Un article du Mises Institute
Si Tyler Cowen, l’économiste de George Mason University, a pu rejeter l’idée d’un renforcement des mesures de confinement, les qualifiant d’épouvantail, et disant que ces mesures extrêmes qui ont commencé en mars de cette année « sont maintenant derrière nous », il semble que les gouverneurs et les autres politiciens du pays n’aient, eux, pas reçu le message. De plus en plus d’États ont recommencé à imposer des mesures de confinement ruineuses.
Les bien-pensants hargneux qui abondent sur Twitter et dans les médias réclament à cor et à cri la condamnation imminente des familles qui se réunissent pour Thanksgiving. L’animateur de CNN, Jake Tapper, a laissé entendre que « Noël ne serait probablement pas possible ».
S’il en était ainsi, tout le monde resterait véritablement assigné à résidence et ne verrait personne pendant des mois, voire des années, car ces coûteuses contraintes sont passées de « quinze jours pour ralentir la propagation » à des mois, voire des années, dans le futur.
Le fait que de telles idées soient même envisagées montre à quel point une grande partie de notre classe d' »experts » et de leurs hordes de lemmings sont déconnectés de la réalité humaine.
Les choses n’ont guère changé depuis avril dernier, quand j’ai dit que le confinement avait des conséquences matérielles indésirables et désastreuses.
Toutefois, à mesure que l’année 2020 avançait, il est apparu clairement qu’au moins une partie de la logique du confinement trouve son fondement dans une conception totalement erronée et relativement récente de la nature humaine.
Presque toutes les cultures et religions de l’histoire de l’humanité ont considéré que les humains sont des êtres à la fois matériels et spirituels. Cependant, en vivant à l’ère moderne comme nous le faisons, l’aspect matériel de notre existence a supplanté le spirituel à tel point que c’est à peine si on lui reconnaît une existence.
C’est sur cette différence de conception que repose la ligne de démarcation de la politique contemporaine selon Russell Kirk, qui va jusqu’à affirmer que « d’un côté de cette ligne se trouvent tous ces hommes et ces femmes qui pensent que l’ordre temporel est le seul ordre, que les besoins matériels sont leurs seuls besoins et qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent du patrimoine humain. De l’autre côté de cette ligne se trouvent toutes ces personnes qui reconnaissent un ordre moral durable dans l’univers, une nature humaine constante, et des devoirs élevés envers l’ordre spirituel et l’ordre temporel ».
Une vision purement matérialiste de l’existence humaine conduira bien sûr à certaines orientations politiques, en particulier face à une pandémie. Nier l’existence spirituelle de l’homme, c’est nier la possibilité d’une vie après la mort – seul le vide du néant attend. Dans cette perspective, il est logique que l’on puisse conclure que la vie terrestre doit se poursuivre à tout prix, qu’aucun sacrifice n’est trop élevé pour repousser à plus tard le néant.
En revanche, ceux qui ont une conception plus traditionnelle de la nature humaine, indépendamment de leur religion ou de leur croyance, peuvent facilement voir que le confinement a un coût énorme, ce que ne sont même pas capables de comprendre ceux qui ont une perspective purement matérialiste.
Les humains sont des êtres sociaux. Notre existence et notre développement en tant que personnes humaines reposent sur cette nature sociale. Les penseurs du contrat social comme Hobbes, Locke et Rousseau peuvent bien fantasmer sur une existence humaine solitaire, tous les exemples d’enfants sauvages ou isolés montrent que sans d’autres humains, un individu solitaire périrait rapidement, sans compter son incapacité à développer la conscience de soi ou la capacité à penser et à communiquer par le langage.
Certains érudits personnalistes, comme le théoricien politique David Walsh, soutiennent que toute notre conception du moi ne peut se former qu’en relation avec d’autres personnes. Contrairement à la célèbre phrase de Descartes qui dit « Je pense, donc je suis », un personnaliste affirmerait que nous ne sommes même pas capables de comprendre l’existence du Je avant d’avoir d’abord compris l’existence d’un Je chez les autres.
Tout comme nous ne pouvons jamais vraiment voir notre propre visage, mais seulement le visage des autres, ce qui nous permet de comprendre notre propre visage invisible, nous ne pouvons pas prendre conscience de nous-mêmes tant que nous ne nous trouvons pas dans un contexte avec d’autres et, à travers eux, nous reconnaissons la nature mutuelle de nos vies intérieures qui fait de nous des personnes.
