Russie : de la chute des prix des hydrocarbures

Quelles sont les conséquences de la chute du prix du baril pour le deuxième pays producteur de pétrole du monde ?

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Vladimir Poutine (Crédits World Economic Forum, licence Creative Commons)

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Russie : de la chute des prix des hydrocarbures

Publié le 12 février 2015
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Par Aymeric de Villaret.

 

Vladimir Poutine (Crédits World Economic Forum, licence Creative Commons)
Vladimir Poutine (Crédits World Economic Forum, licence Creative Commons)

 

Deuxième producteur mondial de gaz mais aussi de pétrole, derrière les États-Unis… Surtout premier exportateur mondial de gaz, et du niveau de l’Arabie Saoudite pour les exportations de pétrole.

De la chute des cours du brut…

Rappelons-nous les conséquences de la chute des cours du baril en 1998 sur l’évolution de l’ex-URSS. Certains mettent même un certain parallèle entre la chute récente des cours et celle de 1998. Chute orchestrée par les Américains afin de déstabiliser la Russie suite à la crise ukrainienne ?
Ou n’est-ce pas l’Arabie Saoudite qui en a assez des « passagers clandestins » qui profitent de son leadership sur le marché du pétrole et de son rôle de « swing producer » ? C’est pourquoi, la veille de la réunion de l’OPEP du 27 novembre 2014, l’Arabie a reçu à Vienne la Russie et le Mexique afin de leur demander de participer à l’effort de coupure. Quand on voit le niveau des exportations russes de brut, on peut comprendre que les Saoudiens ne désirent plus indéfiniment faire les efforts.

Des conséquences sur sa production et sur son économie…

Il est clair que la Russie est fortement impactée par la chute du baril et l’embargo sur son économie. Leur impact combiné est estimé par l’AIE (Agence Internationale de l’Énergie) à -560 kb/j sur la production brut russe à l’horizon 2020 (environ -5%). Et c’est, selon l’IFP Énergies Nouvelles, un impact de -4 % à -7% de son PIB qu’elle pourrait perdre si le baril en 2015 était à 80$ ou 60$/baril !

Que fait la Russie ?

Elle s’est restructurée depuis l’éclatement de l’empire soviétique. Sa production d’hydrocarbures a bien redémarré. Et alors qu’elle a le plus grand producteur de gaz du monde (Gazprom), elle a su créer dans le pétrole un géant en l’intermédiaire de Rosneft (qui après avoir repris les actifs de l’ancien Yukos, a intégré en 2013 ceux de TNK-BP). Bien sûr le secteur russe dépend de la suite de l’embargo, mais avec deux majors que sont Gazprom et Rosneft, le secteur est assez fort pour résister, d’autant qu’il exporte en $ américain.

Que doit-elle faire ?

1) Rejoindre l’OPEP ?

À son niveau d’exportation, qu’est ce qui l’en empêche ? Un pays comme le Qatar, par exemple, un des principaux exportateurs de gaz, en est membre, tout en ne produisant que très peu de brut. La Russie peut-elle rester le passager clandestin de l’OPEP ? L’Arabie Saoudite lui pose carrément la question et même si fin novembre elle a refusé, pourra-t-elle le faire indéfiniment ?

2) Se tourner de plus en plus vers l’Asie ?

Historiquement tournée vers l’Europe, la Russie regarde de plus en plus vers l’Asie qui est à ses portes, notamment vers la Chine. Celle-ci est un gigantesque marché et lui ouvre ses portes. Pourquoi refuser quand l’Occident les lui ferme ?

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  • La présence d’importantes quantités de pétrole (ou d’autres ressources facilement monopolisables entre peu de mains, souvent via le pouvoir politique local ou étranger en cas de guerre de ressources par corporations interposées) est généralement une malédiction pour les pays préalablement peu libéraux, cela incite plus rapidement ces derniers au totalitarisme du fait de cette « maladie hollandaise ». http://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_hollandaise

    Ainsi les gouvernements peu scrupuleux, démagogues nationalisent le pétrole afin de pratiquer le clientélisme, cela lui permet de baisser, voire de supprimer les impôts directs, ce qui en contrepartie coupe le lien de régulation (rétroaction) de la population envers son gouvernement via l’incitation au contrôle des impôts, un autre problème – sûrement le pire – vient du fait que le secteur pétrolier vampirise le reste de l’économie en l’empêchant de se diversifier à cause de « l’effet revenu » notamment par la présence proéminente du secteur pétrolier dans l’économie, ce qui a pour conséquence d’augmenter substantiellement le taux de change réel à lui seul, ce qui réduit la capacité d’exportation des secteurs peu compétitifs (on peut aussi voir ici un problème lié au monopole monétaire, où des secteurs aux compétitivités diamétralement opposées se partagent une même monnaie) le problème de cet « effet revenu » est qu’il empêche la décentralisation du pouvoir économique (et in fine politique) par la nécrose des autres secteurs économiques qui sont proches de nombreux individus (PMI, PME, agriculteurs…), ainsi ces derniers n’ont pratiquement plus voix au chapitre, et quand bien même l’État décide de « diversifier » artificiellement l’économie en subventionnant les producteurs, il ne fait que les subjuguer.
    De surcroît Il est très difficile politiquement de changer cela sans émeutes et si l’on veut se faire réélire.

