Coronavirus : l’urgence de combattre le virus des idées fausses

Pouvons-nous raisonnablement anticiper l’ampleur de la récession ? Découvrez l’avant-propos de l’étude de Serge Schweitzer, qui sera répartie en 4 discussions.

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Coronavirus : l’urgence de combattre le virus des idées fausses

Publié le 25 mars 2020
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Par Serge Schweitzer.

Depuis que chacun est amené à pouvoir émettre son opinion sur tout il fallait s’attendre qu’à l’occasion d’un événement spectaculaire le phénomène devienne apparent, tangible, palpable, sinon même aveuglant.

Devant le Niagara d’informations irriguant tous les canaux d’information possibles l’avis d’un professeur de médecine vaut celui d’un journaliste, mais ne pèse pas plus lourd, et le point de vue d’un parlementaire ignorant tout de l’infectiologie et de la virologie vaut autant que les préconisations d’un urgentiste chevronné.

Nous touchons les dividendes amers du déclin continu du statut de la démarche scientifique sous le prétexte gravement erroné qu’en démocratie chacun peut avoir son avis et se doit désormais, par le biais des réseaux sociaux, de nous le communiquer.

Le brouillard des concepts les plus clairs est tel qu’il amène par exemple le président de la République à terminer son intervention solennelle par un retentissant « Vive la République » dont on se demande bien la signification ici et maintenant et à propos d’une intervention toute entière consacrée au Covid-19 et pas par exemple à une intervention de nos armées, ce qui alors se justifierait amplement.

La forme du régime va mieux nous épargner ?
La République va assurer le comportement responsable de chacun ?
Le virus reculera à l’idée de ternir la République s’attaquant en priorité aux monarchies, régimes autoritaires ou dictature communiste chinoise.

Bref que vient faire la République là où la seule cohorte qui compte pour nous guider est celle des savants. Ce propos n’est qu’un exemple parmi le tsunami de sottises sidérante si l’on veut bien mener une réflexion et non pas succomber à l’hystérie majoritaire qui oscille entre les enfantillages désormais quotidiens à haut bruit de 20 heures et une désinformation qui permet à coup sûr le pronostic suivant : quel que soit le nombre de décès, les conséquences dans les têtes et les comportements sont et seront plus dévastatrices que le virus lui-même. Décidément, mais c’est la une banalité, le virus des idées fausses est le plus pernicieux d’entre eux.

Essayons d’éclaircir les idées et d’en hiérarchiser quelques-unes.

  1. La notion de guerre est-elle correcte pour caractériser une situation épidémique ?
  2. Est-il fondé de subordonner la science à la politique ?
  3. Le virus sera-t-il éradiqué grâce à l’État s’arrogeant des pouvoirs exceptionnels ?
  4. Enfin, pour parodier Keynes en détournant simplement l’ultime mot de son célèbre ouvrage de 1920 on pourra s’interroger sur les conséquences économiques de la « guerre » (virale).

D’une part peut-on raisonnablement anticiper l’ampleur de la récession ? Les conséquences économiques de l’arrêt du pays seront-elles comparables à 1929, voire pires ? L’analyse économique donne-t-elle des outils pour juger et prévoir au moins à grands traits ?

D’autre part quelles thérapies ? L’État doit il massivement intervenir ? Y a-t-il des précédents pour nous guider : 1929, 1987, 2008 ?

Tels sont les quatre thèmes sur lesquels ici un peu moins d’ignorance, là une grande probité intellectuelle, là encore beaucoup d’humilité, là enfin la confrontation des opinions doivent permettre un large accord, du moins pour ceux pour lesquels la science dépasse, surpasse et enveloppe l’idéologie.

À ce propos précisons dès l’abord un point : nous serons appelés à plaider pour la primauté absolue de la démarche scientifique quand il s’agit justement d’un problème scientifique, ici en l’occurrence d’un problème médical. Cela ne signifie pas une adhésion au Saint-Simonisme, ni selon l’heureuse expression de Jean-Yves Naudet à une scientocratie.

