Guerre Russie-Ukraine : 3 leçons pour l’Occident

Les Occidentaux devraient tirer plusieurs leçons et rappels de la crise actuelle entre l’Ukraine et la Russie.

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Marcon- Poutine by Trong Khiem Nguyen - https://www.flickr.com/photos/trongkhiem/34989429566/in/photolist-ViTYp1-UZhSLG-2hcWmg7-P7nurc-P7n3nD-QJKcis-2cN8j1u-2d3tnp8-2d3ttZT-QUK3dy-2hrZicM-269ypBP-V1ZgKb 34989429566_3be8063e91_o

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Guerre Russie-Ukraine : 3 leçons pour l’Occident

Publié le 2 mars 2022
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Toute analyse de la situation internationale faisant l’impasse sur le fait que la Russie est la première ou deuxième puissance nucléaire mondiale est puérile.

La Russie, une puissance nucléaire

Si la Russie n’avait pas d’arme nucléaire, l’OTAN aurait déjà instauré une no-fly-zone dans le ciel ukrainien, et se feraient prestement dégommer sur le mode Buck Danny les appareils russes la violant. Ce qui est évidemment impensable dès lors que la Russie dispose de six mille ogives goulues en vies humaines, aussi nucléaires que menaçantes. Le genre de nuance qui échappe à des demeurés dans le genre du parlementaire américain Adam Kinzinger, dont l’idée de no-fly-zone dans le contexte actuel mène de façon directe, immédiate et mécanique à la guerre thermonucléaire totale.

J’ignore de quand date la dernière lecture de Diplomacy, la fresque magistrale de Kissinger, On War (Clausewitz) et Der Nomos der Erde (Carl Schmitt), par Donald Trump. Ce que je constate, en revanche, est que le New Yorkais se fait des rapports de force une vision et une pratique fascinantes de finesse, d’intelligence et de proportionnalité. Lors du récent CPAC (Conservative Political Action Conference), Trump rappelait que les USA sont richement dotés en armes nucléaires, mais que la Russie ne l’est pas moins, et que dans ce domaine les Chinois n’ont guère que cinq années de retard. À contraster avec les dirigeants européens dont la diplomatie actuelle se résume à égaler Poutine et Hitler. Dans le concert actuel, le retour aux affaires de M. Trump se profile comme une évidence churchillienne.

L’arme nucléaire est le grand égalisateur des relations internationales — ce qui nous rappelle que l’égalité n’est pas une valeur recommandable. Les armes nucléaires garantissent à leur possesseur, sinon l’immunité, du moins une très large part d’impunité. C’est regrettable. Mais on ne fait pas de politique, moins encore de la diplomatie, avec des regrets. Encore merci, Robert Oppenheimer.

Une crise humanitaire

L’Europe parle fort et va connaître sa pire crise humanitaire depuis 1945. Les Ukrainiens qui fuient en masse leur malheureux pays sont nos frères et nos sœurs ; leur refuge naturel, légitime, authentique, c’est nous, c’est l’Europe. Comme la France pour les réfugiés belges en 1940. Ces Ukrainiens sont d’authentiques réfugiés : personne ne le leur contestera. Admirable Pologne qui, après cinq jours, avait déjà accueilli près de 300 000 civils d’Ukraine ! Cette même Pologne dont le sieur Verhofstadt hurle depuis dix ans l’égoïsme et le non-respect des valeurs européennes au Parlement européen. Triste sire, en vérité !

Quand les écologistes deviennent les idiots utiles de la Russie

Depuis quinze ans, sous la pression des écologistes de tous les partis, l’Europe s’est massivement engagée dans l’interdiction de l’exploitation du gaz de roche-mère (schiste), dont nos sous-sols regorgent pourtant et dans la destruction de nos capacités nucléaires civiles. Dominique Reynié de la Fondation pour l’innovation politique (FONDAPOL) rappelait récemment que le gouvernement russe finance de longue date des mouvements, ONG, organisations et partis écologistes européens qui militent pour l’interdiction du gaz de schiste et la destruction du nucléaire civil. Et de citer l’exemple de la Belgique, dont l’actuelle ministre de l’Énergie Christinne Van der Straeten du parti écologiste GROEN est issue d’un cabinet d’avocats qui fut massivement rémunéré par GAZPROM, le géant gazier du gouvernement russe.

