Affaire Baby Loup : qu’en dirait un libéral ?

Nouvel affrontement entre les partisans de la laïcité et de la liberté religieuse jeudi dernier à la cour d’appel de Paris qui a rejugé le licenciement d’une salariée voilée de la crèche Baby-Loup, après son annulation par la Cour de cassation.

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Affaire Baby Loup : qu’en dirait un libéral ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 22 octobre 2013
- A +

Par Fabrice Descamps.

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Dans l’affaire de la crèche Baby Loup, on ne peut d’abord qu’être frappé par la tartufferie de la cour de cassation quand elle argue que :

« Le principe de laïcité instauré par l’article premier de la Constitution n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public ».

Certes une crèche n’est pas stricto sensu un service public même si la crèche Baby Loup est une des rares crèches françaises ouvertes sept jours sur sept, car une crèche n’est pas tenue, contrairement à une école maternelle, de remplir les trois obligations définissant, en droit européen, un service d’intérêt général, à savoir les obligations de continuité, d’accessibilité et de mutabilité du service (c’est-à-dire, pour cette dernière, de tenir compte de l’évolution des besoins de ses usagers).

Notons cependant que dans un pays où on utilise à tort et à travers et souvent à très mauvais escient le terme de « service public », la soudaine restriction que lui impose la cour de cassation est suspecte et en particulier de cacher une certaine lâcheté des juges face à l’intolérance des franges les plus radicales de l’islam français. Ajoutons qu’à cette aune, on est surpris que la cour ne rappelle pas de temps en temps aux enseignants de la FSU que quand ils ferment une école primaire pendant une grève (c’est arrivé en 2003 dans l’école de mes fils) ou quand ils font obstacle à une réforme voulue par un gouvernement issu de la volonté des Français (ça arrive chaque année), ils s’assoient sur deux des trois principes du service public, à savoir la continuité et la mutabilité.

Mais, en fait le problème n’est pas là et je pense que la directrice de Baby Loup a eu tort d’invoquer la laïcité et son interprétation plus ou moins large pour justifier le licenciement d’une puéricultrice en hijab.

Admettons que je possède un magasin de prêt-à-porter.

Ne devrais-je pas avoir le droit de licencier une employée qui se présenterait tous les matins au travail dans une tenue incompatible avec l’image que je veux donner de mon commerce ? C’est exactement cette liberté que l’on refuse à la directrice de Baby Loup : elle veut que sa crèche ne fasse de publicité pour aucune foi religieuse, qu’elle soit une crèche laïque ; c’est son droit le plus strict. Pareillement l’employée licenciée de Baby Loup a parfaitement le droit de fonder une autre crèche où elle pourra transmettre aux enfants sa conception de l’islam et travailler en hijab, au même titre que n’importe quelle Église peut fonder une école confessionnelle.

C’est pourquoi l’argumentaire du procureur près la Cour d’Appel de Paris, M. Falletti, qui justifie son licenciement en soulignant le « caractère particulièrement influençable d’enfants de deux ou trois ans » est fort mauvais car un enfant de trois ans ans qui rentre dans une école maternelle catholique est tout aussi influençable ; or le procureur Falletti aurait-il le toupet d’en faire le reproche à l’enseignement privé catholique ? A-t-on le droit, oui ou non, en France de transmettre sa foi à ses enfants ?

Ici comme ailleurs, il faut refuser le deux poids deux mesures.


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  • Vous avez tout résumé par cette phrase : « Mais, en fait, le problème n’est pas là et je pense que la directrice de Baby Loup a eu tort d’invoquer la laïcité et son interprétation plus ou moins large pour justifier le licenciement d’une puéricultrice en hijab ».

    Encore et toujours, jusqu’en s’en crever les tympans, tant que nous invoquerons un débat religieux, même au travers d’une laïcité de façade, nous aurons tort en terme de droit.

    Si nous disons « chrétien » alors il faut accepter tout le reste.

    Me Letteron, sur ce site, dispense quelques cours de rattrapage, et c’est gratuit (avec les liens afférents) :
    https://www.contrepoints.org/2013/10/21/143400-des-aumoniers-temoins-de-jehovah-dans-les-prisons

  • On devrait avoir le droit de virer qui ont veut en vertu du contrat signé.

  • Je suis contre toute espèce de politique de non-discrimination.

