Pourquoi sommes-nous attirés par des partenaires ressemblant à nos parents ?

Les animaux de nombreuses espèces « reconnaissent » qu’un partenaire conviendra en fonction de sa ressemblance avec ses propres parents, et il en va de même, semble-t-il pour les humains.

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Matriochkas by serguei_30(CC BY-NC-ND 2.0)

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Pourquoi sommes-nous attirés par des partenaires ressemblant à nos parents ?

Publié le 26 janvier 2020
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Par Tamsin Saxton1.
Un article de The Conversation

Avez-vous jamais pensé à la ressemblance familiale troublante entre un de vos amis et sa partenaire ? Ou vous êtes-vous demandé un bref instant si ce couple marchant dans la rue était mari et femme, ou bien frère et sœur ? Vous pourriez ne rien imaginer du tout. Les animaux de nombreuses espèces « reconnaissent » qu’un partenaire conviendra en fonction de sa ressemblance avec ses propres parents, et il en va de même, semble-t-il pour les humains.

Les scientifiques savent depuis longtemps que les espèces animales comme les oiseaux, les mammifères et les poissons choisissent des partenaires semblables à leurs géniteurs. Cela s’appelle l’empreinte sexuelle positive. Par exemple, si une maman chèvre s’occupe d’un bébé mouton, ou si une maman mouton prend soin d’un bébé chèvre, alors ces bébés, devenus grands, tenteront de s’accoupler, non pas avec un membre de leur propre ascendance, mais avec quelqu’un de celle de leur mère adoptive.

Les humains, semble-t-il, font de même. Quand vous demandez aux gens de se prononcer, à partir de photographies, sur les similitudes entre des couples hétérosexuels et leurs parents, il en résulte une image fascinante. En gros, les femmes tendent à choisir des partenaires dont le visage présente des similitudes avec celui de leur père, tandis que les hommes préfèrent souvent des partenaires ressemblant un peu à leur mère. L’air de famille ne s’arrête pas au visage : on observe également, qu’en moyenne, il existe de subtils traits communs entre partenaire et parent concernant la taille, la couleur des cheveux et celle des yeux), les caractéristiques ethniques et, même, le degré de pilosité du corps.

Est-ce un couple ou un frère et une sœur ? Teeejayy/Flickr, CC BY-SA

Mais quel est le fond du problème ? Puisque nous avons tendance à ressembler à nos parents, alors comment savons-nous qu’un individu ne choisit pas son partenaire, simplement par ce qu’il lui ressemble ? Nous savons qu’une telle ressemblance influe sur le choix de l’être aimé. Mais de nombreuses études suggèrent que cela ne constitue pas le fin mot de l’histoire. L’une de ces études portant sur des femmes adoptées montre qu’elles tendent à préférer un mari présentant des traits similaires à ceux de leurs pères adoptifs.

Nous savons aussi qu’en général les hétérosexuels se montrent davantage attirés par quelqu’un(e) ressemblant au parent du genre opposé plutôt que par le parent appartenant au même sexe que lui (ou elle). De plus, la recherche a montré que l’apparence physique n’était pas le seul critère pris en compte, mais qu’importait tout autant celui du rapport entretenu avec ce parent. Les personnes mentionnant des relations positives avec leur père ou leur mère pendant leur enfance sont davantage susceptibles de se sentir attirées par des partenaires présentant l’apparence de ce même parent.

Aversion contre attraction

Il n’est pas question ici du complexe d’Œdipe revisité.

Oedipe conduit par Antigone, fille de son union incestueuse avec sa mère Jocaste. Antoni BRODOWSKI/Wikipédia, CC BY-SA

Sigmund Freund estimait que les enfants éprouvaient une attirance sexuelle pour leurs parents, mais la refoulaient. Cette recherche ne démontre en aucun cas que nous désirons secrètement nos père et mère, mais simplement que nous avons tendance à éprouver de l’attraction pour des personnes qui leur ressemblent un tant soit peu. Nous avons plutôt tendance à ne pas être attirés par les membres de notre famille proche. Par exemple, les gens repoussent violemment l’idée même de rapports sexuels entre frères et sœurs.

Cette aversion semble se développer automatiquement à travers deux processus distincts. Le premier élimine toute attirance envers ceux avec qui nous passons beaucoup de temps pendant notre enfance ; le second enlève toute attraction pour un enfant dont notre mère prend grand soin. Le rejet sexuel envers nos frères et sœurs pourrait bien être le moyen trouvé par la nature pour s’assurer que nous n’essayons pas de copuler avec quelqu’un de trop proche afin d’éviter un risque accru de désordres génétiques pour la descendance.