De nombreuses religions, d’une manière ou d’une autre, évoquent l’interdépendance du monde et des personnes et l’illusion de la séparation. Bien qu’elle soit le plus souvent associée aux religions orientales comme le bouddhisme, cette unité spirituelle n’est pas étrangère au christianisme et à l’Occident. En effet, la Trinité chrétienne est interprétée comme étant un Dieu unique en trois personnes. Jésus Christ fait référence à cette unité dans l’Évangile de Jean chapitre dix-sept lorsqu’il prie :
« Pour que tous ils soient un, comme vous, mon Père, vous êtes en moi, et moi en vous, pour que, eux aussi, ils soient un en nous […] afin qu’ils soient un, comme nous sommes un, moi en eux, et vous en moi, afin qu’ils soient parfaitement un ».
Au-delà des implications religieuses spécifiques, les humains ont reconnu depuis des millénaires que lorsque des personnes se rassemblent, elles entrent en contact les unes avec les autres sur le plan spirituel, par la reconnaissance de leur identité mutuelle. Cependant, cette unité spirituelle si essentielle à notre existence-même en tant que personnes humaines ne se produit pas dans le vide, mais plutôt dans le contexte dans lequel nous nous rassemblons dans le monde matériel.
Les humains pourraient absorber tous les nutriments dont ils ont besoin en ingérant du Soleil Vert[. Allusion au film de science fiction Soylent Green, dans lequel les humains absorbent des nutriments pour vivre, mais ne font plus de repas traditionnels, NdT.] dans la solitude, mais au lieu de cela, nous transformons souvent nos repas en rituels sociaux. Les repas que l’on partage fournissent non seulement une nourriture matérielle, mais aussi une nourriture spirituelle. Danser seul dans sa cuisine, c’est bien beau, mais ce n’est rien comparé à une foule de milliers de personnes qui se pressent dans un festival de musique électronique ou comparé aux pieds d’une secte soufie qui danse le dhikr.
Nous avons la chance de pouvoir accéder à de grandes œuvres d’art d’un clic de souris, mais regarder le Lac des Cygnes chez soi, seul sur YouTube, ne remplace pas l’expérience de le voir en direct dans une salle bondée où chaque personne est émue jusqu’aux larmes.
Il y a peu d’événements qui soient plus empreints de l’unité spirituelle des participants qu’un mariage, une célébration de l’unité littérale de deux personnes comme une seule, en présence de leurs amis et de leurs proches autour d’un festin, de chants et de danses.
Pourtant, combien de mariages ont été annulés ou célébrés en privé cette année en raison des confinements ? Combien de repas en commun n’ont pas été pris ? Des danses non dansées, des chansons non chantées, des conversations non tenues ?
Combien de parents et de grands-parents en maison de retraite n’ont pas pu voir leurs proches avant de quitter cette Terre ? Combien d’enfants ont souffert toute la journée, seuls devant un écran ?
Ce ne sont pas là de simples luxes frivoles dont nous, les humains, pouvons nous passer. Le double aspect matériel et spirituel de notre vie ne peut être dissocié. Ces aspects de nos familles et de nos communautés ne sont pas de jolis accessoires de vie, mais la vie humaine elle-même.
Il est indéniable que pendant une pandémie, il sera nécessaire de modifier son comportement, mais tout comme aucun bureaucrate d’État ne peut planifier avec succès l’économie, aucun responsable de la santé publique n’est capable de planifier de manière centralisée une réponse pour des centaines de millions de personnes qui vivent toutes dans des conditions différentes, avec des besoins matériels et spirituels différents.
Chaque personne doit décider elle-même de la marche à suivre à la lumière des circonstances uniques de sa vie. Arracher ces décisions à chaque personne et les placer entre les mains des bureaucrates de la santé publique a conduit au désastre.
Le taux de suicide est en hausse dans tout le pays, à certains endroits jusqu’à 70 % par rapport à la même période l’année dernière. Les suicides de militaires ont augmenté de 20 %. Les décès par overdose sont en passe d’atteindre un niveau record. La RAND Corporation a constaté une augmentation de la consommation d’alcool cette année. L’Associated Press fait état des conditions horribles qui règnent dans les maisons de retraite du pays et qui ont pu entraîner la mort de dizaines de milliers de résidents dans des circonstances atroces et terrifiantes, leurs familles n’ayant pas été autorisées à s’occuper d’eux.
De plus, il semble que de nombreux patients se soient tout simplement éteints, leur esprit brisé par le fait d’avoir été enfermés dans un véritable isolement sans contact avec leurs amis ou leur famille pendant des mois.
La planification sanitaire centralisée qui ne reconnaît même pas l’aspect spirituel et social de l’existence humaine a causé la mort d’un nombre incalculable de personnes dans tout le pays, peut-être plus que le virus lui-même à long terme.
Nos chefs tant vantés peuvent agir comme de purs matérialistes lorsqu’ils prennent des décrets autoritaires qui anéantissent la société et notre humanité même, mais à un certain niveau, ils comprennent évidemment l’importance de leur propre santé spirituelle. Sinon, pourquoi les dirigeants de Californie enfreindraient-ils leurs propres règles pour dîner dans des restaurants prestigieux ou s’envoler vers Hawaï pour des réunions, et ne se contenteraient-ils pas de plats à emporter et de Zoom, comme nous autres paysans ? Mais que peut-on attendre d’autre d’un système de contrôle du haut vers le bas ?