    Quant à l’égalité de l’islam et du christianisme devant la laïcité, c’est du délire.
    Les religions ne se laissent pas définir: Il est vain d’exiger de l’islam qu’il se rende compatible avec la laïcité.
    C’est l’islam qui nous dira s’il s’y plie ou non, non par la voix de quelques-uns, sincères ou pas, mais par la réalité observable. Et depuis 1400 ans, dans des dizaines de pays, c’est non.
    Mais il va de soi que la France saura obtenir une dérogation.

    Quant au christianisme, il est plus que compatible, il est la matrice de la laïcité.
    C’est la religion qui dissocie spiritualité et règles sociales.
    La religion où le péché est une affaire entre l’individu et Dieu (d’où par exemple le secret de la confession), à l’exact opposé des notions de haram et hallal.
    La lutte contre le christianisme est en fait une lutte contre la laïcité, par la gauche qui se refuse à choisir entre pouvoir et autorité morale.
    Le socialisme revendique les deux.
    Il est déprimant de voir les libéraux les soutenir dans cette prétention.

  • C’est une entreprise privée l’état n’a pas à s’en mêler!Maintenant je pense que le christianisme devrait être constitutionnellement reconnu comme base fondamentale de l’action publique comme c’est le cas à Monaco ou au Liechtenstein…

    • C’est une crèche semi-publique en fait.

    • « le christianisme devrait être constitutionnellement reconnu comme base fondamentale de l’action publique »

      C’est le seul moyen d’assurer une vraie laïcité et de refonder le libéralisme.
      Mais le socialisme ne le permettra jamais: Comme le rappelle Vincent Peillon, le christianisme fait obstacle au constructivisme. C’est pourquoi le socialisme a expulsé les congrégations et s’est approprié l’école.

      Le constructivisme requiert un pouvoir total, donc non laïc.
      L’habileté du socialisme est d’avoir opéré un retournement de vocabulaire, pour appeler laïcité ce qui en est l’exact opposé: Le rattachement de la morale à son pouvoir régalien.

  • Le pire c’est qu’en lisant la constitution, et notamment dans son préambule la DDH de 1789, le principe de non-discrimination ne s’applique qu’à la justice, ou pourrait-on dire, à l’Etat. En gros, la loi, le gouvernement, doit traiter tous les individus selon les mêmes règles. Ils ne peuvent, en particulier, pas traiter les gens différemment sur la base de leur sexe, de leur race, de leur religion ou de leur fortune.
    Par contre, il est évident que les particuliers peuvent et doivent discriminer. Et notamment sur la base des éléments notés ci dessus.

    Donc au lieu de dire « comme la crèche est privée elle ne peut pas virer tel ou tel sur la base de sa religion car la laïcité est seule pour l’Etat », elle devrait dire « comme elle privée, elle fait ce qu’elle veut tant qu’elle ne le fait pas par coercition ».

    Mais il semblerait que même le Conseil Constitutionnel (autrement nommé le con-con) a du mal à comprendre la DDH et donc une grosse part de nos lois sont anti-constitutionnelles. A commencé par l’impôt sur le revenu et l’ISF.

  • Till l’espiègle
    L’affaire Baby Loup pose le problème de l’islamisation de la France ( problème identique en Europe – Amérique du Nord – Russie …..). Il s’agit d’implanter la charia : lapidation – égorgement des apostats ….
    L’islam est une organisation totalitaire . Il n’est pas concevable d’affirmer  » l’employée licenciée de Baby Loup a le droit de fonder une autre crèche où elle transmettra aux enfants la conception de l’islam »
    Accepterait-on une école où des criminels enseigneraient l’assassinat ?
    Le 19 octobre , à Paris , les Frères Musulmans chassèrent , à l’Institut du Monde Arabe , le romancier
    Al-Aswany , lors de sa conférence en hurlant  » A mort !  » ( L’Observatoire de l’Islamisation )

  • J’ai travaillé dans de nombreux pays, y compris dans certains où une partie du personnel venait voilée, la seul chose qui m’ait toujours importé c’est la qualité du travail réalisé. Tout s’est toujours très bien passé.
    Par ailleurs, je n’ai pas souvenir d’avoir été traumatisé dans mon enfance par la mode vestimentaire de ceux ou celles qui se sont occupés de moi… Ce qui m’importait c’était éventuellement que l’on me prenne en charge de la manière la plus douce et efficace posible.
    La liberté, de mon point de vue, serait que l’Etat s’occupe un peu moins de ce qui ne le regarde pas.
    A chaque fois dans l’histoire qu’il s’est mélé de savoir comment les gens devaient s’habiller, les choses ont plutôt mal tourné.
    Le reste est éventuellement un problème d’éducation et de respect… L’éducation est morte et, de toute manière, on ne respecte que ce qui est respectable. Il est donc fort probable que tout ceci se poursuive en pire.

