Et si on s’intéressait aux sources des difficultés économiques de la France ?

Alors que les indicateurs économiques français sont à la traîne, la création d’une commission d’enquête viserait à identifier les responsabilités au sein de l’administration et à analyser en profondeur les facteurs ayant conduit à cette situation critique.

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Et si on s’intéressait aux sources des difficultés économiques de la France ?

Publié le 18 mai 2023
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Depuis la fin des Trente Glorieuses, l’économie française réalise de très mauvaises performances, bien inférieures à celles de tous les autres pays européens.

Il serait donc temps de comprendre à la fois quelles en sont les raisons et pourquoi nos dirigeants n’ont pas cherché à y remédier. On peut soupçonner des fautes commises par nos responsables politiques et/ou par des responsables placés à de hauts niveaux dans l’administration du pays. Il paraît donc nécessaire de mettre en place une commission d’enquête parlementaire, à l’image de ce qui vient d’être fait à propos du déclin de notre secteur nucléaire.

En effet, le 11 octobre 2022, une commission d’enquête a été organisée à l’Assemblée nationale par la Conférence des présidents, visant « à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France ». La présidence en a été confiée à Raphael Schellenberger et le député Antoine Armand en a été nommé rapporteur. Cette commission a travaillé intensément et a remis son rapport le 6 avril dernier, après avoir procédé à 150 heures d’audition de responsables à différents niveaux, dont deux anciens présidents de la République. Ses conclusions sont très sévères et il en résulte une trentaine de recommandations extrêmement utiles pour l’avenir de notre pays.

Rappelons qu’une commission d’enquête a été aussi créée au Sénat sur « L’influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques ». De telles commissions sont très précieuses.

Dans le cadre de la Commission que nous proposons de créer, il s’agirait de rechercher les raisons pour lesquelles l’économie française est bien moins performante que celle des autres pays européens, et de pointer les responsabilités au sein des administrations. Pour résoudre cet état de fait, une analyse méticuleuse des facteurs ayant conduit à la situation actuelle paraît nécessaire.

 

La France, un pays aux très mauvaises performances économiques

En 2018, le service des statistiques des Nations Unies (UNSD) a publié les résultats d’une étude montrant comment ont évolué sur une longue période les économies d’un certain nombre de pays, en se référant à leur PIB/capita qui est l’indicateur de richesse utilisé par les économistes. Nous indiquons donc, ci-dessous, les évolutions des grands pays européens, en ajoutant le cas d’Israël qui est particulièrement exemplaire :

Durant cette période, les performances économiques de la France ont été bien inférieures à celles des autres pays européens. Il aurait fallu au moins être au multiplicateur quatre, ce qui aurait permis au PIB d’être environ 30 % plus élevé qu’aujourd’hui.

Notre taux de dépenses publiques serait alors de 40 %, c’est-à-dire conforme au taux moyen des dépenses publiques de l’Union européenne (42,5 %), et notre taux d’endettement se trouverait ramené à 78 % par rapport au PIB. Il est tout à fait inadmissible que nos dirigeants aient laissé le pays dans une telle situation : tous les clignotants de l’économie sont à présent au rouge, et l’endettement ne cesse de croître.

 

Quelques avertissements qui n’ont pas été entendus

Il est évidemment impossible que cette dérive de notre économie ait échappé aux services du Trésor. On trouve sur son site les traces de diverses études mentionnant ce problème.

Par exemple, une étude portant sur la période 1975-2013 se concluait par :

« Le PIB/tête, en France, a crû moins vite que celui des États-Unis, et dans une mesure moindre de l’Allemagne et des pays du Nord. Le déficit de croissance moyen en matière de PIB/habitant est de 0,4 points par an, par rapport aux pays riches ».

Certains économistes ont, eux aussi, tiré la sonnette d’alarme.

Dans Changer de modèle, Philippe Aghion et Élie Cohen écrivent :

« Alors que les PIB par tête en Suède et en France étaient comparables en 1980, la Suède est à 10 points au-dessus. La France se paupérise par rapport à de nombreux autres pays : elle reste dans la moyenne de la zone euro parce que l’Espagne et l’Italie sont en dessous d’elle en PIB/capita ».

Divers économistes ou journalistes ont formulé leur diagnostic sur le mal français : trop de dépenses publiques, souci exacerbé de réduction des inégalités, fiscalité trop lourde impactant la compétitivité des entreprises, manque d’investissements en recherche & développement, etc.

Il faudra déterminer avec précision les causes de l’apathie de l’économie française.

Selon François de Closets, les Français sont d’éternels insatisfaits, ils ruinent l’État avec leurs exigences.

