Sécurité juridique : au delà du droit continental et de la common law

En matière de sécurité juridique, il y a des avantages nets dans certains domaines pour la common law (contrats) et d’autres dans certains pays de droit continental »

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Sécurité juridique : au delà du droit continental et de la common law

Publié le 18 août 2022
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Il arrive souvent, notamment en droit comparé, que l’on mette en comparaison les deux grandes origines légales des pays, c’est-a-dire le droit continental et le droit de common law. Si ces comparaisons peuvent parfois être utiles, en matière de sécurité juridique, les différentes études montrent que ce n’est pas le cas. Passons outre le rapport Doing Business de la Banque mondiale qui favorisait de manière évidente le droit de common law, pour nous intéresser à d’autres rapports et index, publiés notamment par des instituts.

Si l’on prend l’Index de Sécurité Juridique (ISJ) de 2015, créé par la Fondation pour le droit continental, on s’aperçoit alors que la supériorité du droit de common law n’est pas vraie, et que celle du droit continental ne l’est pas non plus. Les résultats montrent des avantages nets dans certains domaines pour la common law (contrats) et montre la supériorité de certains pays de droit continental dans d’autres (ex : la responsabilité).

Dans un premier temps, il conviendra de se pencher sur la notion même de sécurité juridique puis, dans un second temps, d’observer les résultats de cet Index.

 

La sécurité juridique, notion essentielle dans la globalisation juridique

Que faut-il entendre par sécurité juridique ?

« L’État de droit substantiel suppose que la règle de droit présente un ensemble d’attributs substantiels qui lui permettent de remplir la fonction qui lui incombe : elle doit constituer pour les destinataires un cadre clair, précis, stable qui leur apporte des éléments de certitudes nécessaires et leur donne la possibilité de prévoir les conséquences de leurs actes ».

Par cette définition, Jacques Chevalier nous éclaire sur la notion importante de la sécurité juridique. Elle est « une garantie contre l’arbitraire et apparaît comme une exigence fondamentale de l’État de droit ». Hayek disait à ce sujet que les lois devaient être générales, égales et certaines.

Pour la Fondation pour le droit continental, la sécurité juridique recouvre trois éléments : l’accessibilité, la prévisibilité et la stabilité dans le temps.

La sécurité juridique a toujours été pensée et à toujours inquiété les juristes des XIXe et du XXe siècles. Cette notion fut de nouveau mise sur le devant de la scène en raison de la globalisation et des hybridations de systèmes juridiques qu’elle entraîne.

Ainsi, son retour s’explique par deux raisons :

D’une part, la sécurité juridique est exigée par l’autonomie de la volonté et son pendant l’attente légitime des sujets de la norme.

D’autre part, l’accent mis sur la sécurité juridique prend place dans une réflexion sur la fonction économique de la régulation juridique.

La sécurité juridique est indissociable de la sécurité judiciaire et plus largement de la sécurité institutionnelle. Elle n’a de sens que si un tiers neutre et impartial est accessible, qu’il présente des garanties d’indépendance, qu’il ait les moyens d’entendre les parties publiquement, équitablement et dans un délai raisonnable, que ses décisions sont intelligibles, accessibles et prévisibles et dotées de l’autorité de la chose jugée. Sans procès juste et équitable, sans recours juridictionnel pas de sécurité juridique.

Quelle que soit la conception que chacun se fait du rôle du juge dans la production normative, force est d’admettre qu’il ne saurait exister de sécurité (et de sentiment de sécurité), y compris juridique, sans accès à la justice, sans garantie procédurale des droits et sans indépendance de la justice.

 

L’absence de modèle dominant en termes de sécurité juridique

Il ressort de l’analyse qu’il n’existe pas un modèle dominant de système juridique en matière de sécurité juridique.

Au contraire, la sécurité juridique semble transcender les systèmes de droit puisque des pays de traditions différentes réalisent des performances proches en termes de sécurité juridique. Diversité et pluralisme juridiques ne sont notamment pas en contradiction avec des niveaux élevés de sécurité juridique. Les résultats globaux semblent démontrer que la sécurité juridique telle qu’elle a été mesurée pour les différents pays n’est pas corrélée à l’origine légale de ce pays.

Ainsi, si la Norvège est classée première (note moyenne de 7,07), la France est troisième (6,83) et le Royaume-Uni, quatrième (6,56). Les résultats montrent certaines disparités. Ainsi, la France est assez mauvaise en contrat (5,31), alors qu’elle a de bons résultats en droit des sociétés (7,79) et en droit de la responsabilité (6,54). À l’inverse, le Royaume-Uni est bon pour la sécurité juridique des contrats (8,02), mais faible en droit des sociétés (5,89).

Pour la France, on constate clairement que le droit français peut se mesurer aux autres systèmes de droit, même si certains points sont perfectibles en termes de sécurité juridique (comme les contrats). On a trop souvent voulu faire apparaître des avantages absolus dans les études empiriques alors que ces avantages sont au tout au plus relatifs, cantonnés à tel ou tel dispositif précis. On s’aperçoit in fine que la plupart des pays qui ont fait l’objet de la présente étude ont un niveau de sécurité juridique satisfaisant.

La comparaison des résultats obtenus dans chaque domaine pour un pays donné met en évidence une relative homogénéité du niveau de sécurité juridique dans l’ensemble des composantes du droit d’un même pays.

« Il en résulte que, non seulement, la distinction droit continental/common law a été exagérée, mais encore qu’elle ne traduit plus la réalité théorique ou pratique du droit appliqué : on ne peut, le déplorant ou non, que constater que c’est là le résultat paradoxal de la mondialisation et de la régionalisation qui ont dynamisé la circulation des modèles et des idées sans que n’apparaisse de mouvement d’unification, et que même la convergence demeure limitée.

Si, d’évidence, des différences demeurent, elles doivent donc trouver une explication ailleurs que dans l’identification des systèmes, ces derniers n’étant plus suffisamment singuliers les uns par rapport aux autres pour constituer un facteur explicatif significatif  (Kermel et Renouard (2010) ».

Bien que cet Index a une portée limitée (comme tout type de rapports de ce genre), il montre avec une certaine acuité que les résultats économiques d’un pays ne sont que faiblement corrélés avec son origine légale. À ce titre, la codification napoléonienne a par exemple accompagné de manière positive le développement économique de la France. Ainsi, le Code civil définit des modèles de relations juridiques dans lesquelles le risque est minimal et qui doivent contribuer de ce fait à garantir avant tout la stabilité des relations sociales.

Les contrats risqués seraient, pour cette même raison, relégués dans d’autres codes, à commencer par le Code du commerce. In fine, c’est bien le contexte historique qui définit la pertinence de tel ou tel modèle juridique.

Ainsi, comme l’affirme Arrunada et Vertova (2005), « le droit civil, qui est produit essentiellement de façon centralisée, par le vote des lois a pu soutenir croissance économique en Europe Continentale alors qu’un système décentralisé comme celui de la common law donnant plus de pouvoir de création aux juges aurait été inadapté », notamment en raison de la production normative décentralisée.

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  • Dans tous les cas, il ne faut pas oublier la stabilité, sans laquelle il est impossible d’assurer une certaine pérennité. (et ne jamais surajouter des procédures irréalistes)

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