Comment expliquer ce compagnonnage de route — d’aucuns parleraient de collaborationisme — entre le gouvernement russe et des écologistes européens ? Parce que l’interdiction du gaz de schiste et la destruction du nucléaire civil condamnent mécaniquement l’Europe à dépendre du gaz russe. 40 % du gaz européen est importé depuis la Russie : 55 % en Allemagne.

La question se pose de savoir si les électeurs européens des partis écologistes persisteront à donner leur suffrage à des mouvements inféodés au régime impérialiste russe. Pire : l’argent qui finance le viol de l’Ukraine est celui du gaz russe vendu aux Européens. Let that sink in, gentil électeur souriant avec des pâquerettes dans les cheveux.

Quoi qu’il en soit, il n’aura pas fallu 48 heures à l’Allemagne pour liquider l’intégralité des seize années de mandat de Mme Merkel. De l’ère Merkel, il ne reste désormais rien, sinon les réfugiés du catastrophique Wir Schaffen Das.

Du jour au lendemain, l’Allemagne vient de décider d’investir cent milliards d’euros supplémentaires dans ses forces armées. Boum, cent milliards ! L’Allemagne se réarme jusqu’aux dents et tout le monde en Europe s’en réjouit : pas de doute, l’époque a changé. (Les Français qui ont la mémoire longue auront quand même une légère remontée d’acidité face à cette « bonne nouvelle ».) Un programme de réinvestissement lourd, allemand et sérieux : donc dans du matériel. Pas dans les frais de retraite et de personnel, comme le font les armées-clowns d’autres pays européens, celles qui lèveront un linge blanc dès que pointera une sarbacane.

Il n’est pas jusqu’à la fermeture des centrales nucléaires que l’Allemagne ne remette en cause ces jours-ci. Ne reste guère que la Belgique pour persister dans cette voie suicidaire, par le fait d’un quarteron d’idéologues écologistes félons.

« Diplomatie ou guerre totale » résume Nicolas Sarkozy. C’est assez juste. Saluons, on n’en a pas tous les jours l’occasion, le rôle de la France, qui ne se cantonne pas à des injures, du virtue signalling et des émoticônes. Russie = Allemagne nazie est une idée intéressante, qui fait malheureusement l’impasse sur un détail : l’Allemagne était nazie, mais pas nucléaire.

En 1962 (crise de Cuba), l’humanité échappait de peu à l’annihilation thermonucléaire.

Dieu nous préserve des amateurs.

 

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  • Gazprom et financement des ONG écolos…
    1. Confirmation des affirmations de Reynié ?
    2. De quelles ONG s’agit-il ?
    3. Attention au raccourci, on parle d’ONG, pas de partis politiques…
    4. Gazprom, comme d’autres, ont financé des programmes environnementaux, par exemple la conservation de forêts tropicales. Et si c’était juste du green-washing ?
    L’accusation de Reynié est grave. Avant de lui accorder du crédit, des précisions s’imposent.

  • Divine surprise du réarmement allemand! Le Saint Empire va bientôt pouvoir montrer les muscles aux vassaux qui refuseraient les dernières lubies de la Gross Kommission. Et l’on va réaliser avec stupeur que c’est quand même mieux de conserver la capacité de produire ses armements, munitions etc. que de les sous-traiter chez les gentils voisins tellement inoffensifs.
    Merci les outres politiques, d’être si pleines de vide que tout ce que vous touchez se transforme en implosion.