Enfin la dernière précaution consiste à respecter In medio stat virtus.

Ce n’est point manque de convictions ou de virilité intellectuelle que de constater que décidément l’idéologie et l’exagération ne sont pas de précieuses auxiliaires. Ainsi par exemple pouvons-nous contester la notion de guerre ou les propos sur les nationalisations temporaires, ou même la gestion de l’infrastructure hospitalière sans tomber dans le systématique : « Tout est de la faute de nos dirigeants politiques et de toutes façons tout va mal et rien ne marche.»

Enfin il nous faut écrire la chose suivante : comme qui parlant du Covid traiterait de façon exhaustive, tel ne sera bien sûr pas le cas, tant des quatre sujets supra et de bien d’autres encore, je n’aurais de toutes façons traité que d’une toute petite partie car il resterait tant à écrire, savoir et méditer.

Ainsi c’est bien sous le signe de la modestie que veut s’abriter cette réflexion somme toute, à bien y regarder, fort banale, mais rendue peut-être originale, voire inattendue à l’esprit du temps fait ici d’inculture, là de hâte, là encore de détournement de concepts, là enfin d’un conformisme navrant, chacun singeant l’autre, imité par le troisième donnant le La au quatrième… dans une répétition en boucle sans fin des âneries les plus grossières et consternantes.

Et surtout parce que nous émettrons des opinions dissidentes, que l’on nous épargne le sempiternel couplet sur l’union sacrée qui est la tunique de Nessus empêchant toute discussion sérieuse, le cadeau empoisonné qui restreint le débat à la couleur du cheval blanc d’Henri IV ou à des discussions sans fin sur des sujets aussi centraux que « peut-on encore utiliser les masques stockés du temps de madame Bachelot » promue sur BFM (on cite) dans une posture de prophétesse…

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  • Merci de ce point de vue. En effet, il me semble que malheureusement, l’outrancier n’aide pas. Je zappe parfois certains articles parce que dès le début, le parti pris est « ridicule ». On repproche aux étatistes leur idéologie mais sommes nous à l’ecart de ce défaut ?
    Je vois parfois que certains d’entre nous n’echappent pas à ce problème idéologique. Le principe « yaka fokon » est trop répandu.
    Même si je me trompe sur ce qu’est le liberalisme, je crois qu’une des qualités d’un liberal est le pragmatisme. C’est d’ailleurs pour cela que je suis visceralement anti « tout état », ce qui ne veut pas dire que je crois en l’absence de tout rôle de l’état central.

  • De la plume de Onfray, toujours too much mais dans le mille.

    https://michelonfray.com/interventions-hebdomadaires/faire-la-guerre

    • Excellent texte de Onfray qui devrait être en une de toute la presse affidiée à ses subventions d’Etat comme la recherche le petit doigt sur la couture du pantalon sauf un rebelle.

    • @Stéphane tb texte du bouillant Onfray . Cette stratégie française est généralisée à tout problème dans ce pays : on ne cible jamais les fautifs, on limite les libertés de tout le monde (tout en laissant les coupables tranquilles) Ex : un année le gel avait été si fort que le grand canal du parc de Versailles était gelé faisant la joie des patineurs .Puis une femme s y est baladée avec bébé et landau.Oula que se passerait-il si madame et bébé passaient à travers ? Sueurs froides du responsable. La réponse fut prompte : désormais le parc est fermé dès qu il est enneigé et que le gel est trop fort ……….. et c’est comme ça à tous les étages ….

      • Parce que la société est devenue très procédurière, pour ne citer que ce défaut importé des USA dont on aime paradoxalement critiquer les vraies qualités.
        Je découvre que le Royaume Uni aussi is confined, avec l’ Inde. Plus de deux milliards de personnes confined. C’ est con, une fois de plus la France a manqué la possibilité d’ être un modèle pour le monde, Bernanos doit faire la toupie dans sa tombe.

