Aujourd’hui encore le mot « cancer » est porteur d’une charge émotionnelle, personnelle et sociale considérable pour les personnes atteintes et pour leur entourage. Il est vrai que cette maladie fait peser sur la santé publique un poids qui ne semble pas s’alléger avec le temps, bien au contraire.
Mais la révolution arrive… D’ailleurs, elle est déjà là .
Le cancer n’est plus une fatalité
En effet, que de progrès accomplis en une seule génération !
Il y a trente ans, tous types de cancers confondus, le taux de survie à dix ans des patients ne dépassait pas 25 %, aujourd’hui il s’élève à plus de 50 %, et il augmente régulièrement ; certains cancers, comme les cancers de la thyroïde ou des testicules sont presque tous guéris. Ce sont plusieurs dizaines de milliers de vies qui sont ainsi épargnées chaque année.
Personnalisation et précision
Deux concepts-clefs expliquent pour l’essentiel ces progrès :
- La personnalisation des traitements
- La précision des traitements
La seconde étant pour l’essentiel fonction de la première.
La personnalisation s’exerce à deux niveaux : celui des patients, dont on sait aujourd’hui qu’ils ne reçoivent pas l’agression tumorale de la même façon, mais aussi, et peut-être surtout, au niveau des cancers eux-mêmes dont les variations cellulaires sont pratiquement infinies : on ne devrait plus jamais écrire le mot « cancer » au singulier.
C’est donc à un couple individualisé « cancer – patient » qu’ont affaire les thérapeutes, dont la tâche a cru en complexité mais aussi en précision, celle-ci permettant à la fois d’augmenter l’efficacité des traitements, mais aussi de limiter les effets secondaires : plus on frappe juste, plus on frappe fort, et plus on limite les dégâts collatéraux.
Personnalité tumorale
Ce ne sont donc pas tant les traitements des cancers qui ont changé que la façon dont ils sont finement adaptés à chaque personnalité tumorale, et à chaque patient.
Prenons l’exemple des leucémies des enfants : voici 40 ans, sur dix jeunes malades, un ou deux étaient sauvés, on en perdait donc huit à neuf. De nos jours, la proportion s’est inversée et ce, en l’absence de chimiothérapies vraiment nouvelles.
Comment cela a-t-il été possible, et surtout ces succès vont-ils durer ?
La fin de la résignation
Là , comme ailleurs, le premier facteur est le facteur humain : d’une part les médecins ne se résignent pas à voir souffrir et mourir leurs patients atteints d’un cancer, et toutes les pistes sont bonnes pour trouver des moyens de les soigner ; d’autre part, les malades eux-mêmes, et la société, n’acceptent plus la fatalité du cancer. Ils se mobilisent pour trouver les moyens de lutter contre la maladie.
Et bien sûr, ne pas se résigner consiste en premier lieu à lutter contre les addictions au tabac et à l’alcool qui sont responsables de 42 % des cancers en France, et à promouvoir les dépistages précoces des cancers du sein, du col de l’utérus, du côlon, de la peau…
Un progrès technique exponentiel
Pour progresser dans la découverte de nouveaux traitements, les chercheurs utilisent les ressources d’un progrès technique exponentiel en termes de biotechnologies, d’informatique, d’ingénierie et d’imagerie.
Grâce en particulier au développement du séquençage à haut débit et aux big data, ils peuvent désormais compiler et croiser les informations concernant les malades et leurs tumeurs, au niveau des cellules, des molécules et du génome, informations que l’intelligence artificielle permet d’analyser.
La recherche clinique
Ces outils permettent à la recherche clinique de proposer des protocoles de plus en plus élaborés, comme l’explique l’INCa, Institut National du Cancer :
« Parmi les essais cliniques, les essais thérapeutiques doivent notamment évaluer :
- de nouveaux médicaments ou associations de médicaments (contre la maladie ou ses effets secondaires), comparés dans certains cas aux traitements existants ;
- de nouvelles façons de les administrer (par comprimés plutôt que par injections, par exemple) ;
- de nouvelles techniques de traitement (nouveau type d’opération chirurgicale ou de radiothérapie, par exemple).
