Décrypter le storytelling dans la publicité : Quezac, un cas d’école

En marketing, le storytelling pourrait se résumer à ce mot d’ordre paradoxal : « pour vendre un produit, ne parlez pas du produit » ! La publicité dont nous allons parler illustre ce principe à la perfection…

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Décrypter le storytelling dans la publicité : Quezac, un cas d’école

Publié le 13 avril 2014
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Storytelling Publicité Quezac 1995 2005

L’un des exemples les plus fameux de storytelling dans le domaine du marketing français est la publicité pour l’eau Quezac (diffusée à la télé en 1995). Prenez le temps de la re-visionner, bien que vous l’ayez certainement toujours en mémoire malgré les années :

Une histoire de « bulles miraculeuses »

On dirait la bande-annonce d’un film médiéval à la limite du fantastique. Rien n’est dit sur la qualité de l’eau, de ses minéraux, ou sur la pureté de sa source. Les origines sont floues, datées approximativement (« il y a très longtemps, peut-être plus de mille ans… »), tout est basé sur des « on dit » (« on dit que les eaux de cet orage… », « on dit que quand l’eau rejaillirait… »), etc.

Et pourtant, du fait même de ces imprécisions, les bulles deviennent « miraculeuses »… L’eau apporte désormais « gaîté et longue vie »… Et Quézac n’est plus seulement le nom d’une marque d’eau en bouteille, mais devient le titre d’une légende.

À la différence des autres grandes marques d’eau minérale, cette publicité ne se concentre pas sur les caractéristiques ou les qualités intrinsèques du produit qu’elle cherche à vendre : elle l’associe à un imaginaire qui lui donne une profondeur, une « âme », marque les esprits et offre bien plus qu’une simple eau pétillante.

Avec les techniques de storytelling, en mettant en récit leurs produits, les marques jouent avec l’imaginaire du public pour capter son attention et lui transmettre des émotions…

De même, si vous voulez vendre quelque chose, ne vous concentrez pas seulement sur les propriétés, particularités ou caractéristiques de la chose en question… Enrobez-la dans une belle histoire !

Démystifier la légende, sublimer l’héroïne

Notons toutefois une évolution assez surprenante des publicités Quezac. En 2005, soit 10 ans après ce premier spot, voici la nouvelle pub qui fut diffusée à la télé :

Après avoir créé un univers et un imaginaire pour faire rêver, Quezac a donc décidé de recentrer sa communication sur un élément beaucoup plus terre-à-terre de son produit : le prix !

Il y a deux aspects qui surprennent vraiment dans cette nouvelle pub :

  • Tout d’abord, le fait qu’en 2005, sur le marché de l’eau en bouteille, les différentes marques – du moins les « grandes » marques comme Quezac – ne cherchent pas à se différencier du point de vue du prix. L’imaginaire créé par le storytelling leur servait justement à se distinguer, par rapport aux autres marques génériques ou premier prix.
  • Ensuite, Quezac fait de son prix le point unique de sa communication. Rien n’est dit, encore une fois, sur la qualité de l’eau ou la richesse de ses minéraux. La seule info, c’est : « Petit prix » ! C’est la seule mention inscrite à l’écran, en plus du nom Quezac sur l’étiquette de la bouteille (voir à la fin).

Le tour de force de Quezac est cependant de faire resurgir son héroïne, la petite fille qui contait sa légende dans la première publicité de 1995.

Tout en centrant son message sur le prix, Quezac mobilise donc habilement l’imaginaire déjà présent autour de son produit, par un simple rappel d’un visage fortement ancré dans le souvenir des consommateurs.

On peut réfléchir sur la stratégie de Quezac, qui s’est peut-être aperçu qu’en teintant d’une légende trop spectaculaire son eau pétillante, a donné à celle-ci l’apparence d’un produit de luxe, rare et précieux, quasi-magique, en tout cas moins accessible qu’une autre eau gazeuse de base. Il fallait donc en quelque sorte circonscrire le mythe, pour remettre l’eau Quezac « à niveau » par rapport aux autres…

Mais ce qui m’intéresse ici, c’est la dimension d’un storytelling particulier qui se déploie alors sur dix années à travers plusieurs publicités.

L’avènement d’un storytelling « réflexif »

L’histoire, ce n’est plus la légende d’un « orage qui, dit-on, gronda il y a peut-être plus de mille ans… » : c’est la vie d’une vraie personne que nous voyons grandir sous nos yeux, passant de petite fille à jeune femme, et qui, de fait, joue sur un type d’émotions très puissant lié à un authentique souvenir.

La charge affective de cette publicité est donc extrêmement forte, et dépend d’une durée incompressible qui sépare effectivement la diffusion des deux spots publicitaires.

Par ailleurs, un subtil jeu est instauré entre le personnage de la petite fille, et la jeune femme qui semble alors quitter son rôle. Par ce décalage, un pont paradoxal est jeté entre la légende et la réalité, inaugurant une forme de storytelling « réflexif ».

