La Pologne face à Viktor Orban : la sécurité avant l’identité

Si le discours d’Orban a suscité des critiques en Pologne, c’est davantage sur des questions de sécurité que d’identité et de race.

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Viktor Orban EPP malta Congress 2017 by European People's Party (CC BY 2.0)

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La Pologne face à Viktor Orban : la sécurité avant l’identité

Publié le 29 juillet 2022
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Que pensent les Polonais du dernier discours de Viktor Orban ? Le Premier ministre hongrois a créé la polémique chez les médias occidentaux avec son discours en Roumanie du 23 juillet. Outre ses propos sur la politique étrangère de la Hongrie, il a rejeté l’idée d’une Europe peuplée de mélanges raciaux (mixed-race). Cette partie du discours a provoqué une polémique (et des condamnations médiatiques) à l’Ouest. De fait, la dimension identitaire du discours semble même avoir éclipsé la partie géopolitique en rapport avec l’Ukraine et la Russie.

Toutefois, on peut se poser la question de savoir comment ce discours a été perçu en Pologne. Actuellement dirigé par un parti (Parti droit et justice) plutôt proche de celui de Viktor Orban, cet autre pays d’Europe centrale peut avoir une autre vision que l’Ouest de l’Europe. Les propos identitaires d’Orban ont-ils eu le même effet en Pologne qu’à l’Ouest ?

Si le discours d’Orban a suscité des critiques, elle portent davantage sur les questions de sécurité que d’identité et de race, creusant la différence entre la Pologne et ses homologues de l’Ouest.

 

En Pologne, Orban est critiqué pour son manque de soutien envers l’Ukraine

La presse polonaise n’a pas autant réagi aux propos d’Orban sur la race que sur ses positions vis-à-vis de la Russie. Et les journaux relatant ses propos identitaires relient vite le sujet au conflit Russie-Ukraine.

Cet aspect met en avant le fait que les différends entre la Hongrie et la Pologne sont d’ordre géopolitique plus que culturel. L’Ouest craint avoir un dirigeant raciste en la personne du Premier ministre hongrois ; les Polonais craignent d’avoir en face d’eux un allié de Poutine. Si ce dernier point est aussi une perception partagée par les Occidentaux, pour les Polonais, c’est un point plus crucial que celui des questions identitaires.

 

Une différence de perception d’Orban qui s’explique par la géopolitique

Cette différence de critique vis-à-vis d’Orban ne doit pas surprendre.

La Pologne est frontalière avec la Russie avec l’enclave militarisée (et très potentiellement nucléarisée) de Kaliningrad. Le pays partage aussi une longue histoire commune avec l’Ukraine. Dès lors, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi la priorité pour la Pologne est le conflit ukrainien.

Inversement, les pays d’Europe de l’Ouest moins liés directement par l’Ukraine se montrent plus sensibles aux questions identitaires.

À bien des égards, Viktor Orban a plus à perdre en termes de soutien de la part du gouvernement polonais qui était un de ses alliés sur les questions liées à l’Union européenne que des critiques de l’Ouest qui lui est hostile depuis des années. En contrepartie, des compromis géopolitiques sont parfois plus faciles à trouver que des compromis sur la question des valeurs.

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

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