Démanteler les GAFA, le nouveau fantasme à la mode

Que la législation se borne à être neutre, la concurrence fera le reste.

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Démanteler les GAFA, le nouveau fantasme à la mode

Publié le 5 avril 2019
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Par Ferghane Azihari.
Un article de l’Iref-Europe

Il faut démanteler les GAFA !

L’injonction résonne aussi bien en Europe que de l’autre côté de l’Atlantique. Aux États-Unis, le combat est porté par des politiciens qui surfent sur les sentiments anticapitalistes, comme la sénatrice Elisabeth Warren. Celle-ci a récemment appelé à briser les figures emblématiques du secteur des nouvelles technologies de l’information et des communications (NTIC).

En France, le candidat malheureux aux élections présidentielles Benoît Hamon appelle à « démanteler les GAFA » pour tenter de revenir sous les projecteurs. Il peut compter sur le soutien du Parti communiste en surfant sur les ressentiments anticapitalistes et protectionnistes que certains intellectuels et entrepreneurs se plaisent à entretenir à l’encontre de ces firmes emblématiques.

Cette proposition de démantèlement hostile à la liberté du commerce et de l’industrie est-elle cependant crédible et souhaitable pour le consommateur ?

 

La peur des monopoles : petite rétrospective

La peur de voir des entreprises et des cartels obtenir une position incontestable colonise l’imaginaire collectif depuis la naissance des révolutions industrielles. Elle inspire les politiques antitrust mises en œuvre dans la plupart des pays développés.

 

Le cas fondateur : Standard Oil

Le grand précédent généralement invoqué est celui de l’entreprise Standard Oil. Elle inaugure malgré elle la stricte application du Sherman Antitrust Act. En 1910, la justice ordonne le démantèlement de l’entreprise au motif qu’elle menace l’équilibre concurrentiel de l’économie américaine. Cependant, certains historiens de l’économie ont relevé que ses parts de marché étaient déclinantes bien avant que la décision du démantèlement ne soit prise.

Dans son ouvrage intitulé The Prize : The Epic Quest for Oil, Money, and Power, l’historien Daniel Yergin écrit ainsi :

« En termes de parts de marché totales pour les produits pétroliers aux États-Unis, la position de domination absolue de Standard Oil était en recul. Son contrôle sur les capacités de raffinage est passé de 90 % en 1880 à seulement 60-65 % en 1911. »

L’historien explique cette évolution par le développement de nouveaux champs pétroliers au niveau de la Côte du Golfe.

 

IBM

Peu de gens s’en souviennent, mais il fut un temps où la compagnie IBM dominait le secteur de l’informatique. En 1969, le département américain de la Justice ouvre une enquête au motif que cette domination violerait la législation antitrust. À ce moment là, IBM occupait environ 70 % du marché de l’informatique.

Le département de la Justice a abandonné son enquête au bout de 13 ans, jugeant que la menace d’un monopole n’était plus crédible. Entre temps, il y avait eu de nouveaux entrants. IBM ne détenait plus que 62 % des parts de marché. Aujourd’hui, si IBM est toujours une entreprise connue sur le marché de l’informatique, plus personne ne parle d’elle comme d’un monopole.

 

Le cas emblématique des systèmes d’exploitation et des navigateurs web

Il fut un temps où toutes les autorités antitrust s’en prenaient à Microsoft.

La firme de Bill Gates était accusée de s’adonner à des abus de position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation et des applications qui dépendent de ces systèmes. Les inquiétudes relatives à la domination du navigateur web Internet Explorer s’inscrivaient dans la conviction que les forces du marché ne pourraient jamais déloger une firme opérant sur une industrie où le poids des effets de réseau est considérable.

Pourtant, comme le rappelle une note de l’Institut économique Molinari, les régulateurs ont sous-estimé la pression concurrentielle existante sur ce marché. Plus précisément, ils ont négligé la possibilité de concurrencer les ordinateurs de bureau en tant que principal support informatique. En l’espèce, c’est l’arrivée des smartphones qui a permis de rebattre les cartes sur le marché des systèmes d’exploitation et des applications web comme les navigateurs, ainsi que le montrent les Tableaux 1 et 2.

Tableau 1 : Évolution en % des parts de marché des systèmes d’exploitation entre 2009 et 2019
Tableau 2 : Évolution en % des parts de marché des navigateurs web

Myspace

En 2007, dans un article publié sur le site du Guardian, un journaliste se demandait si le réseau social MySpace allait un jour perdre son monopole.

C’était l’un des sites les plus populaires au début des années 2000. Il était tellement populaire que NewsCorp, l’entreprise de Rupert Murdoch, l’avait acquis en 2005 en déboursant 580 millions de dollars. Pourtant, six années plus tard, NewsCorp a vendu le réseau social pour 35 millions de dollars, soit un prix 16 fois inférieur à son coût d’acquisition. Rupert Murdoch n’avait pas anticipé la concurrence d’autres réseaux sociaux comme Facebook.

 

Nokia

Toujours en 2007, Forbes faisait sa Une sur l’entreprise Nokia, laquelle comptait un milliard de clients sur le marché de la téléphonie mobile. Forbes se demandait si quelqu’un serait un jour capable de défier la firme finlandaise. Six années plus tard, un article de la BBC constatait déjà la fin de l’ère Nokia.

 

Les GAFA bénéficient-ils d’un monopole ?

La crainte des monopoles privés se fonde sur la confusion régulièrement entretenue entre les parts de marché et le pouvoir de marché.

L’expérience historique et les exemples précédemment cités suggèrent pourtant que l’acquisition d’une position dominante dans un secteur particulier ne signifie pas que l’acteur dominant n’est soumis à aucune pression concurrentielle qui l’oblige à rester compétitif sous peine d’être détrôné. Le secteur des NTIC a montré à quel point il pouvait être versatile.

Prenons l’exemple de Facebook. En 2017, cette entreprise de régie publicitaire détenait 7,5 % des parts de marché pour l’industrie de la publicité à l’échelle mondiale et 19,7 % des parts de marché pour la publicité en ligne.

Mais sa capacité à rester incontournable sur le marché de la publicité dépend de son attractivité sur le marché des services de messagerie et de communication. Or ce ne sont pas les concurrents qui manquent. Dernièrement, Facebook a connu une panne de quelques heures. Cette panne a favorisé l’un de ses concurrents, Telegram, qui a gagné plusieurs millions d’utilisateurs en quelques temps.

Autre phénomène intéressant à souligner : de nombreuses analyses mettent en avant le fait que le réseau social est en perte de vitesse chez les jeunes. Tous ces indicateurs montrent que même les géants des nouvelles technologies ne sont pas affranchis de l’impitoyable loi du marché.

 

Big is beautiful

Être une grande firme ne signifie pas être invincible.

En ce sens, le démantèlement des grandes entreprises du numérique n’est pas nécessaire pour soumettre ces dernières à une intense pression concurrentielle. Ce démantèlement est d’autant plus indésirable que la taille de ces firmes permet aux utilisateurs de bénéficier des avantages des effets de réseau. En effet, l’une des raisons pour lesquelles Facebook est populaire tient à sa vaste communauté.

Le régulateur qui fragmenterait ce réseau social en de multiples communautés déconnectées les unes des autres porterait donc atteinte à la qualité du produit plébiscité par les consommateurs en nuisant à leur bien-être. Dans le secteur numérique comme ailleurs, le rôle du législateur consiste à démanteler toutes les entraves législatives et réglementaires à la liberté du commerce et de l’industrie. Que la législation se borne à être neutre, la concurrence fera le reste.

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