Manon Aubry vs les micros-cravates : le monde de l’indignation

La gauche française est en guerre. L’ennemi ? Le micro-cravate, cet accessoire discret devenu le symbole inattendu… du patriarcat.

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Manon Aubry vs les micros-cravates : le monde de l’indignation

Publié le 29 juillet 2023
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La guerre des boutons fait rage au sein de la gauche française. Qui gagnera le prix de beauté ? À qui sera décerné le certificat de moralité ? Qui aura le plus ébranlé les petites convenances de la petite bourgeoisie réactionnaire de droite ? Qui sera décoré de la médaille du révolutionnaire en peau de lapin ?

Alors que Sandrine Rousseau semblait mener depuis plusieurs étapes la course en tête, voilà que Manon Aubry sort du peloton pour tenter de reprendre l’initiative.

Dans une courte vidéo agrémentée d’une petite musique de fond guillerette, la chef de file des Insoumis au Parlement européen dénonce ce qu’elle présente comme n’étant pas loin d’être le pire scandale du siècle. L’horreur absolue rôde ! Une guerre doit absolument être déclarée aujourd’hui même contre l’ignoble micro-cravate, symbole ultime de l’emprise profonde du patriarcat sur notre mode moderne.

 

La rhétorique du scandale

Passons les détails de sa démonstration somme toute assez convaincante pour ne pas nous faire leurrer par le fond de la question. Mais que vient donc faire ici un accessoire technique dont quasiment personne ne connaît l’existence, à part ceux qui passent leur vie sur les plateaux télés ?

Il fait exactement ce que les précédentes lignes que vous venez de lire font : attirer la moquerie et les quolibets des méchants mâles blancs cis hétéros ultralibéraux fascistes conservateurs bourgeois obscurantistes bigots antiscience complotistes populistes bas du front consanguins racistes machos, tous excités comme des mouches par une telle absurdité.

Vous savez ? Les ploucs ! Vous ou ces abrutis que l’on voit dans les films et dont tout le monde se moque jusqu’au jour où arrive l’apocalypse zombie ; quand ils passent tout d’un coup du statut risible de fossile vivant à celui de survivant badass hyper sexy.

 

Cliver pour mieux régner

On ne voit jamais mieux l’éclat du blanc qu’en le posant sur un fond noir. Pour révéler l’absolue pureté morale et l’appartenance à l’élite, rien de mieux que de soulever les remugles de la lie de la société. Rien de mieux que d’obliger tout observateur à prendre parti : hurler avec les loups, ou bien être ébloui par la piété et la sainteté éclatante de la petite Manon jetée en pâture aux fauves déchaînés sous les hurlements de la foule.

Pauvre victime, martyre expiatoire des ennemis du bien commun, sacrifiée sur l’autel de la cause.

Il y a longtemps que la communication et le marketing ont remplacé l’idéologie en politique. La transformation a été si radicale que personne n’y comprend plus rien. Il est devenu quasiment impossible de comprendre où se situent la droite et la gauche, ou le centre et les extrêmes. On en est même arrivé à inventer des concepts aussi ridicules que l’extrême centre ou l’écologie révolutionnaire. Comme si le barycentre pouvait se trouver ailleurs qu’au loin des extrémités, ou si les révolutions pouvaient se faire avec des petits oiseaux et du quinoa.

 

Se singulariser à tout prix

Le mécanisme du handicap évident est depuis longtemps un stratagème utilisé par les publicitaires pour promouvoir les produits de luxe. Le slogan de la marque L’Oréal « parce que je le vaux bien » résume à lui seul parfaitement cet artifice qui consiste à mettre en avant une singularité et à la détourner en avantage.

Comment se fait-il que les paons arborent des roues gigantesques, alors que cet attribut les handicape fortement pour se déplacer ? Pourquoi les poissons des coraux revêtent-ils des couleurs chatoyantes plutôt que des camouflages qui leur éviteraient d’attirer les proies ?

Ces handicaps évidents jouent en réaction des mécanismes de l’évolution. Si les paons ou les poissons arrivent à survivre avec de tels désavantages flagrants, c’est que ceux-ci doivent être contrebalancés par des avantages cachés, une botte secrète qui leur permet de survivre malgré leur gigantesque pied de nez aux prédateurs et aux éléments.

 

Mode, luxe et apparat

Les pirouettes de Manon Aubry ou de Sandrine Rousseau sont autant de handicaps évidents savamment mis en scène pour s’attirer les foudres des oppositions. Elles suscitent inconsciemment la question de savoir comment ces personnes parviennent à survivre en agitant de tels drapeaux rouges au nez des ploucs-prédateurs vivant dans la violence de leur méchanceté ?

Les suffragettes se retourneraient dans leur tombe si elles voyaient leur lutte instrumentalisée dans le but de déterminer le sexe d’un instrument dont quasiment personne (à part ceux de la haute, ceux qui passent à la télé) n’ont jamais eu entre les mains.

Associer micro-cravate et paternalisme, c’est un peu comme se demander s’il faut ou non beurrer les toasts à caviar. Ça n’intéresse personne. Mais par contre, ça permet subrepticement de s’imposer comme étant largement au-dessus des basses préoccupations des ploucs qui ne se poseront jamais ce genre de questions.

Faire le clown dans une vidéo en se tortillant, tout en faisant la morale et la leçon, ça permet de se faire huer et de rejoindre ainsi le camp des minorités oppressées.

C’est un excellent stratagème de manipulation d’opinion, un excellent moyen d’exhiber sa haute supériorité morale, et son appartenance à l’élite, tout en suscitant des vocations : vous aussi, n’ayez pas honte de dénoncer le machisme du micro-cravate, parce que vous le valez bien !

 

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