Encore un week-end festif au commissariat de Champigny-sur-Marne

Lutter contre la violence liée au trafic de drogue suppose une police et une justice prêtes. Elles ne le sont ni l'une, ni l'autre.
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Encore un week-end festif au commissariat de Champigny-sur-Marne

Publié le 12 octobre 2020
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par h16

Week-end festif à Champigny-sur-Marne : dans la nuit de samedi à dimanche, le commissariat a été attaqué par une troupe de quarante joyeux drilles à coups de barres de fer divertissantes et de jets de projectiles dont des mortiers d’artifices réjouissants.

Des jeunes, assez probablement déçus par les petites restrictions – certainement liées au strict respect sanitaire, cela va sans dire – dans leurs échanges commerciaux réguliers de vente de produits relaxants ont ainsi exprimé leur désarroi devant l’établissement des gardiens de la paix qui ont vraisemblablement pris note de leur mécontentement, comme en témoignent les images filmées de différents points de vue et qu’on trouve maintenant un peu partout sur les réseaux sociaux.

Cette réaction est réellement étonnante de la part de la population locale qu’on sait, depuis un moment, être à la fois aussi calme que paisible. Champigny est en effet une cité reconnue pour sa douceur de vivre et son commissariat n’est l’objet d’attaques en règle que de façon très irrégulière, comme en témoigne le faible nombre d’articles de presse qui relatent les rares différends entre les forces de l’ordre et les frétillants citoyens du cru.

Tenez, dès 2011, je notais dans un petit article que ce commissariat avait été témoin de petits débordements. À l’époque, la presse avait fait assaut de prudence pour relater les événements et leurs articles pastel permettaient d’établir que des jeunes à peine pubère, après un Monaco bu trop vite en plein soleil, avaient chanté deux chansons paillardes devant ce commissariat pour réclamer le droit de vendre des fruits et légumes primeurs à tarifs concurrentiels ; des policiers avaient alors dispersé l’amusante petite troupe après avoir brandi la menace de hausser le ton, et tout rentra dans l’ordre à temps pour voir Vivement Dimanche dans des conditions de stress minimales.

taubira : il faut que jeunesse se passe

Depuis, les choses sont rentrées dans l’ordre et, tout comme en 2018, l’année 2020 s’écoule donc, paisible et raisonnable : en avril, il ne s’est rien passé de significatif, pas davantage en juillet qu’en août, et le mois d’octobre s’annonçait donc très peu stressant.

Malheureusement, il semble bien que la guerre contre le trafic de Darmanin – ou, disons, la guéguerre de communication de Dardmalin contre le trafic de drogue, plutôt – provoque de petites irritations de la part des dealers pratiquant quelques opérations de représailles : déjà fort marris d’avoir été gênés les mois de mars et d’avril passés, on comprend que nos commerçants locaux n’entendent pas laisser du terrain au ministre de l’Intérieur qui, il est vrai, a bien du mal à remplir son costume à coup de petits tweets rageurs.

Bien évidemment, devant ce qui vient de se passer, une réponse logique pourrait consister à ne pas se laisser faire, boucler la cité et nettoyer les caves une à une pour y débouter les trafics, les stocks et les dealers, ce qui aurait le mérite d’envoyer un message clair de la République à toutes les autres cités dans un cas similaire. L’efficacité finale de l’opération serait très discutable, mais au moins la crédibilité du ministre et des forces de l’ordre derrière lui n’en serait pas durablement amoindrie. En lieu et place de quoi, cette réponse possible ne sera même pas envisagée : Darmutin va probablement montrer ses petits bras pas musclés, saisir un ou deux scooters et deux barrettes et hop, le travail sera considéré comme achevé.

En réalité, il n’y a guère que deux façons réalistes de s’attaquer au trafic de drogue qui gangrène certaines cités françaises.

L’attaque frontale en est une : elle n’a jamais fonctionné, comme en témoignent les années de prohibition aux États-Unis qui se soldèrent par des dizaines de milliers de morts et un échec complet des politiques menées qui ne firent disparaître ni les trafics, ni l’alcoolisme, et engendrèrent violences et corruption massives.

L’autre voie possible est la légalisation : c’est en pratique la seule façon de saper les fondements (financiers) de ces trafics et, pour le coup, ceci a déjà été tenté dans plusieurs États, avec succès… Cependant, cette légalisation ne peut fonctionner qu’à une condition impérative : que la justice et la police soient prêtes à gérer les violences qui suivront inévitablement l’assèchement des ressources liées au trafic.

En effet, par la force des choses, les dealers actuels sont quasiment sélectionnés sur leur capacité à user de la violence et à enfreindre loi et moralité pour parvenir à leurs fins. La disparition du trafic illégal signifie aussi un effondrement des cours des produits qu’ils vendent, et donc de leur source de revenus. Ceci entraînera naturellement un report des violences actuelles vers d’autres sources illégales de profit (vols à la tire, cambriolages, car-jacking, home invasion, extorsion, et j’en passe) bien au-delà des cercles connus de ces cités.