    C’est pour ces différentes raisons que de nombreux pays pétroliers ne sont pas des démocraties libérales, on m’objectera certainement le cas de la Norvège – l’exception à la règle – mais ce pays est plutôt libéral économiquement comparativement à la France (cette dernière est 73éme d’après l’indice de liberté économique, tandis que la Norvège est 32éme), il ne faut pas négliger le fait que la Norvège était libérale (surtout grâce à sa culture protestante) bien avant l’exploitation de ses ressources pétrolifères dans la mer du nord en 1960.

    (Petite digression, qui sait ce qu’aurait été l’histoire contemporaine de la Norvège si elle avait eu la capacité d’exploitation de son pétrole à l’époque de collaboration avec le régime nazi, peut-être qu’un certain autoritarisme et une certaine liquéfaction, apathie de la société civile auraient pu perdurer après la libération du fait d’une maladie Hollandaise ?)

    Aujourd’hui la Norvège ne distribue pas l’argent du pétrole de façon clientéliste contrairement au Venezuela et préfère l’investir dans un fonds souverain dont les opérations sont plutôt transparentes et non autocentrées, de plus l’accès à un marché très ouvert facilite les choses.

    Tout ça pour dire que la Russie, Venezuela & Cie ne sont pas près d’avoir de sitôt des sociétés à l’Occidentale, ces problèmes quand on est dedans on y est pour longtemps…

    • Sauf que :
      – la Russie vend son pétrole en $ (lire article)
      – la Russie a remboursé ses dettes et constitué un capital qu’elle use actuellement.

      Sans être libérale, elle n’en reste pas moins une démocratie, et donc comme ici, les gains du pétrole seront plus ou moins efficacement utilisée pour améliorée les dépenses sociales.

      Si la Russie se contente de payer les retraites, l’éducation, elle pourrait échapper à la malédiction hollandaise puisque la population active resterait obligée de travailler.

      N’oublions pas que la Russie dispose d’indéniables qualités dans une industrie à forte valeur ajoutée: les armes.

      • Les gains apportés par la nationalisation des compagnies productrices de gaz et pétrole n’ont pas été employés à « améliorer les dépenses sociales », mais à moderniser, équiper, et entraîner l’armée dans le but de redevenir une « grande puissance mondiale », et de pouvoir utiliser la menace militaire à des fins politiques.
        Après la guerre en Georgie, nous avons vu l’annexion de la Crimée, et aujourd’hui la guerre dans le bassin du Don.

        • Il est sur que l’impact du gaz et du pétrole sur l’économie Russe est forte, mais une bonne partie de la population en bénéficie dû aux emplois indirects de cette économie; Je ne pense pas que la maladie hollandaise soit d’actualité en Russie, car il y a encore beaucoup de chemin à faire avant de pouvoir développer d’autres secteurs. D’un autre côté, cela leur a permis d’avoir 10 ans d’amélioration constante, de rembourser toutes leurs dettes et d’épargner (l’achat massif d’or de 2012 à 2014). C’est un peu l’ordre des choses de se prendre une claque économiquement pour mettre en évidence une diversification nécessaire, ce qu’a martelé Medvedev ces derniers jours mais aussi de limiter la hausse des prix qui sont en partie à cause des sanctions européennes et guerre en Ukraine mais aussi par le simple fait d’une spéculation sur le marché intérieur. En tout cas, Kulasec, l’annexion de la Crimée n’est pas le fait de dépenses militaires, ni la guerre civile (je pèse mes mots) en Ukraine. Quant à la Géorgie, ils sont potes maintenant avec la russie, non?

      • Il ne faut pas oublier que ses recettes budgétaires dépendent de moitié des revenus du pétrole, la population n’est pas incitée à mieux contrôler l’état, et ce gros pot de confiture permet une grosse corruption via les oligarques et offre un moyen de pression sur les États limitrophes.

        La Russie subit quand même une maladie Hollandaise, notamment par un autre effet non négligeable : « le déplacement de la main-d’œuvre vers le secteur très compétitif, où les rémunérations augmentent du fait d’une demande plus élevée : cela se fait au détriment des autres secteurs (désindustrialisation directe). Cet effet est tout de même généralement assez faible, car les industries extractives emploient généralement peu de gens. »

        L’effet revenu ne concerne pas uniquement le taux de change : http://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_hollandaise

        Plus d’infos sur ce flash Natixis : cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=56338

      • @ Amike,

        Las Russie est une économie de rente et non une économie basée sur l’esprit d’entreprise. Ce qui explique pourquoi la Russie n’est pas dans la course dans le marché mondial les grandes innovations technologiques et scientifiques comme le secteur de l’informatique, du numérique, des bio-technologies, des grandes découvertes médicales ou de la pharma. Les russes sont rarement dans l’attribution des prix Nobel scientifiques Et cela par leur manque d’innovations. Ce n’est pas en étant 140ème dans la liberté économique et très mal classé dans les pays les plus corrompus que la Russie va attirer des entrepreneurs innovants ou nous pondre des Bill Gates ou des Steeve Job.

        Elle peut bien avoir remboursé ses dettes avec l’argent du gaz et du pétrole mais aujourd’hui ont voit bien que ce système économique est à bout de souffle.

        D.J

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

Aurélien Duchêne est consultant géopolitique et défense et chroniqueur pour la chaîne LCI, et chargé d'études pour Euro Créative. Auteur de Russie : la prochaine surprise stratégique ? (2021, rééd. Librinova, 2022), il a précocement développé l’hypothèse d’une prochaine invasion de l’Ukraine par la Russie, à une période où ce risque n’était pas encore pris au sérieux dans le débat public. Grand entretien pour Contrepoints par Loup Viallet, rédacteur en chef.

 

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