On a coutume de dire que « les meilleures histoires sont les plus courtes »… À l’inverse, un bon storytelling s’inscrit dans la durée, dans le temps – jusqu’à faire coïncider, dans le meilleur des cas, l’histoire qu’il véhicule et l’Histoire avec un grand H…

Au risque de mélanger fiction et réalité…

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  • Je m’en tape de la pub Quezac, je ne bois que du bourbon

    • …sage décision 😉

      Le storytelling des marques d’alcool a d’ailleurs ceci d’intéressant qu’il ne peut utiliser les mêmes vecteurs traditionnels de la publicité du fait de la réglementation française : un marketing de la « confidentialité » voire de la « transgression », un peu comme Red Bull à l’époque de son interdiction en France ou encore Yxaiio aujourd’hui… Peut-être y consacrerai-je un article à l’occasion, pour faire plaisir à notre ami Pascal (cf. ses commentaires plus bas) 😉

  • Il faudrait distinguer le marketing des produits de grande consommation et celui des produits industriels .Il est normal que l’acheteur recherche la satisfaction d’un besoin et non la connaissance des caractéristiques du produit ( qui ne servent qu’à crédibiliser la promesse faite au consommateur)

  • En même temps, Quezac fait partie de la myriade Nestlé, c’est quand même un peu la première entreprise agroalimentaire du monde. La communication est excellente, la dernière campagne Nespresso, sur le ton de l’humour qui maltraite l’ego des acteurs américains, est également de bonne facture.

  • je trouve ça plus troublant avec des voitures…ou des produits de luxe…
    la seule qui me marque c’est KIA 7 ans de garantie…compréhensible …
    beaucoup de marques n’ont que leur nom qu’elles doivent associés à une « image de qualité…quelle qualité?

    mais la pub s’adresse rarement à la raison…si on est con on est con…
    le mensonge c’est autre chose.

  • Mais c’est quoi, cet article ? Ça parle de quoi ? À quoi ça sert ? Impossible de saisir l’intention de l’auteur, sinon passer à tout prix dans Contrepoints, ou prospecter Quezac, ou vendre un stage sur le storytelling, va savoir. Une chose est sûre : ce n’est ni du journalisme, ni de la chronique, ni de la critique.

    Plus fort encore ! Ce n’est même pas du marketing : aucun fait concret, aucune chiffre sur les ventes, sur le budget, sur qui a fait quoi, rien.

    Quelque chose a changé, à la direction de Contrepoints. Avant, on n’avait pas à subir de tels non-propos. On entre dans l’ère de la création de contenu pure et dure. Vivement une joint-venture avec CB News et Vogue Hommes.

    • Exact, c’est une belle histoire, mais ce n’est pas le propos de Contrepoints. En cela c’est du divertissement. L’auteur cherche certainement à placer « ses billes » dans le staff d’une équipe marketing …

      • Et encore ! Une jolie anecdote publicitaire, sans plus.

        Pour que ce soit une belle histoire marketing, il nous faudrait les chiffres de l’évolution de la marque par rapport à ses concurrentes pendant la décennie considérée.

        L’idée que Contrepoints se lance dans la création de contenu m’atterre.

        • Je suis d’accord avec vous, mais c’est un contenu pas idiot du tout, c’est intéressant comme point de vue. Un peu de divertissement (Du latin divertere « détourner »).

          • Mais pour ça, on a déjà les pages gossip du Figaro.

            Mon impression est que notre ami ne connaît pas particulièrement le marché des eaux minérales, marché pourtant passionnant. Une vraie étude de ce commerce aurait été passionnante. Ou une vraie histoire de la marque en question. Mais là, non, franchement, non.

            • Merci pour vos commentaires complaisants, ça fait plaisir.

              « …notre ami ne connaît pas particulièrement le marché des eaux minérales, marché pourtant passionnant. Une vraie étude de ce commerce aurait été passionnante » : cela excède en effet mon domaine de compétence, et n’a de toute façon strictement rien à voir avec le propos de cet article.

              Le marché de l’eau minérale, je m’en tamponne, vous avez vraiment des passions chelou. Par contre je sais que l’utilisation de certaines techniques assez simples permettent de vous faire choisir telle bouteille ou telle marque plutôt que telle autre.

              Les principes de storytelling présentés ici à travers l’évolution des pubs Quézac correspondent à ceux également utilisés en matière de comm institutionnelle ou politique. A la fin vous êtes convaincu d’avoir une opinion librement fondée, ou un vote mûrement réfléchi, ou autres conneries de ce genre, alors que vous pensez à travers un maillage d’histoires montées de toutes pièces. Voilà le lien avec Contrepoints, et plus généralement l’actu et les débats de société.

  • Pour moi la + belle histoire marketing reste Perrier la petite bouteille ronde du grand art ! – avant sa chute y compris du cours de l’ action et son achat par un grand groupe Suisse – un traquenard c’est mon avis qui était lui aussi un autre travail d’ « artistes  » .

  • Les commentaires sont fermés.

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