Du reste, c’est exactement ce qu’on a pu observer avec la fin du confinement : comme il a fallu rattraper le temps perdu pendant les deux mois d’arrêt de l’économie et donc aussi de l’économie souterraine, il y a eu un report de la violence normalement contenue à certains quartiers bien au-delà de ces derniers ce qui s’est traduit par une explosion des crimes et délits un peu partout dans le pays, y compris à des endroits réputés plus calmes auparavant.

Problématiquement, les forces de l’ordre sont actuellement noyées dans les procédures et la paperasserie, leurs moyens opérationnels sont souvent réduits à des bouts de ficelle, et les contraintes politiques (ne pas faire de vagues, ne surtout pas risquer les émeutes) sont si fortes que ces institutions ne travaillent plus guère qu’à harasser le paisible citoyen à coups de prunes circulatoires aussi diverses, variées que stupides.

Parallèlement, la justice, dont le budget rikiki est en totale inadéquation avec les besoins réels, a été essentiellement colonisée par des magistrats acquis aux causes les plus progressistes et qui n’entendront certainement pas abandonner leur idéologie marxiste pour tenter de faire revenir le calme dans le pays. Par exemple, l’idée de construire des prisons en France est toujours repoussée aux calendes grecques, alors même que s’empilent les condamnations internationales pour l’insalubrité des centres de détention français et que les criminels qui devraient y passer se retrouvent de plus en plus facilement dans la nature.

Bref : ni la police, ni la gendarmerie, ni la justice ne sont prêtes, même de loin, à gérer la violence inévitable qui suivra soit la décision actuelle d’affronter les trafics de drogue (ou, plus exactement, la volonté de faire un peu de communication musclée), soit la décision bien plus courageuse – mais totalement hors de portée de nos gouvernants – de la légalisation de la consommation et du commerce en France.

Cette attaque de commissariat (une parmi une longue liste, en fait) est une démonstration flagrante de l’absence totale de toute politique d’ensemble de gestion des violences dans ce pays ainsi que de toute volonté réelle de trouver une solution opérationnelle, viable, au problème de la drogue qui gangrène de plus en plus de quartiers du pays.

Il faut se rendre à l’évidence : ce pays est foutu.


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  • réponse de darmanin : interdire la vente au public des mortiers d’artifice …je les vois trembler d’ici les sauvageons ; à quand l’interdiction des briquets et des allumettes qui mettent le feu aux bagnoles , aux flics et aux poubelles ? pauvre France va , avec des glands pareil au pouvoir , on n’est pas sorti de l’auberge ; je fulmine ;

    • La réponse des politiques ressemble à celle des gamins à l’école : « je vais le dire à mon père ».

      Cela n’a jamais réglé le problème de celui qui dit ça. Bien au contraire l’aveu de faiblesse est une invitation à recommencer.

      Mais plus grave, ce n’est pas le problème de Darmachin ou du gouvernement mais de la République.

      Et c’est la République qu’il ridiculise par la communication.

      • « je vais le dire à mon père »

        Quand vous proférez des menaces plutôt que vous servir de vos poings, celui d’en face sait qu’il a affaire à une couille molle et qu’il a déjà gagné la bagarre.

    • @véra: A Londres il est interdit de vendre des couteaux, à lame pointue…

      Sinon, en France, cela fait belle lurette que disposer sur soit d’un tout petit canif ou d’un truc contondant vous place en position délictueuse. Bien sûr au départ, cela ne devait concerner que les individus violents pris sur le fait…

      • « A Londres il est interdit de vendre des couteaux, à lame pointue » et paradoxalement le nombre d’homicide par arme blanches crève le plafond.
        Rappel : les machettes (pas les kikris) ne sont jamais pointues mais for efficaces.
        Le moyen de donner la mort, en admettant que l’on arrive à le supprimer, n’influe pas sur le nombre d’homicides. Il y a toujours une alternative.

  • Pris dans l’article de 2011 (RIEN NE CHANGE !) :
    Melkion 4 juillet 2011, 19 h 16 min – Enorme. Le plus grave dans cette histoire c’est de constater le vocabulaire utilisé par nos journaleux : « représailles », « protestation »… C’est une parfaite inversion de la réalité, comme si le jeune déçu était en fin de compte la victime qui exercerait son droit de légitime défense face à un agresseur.

    En fin de compte, se servir de sa raison la plus élémentaire revient à constater que le monde autour de soi marche au plafond, et que l’on est très peu nombreux à ne pas observer les faits avec une paire de binocles déformantes labellisée demaerd (c).

  • Analyse avec laquelle je suis malheureusement complètement aligné. Il y a quelque temps je me demandais pourquoi on ne légaliserait pas le Canabis comme cela a été fait dans d’autre pays.
    La peur de la révolte des petits caïds y est certainement pour beaucoup.

  • « Les petits caïds n’impressionnent personne »

    ben au moins les deux policiers qui ont préféré rentrer dans le commissariat !