Dans son livre La France doit choisir, Jean-Louis Beffa, l’ancien président de Saint-Gobain, énonce que les difficultés de l’économie française proviennent de son changement de modèle : le pays s’est traditionnellement développé, et notamment après la Seconde Guerre mondiale, avec le modèle colbertiste que Jean-Louis Beffa nomme « commercial-industriel », pour passer, avec la mondialisation, au modèle anglo-saxon qu’il qualifie de « libéral-financier », un modèle d’économie capitaliste où la concurrence est très sévère et où les entreprises sont lancées dans une course effrénée aux profits. L’auteur considère que ce modèle libéral ne convient pas à la sociologie des Français. Il recommande donc de revenir rapidement à notre modèle traditionnel où l’État intervient dans l’économie et accompagne les entreprises dans leur développement.

Deux économistes particulièrement lucides, Élie Cohen et Christian Saint-Étienne ont mis l’accent sur les dangers de la désindustrialisation du pays :

Christian Saint-Étienne : La France est-elle en faillite ? en 2008 ; La France : état d’urgence, en 2013 ; Relever la France en 2016.

Élie Cohen a publié en 2014 Le décrochage industriel.

Ces auteurs ont mis en avant le problème de la désindustrialisation du pays, qui est au cœur même de toutes les difficultés de l’économie depuis une quarantaine d’années, c’est-à-dire depuis la fin des Trente Glorieuses :

  • faible croissance,
  • chômage plus important que partout ailleurs,
  • balance commerciale déficitaire chaque année,
  • prélèvements obligatoires les plus élevés de tous les pays de l’OCDE,
  • budgets en déséquilibre depuis 1975, contraignant l’État à recourir, chaque année, à l’endettement.

 

Mais ils ne furent pas entendus.

La commission d’enquête devra donc élucider la cause réelle expliquant le manque de dynamisme de notre économie, comprendre pourquoi les meilleurs analystes économiques n’ont pas diagnostiqué les causes du mal, et expliquer pourquoi les experts, à divers niveaux, qui ont tiré la sonnette d’alarme n’ont pas été écoutés.

Il y a manifestement un sérieux coup de balai à donner dans les rouages de l’État.

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  • « comprendre pourquoi les meilleurs analystes économiques n’ont pas diagnostiqué les causes du mal, et expliquer pourquoi les experts, à divers niveaux, qui ont tiré la sonnette d’alarme n’ont pas été écoutés. »
    Pourtant, les diagnostics ont été faits, la sonnette d’alarme tirée à maintes reprises, mais les décisions (d’agir ou pas) ont été prises par des politiciens hors sol dont le seul objectif était leurs carrières, et leur seul horizon, la prochaine élection où leur poste serait mis en jeu! Il me semble, (mais c’est mon opinion), que c’est aussi simple que ça! La santé de l’économie, le bien être et la qualité de vie de leurs électeurs, ils s’en fichent royalement!

  • Le problème est que ce ne sont ni le gouvernement ni l’administration qui pilotent mais in fine les lois, notamment fiscales et sociales, démocratiquement suscitées par un peuple savamment décérébré depuis plus de quarante ans.

  • Toutes ces préconisations sont exactement le contraire de ce que souhaitent les électeurs, le premier micro-trottoir venu vous le confirmera.

  • L’IDH franssais est très officiellement inférieur à l’IDU espagnol maintenant. Et si on s’intéresse au cas des régions, on remarque que seules l’IDF et la Bretagne présentent un IDH « européen », pour tous les autres endroits on a l’IDH de la Slovénie ou de la Tchéquie.

  • A propos, où en est-on des refus d’installation des établissements Bridor de Louis Le Duff à Liffré ? 250 millions, 500 emplois et manifestations continuelles, suivies par le gouvernement, pour leur interdiction…
    Id. pour Amazon à Briec, Barr, Fournès, Carquefou, …

  • Créer un Commission d’enquête. Voilà qui va résoudre le problème ! Elle va créer des sous commissions régionales, départementales puis locales qui chacunes vont nommer des experts pilotés par des chefs experts qui vont à leur tour nommer des enquêteurs et des chefs enquêteurs qui vont faire appel à des stagiaires. Bref au moins 4000 personnes vont être mobilisées et payées pour enquêter.
    Il y a longtemps que nos politiciens savent exactement quels sont les problèmes dont soufre la France. Mais aucun n’a voulu les résoudre sous peine de ne plus être élu et voir son parti marginalisé. Quand on est politicien professionnel, on n’est pas là pour résoudre les problèmes mais pour être réélu.

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