Ce que les actions gratuites révèlent sur notre fiscalité

Le dispositif d’attribution d’actions gratuites s’inscrit, sans conteste, comme un monument d’instabilité fiscale.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Taxes By: GotCredit - CC BY 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Ce que les actions gratuites révèlent sur notre fiscalité

Publié le 20 décembre 2016
- A +

Par Virginie Pradel.

Taxes
Taxes By: GotCreditCC BY 2.0

Un nouveau psychodrame fiscal relatif au dispositif des actions gratuites s’est noué dans le cadre des débats autour de la loi de finances pour 2017. Ce dernier constitue une triste illustration des maux dont souffre notre système fiscal, à savoir l’instabilité, la complexité, l’idéologie et l’incohérence.

L’instabilité

Le dispositif d’attribution d’actions gratuites s’inscrit, sans conteste, comme un monument d’instabilité fiscale.

Depuis son instauration par la loi de finances pour 2005, le dispositif a fait l’objet de plusieurs modifications qui ont progressivement conduit à lui faire perdre son caractère incitatif. En particulier, la loi de finances rectificative pour 2012 a substantiellement augmenté le coût fiscal et social de 55,5% à 60,7% pour les bénéficiaires.

En 2015, la loi Macron a opéré un revirement salutaire pour le dispositif en prévoyant pour ses bénéficiaires la suppression de la cotisation salariale de 10% et l’imposition du gain d’acquisition dans la catégorie des plus-values de cession et non plus dans celle des salaires. Ce changement a permis d’abaisser pour ces derniers le coût fiscal et social à 58,2%, 35,7% et 28,5% en fonction de la durée de détention des actions. La cotisation patronale a, quant à elle, été abaissée de 30% à 20%.

L’aubaine fut toutefois de courte durée. Des députés de la majorité se sont en effet empressés, au cours des débats sur le projet de loi de finances pour 2017, d’adopter un amendement visant à opérer un quasi-retour à la législation en vigueur… avant la loi Macron.

Il va sans dire que cet amendement a suscité un véritable tollé et a conduit le gouvernement, qui s’érige désormais en gardien de la stabilité fiscale, à monter au créneau pour sauver les actions gratuites.

En définitive, après un suspens haletant conjugué à des tribunes enflammées des acteurs politiques et économiques concernés, les députés ont sagement opté pour des modifications plus modérées du dispositif. En substance, le régime des plus-values de cession continuera de s’appliquer jusqu’à 300.000 euros de gains d’acquisition par an tandis que la contribution patronale sera relevée de 20% à 30%, sauf pour les PME ne versant pas de dividendes.

La complexité

Compte tenu des réformes successives opérées sur le dispositif d’attribution d’action gratuites, ce dernier est devenu d’une redoutable complexité.

Quatre régimes d’imposition distincts, plus ou moins incitatifs, coexistent dorénavant en fonction de la date d’attribution des actions.

Le premier régime s’applique aux actions attribuées avant le 27 septembre 2012, le second aux actions attribuées entre le 28 septembre 2012 et le 7 août 2015, le troisième aux actions attribuées entre le 8 août 2015 et le 31 décembre 2016 et le quatrième aux actions attribuées à compter du 1er janvier 2017.

Cette cohabitation absurde de régimes fiscaux distincts selon la date d’attribution des actions gratuites est injustifiée d’un point de vue économique et source d’injustice pour les contribuables qui sont soumis aux régimes fiscaux les moins favorables.

L’idéologie

Il est inquiétant de constater que certains députés étaient farouchement déterminés à sacrifier l’ensemble du dispositif d’attribution d’actions gratuites sur l’autel du dogme anticapitaliste. Cela illustre la fâcheuse tendance des parlementaires à sombrer hâtivement dans l’idéologie politique au détriment de toute analyse économique.

Que ces derniers soient scandalisés par l’attribution d’actions gratuites à des dirigeants du CAC 40 tels que Carlos Ghosn, cela peut s’entendre ! Il apparaît cependant illégitime de bouleverser, pour cette seule raison, un dispositif économiquement efficient profitant à toutes les entreprises.

Ce dispositif permet en effet aux entreprises de fidéliser et d’impliquer davantage leurs salariés en permettant à ces derniers de devenir actionnaires (100% de salariés-actionnaires chez Critéo ou Blablacar). Il permet, du reste, aux entreprises en mal de trésorerie d’attirer d’excellents profils en compensant un salaire modeste par une rémunération alternative à celui-ci.

L’incohérence

Le dispositif d’attribution d’actions gratuites s’inscrit comme l’un des trois dispositifs, avec les BSPCE et les stock-options, destinés à encourager l’actionnariat des salariés ou des dirigeants.

En raison de leur finalité commune, à savoir favoriser l’actionnariat, il semblerait logique que les modalités d’imposition de ces différents dispositifs soient peu ou prou alignés.

Or, c’est un tout autre constat qui s’impose dans la mesure où il existe une incohérence flagrante depuis 2015 entre ces trois régimes fiscaux. Celle-ci se traduit par un décalage important entre les modalités d’imposition incitatives applicables aux actions gratuites et aux BSPCE, d’une part, et celles dissuasives applicables aux stock-options, d’autre part.

Il s’agit là d’une incongruité fiscale malheureuse, fruit d’un désamour législatif pour les stock-options, lequel est absolument non justifié sur le plan économique.

Voir le commentaire (1)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (1)
  • Hélas, les parlements passent et on constate toujours la même instabilité.
    Que pouvons nous faire, nous simples citoyens ?

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Par Nathalie MP Meyer.

Quand on s’appelle l’Allemagne, pays habitué aux excédents budgétaires et donc à un endettement public en baisse depuis quelques années (de 80 % du PIB en 2010 à 60 % en 2019) suite à un train de réformes structurelles très importantes dans les années 2000, la violente crise économique consécutive aux confinements anti-Covid se solde par un recul du PIB de 5,8 % en 2020 et un niveau de dette publique de 75 % à l’horizon 2021.

Mais quand on s’appelle la France, pays « en situation de faillite » (Fillon en 2... Poursuivre la lecture

Par Louise Alméras.

Le nouveau budget voté dans le cadre du projet de loi de finances semblait prometteur avec son gros milliard d’euros consacré à l’égalité entre les femmes et les hommes. Mais dans le Document de politique transversale joint au projet de loi, la raison de cette somme mirifique apparaît tout autre. Plus de 70 % du budget est destiné aux pays en voie de développement… La politique transversale du pays est-elle davantage synonyme de politique étrangère ? Ou bien le gouvernement s’est-il trop emballé face à l’annonce du ... Poursuivre la lecture

Par Matthieu Loonis.

Le 5 octobre dernier, le député LREM (et ex-LR) François Jolivet, directeur général d’ICF Habitat Atlantique, est parvenu à faire adopter un amendement  au Projet de Loi de Finances 2019, malgré l’opposition du rapporteur général Joël Giraud (étiquette LREM, et ex-Parti Radical de Gauche), en vue de la suppression de l’article 35 bis du Code Général des impôts.

Cet article permettait notamment d’exonérer d’impôts les revenus tirés de la location meublée d’une ou plusieurs pièces de sa résidence principale à ... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles