Ces bonnes nouvelles dont on ne parle pas

Le monde va mieux. Comment se fait-il que nous ne tenions pas compte des données empiriques disponibles dans le jugement que nous portons sur l’évolution du monde ?

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Ces bonnes nouvelles dont on ne parle pas

Publié le 1 janvier 2020
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Par Thierry Godefridi.

À la question d’une récente enquête quant à savoir si, tout bien considéré, ils pensaient que le monde allait mieux ou moins bien, ou ni l’un, ni l’autre, ils n’étaient que 10 % des répondants en Suède à estimer que les choses s’amélioraient, 6 % aux États-Unis et 4 % en Allemagne. Peu nombreux sont ceux qui pensent que le monde va mieux.

Pour répondre à la question de savoir si le monde va mieux ou moins bien, il convient d’adopter une perspective historique et de considérer le monde dans sa totalité, de prendre en compte l’évolution des conditions d’existence de l’ensemble des êtres humains qui peuplent la planète. C’est ce qu’a fait Marc Roser dans un article publié par Our World in Data, une publication en ligne basée à l’Université d’Oxford et ayant pour objet les changements du niveau de vie global.

Pauvreté et croissance économique

Un recul de 30 ou 50 ans ne suffit pas à juger de l’évolution du monde. En ce qui concerne la part de la population mondiale vivant dans un état d’extrême pauvreté, par exemple, il convient de remonter deux cents ans en arrière, lorsqu’une vaste majorité de la population du globe vivait encore dans des conditions que l’on qualifierait aujourd’hui d’extrême pauvreté. En 1950, c’était le cas de trois-quarts de la population mondiale ; en 1981, c’était encore 44 %. Aujourd’hui, c’est moins de 10 %. C’est d’autant plus remarquable que, pendant les deux derniers siècles, la population mondiale s’est multipliée par sept.

Le monde n’a jamais été habité par autant d’êtres humains et jamais il n’y en a eu une aussi faible proportion vivant dans un état d’extrême pauvreté. Le moteur de cette évolution réside dans l’augmentation de la productivité humaine et la croissance économique. L’une et l’autre ont permis d’élargir ce qu’il y avait à partager, de passer d’une économie à somme zéro à une économie à somme positive. (dans une économie à somme zéro, le seul moyen d’améliorer sa propre situation est que la situation de quelqu’un d’autre se détériore.)

Meilleure alphabétisation dans le monde

Pendant le même laps de temps, l’alphabétisation a suivi la même progression. En 1820, une personne sur dix pouvait lire et écrire ; en 1930, c’en était une sur trois ; aujourd’hui, nous sommes 85 % et l’analphabétisme est en voie d’éradication car ce sont souvent les couches les plus âgées de la population qui en souffrent encore. En d’autres termes, le nombre de personnes sachant lire et écrire a augmenté de plus de 6 milliards d’individus en 200 ans. Imaginez l’impact de cette évolution sur le plan de la science, de la technologie et des libertés !

Santé

Une évolution semblable s’est ainsi manifestée dans le domaine la santé, sans que la médecine en soit pour autant la seule responsable. En effet, si l’apparition de la théorie microbienne dans la seconde moitié du XIXe siècle y a certes contribué, de meilleures habitations, l’hygiène, l’alimentation, les gains de prospérité qui transformèrent les relations sociales ont aussi concouru à combattre les maladies. En deux siècles, la mortalité infantile est tombée de 43 % à 4,3 % au niveau mondial.

Fertilité

De fait, l’accroissement de la population mondiale va de pair avec une utilisation plus intense des ressources de la planète et un impact sur l’environnement. Cet accroissement de la population résulte toutefois de ce que les taux de fertilité et de mortalité décroissent avec un écart dans le temps. L’espérance de vie a doublé ces cent dernières années alors que cela a pris autant de temps pour passer d’un taux de fertilité de plus de 6 enfants à 3 par femme en Grande-Bretagne.

La transition démographique est désormais engagée au niveau de la planète et, alors que la population mondiale avait quadruplé au XXe siècle, elle ne fera que doubler au XXIe et, selon les prévisions, elle cessera de s’accroître et elle déclinera d’ici la fin du siècle.

L’éducation s’améliore dans le monde entier

Jamais sans doute le monde n’aurait-il connu cette prodigieuse évolution si l’éducation n’avait pas suivi. Or, si les prévisions ci-dessus en matière de fertilité se réalisent, le nombre d’enfants dans le monde a commencé à décliner et ces enfants bénéficieront des infrastructures et programmes en place pour atteindre globalement un niveau d’éducation jamais atteint auparavant.

D’ici la fin du siècle, il n’y aura presque plus d’enfant qui n’ait reçu une éducation formelle et la Terre sera peuplée de plus de sept milliards de cerveaux ayant au moins terminé l’enseignement de niveau secondaire.