  • Et le réel?
    Parce que baby-loup, c’était çà:
    http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2013/06/05/01016-20130605ARTFIG00559-laicite-la-creche-baby-loup-contrainte-au-demenagement.php

    Ici, même les policiers ne veulent plus venir.» L’ambiance se dégrade. Apparaissent par exemple des demandes d’alimentation halal pour les enfants. «Certains parents n’hésitent pas à faire pression sur le personnel musulman de la crèche pour les prendre à partie, explique Didier Cros, trésorier de l’association. La direction n’a donc plus de légitimité et elle doit jongler au quotidien avec le poids communautaire de certains parents et membres du personnel.»

    Autre exemple avec ce père de famille qui exige que son enfant soit réveillé après une heure de sieste au motif que s’il dort plus la journée, il est «intenable» le soir. Refus des puéricultrices qui lui expliquent qu’on ne réveille pas un enfant. Le père s’emporte, les insultes fusent, («sale Blanche» est lâché), l’homme demande à voir du personnel musulman. Les parents sont convoqués par la direction qui propose d’appeler la police. Le père répond qu’il n’a pas peur et qu’il a déjà fait cinq ans de prison… Me Richard Malka confie «craindre tous les jours un dérapage».

    Le personnel de la crèche ne peut plus sortir fumer sans se faire insulter. Leurs pneus de voitures sont crevés, les carrosseries rayées. Les assiettes des enfants sont illustrées avec des petits animaux: girafe, chevaux, cochons, ce qui leur a valu des qualifications d’islamophobes. «Il y a deux semaines, l’Inspection du travail nous a envoyé une injonction pour réécrire le règlement et autoriser le port du voile, confie Me Malka. Nous n’avons pas encore répondu. La République nous laisse tomber après nous avoir planté un couteau dans le dos avec la décision de la Cour de cassation.

    Que le droit et la conception de la laïcité pose problème est une chose.
    Ce qu’il se passe là-bas en est une autre.

    Un article totalement déconnecté du réel, dans un certain sens.

  • Un libéral dirait que :

    – Si l’employeur ne veut pas de neutralité, on peut mettre un voile etc….
    – Si l’employeur veut la neutralité, alors l’employée doit être neutre !

    Un point c’est tout.
    Voilà la vision libérale.

  • Les islamistes s’agrippent partout où c’est possible.
    La crèche 7/24 Baby Loup facilitait d’abord le travail des mères en horaires décalés ou de nuit. Elles échappaient quelque part à l’autorité des mâles. Au lieu que ceux-ci s’ingénient à travailler pour rapporter du salaire au foyer et permettre aux femmes de jouer pleinement leur rôle de mère à domicile, ils ont préféré casser le service parapublic qu’ils ne contrôlaient pas, à défaut de pouvoir le phagocyter.
    La crèche a ou va fermer. Son déménagement est improbable, aucune commune ne voulant importer ce groupe de pression chez elle. L’islamophobie en sort renforcée, et les femmes modestes et courageuses se lèveront toujours avant l’aube pour aller faire briller les surfaces dans des entreprises encore endormies. Elles n’ont pas le choix.

  • La directrice à t elle le »droit » de licencier cette salariée car elle souhaite porter un hijab ?
    si l’interdiction du hijab n’est pas écri dans le reglement intérieur ou dans son contrat de travail alors la directrice est en faute.

  • l islamisme est le bouc emissaire des politiciens. + de lois + de mensonges et surtout comment diviser pour mieux régner.
    l islamisme ne represente meme pas 1% du terorisme mondial

  • Et si, un jour, la question suivante vous était posée : « Estimez-vous pertinent de reconnaître à chaque être humain le droit de se vêtir comme il le souhaite ? », que répondriez-vous ?

    • Je répondrai oui, sauf au boulot où l’entreprise doit avoir le droit d’imposer un uniforme ou une neutralité religieuse et politique. C’est le sujet de Baby Loup, la crêche veut être neutre, l’employée doit s’y plier ou partir. C’est simple. Si la crêche s’en fout de ne pas être neutre, l’employée peut mettre son voile.

      C’est simple il me semble… la loi ça devrait se résumer à ça finalement: « L’employeur a le droit d’imposer un code vestimentaire et une neutralité religieuse et politique s’il le désir, dans le contrat signé à l’embauche, si l’employé(e) ne souhaite pas se plier aux règles de l’entreprise il doit démissionner ».

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