  • « Tout est toujours noir, rien ne fonctionne, tout va mal, donne l’image d’éternels grincheux et acariâtres qui n’incite pas, en particulier les jeunes, à s’investir dans la diffusion du libéralisme. » Objectivement, certains d’entre nous paient très lourdement dans leur quotidien la lourdeur étatique de ce pays, que ce soit financièrement ou en termes de tracasseries administratives. Sachant que l’aspect financier peut avoir des conséquences en termes moraux et humains. Et que les conséquences de notre étatisme se paie trop souvent au prix lourd (https://www.lexpress.fr/actualite/societe/fait-divers/paris-la-mere-de-lou-11-ans-morte-d-une-peritonite-pointe-la-responsabilite-de-necker_2117614.html).) Il y a de quoi finir aigri, à tout le moins très amer… Émigrer ? Tout le monde ne le peut pas. Et pour aller dans quel pays ?

  • Le « déclin continu du statut de la démarche scientifique » a été depuis longtemps préparé par l’EN. Si cette grave lacune pouvait être réparée… Mais ne rêvons pas…
    Le pire est que la perméabilité aux discours anxiogènes (puisque l’émotionnel règne à la place de la raison) se retourne contre les politiciens quand par hasard, ils ont un discours raisonnable…

    • Et donc ils se plaigent des conséquences dont ils sont la cause.

    • Le malade imaginaire et Knock ne sont pas des livres récents. La sclérose des institutions de recherche, des académies, des milieux intellectuels en général a toujours été la règle en Europe et bien avant notre EN.

  • La situation est pourtant claire: on a demandé aux gestionnaires de réduire les dépenses de santé. Il y avait deux façons de faire: une difficile qui consiste à revoir les principes et structures du système pour les améliorer; l’autre qui consiste à rogner sur chaque poste, supprimer le stockage des masques, réduire d’un puis de deux jours la durée d’hospitalisation, réduire le nombre de lits de réanimation qui coûtent très cher, ne plus rien stocker et surtout ne rien prévoir.
    Ce qui fait que, lorsque la bise fut venue, notre système de santé fut pris au dépourvu et le pays réagit comme au XVIIème siècle, ou comme un pays en voie de développement.
    Quand on regarde les courbes d’infection de tous les pays, un seul a vu cette courbe s’aplatir le plus vite: la Corée du sud. Comment? En testant massivement et en isolant les gens infectés.
    La France: après-demain, on confine, ce qui permit à une cohorte de parisiens d’aller infecter la province.
    Des masques: cela ne sert à rien.
    Tester: on n’a pas les réactifs
    Et vous vous étonnez que l’on soit un tout petit peu critique??

    • « lorsque la bise fut venue, notre système de santé fut pris au dépourvu »

      … est LA conclusion qui pour moi veut tout dire :

      – on sait que les pandémies sont un des risques majeurs pour l’humanité (non pas directement pour son extinction, mais indirectement par les conséquences)
      – on sait que statistiquement, de nouveaux virus dangereux vont apparaître sur des intervalles de quelques dizaines d’années.
      – on a des alertes tous les 3 ans

      Et aussi surement que la Bise revient, on chante !

      Il y a dans notre modèle occidental un énorme problème de gestion des priorités !

      • Lederberg prix Nobel de médecine dans les années 50 disait que la principale menace à la survie humaine sur la terre sont les virus.

    • Il y a une école de pensée managemeriale imbécile qu’on nomme le « cost killing », c’est un peu comme une saignée, ça peut soigner ou tuer. Mais je remarque qu’en général c’est les parties saines qui sont sacrifiées au profit des parties nécrosées. Dans une PME, on vous fera perdre une heure pour acheter un stylo en paperasse. Dans un magasin on sacrifiera l’entrepôt. Le gain comptable est rapide à court terme, mais en temps long ça coute plus cher.