Liberté

De par l’impact de l’éducation sur la santé et la prospérité, cet aspect est essentiel. Encore faut-il qu’il puisse se déployer dans un contexte de liberté. Les libertés individuelles et civiques sont au cœur du développement dont elles constituent le moyen et la fin. Au XIXe siècle, plus d’un tiers de la population mondiale était soumis à un régime colonial et pratiquement chaque autre personne vivait dans un régime autocratique.

Un tournant décisif s’est produit dans la seconde moitié du XXe siècle : plus d’une personne sur deux vit aujourd’hui dans un régime démocratique et 80 % de ceux qui vivent encore sous un régime autoritaire – quatre personnes sur cinq – vivent dans un seul pays, le plus peuplé de la planète, la Chine.

Le rôle des médias

Comment se fait-il que nous ne tenions pas compte de ces données empiriques dans le jugement que nous portons sur l’évolution du monde ? Les médias en sont en partie responsables, explique Max Roser de Our World in Data, dans la mesure où ils se cristallisent sur des événements singuliers. De tels événements non seulement ont souvent une connotation négative (attentats terroristes, crashs aériens, cataclysmes, résultats électoraux ne répondant pas aux attentes, faits divers…) mais encore ne reflètent-ils pas comment l’humanité évolue dans sa totalité.

L’obsession des médias pour ce qui marque l’actualité au jour le jour nous laisse dans l’ignorance des tendances profondes de l’évolution du monde, une évolution dans laquelle l’initiative de chacun et la libre interaction du plus grand nombre jouent le rôle déterminant (et non une quelconque élite omnisciente). Que l’on vît dans cet état de fait une conjuration entre les génies qui nous informent et ceux qui nous gouvernent (et subsidient ou censurent les premiers) serait-il donc encore une vaste exagération de leurs compétences ?

Source : A history of global living conditions in 5 charts. Max Roser (2016) OurWorldInData.org.

Article initialement publié en décembre 2017.

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  • En l’occurrence, il y a 6 graphiques et non 5 (mais l’erreur est à la source).

  • La dictature c’est ferme ta gueule, la démocratie c’est cause toujours … vous parlez de liberté? Alors que le moindre de nos faits et gestes sont surveillés, sous prétexte de lutter contre le terrorisme, l’on nous tonds de plus en plus la laine sur le dos , à quand un impôt sur l’espoir ? C’est vrai qu’il ne ferait pas recette très longtemps vue le peut qu’on nous laisse

  • Merci à Thierry Godefridi pour cette remise en perspective positive.

  • Merci pour ces rappels qu’il est nécessaire de faire souvent.
    Deux choses :
    – Hans Rosling et gapminder font le même constat depuis longtemps. Les conferences TEDx de Hans Rosling sont extraordinaires !
    – quand le candidat Fillon mélange habilement seuil de pauvreté et extrême pauvreté, aucun média ne relève l’énormité de la chose. Et il va faire une large part de sa campagne sur cet amalgame mensonger. Ça promet…

  • C’est bon d’avoir un point de vue positif.
    C’est c*** de vouloir occulter à tout prix les côtés négatifs (si si, il en existe encore)

  • Je suis d’accord avec tout ce que vous dites et il y a beaucoup d’autres raisons d’être heureux : par exemple, éradication du choléra, de la lèpre et le cancer du sein, la tuberculose et le sida ont plus de 50% de guérisons. Il y a 18 millions de parcs nationaux sur terre, 12% de la superficie globale, la Chine, l’inde et les Usa font d’immenses efforts pour baisser la production des gaz à effet de serre et les effets de manche de Macron n’y sont pour rien ! Elle est quasi au minimum en Europe et la France est championne du monde grâce aux centrales nucléaires ! La chasse à l’ours blanc est ré-ouverte, il y en trop ! 16 000 écoles ont ouvert en Afghanistan ! L’Arabie Saoudite n’est plus wahabite !
    mais je ne suis pas d’accord avec votre article sur la liberté. La liberté politique n’est pas la liberté. Gagner sa vie, se déplacer, lire ce qu’on veut : ça, c’est de la liberté. les chinois n’ont pas de liberté politique mais ils s’en foutent !
    Et encore une fois, le colonialisme a été une excellente chose pour l’Afrique comme pour l’Asie. la décolonisation a, elle été faite en dépit du bon sens !

  • Cependant reste à démontrer que les humains sont plus heureux, or là j’en doute quand on observe la vente de médicaments pour lutter contre le stress de la vie moderne. Donc ok il y a de bonnes nouvelles, mais elles ne suffisent pas pour prédire un avenir optimiste de l’humanité sûr et certain.

  • on a du mal à notre échelle à apprécier ce qui est bon, on se repaît d’avantage de ce qui trouble, qui est négatif et qui choque, l’homme est ainsi fait, alors d’un point de vue global, il se passe la même chose, hélas ! Alimenté bien entendu par les médias. Comment dans ces conditions reconnaître que le monde va mieux ?

