Le mécanisme régulateur de la banque libre : la loi des compensations interbancaires

L’École de la banque libre a mis en avant un mécanisme que George Selgin appelle la loi des compensations interbancaires adverses.

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Le mécanisme régulateur de la banque libre : la loi des compensations interbancaires

Publié le 24 février 2022
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L’École de la banque libre a mis en avant un mécanisme que George Selgin appelle la loi des compensations interbancaires adverses. En effet, dans le système concurrentiel, il existe un mécanisme automatique qui permet d’empêcher l’expansion de l’émission de billets ; ce mécanisme a également été décrit par d’autres prédécesseurs, tels que Murray Rothbard ou Vera C. Smith. Nous l’avons plusieurs fois mentionné dans de précédents articles.

Selon les partisans de la banque libre, ce mécanisme fonctionne automatiquement grâce aux réclamations réciproques des banques sur leurs réserves respectives. Toute banque reçoit continuellement des paiements de la part de ses clients, soit en paiement de prêts, soit sous forme d’espèces déposées. Dans un système où toutes les banques sont concurrentes, une banque ne sera pas prête à payer à son propre guichet les billets des banques rivales, mais les retournera à leurs émetteurs par le biais du processus de compensation.

Il faut donc supposer que si une banque se développe en dehors du rythme des autres, les soldes de compensation se retourneront contre elle et ses rivales puiseront dans ses réserves d’or à hauteur de son solde négatif. Ce mécanisme fonctionnerait à un stade beaucoup plus précoce que la fuite externe d’or et ferait que les réserves ressentiraient les effets de l’expansion presque immédiatement. Il est peu probable que toutes les banques décident de concert de réduire leur taux de réserves, et plus le groupe des banques conservatrices qui n’est pas désireux de le faire est important, plus le frein à l’expansion de l’autre groupe sera fort.

Ainsi, une banque qui envisage de s’agrandir doit tenir compte non seulement de l’effet direct sur son taux de réserves, qui se produit en premier lieu lorsqu’elle augmente son émission par rapport à la même réserve totale absolue qu’auparavant, mais aussi de l’effet indirect occasionné par le retrait d’espèces vers d’autres banques.

L’importance de l’augmentation qu’elle peut se permettre d’apporter à ses prêts sur la base d’une baisse donnée de son taux de réserves sera réduite en conséquence, et son action réagira en partie au profit des autres banques qui s’assurent une augmentation de leurs réserves. Tout en admettant qu’il puisse se produire des circonstances dans lesquelles la majorité des banques soient disposées à permettre une certaine réduction de leur taux de réserves, il est peu probable qu’elles risquent jamais des fluctuations de dimensions aussi importantes que celles qui sont considérées avec une certaine sérénité par la banque centrale.

Les free-bankers ont donc fait valoir que dans leur système une surexpansion n’était non seulement pas plus probable, mais même beaucoup moins probable que dans un système de banque centrale. Dans ce dernier système, tous les billets sont émis par une seule banque qui reçoit tous les paiements en ses propres billets et peut toujours rembourser ses propres billets. Elle ne donne ni ne reçoit donc de créances sur les réserves de numéraire en ce qui concerne les créances interbancaires.

La seule source de créances est la demande d’or du public (du moins, c’était à l’époque où la monnaie restait liée à un étalon de valeur, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui). L’effet peut être observé dans la période moyenne de circulation beaucoup plus longue (remboursements moins fréquents) des billets dans un système unitaire par rapport à un système avec plusieurs émetteurs de billets.

Les partisans d’un système de banque centrale prétendent que le contrôle interbancaire via le mécanisme de compensation est en grande partie une illusion, et ne fonctionne que dans des circonstances très particulières.

Si une banque augmente ses émissions dans une proportion donnée, ses affaires augmenteront dans la même proportion et par conséquent, le montant plus élevé des remboursements de prêts qu’elle aura à effectuer au cours d’une semaine lui donnera le même nombre de créances sur les banques rivales que celles-ci ont sur elle, de sorte qu’il n’y a pas de différences dans les compensations et pas de créances sur les réserves.

On a donc nié qu’il y ait un contrôle automatique sur l’expansion des émissions de billets dans un système bancaire multiple, notamment dans les cas où les billets circulent dans des zones géographiques restreintes. Cependant, comme l’a rappelé Steven Horwitz, ce fait est plus lié aux restrictions et à l’interdiction d’ouvrir des succursales bancaires (durant les Free-Banking Laws aux États-Unis), rallongeant les périodes de retour des billets à leurs émetteurs, qu’une véritable tendance de la banque libre, ou encore l’interdiction d’émettre de petites coupures (comme en Écosse).

Une présentation arithmétique de la loi des compensations interbancaires

Je me servirai ici de l’exemple utilisé par Vera C. Smith pour illustrer le mécanisme de contrôle automatique qu’est la loi des compensations interbancaires.