  • Quelle courte vue de nos po!itiques, entre l’abandon du nucléaire,le refus de même connaitre nos réserves de gaz, pour assurer une certaine indépendance énergétique, le refus de l’application des accords de Minsk signes par tous,ce qui est en partie au moins à l’origine de cette guerre

  • Excellentissime analyse, à la fois claire, synthétique et complète : à faire apprendre et réciter par cœur (avec interro à la clé) aux journalistes et autres personnes qui ont vocation à commenter l’actualité et qui le font si mal, sans parler des dirigeants et hommes politiques …

    Une seule réserve : le titre de l’ouvrage – majeur – de Karl von Klausewitz, officier et penseur prussien, est « Vom Kriege » [De la guerre] car il fut écrit en allemand en Allemagne et non pas à Harvard ou à Berkeley : l’emploi de l’anglo-étasunien pour le désigner est donc infondé, voire nocif car tendant à faire penser que toute source de connaissance ne peut être qu’anglophone. Vue l’actualité, il est particulièrement nécessaire de combattre tout monopole de la pensée ou de la parole.

  • quelle (bonne )surprise, cet article
    dans la déferlante de propagande venant ou inspirée par Moscou, une analyse réaliste, qui remet les pendules à l’heure.
    J’ai souvenir de mes parents qui avaient accueilli des réfugiés Bulgares, l’histoire se répète
    il n’y a aucune justification possible à ce désastre, sinon la continuelle dérive des régimes qui se succèdent en Russie… depuis des siècles
    Au moins,cela aura mis un coup d’arrêt à la folie destructrice du zéro carbone, dont ces grands démocrates russes et chinois n’ont pas la moindre préoccupation
    Si on ne peut pas(on a en face des dictateurs vieillissants et complètement hors sol) des missiles, on pourrait leur envoyer Greta, l’arme de destruction massive qu’ils nous avaient eux soigneusement bombardée

    -2
  • Le complexe militaro-industriel anglo-saxon se frotte les mains: il a obtenu, en jetant de l’huile sur le feu depuis dix ans, une durable séparation du continent européen. L’Europe de l’atlantique à l’Oural qui menacerait à terme la suprématie anglo-saxonne est bien repoussée dans ces temps incertains. Mais réveiller la bête sanguinaire et guerrière des peuples européens n’est pas sans risques.

  • 1. Le conflit d’intérêt c’est encore autre chose.
    2 et 3. La question du financement des partis écolos ou des ONG par Nordstream ne trouve pas une réponse claire ; Gazprom finit certes par financer des opérations de sauvegarde de l’environnement, ce qui est au pire du greenwashing, au mieux la juste réparation des dégâts qu’ils sont accusés de causer, comme telle ou telle entreprise qui plante des arbres pour compenser ses émissions de CO2.
    Entendons-nous bien : je serais le premier à me réjouir qu’on démasque les partis écolos, dont les contradictions et les positions fondamentalement anti-capitalistes et anti-libérales me sont désolantes. Mais même s’il peut y avoir un faisceau d’indices, comme on dit dans la police, c’est bien insuffisant pour envoyer un suspect en prison.
    Qu’on me prouve que c’est parce que la Russie finance de près ou de loin des mouvements écolos que ceux-ci sont devenus hostiles au gaz de schiste et au nucléaire, agissant ainsi au plus près des intérêts russes. Une concomitance ne traduit pas nécessairement une relation de cause à effet.

  • C’est l’ouest de l’Ukraine qui a des visées européiste pas l’est, et plus d’un millions d’ukrainien ont fuit la guerre du Donbass et les bombardements de la Kiev « démocratique » depuis 2014.
    Une « analyse » qui commence par ignorer la complexité du pays et l’historique de ce conflit ?

  • Les commentaires sont fermés.

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Nicolas Quénel est journaliste indépendant. Il travaille principalement sur le développement des organisations terroristes en Asie du Sud-Est, les questions liées au renseignement et les opérations d’influence. Membre du collectif de journalistes Longshot, il collabore régulièrement avec Les Jours, le magazine Marianne, Libération. Son dernier livre, Allô, Paris ? Ici Moscou: Plongée au cœur de la guerre de l'information, est paru aux éditions Denoël en novembre 2023. Grand entretien pour Contrepoints.

 

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