  • Ceci met bien en exergue l’infinie imbécillité humaine dont parlait Einstein. Presque la quasi totalité des occidentaux est persuadé que notre alimentation nous empoisonne (merci aux écolos). D’où la folie du bio actuelle, qui n’est absolument pas bio d’ailleurs. Donc nous sommes empoisonnés tous les jours par notre consommation, mais nous n’avons jamais vécus aussi vieux en bonne santé? De même pour le niveau de vie. Bien sûr il y a plus de chômage, mais c’est uniquement dû aux politiciens qui sabotent l’économie à des fins électoralistes pour acheter les votes des électeurs, comme cela se faisait dans la Rome républicaine antique! La plupart des maladies sont guérissables grâce aux extraordinaires progrès de la médecine. Le cancer est éradiqué dans nombre de cas: 80% du sein, de la prostate, de la thyroïde, de l’utérus. Entre 20 et 60% pour la plupart des autres.
    Par contre comme ils se foutent complètement des pays du Tiers-monde, ils ignorent que le développement économique en route depuis le discrédit du communisme, et donc du socialisme, a sorti des milliards de gens de la misère. Pourtant ils voient sur leur téléviseurs les spectacles des villes ultramodernes de Chine, d’Asie, du Moyen-Orient. Même l’Inde, la plus misérable, a éradiqué les famines grâce à l’agriculture intensive, tant décriée par les occidentaux, et affiche un taux de croissance de 8% par an.
    Le problème reste donc la bêtise et l’ignorance d’une population qui en est plus affectée dans les couches les plus instruites, celle des bobos! Alors qu’ils devraient être conscients de ce qui se passe dans le monde et chez eux.

    • Et bien moi je ne pense pas que les humais soient d’une infinie imbécilité. Au contraire je pense que l’ensemble humain est une petite merveille de subtilité. C’est étonnant d’ailleurs que pour un libéral très militant cela vous ai échappé. Ce qui compte par dessus tout c’est la diversité, l’arme absolue de la nature. La diversité c’est l’efficacité pas necéssairement dans l’instant mais sur la durée. La diversité n’est rien d’autres que l’expression de possibilités dont l’une ou l’autre trouveront une issue favorable.

      En pratique ces possibilités peuvent s’opposer et sont toujours plus ou moins en concurrence. On retrouve ce processus également dans les cerveaux humains. Tout le monde ne pense pas et n’agit pas de la même manière. Notre caractère te nos convictions sont mêmes assez rigides. Eintein, puisque vous le citez, disait qu’il était plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé. Pour un caractère précis ou une idée par exemple, on obtient pour l’ensemble des humains, une courbe en forme de cloche avec les extrêmes sous représentés et le centre synonyme de modération sur représenté. Les extrêmes sont les militants pourrait-on dire, ceux qui provoquent le mouvement et le centre est le corps qui donne de la force au mouvement.

      Du point de vue de la nature ce qui est important, le chemin de l’humanité n’étant pas tracé à l’avance, c’est justement de ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier. La diversité est un rempart à l’impasse. Alors cela peut paraître curieux mais de ce point de vue je suis rassuré que tout le monde ne pense pas comme moi et tant pis si on avance moins vite en apparence. Après tout rebrousser chemin fait perdre plus temps que prendre une route sinueuse. En outre la patience est une vertu de l’intelligence.

  • Il y a plusieurs points… les diagrammes sont vrais..mais ils ne veulent pas dire que le monde va mieux…
    Une vraie question serait de savoir comment diable déterminer si le monde va mieux…

    Pourquoi les gens sont malheureux dans pays riches… Pourquoi des gens qui ont tout pour être heureux comme on dit sont malheureux?

    • Sur le plan technique (économique, santé, alimentation..) c’est facile et objectif de démontrer que le monde va mieux.
      Sur un plan psychologique cela n’a pas vraiment de sens. Outre la part liée au bien-être matériel, le bonheur est un sentiment circonstanciel qui dépendra de l’environnement social dans lequel on évolue. Par exemple, dans mon petit village je peux me sentir heureux parce que je suis quelqu’un alors que dans une grande ville je me sentirai malheureux car trop anonyme.

  • Merci pour ce rappel : comme la perception du bien-être n’est que le regard que l’on porte sur les choses, le matraquage continu des mauvaises nouvelles, jamais compensé par le rappel des bonnes, nous fait voir notre exceptionnellement bonne situation comme au mieux grise, si pas noire.

    • Heureusement pour les trop nombreux parasites (politicards professionnels, étatiste de tous poils de gauche ou de droite, verts marchands de catastrophes imaginaires et autres…) que peu de gens s’aperçoivent des progrés réels au niveau global, il faudrait créer un pôle emploi spécial crapules

  • Vu de nos pays, le monde qui va mieux est surtout celui des autres. Et comme leur argent n’est pas disponible pour nos politiques…

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