  • Merci pour cet appel à la tempérance. Quand je lis les commentaires des derniers articles sur le COVID, j’ai envie de lister quelques faits :
    La Corée a été soumise à une épidémie de MERS en 2015. A l’époque, l’OMS avait souligné les manques criants d’organisation et les déficiences en matière de test (9 jours pour tester un patient revenu du Moyen Orient présentant tous les symptômes). Cet épisode associé à celui du SRAS a ébranlé l’Asie de l’Est.
    Mesure étatique : En réaction, la Corée a mis en place des protocoles de réquisition des moyens de production privée, à construit des usines dédiées (coût de maintenance non négligeable hors période d’épidémie), a formé du personnel pour réaliser les test, a éprouvé des procédures de crises permettant la synchronisation des drives thru (parking, supermarché,…) et des centaines de laboratoires d’analyse qui fonctionnent à plein régime pour garantir les résultats sous 9h. La mise en place de tel protocoles demande des mois de préparation et ne peuvent pas être improvisés en quelques jours.
    Mesures individuelles : Les coréens/japonais ont tous des masques à la maison et ils en mettent en temps normal quand ils sont malades. Ils ne se saluent pas en se touchant. Lorsque l’épidémie a été déclarée plus de 60% de la population est passée en télétravail.
    L’épidémie a aussi profondément changer la philosophie des Coréens qui acceptent un abandon total de leur vie privée en cas de test positif (application qui géolocalise les infectés et préviens les non-infectés, accès aux historiques carte bleue et GSM des infectés,…). D’autre part, les masques ont été rationnés, 2 par jour pour la population avec un accès aux pharmacie une fois par semaines pour chaque coréen.
    La France a été soumise a un début d’épidémie H1N1 en 2009 qui n’a ébranlé personne.
    Mesure étatiques : Les scientifiques ont surévalué le risque mais la gestion de l’épidémie a été bonne puisque l’épidémie a fait peu de morts.
    Cependant, plutôt que de s’en réjouir, les français ont largement moqués les dispositions prises (vaccination de masse, approvisionnement de masques,..) en pointant du doigt un gâchis d’argent publique. Dans ces conditions, la mise en place coûteuse d’un protocole d’urgence comparable au modèle coréen aurait était plus que conspuée.
    Mesures individuelles : Lorsque le président a demandé aux français d’appliquer les gestes barrières et de s’isoler ainsi qu’aux entreprises de mettre les gens en télétravail, sans appliquer le confinement,le jeudi 12 Mars, les personnes non malades se sont ruées sur les masques, les gels hydroalcooliques et les denrées alimentaires, il y a eu de grands rassemblements dans les parcs et moins de 20% de personnes étaient en télétravail le lundi 16 au matin.
    Les USA et le Brésil jugent que l’effet du confinement sur l’économie est pire que l’effet du virus. Trump veut stopper le confinement et Bolsonaro ne veut pas le mettre en place.
    Seule la fin de cette pandémie, nous permettra de dire quel stratégie a été la meilleures. En attendant prenez soin de vous.

    • Vous faites une erreur de raisonnement :
      Effectivement la Corée a vécu un épisode de mers en 2015 et a vu les restrictions de liberté individuelle par les mesures etatiques
      Les mesures etatiques de la Corée n’ont pas été les plus ilpressionnantes, par contre les Coréens se sont organisés et les médecins sont allés à l’encontre des
      Recommandations etatiques. Quand vous comprendrez que vos recommandations etatiques sont réalisé par des hommes, vous changerez probablement de pseudo

  • Je rajouterais même que la prise de décision individuelle, l’hydroxychloroquine et les tests massifs ont été des méthodes plus efficace que la surveillance de masse qu’on essaie de nous vendre « pour juguler l’épidémie » surtout dans un pays socialiste

  • Les commentaires sont fermés.

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