Les humains sont des êtres à la fois matériels et spirituels. Tout comme nous avons des besoins matériels que les planificateurs centraux ne peuvent pas anticiper, nous avons des besoins spirituels qui ne peuvent être satisfaits que d’une myriade de façons, que les planificateurs centraux ne peuvent pas prévoir, surtout lorsqu’ils ne reconnaissent même pas qu’il s’agit de besoins.
Lorsqu’ils ne sont pas satisfaits, notre santé physique en souffre tout aussi sûrement que si nous avions un virus. Les aspects sociaux et communautaires de la vie humaine, qu’il s’agisse d’un dîner en famille, d’aller à l’église, d’un mariage ou même des relations banales de la vie quotidienne, ne sont pas de simples luxes dont on peut se passer, ils sont la vie humaine elle-même. Les gens doivent être libres de traverser ces moments difficiles armés de la connaissance de leur situation qu’ils sont les seuls à posséder.
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Sur le web – Traduction Contrepoints.
Oui, pendant cette incroyable épisode, la valeur de la vie sociale et spirituelle a été proprement piétinée. C’est très probablement dû au fait que d’autres impératifs ont pris le dessus dans l’esprit des dirigeants: nécessité de faire de l’argent (ce qui impliquait que la maladie devait être grave et sans traitement précoce) et nécessité d’en faire un outil politique utile à leurs intérêts (l’instrumentalisation de cette crise dans la campagne présidentielle US est évidente).
Le Covid est un crash test de la capacité de nos sociétés « évoluées » à encaisser des chocs. Le bilan n’est guère reluisant.
La notion de besoin « essentiel » choque, passer une vie à survivre ce n’est pas vivre..
Considerer comme une évidence que des gens âgés proches de la mort doivent faire le choix de la claustration est vertigineusement idiot..
Dans le fond, ça exploite l’amour des enfants pour leur parents mais .en pratique les dits enfants constatent très vite que les gens âgés font vite le choix : les contacts humains. .
Celles et ceux qui sont prêts à sacrifier toute vie sociale pour survivre dans leur coin peuvent parfaitement le faire en s’auto-confinant.
Les statistiques montrent qu’il n’y a aucune corrélation entre le degré des mesures sociales d’enfermement et le nombre de décès. En tant que mesure sanitaire, le confinement général est inefficace.
Quant au vaccin salvateur …
La nature humaine on en a eu une belle illustration samedi,premier jour de semi déconfinement à 20 km pendant 3h qui a vu converger dans Paris plusieurs dizaines de milliers de manifestants,et les mesures sanitaires ?
Ramassis de branleurs professionnels et autres zadistes à nos frais dont l’idéal est de tout casser et en particulier du flic.
Belle nature humaine armée de marteaux,mortiers …les scènes de combat de rues sont semblables à celle du début du film Gladiator,les barbares contre les légions romaines ,malheureusement nous n’avons pas de Maximus.
Les rassemblements de branleurs professionnels et autres gauchistes sont-ils spontanés?
Je partage cette analyse. Le confinement est un emprisonnement tout comme le télétravail, d’ailleurs.
Cela met surtout en lumière notre dépendance psychosociale…c’est hallucinant…!!! ( que cette dernière soit largement influencée par l’Etat et notre « modèle social »..)..Et le pire c’est que beaucoup en redemandent ce qui voisine l’addiction …
« Il est indéniable que pendant une pandémie, il sera nécessaire de modifier son comportement, »
Oui, mais ce n’était pas une pandémie. Du moins si l’OMS n’en avait pas changé la définition.
D’ailleurs en cas d’épidémie, de grippe par exemple, personne n’a attendu l’Etat pour changer son comportement…
Sinon, merci de mettre en relief la question de fond: l’homme n’est pas seulement une vie biologique.
Mais n’est-il pas nécessaire pour les psychopathes qui nous gouvernent, de faire table rase de l’humain pour faire advenir le transhumanisme qu’ils appellent de leurs voeux?
Pourquoi ne pas voir le bon côté des choses, puisque de toutes façons on y est contraints ? Arrêter quelques semaines de vivre dans le tourbillon de la vie, prendre du recul, le temps de réfléchir, de prendre conscience que nous vivons mal, retrouver nos ressources intérieures. Il y a plein de choses à faire. Et encore une fois, on dirait que c’est la fin du monde, mais ça représente 12 semaines sur une année.
encore faut-il continuer à être payés, avoir un grand logement avec un jardin : ce n’est pas le cas de tout le monde… !