Ce phénomène d’aversion est appelé l’empreinte sexuelle négative. Cependant, une attraction sexuelle peut se déclencher entre des frères et sœurs qui, ayant été très tôt séparés, se retrouvent quand ils sont adultes.

Mais à quel moment développons-nous ces préférences ? Peut-être est-ce tôt dans notre vie que nous trouvons attractif le physique de nos parents. Après quoi nous ne nous soucions plus de cela avant de le laisser remonter finalement à la surface quand nous sommes prêts à nouer des relations adultes. Ou peut-être des expériences plus récentes se superposent à cet apprentissage antérieur ?

Pour le tester, j’ai demandé à des femmes adultes hétérosexuelles de me parler des rapports avec leurs parents à différentes étapes de leur propre développement. Et j’ai mesuré à quel point leurs préférences actuelles correspondaient à l’apparence physique de leurs père et mère.

J’ai découvert que les femmes ayant entretenu une meilleure relation avec leurs parents après la puberté se montraient plus enclines à aller vers des partenaires possédant des yeux de la même couleur que lesdits parents. A contrario, si une femme était proche de ses parents beaucoup plus tôt dans la vie, elle était moins disposée à choisir un partenaire de même couleur d’yeux que ses ascendants.

En science, nous aimons toujours répliquer les résultats avec des échantillons variés et des méthodologies avant de généraliser les résultats trop rapidement. Jusqu’à présent, le schéma étonnant que cette toute première étude suggère est qu’il pourrait exister de complexes modèles de développement sous-jacents à notre construction de l’image d’un partenaire idéal. Peut-être ce qui est à l’œuvre, ce sont à la fois les actions des empreintes sexuelles positives et négatives.

Mais une question demeure. Si les préférences liées à la ressemblance avec les parents existent au sein de populations différentes, alors quelle est l’explication biologique de cette attitude ? Il se trouve que s’accoupler avec un membre lointain de la famille est le meilleur pari possible, biologiquement parlant, pour donner naissance à beaucoup d’enfants en bonne santé.

Une possibilité : si vous êtes attiré par des personnes ressemblant à vos parents, il y a des chances que vous craquiez pour des membres éloignés de votre famille. Cela pourrait vous donner de meilleures chances d’engendrer davantage de rejetons sains et, du coup, ce comportement persiste.

En dépit de cette recherche, si vous en veniez à me dire que votre partenaire n’a aucun trait commun avec votre père ni votre mère, je ne serais pas surprise. La ressemblance avec ses parents ne vient probablement pas en tête de liste des souhaits de quiconque.

Comme beaucoup de gens, vous désirez certainement un partenaire gentil, intelligent et séduisant. Mais, toutes choses étant égales par ailleurs, ce sentiment confortable de familiarité pourrait tout de même suffire à déclencher une relation, ou à maintenir des sentiments de confiance dans la relation.

Sur le web-Article publié sous licence Creative Commons

  1. Senior Lecturer in Psychology, Northumbria University, Newcastle .
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  • je ne sais pas trop… les chercheurs semblent se restreindre à un nombre de caractéristiques de nature physique..

    on parle aussi de parents qui ont élevé les enfants et qui ont eu de bonnes relations avec eux..

    bon..si par exemple vous allez avec un partenaire ayant les m^me yeux que les parents..mais tout à fait différemment par ailleurs..est il « semblable » ..
    ce que je veux dire définir de façon quantitative la proximité physique..
    puis passer à une « proximité  » physique plus caractérielle me semble ardu…

  • Lorsque j’étais gamin on disait vois la mère est tu verras ta copine dans 20 ans. Ainsi donc en regardant le père on se voyait aussi 20 ans plus tard.. Heureusement que ça ne marche pas à tous les coups !

    • pire…
      regarde quoi chez ta mère ou ton père?

      l’article ne définit pas clairement la « similarité  »

      il donne des miettes..toujours physiques d’ailleurs..

      et le nous avons tendance…peut caractériser une corrélation  » fort nébuleuse »..

      je ne sais pas…

      on lit ça car on se pose parfois la question..je sors dubitatif…faut se farcir les études … plus exactement il faudrait…

      premier point donc comment définir la similarité pour ne pas tomber dans le syndrome de l’horoscope..
      il y a de multiples paramètres… pourquoi pas les odeurs corporelles, le timbre de voix, pourquoi pas les traits de caractères? les traits culturels?

      ouais…

      • et tout ça pour en arriver à une conclusion..ah ben oui dis donc..