Prenons d’abord le cas de l’émission des billets.

Prenons deux banques (ou groupes de banques), A et B. Toutes deux réalisent le même volume d’affaires en première instance. Chacune prête 10 000 et a 10 000 prêts qui arrivent à échéance chaque jour de règlement.

A augmente maintenant ses prêts de 10 000 un jour donné et tous ces prêts supplémentaires doivent être remboursés quatre périodes de compensation plus tard, de sorte qu’il y a trois compensations entre les deux.

Supposons en outre que

  • si B retire de l’or à A, B n’augmente pas immédiatement son émission de billets dans la mesure où cela ramènerait son taux de réserve à son niveau antérieur, mais seulement dans la mesure nécessaire pour remplacer les billets qui ne sont pas entrés comme d’habitude, mais sont restés en circulation (cela lui permet simplement de prêter actuellement le même montant qu’auparavant) ;
  • A réduit en conséquence son émission de billets en circulation du montant de la perte d’or, c’est-à-dire du montant des billets supplémentaires qui lui ont été retournés par B lors des compensations.

L’encours total des billets émis par A et B reste alors le même pendant toute la période considérée.

 

Position initiale 

A.                B.

Billets  ……………………………..    40 000        40 000

Or ……………………………………       4 000          4 000

Remboursements de prêts ….    10 000        10 000

 

A reçoit 5000 de ses propres billets et 5000 de ceux de B.

B reçoit 5000 de ses propres billets et 5000 de ceux de  A.

Les billets sont donc compensés sans transfert d’or.

 

Position lors de la première compensation après l’expansion de A

A.        B.

Billets………………………………..  50 000      40 000

Or …………………………………….    4 000         4 000

Remboursements de prêts …..  10 000      10 000

 

A reçoit 5555 de ses propres billets et 4444 de ceux de B

B  reçoit 4444  de ses propres billets et 5555 de ceux de A

B tire 1111 or de A

 

Deuxième compensation  

A.          B.

Billets ………………………………   48 889     41 111

Or ……………………………………      2 889       5 111

Remboursements de prêts ….   10 000     10 000

 

A reçoit 5433 de ses propres billets et 4567 de ceux de B

B reçoit 4567 de ses propres billets et 5433 de ceux de A

B tire 826 or de A

 

Troisième compensation 

A.          B.

Billets ………………………………  48 063       41 937

Or ……………………………………     2 063         5 937

Remboursements de prêts ….   10 000      10 000

 

A reçoit 5341 de ses propres billets et 4659 de ceux de B

B reçoit 4659 de ses propres billets et 5341 de ceux de A

B tire 682 or de A.

 

Quatrième compensation 

A.          B.

Billets ………………………………   47 381    42 619

Or …………………………………….     1 381      6 619

Remboursements de prêts ….   20 000  10 000

 

A reçoit 10 530 de ses propres billets et 9470 de ceux de B

B reçoit 4735 de ses propres billets 5265 de ceux de A

B perd 4205 d’or au profit de A

 

A la fin de la quatrième compensation, la position est :

A.           B.

Billets….  51 586    38 414

Or ………    5 586       2 414

 

À l’arrivée, la surémission de B a pris fin avec la compensation des prêts supplémentaires, ce qui a mis à mal ses réserves, qui auront été drainées par la Banque A, qui aura été conservatrice dans sa gestion.

 

Prenons un autre cas, celui des dépôts de crédit. On peut supposer dans ce cas que les bénéficiaires des chèques payés par les emprunteurs des 10 000 supplémentaires versent ces chèques dans leurs banques pour encaissement immédiat. Il est raisonnable de supposer, à moins qu’il n’y ait une répartition inégale de l’activité de dépôt entre les deux banques, que la moitié de ces chèques soient versés dans chaque banque.

 

Position originelle 

A.        B.

Dépôts ……  40 000      40 000

Encaisse …     4 000        4 000

 

Première compensation      

A.                B.

Dépôts……    50 000        40 000

Encaisse…      4 000            4 000

 

B reçoit 5000 en chèques tirés sur A contre lesquels il n’y a pas de demande reconventionnelle de A sur B ; B réclame donc 5000 en espèces à A. La position après la première compensation est déjà intenable pour A :

A.              B.

Dépôts …..   45 000        45 000

Encaisse …  –1 000          8 000 + 1000

 

La stabilité des réserves des banques libres peut être mieux discernée sur ce diagramme (tiré du livre Financial Stability without Central Banks, de George Selgin).

(Tiré de Financial Stability without Central Banks, George Selgin, 2017, The Institute of Economic Affairs)

 

De plus, ce diagramme peut nous permettre de mieux comprendre comment un système de banque libre, en émettant autant de monnaie que ce qui est souhaité par les consommateurs et en évitant les surexpansions grâce au mécanisme des compensations adverses, permet de stabiliser MV, et de garantir l’application d’une norme de productivité en garantissant l’équilibre monétaire.

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