D’autres essais cliniques peuvent porter sur de nouvelles techniques de diagnostic (nouveau test biologique, par exemple) ou de prévention.
Les essais cliniques sont indispensables pour faire progresser et améliorer la prise en charge des cancers et, en conséquence, le parcours de soins des patients ».
Et le capitalisme mondialisé !
Enfin, et il n’aurait pas été abusif de mettre ce facteur en premier : seules les ressources financières considérables fournies par le capitalisme mondialisé, appuyé sur la veille marketing de tout marché libre, à l’affût des innovations rentables, rendent possible le financement de toute la chaîne de recherche.
Rappelons en effet que les médicaments anticancéreux occupent la première place du marché pharmaceutique mondial, représentant 14 % de ce marché, en hausse constante.
La triade chirurgie/radiologie/chimiothérapie
Si d’authentiques innovations ont contribué à ces avancées – nous en reparlerons – les principes de base du traitement n’ont pas changé : aujourd’hui comme naguère ils reposent pour l’essentiel sur la triade chirurgie / radiologie / chimiothérapie.
On enlève au scalpel le plus possible de tissu tumoral, on brûle les résidus avec des radiations, et on injecte dans le corps des médicaments destinés à tuer les cellules cancéreuses qui survivent.
Une chirurgie plus fine et moins invasive
Pour les tumeurs dites solides, par opposition aux cancers du sang et de la lymphe, dits liquides, la chirurgie est le plus souvent le traitement de premier recours.
La chirurgie est plus fine, moins invasive et donc beaucoup plus sûre : anesthésies partielles, cœlioscopie, c’est-à -dire une intervention via de petites incisions et une caméra, chirurgie au laser, aux ultrasons, par radiofréquence, voire cryochirurgie, qui utilise le froid, rivalisent d’innovations pour des interventions toujours plus légères et efficaces.
La radiothérapie plus précise
La radiothérapie est elle aussi une technique ancienne pour traiter les cancers, mais les radiologues d’antan n’y retrouveraient pas leurs rayons.
La radiothérapie d’aujourd’hui est plus précise. Elle permet de guérir un plus grand nombre de patients en limitant les effets indésirables Â: modulation de l’intensité des doses, délivrance de doses différentielles au sein de la tumeur, contrôle par l’image, utilisation de nouvelles énergies comme les protons, qui permettent de cibler précisément la tumeur en milieu fragile (cancers du cerveau).
Une chimiothérapie ciblée
La chimiothérapie a pour but de détruire ou d’empêcher la prolifération des cellules cancéreuses. Ce traitement est capable de dégrader l’ADN des cellules tumorales, de cibler ses composants essentiels, d’inhiber les enzymes et molécules permettant à ces cellules de bien fonctionner, ou encore de bloquer la division cellulaire.
Beaucoup des médicaments utilisés sont restés les mêmes, mais ils sont associés et dosés de façon ciblée en fonction de l’analyse cellulaire du « couple tumeur – patient », ce qui permet d’augmenter leur efficacité tout en limitant leurs effets indésirables.
Mais le progrès en cancérologie ne s’est pas borné à améliorer les traitements existants. Il a aussi profité, et profitera de plus en plus, d’innovations radicales, à commencer par l’immunothérapie.
L’immunothérapie, une révolution en cours
Le système immunitaire permet de protéger notre organisme des virus et bactéries pathogènes, mais il permet aussi de détruire les cellules dangereuses, inutiles, malformées ou cancéreuses.
Certains cancers sont capables de s’adapter et d’échapper à la vigilance du système immunitaire.
Le principe de l’immunothérapie est d’aider le système immunitaire du patient à s’adapter lui aussi et à éliminer les cellules cancéreuses.
Des molécules efficaces sont déjà utilisées avec succès contre les mélanomes, les cancers du rein, du poumon, les leucémies. Ils le seront très bientôt dans les cancers du sein, du foie, de la vessie, de la prostate, du colon, des os, et dans les lymphomes.
Les vaccins thérapeutiques en oncologie
Ils représentent une voie très prometteuse dans la lutte contre les cancers.
