Danone et Nestlé : retour aux fondamentaux

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Ulf Mark Schneider, PDG de Nestlé de 2017 à août 2024.

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Danone et Nestlé : retour aux fondamentaux

Publié le 21 septembre 2024
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Deux grandes entreprises de l’agroalimentaire, Danone et Nestlé, ont fait l’objet de changement de direction qui remettent en question leur management. Dans les deux cas on retrouve la même pression des marchés financiers insatisfaits de leurs performances. Ces deux grandes entreprises se croyaient à l’abri. Et pourtant, la dure loi des clients est venue leur rappeler que pour une entreprise privée, la satisfaction des clients est leur première mission. Dans la foulée, leurs administrateurs ont décidé de ne pas renouveler les mandats de leurs PDG.

 

Danone : de l’entreprise à mission à la recherche de la rentabilité

La nouvelle est tombée le 23 novembre 2020 : entre 1500 et 2000 postes seront supprimés chez Danone, dont près de 400 en France. L’annonce faite par son PDG, Emmanuel Faber, est tombée comme un couperet. Elle s’inscrit dans un plan d’adaptation tracé par le patron du groupe d’agroalimentaire français, soucieux de renouer avec la croissance et la rentabilité.

Comme je l’écrivais :

« L’enjeu pour Danone est de retrouver la confiance des actionnaires, alors que l’action Danone a perdu plus d’un quart de sa valeur en 2020. C’est d’ailleurs lors d’une réunion d’investisseurs, organisée de manière impromptue, qu’il a dévoilé un peu plus sa stratégie et livré des objectifs chiffrés ».

Mais ce retour aux fondamentaux du PDG de Danone ne lui aura pas permis de sauver son fauteuil. Le 14 mars 2021, Emmanuel Faber a été démis de ses fonctions à la majorité des voix des administrateurs.

Ainsi, le patron emblématique du CAC 40 a dû s’incliner devant la contre-performance du groupe depuis la pandémie de Covid-19 avec un titre en chute de 25 % en 2020, et des ventes en baisse d’un milliard d’euros à cause de la crise sanitaire. Bref, les clients et les investisseurs ont eu raison de ce patron fervent militant de l’entreprise à mission. Tant que la rentabilité était là, et même si ses leçons de morale avaient tendance à irriter les milieux économiques, Emmanuel Faber pouvait s’adonner à sa passion de l’entreprise socialement responsable. Mais voilà, toute entreprise privée doit surtout penser à ses clients et ses actionnaires. Et ces derniers sont exigeants ! Bref, le mythe de la gentille entreprise à mission a du plomb dans l’aile.

Le successeur d’Emmanuel Faber est Antoine de Saint-Affrique qui est directeur général de Danone depuis septembre 2021 et administrateur depuis avril 2022. Son parcours est classique pour une grande multinationale : précédemment, il a occupé le poste de directeur général de Barry Callebaut d’octobre 2015 à septembre 2021. De septembre 2011 à septembre 2015, il a été président d’Unilever Foods et membre du comité exécutif du groupe Unilever. Sa mission chez Danone est clairement de redresser les marges et le chiffre d’affaires du groupe, tout en reprenant les ambitions de ses prédécesseurs dans la santé : produits sains, nutrition médicale et infantile. Ceci étant, cet élan retrouvé dans les rangs du groupe peine toutefois à se concrétiser sur les marchés financiers. La normalisation n’a pas encore donné tous les résultats escomptés. Le graphique 1 montre le retard de l’action Danone (en bleu) sur le CAC 40 (en rouge) sur les cinq dernières années.

 

Graphique 1 : L’action Danone comparée au CAC 40 sur 5 ans (2019-2024)
 

À lire aussi :

Danone, une illustration des fragilités du statut d’entreprise à mission

Nestlé : repartir à la reconquête des clients

Mark Schneider, qui, depuis sept années, était à la tête du géant de l’agroalimentaire Nestlé a lui aussi été démis de ses fonctions.

Il va donc passer la main, début septembre 2024, à Laurent Freixe, qui a dirigé la zone Europe, puis la zone Amériques du groupe, pendant de nombreuses années. Ici encore, on retrouve la sous-performance boursière de l’action par rapport à ses indices. Le graphique 2 montre cette sous-performance de l’action Nestlé par rapport aux grandes valeurs suisses.

Depuis janvier 2022, le titre sous-performe de 27,5 points les grandes valeurs helvétiques. Deutsche Bank observe que le statut boursier du titre s’est détérioré par rapport à son secteur européen.