  • Le fief du parti communiste, marchais habitait la, sympa tant qu’il n’y avait que des portuguais. Celebre pour sa foire aux cochons.. Puis vint le bois l’abbé…… Des milliers de logements sortis de terre comme des champignons.. J’ai vécu à côté pendant 30 ans…

  • Ayant le plaisir d’habiter, non à Champigny, mais dans une commune limitrophe située en bas de la côte du même nom, je précise que l’usage de mortiers est quasiment hebdomadaire. En effet, à la différence du 14 juillet où on entend des feux d’artifice tant communaux que de particuliers en fête, ce « 14 juillet » se répète disons, entre 23h et 2 h du matin régulièrement et pas uniquement vers le ciel pour faire de jolies couleurs. Ce qui est intéressant est que la « presse » fait mention de ces attaques, puisque c’en sont, lorsque le niveau d’intensité doit, probablement, interpeller les maires ou peut-être quelques hauts fonctionnaires logeant au bas de cette même côte. Je plains nos forces de police dont, allez, 2 fois dans l’année, il semble que ces éruptions les mette sur le devant de la scène alors que c’est quasi tout le temps. Bienvenue au temps des barbares…

  • Légaliser la vente et la consommation de canabis ne va pas resoudre, je crois, le problème mais simplement déplacer le deal vers d’autres substances (cocaïne, crack, …)

    • @Jean-Pol
      Bonsoir,
      Ce que consomme chacun est de son ressort et de sa propre responsabilité. A chacun d’assumer les coûts tant financiers que de santé.
      La consommation d’alcool, bien que problématique sur le plan sanitaire (dépendance) ne pose pas de problème de trafic, ni de délinquance ou criminalité pour s’en procurer, le revendre, ou se procurer sa prochaine doses (86, pack de Kro’, ‘sky, ou shot de vodka). L’alcool est légal et légalement taxé.
      De plus, pouvoir se défendre d’un junky aux drogues, à l’alcool, à l’argent des autres, chez soi et en dehors, ne devrait causer aucun problème judiciaire à qui se défend.

    • peut être ramener la police vers la prévention et la repression de la violence illégitime serait une bonne idée non?
      ne serait ce qu’en terme d’utilisation de ressources..

    • @Jean-pol: le traffic de cocaine existe deja. pourquoi la legalisation de l herbe v a augmenter la demande pour la cocaine ? c est comme dire que legaliser le vin va augmenter la demande de vodka …

  • A chaque nouvelle étape franchie se fendre d’une déclaration et s’en gargariser ne sert absolument à rien !
    Et s’en prendre à un commissariat de cette manière est une nouvelle étape.
    Que l’état soutienne ses forces de l’ordre et leur permette de mener à bien leur mission serait un grand pas. Il est tout à fait illogique que ce soit les racailles qui s’en sortent et les policiers qui soient mis en examen.
    Bien évidemment on parle à chaque fois de « bavure » et les délinquants sont conscients de cela alors ils dépassent sans cesse les limites.
    Pour caresser dans le sens du poil ces s……. l’état se permet de se mettre les forces de l’ordre à dos, laissons-les faire leur travail et taper dans ces sauvages.
    C’est bien beau de pérorer devant une caméra, ce n’est pas eux qui montent au front.
    La France est devenue un drôle de pays…

  • Les adeptes du politiquement correct verrons là des « incivilités, un ensauvagement dû à une société cruelle, une réponse inadaptée, certes à des supposées violence policière, … » et j’en passe.
    Moi j’y vois la montée en puissance d’une guérilla qui s’organisent de plus en plus grâce à l’apport: de financement grâce aux trafics quand ce ne sont pas des financements étrangers camouflés sous des formes présentables et un apport humain constant avec la complicité de l’état.
    L’objectif pour ces nouveaux guérilleros s’attaquer par des attaques larvées mais ciblées de notre civilisation à commencer par nos « institutions régaliennes ».
    Cette situation est alimentée en homme par une migration constante, par un soutien physique (black blocs, zadistes, …) clairement identifiés , jamais réellement combattus et soutenue moralement par la gauche, la faiblesse de la droite dite républicaine et par les médias du fait de leur incroyable silence.
    Les techniques de contre guérilla sont connues et éprouvées. Encore faut-il avoir le courage de nommer les choses si l’on veut en traiter les effets, de s’en donner les moyens en acceptant les conséquences de ces actions.
    Commençons par ne pas «  couper les ailes » de nos forces. Rétablir l’ordre suppose l’acceptation d’une sévérité intransigeante , d’aller dénicher les fauteurs de troubles de leurs antres, de couper leurs sources d’approvisionnement et de les évacuer
    Tant que nos responsables n’auront pas ce courage politique et stratégique, visant à sécuriser le pays, en se gobergeant d’anathèmes et en se cachant les réalités la situation ne peut que s’aggraver. Il ne suffit pas de «  monter ses muscles » il faut s’en servir.

  • Un point qui n’a rien à voir avec le sujet et qui pourrait paraître superficiel, mais qui a tout de même son importance: on est d’accord que l’uniforme des gardiens de la paix est ridicule (casquette et polo), non? Ca peut paraître anodin mais ça ne l’est pas.
    L’esthétisme compte dans l’image d’une force, et donc dans le respect voire la crainte qu’elle inspire.

  • Les commentaires sont fermés.

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