Le vaccin fonctionne en éduquant le système immunitaire à lutter contre des éléments propres à la tumeur. Ce n’est donc pas un vaccin préventif pour les personnes en bonne santé, il est destiné aux personnes déjà touchées par le cancer. Il s’agit d’un traitement ultra-personnalisé, puisqu’on va identifier les antigènes spécifiques des cellules cancéreuses du patient, puis les réintroduire dans l’organisme pour l’entraîner à reconnaître ses cibles et à les combattre.
Des études cliniques très encourageantes ont été publiées cette année dans le traitement des cancers du pancréas, devant lesquels les thérapeutes sont souvent démunis, et dans les mélanomes cutanés.
Les thérapies cellulaires à cellules CAR-T
La production des cellules CAR-T consiste à extraire des lymphocytes T par leucaphérèse, un prélèvement sanguin ciblant les globules blancs du patient, puis à les modifier génétiquement en laboratoire afin qu’ils puissent reconnaître les cellules cancéreuses. On réinjecte ensuite ces cellules activées au patient, qui vont aller se fixer sur les cellules cancéreuses et les détruire.
Ce traitement est déjà utilisé avec succès dans les lymphomes et certaines leucémies, notamment chez l’enfant et le jeune adulte.
La greffe de moelle osseuse
Citons enfin la greffe de moelle osseuse, utilisée contre certains cancers du sang où elle permet parfois des guérisons complètes chez des patients auparavant considérés comme perdus.
La moelle osseuse, à ne pas confondre avec la moelle épinière, contient des cellules dans les os longs qui fabriquent les éléments essentiels du sang. Ces cellules dites « hématopoïétiques » peuvent être altérées, soit par un cancer soit par les chimiothérapies. La greffe consiste à remplacer la moelle déficiente du malade par celle d’un donneur sain compatible.
Ainsi, dans le meilleur des cas, la moelle se remet à produire du sang normal avec les cellules du donneur.
Enfin, une révolution de velours
Néanmoins, une autre révolution, de velours celle-là , moins spectaculaire mais non moins efficace, a transformé la vie des patients atteints de cancers.
C’est celle de la communication sur la maladie, le parcours de soins et l’accompagnement des patients et de leur famille.
Il y a 40 ans, les médecins dissimulaient le diagnostic d’une maladie vécue comme une condamnation à mort. Aujourd’hui, l’information sur la maladie et son traitement sont la règle, faisant du malade et de ses proches des intervenants à part entière dans le processus de soins. Ainsi, l’image sociale de la maladie s’améliore peu à peu pour rejoindre celle des autres maladies chroniques, cardiovasculaires ou rhumatismales.
La multidisciplinarité autour de ces maladies complexes, l’accompagnement psychologique et social, la collaboration entre les professionnels de santé libéraux, hospitaliers ou associatifs, remettent le patient au centre du système et lui donnent le pouvoir sur sa maladie.
Cette révolution-là n’est pas la plus facile !
On notera que ces progrès sont toujours le fait des Occidentaux. Les pays comme l’Arabie saoudite, le Quatar et autres monarchies du golfe, l’Azerbaïdjan, l’Algérie, la Russie qui croulent sous l’or noir n’investissent jamais pour le bien de l’humanité. Tout comme tant d’autres pays ils préfèrent investir dans l’armement et dans l’effondrement de la civilisation occidentale.
C’est une triste réalité mais qui prendra la relève…
Ces pays-là sont des boulets. Aux deux sens du terme.
Occidentaux…! Occidentaux…! On pourrait aussi parler des médecines chinoises, indiennes,…
Quant à la Russie, tout n’y est pas négatif… inversement, aux USA, si on ne peut pas payer,…
Tandis qu’en France, même si on peut payer, on a (avec un délai certain) le même service minimum que les autres, et encore…
Capitalisme mondialisé… Indéniable.
Et bientôt l’IA. Qui, tout aussi mondialisée, produira du sens – identifier des causes – là où ne voyait rien.
Merci beaucoup pour cet état des lieux qui envisage l’avenir avec optimisme
Mouais. Quand on saura déterminer les causes pour prévenir l’apparition du cancer, on pourra parler de révolution. Quant aux vaccins… si c’est aussi prometteur que d’autres vaccins ARN surpuissants, je me permets de rigoler…