Pour Nestlé comme pour Danone, le redressement passe par la reconquête des clients. Ce sera d’autant plus difficile que le géant suisse est accusé de comportements peu éthiques, comme vendre des aliments bébé trop sucrés dans les pays du Sud et des pizzas contaminées Buitoni. Il fait aussi face à un scandale sanitaire sur ses bouteilles d’eau minérale. Bref, l’image du groupe a été bien écornée. Suite à la publication d’un article du Financial Times rapportant que la majorité de ses produits n’obtiennent pas un score suffisant pour être jugés bons pour la santé dans le système de notation australien semblable au Nutriscore français, le groupe s’est engagé à modifier sa stratégie.

Nestlé promet, par exemple, de réduire le sel et les calories dans ses produits, et d’accroître la valeur nutritionnelle des aliments, grâce à des investissements importants dans la recherche et développement. Il est intéressant de noter que c’est in fine la pression des marchés financiers qui va conduire ce géant de l’agroalimentaire à adopter un comportement plus responsable pour retrouver la confiance de ses clients.

Graphique 2 : L’action Nestlé comparée aux grandes valeurs suisses

 

Conclusion

Danone comme Nestlé doivent se transformer pour satisfaire la demande de leurs clients et améliorer leurs performances financières. Ce faisant, ces deux grandes entreprises doivent retrouver les fondamentaux de toute entreprise privée sur un marché concurrentiel. Leur taille n’est pas une garantie de survie. Loin de leur communication sociétale plus ou moins sincère et de leur superbe, il leur faut retrouver tout simplement la confiance de leurs clients et de leurs actionnaires.

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  • La bienpensance triomphalement myope ne voit pas que la recherche du profit, raison d’être des entreprises, est un processus égoïste paradoxalement vertueux qui diffuse ses bénéfices par percolation dans tout le corps social, y compris ses ennemis les plus virulents. Les patrons qui ruinent leur boîte pour se la jouer altruiste se font virer parce que la pseudo-bonne-conscience se vent mal. Ni l’actionnaire ni le client ne veulent se ruiner pour des billevesées.

    • Non ! L’exemple 2 Nestlé vous contredit. Une entreprise doit satisfaire ses actionnaires ET ses clients. Est-ce vraiment égoïste ? Je ne pense pas en revanche Danone et Nestlé semble t-il dans l’exemple ici se sont comportés égoïstement, narcissisme et inconséquent respectivement.

    • Vous avez tout à fait raison, la solidarité imposée d’en haut par les élites n’est ni éthique ni vertueuse. Il y a eu en 2015 sur contrepoints un article humoristique très instructif dans ce sens:
      Ce récit expliquait très clairement les priorités des entreprises grandes ou petites, confrontées bien qu’à des échelles différentes , à des contraintes similaires, et des objectifs incontournables de profits si elles voulaient survivre et se développer.
      Le lien ici: https://www.contrepoints.org/2015/12/26/196732-voila-pourquoi-je-nembaucherai-pas-marcel
      Une entreprise doit d’abord donner satisfaction à ses clients en termes de qualité et de prix. Ensuite, le chiffre d’affaires couvre les besoins divers de l’entreprise en matières,les salaires et charges, les frais de fonctionnement, et les bénéfices couvrent les frais de recherche et développement/investissements nécessaires au développement de l’activité, et rémunèrent le risque pris par le patron et les actionnaires ayant investi leurs capitaux dans l’entreprise. Si l’entreprise stagne ou perd de l’argent, pas d’emplois créés ( ou conservés). C’est l’unique “solidarité” que l’on peut attendre de l’entreprise.

  • L Opium des intellectuels
    22 septembre 2024 at 20 h 27 min

    L’erreur consiste a décorréler les résultats économiques de la réalité éthique… Frédéric Bastiat a bien démontré faire de l’argent (à condition que ce soit dans un échange libre et une activité honnête) est vertueux en soi. Pas besoin de “faire de l’éthique”, puisque c’est éthique en soi-même. Ceci posé, si les entreprises souhaitent vendre des produits de meilleure qualité et ne pas distordre le libre-marché, alors oui c’est une démarche vers l’éthique. D’une manière générale, c’est la consommation de plats pré-transformés qui est mauvais en alimentation : il faut que les gens reprennent le temps de faire la cuisine. Les géants de l’agroalimentaire et de la distribution devraient donc orienter vers la vente de produits bruts.

    • Les nombreuses émissions culinaires nos médias sont inversement proportionnelles a l appétence déclinante de nos gaulois à cuisiner……..le bio, le vrac, les marchés, les circuits courts….. ont du plomb dans l aile…..🤣🤣🤣🤣🤣

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