      • On est seulement a une idée de départ de recherches …. Il faut commencer par quadriller le sujet et définir des protocole pour chaque case.
        L’idée d’une tel étude parait intéressante, comme la généalogie.

        • oui…le « problème » est que souvent, parce que d’ailleurs ça n’a pas vraiment d’intérêt on ne creuse pas plus loin..

  • Mais alors pourquoi moi, qui ne suis pas particulièrement beau ni, soyons honnête, pas particulierement moche, suis-je si attiré par les plus belles femmes du monde ?
    Si celles-ci me sont inaccessibles, est-ce parce qu’au plus profond de moi, je m’assemble avec qui me ressemble, ou est-ce en vertu d’une forme de loi de l’offre et de la demande ?
    Je soumets une théorie : si l’on attribue un point à la jeunesse, un point à la beauté, un point à la richesse ou à l’intelligence, on finira par frayer avec des personnes qui cumulent le même score. Voilà pourquoi on finit souvent avec des personnes qui viennent du même milieu socio-professionnel, qui ont le même âge et les mêmes « qualités » physiques que nous.
    Si, étant vieux et quelconque, on désire frayer avec une belle jeune femme (2 points) on aura intérêt à être riche et intelligent (2 points aussi)…

  • Mon expérience personnelle va à l’opposé, ma femme est asiatique (et je ne le suis pas). Du coup pas vraiment de ressemblance ni physique ni comportementale avec mon beau père, ni l’inverse d’ailleurs.
    Je vois un peu trop souvent en sciences sociales des affirmations vagues ou présupposées. Bref, j’aimerais bien voir l’étude étayée par quelques statistiques, au moins un lien à la fin de l’article…

  • Ouh là, corrigez vite la grosse coquille, Freud, pas « Freund ». Elle n’existe pas dans le texte original d’ailleurs :

    « This isn’t Freud’s Oedipus complex revisited. Freud believed that children have a suppressed desire for their parents. »

  • Une meta étude de 48 recherches à travers de nombreux pays montre que l’optimum génétique est cousin au troisième ou quatrième degré, plus lointain, la fertilité est moindre et les enfants sont plus fragiles, plus proche l’enfant risque d’avoir un gène déficient en double exemplaire.
    https://io9.gizmodo.com/why-inbreeding-really-isnt-as-bad-as-you-think-it-is-5863666

    • ce qui me semble montrer qu’il y a des facteurs plus subtils enjeu..
      j’ai du mal à penser que la couleur des yeux suffisent..

      et je suis curieux de connaitre l’aspect quantitatif du truc… pas sur que ça joue beaucoup en terme de sélection naturelle..

      ce n’est pas un optimum génétique d’ailleurs..

      c’est un optimum se « santé  » des bébés par rapport au niveau de parenté..
      j’accorde un crédit relatif à ce genre d’études..quand il faut des meta analyses…

      • Oeuf ou poule ?
        Historiquement, la mobilité était faible et on se mariait surtout entre villages voisins, donc entre personnes qui avaient des liens de parenté en Europe.
        .
        Les chercheurs ont trouvé qu’en Islande de 1800 à 1825 le nombre d’enfants et de petits enfants était de 4.04 et 9.17 pour les cousins du troisième degré et de 3.34 et 7.31 pour les relations plus lointaines. C’était une différence importante de presque 2 petits enfants et on retrouve les mêmes rapports tout au long du 19ème et 20ème siècle.
        .
        La consanguinité même pour des cousins du premier degré n’est pas si dramatique ; 4% de grossesse interrompue contre 2% dans la population générale et 1,2% d’augmentation de mortalité infantile. (par contre, ça augmente dramatiquement pour des relations plus proches)
        .
        D’autres statistiques en Chine cette fois montrent que les couples internationaux ont des taux de divorce plus élevé.
        Bref, la « diversité » est moins efficace en terme de reproduction, « qui se ressemble s’assemble » a un fond de vérité 🙂

  • Bon,les deux la haut ils sont frère et soeur ou pas,je me méfierais de la fellation avec un appareillage pareil

  • Les commentaires sont fermés.

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