Gilets jaunes, grand débat : et maintenant, on fait quoi ?

Il leur faudra être courageux. Une seule réforme est indispensable : celle de l’État – pas celle des Français.

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Gilets jaunes, grand débat : et maintenant, on fait quoi ?

Publié le 19 janvier 2019
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Par Erwan Le Noan.
Un article de Trop Libre

Bruno Le Maire, reprenant le message du gouvernement, l’assure : « Le grand débat est le meilleur moyen de réconcilier les Français ». L’affirmation peut sembler optimiste : l’exercice n’est pas commencé, mais il est déjà prévu de le circonscrire, certains s’inquiétant qu’il ne « dérive » (on ne mesure pas assez les « risques » de débattre en démocratie…).

Les Gilets jaunes sont révélateurs d’une crise profonde et structurelle : la défiance vis-à-vis du politique n’est pas neuve ; la violence en marge des manifestations ne date pas de l’automne ; la dénonciation des journalistes a grandi depuis des années ; le complotisme et l’antisémitisme gangrènent une partie de la société depuis longtemps. Mais jusqu’à maintenant, l’élite en restait préservée, car ignorante.

Le malaise germait depuis longtemps : les milieux populaires ne s’imaginent plus d’avenir, les classes moyennes craignent leur déclassement, les bourgeois sont étranglés d’impôts que les plus riches fuient en quittant le pays. L’effondrement de l’État-providence, incapable de se réformer et d’inventer une nouvelle forme d’accompagnement social, a laissé les citoyens seuls face à leurs difficultés et leurs angoisses. Une étude récente vient de montrer que cette asphyxie de la société n’est pas pour rien dans le succès du populisme : selon les auteurs, « les individus qui appartiennent à des associations sont moins susceptibles de voter pour des partis populistes. Alexis de Tocqueville avait raison (…) : la société civile est une défense essentielle de la démocratie libérale1 ».

Depuis l’automne, la situation politique et sociale française se dégrade de façon accélérée. Le gouvernement est l’héritier de ce délitement ; mais il l’a aussi précipité par ses maladresses et le déficit d’empathie – bref, le défaut de politique. En réaction, l’alliance redoutable des forces rouges et brunes se dessine. Alors maintenant, on fait quoi ?

D’abord, les démocrates doivent rester fermes : le gouvernement est seul légitime à gouverner. C’est l’élection qui installe le pouvoir – pas les rêves des mauvais perdants, fussent-ils populistes. L’état de droit doit être préservé et l’ordre enfin rétabli.

Conclusion électorale

Ensuite, les réformateurs doivent s’allier. Le grand débat est une mince opportunité, mais il pourrait en ouvrir la voie. Il aura une dimension cathartique évidente ; mais il pourrait aussi constituer une occasion de faire des choix transpartisans, en conduisant les Français à se prononcer sur quelques grands arbitrages politiques. En ce sens, il doit se conclure sur une échéance politique, probablement électorale, que le gouvernement doit définir – sans quoi il ne sera qu’un vaste artifice frustrant.

Dans l’histoire récente, les grandes réformes ont été engagées par des gouvernements bénéficiant de mandats clairs, pour des programmes validés par les électeurs lors d’un vote2. Ce n’est pas le cas de l’exécutif : il n’y arrivera donc pas seul. Il est temps que les partis travaillent ensemble à relever la France plutôt que leurs ambitions.

Il leur faudra être courageux. Une seule réforme est indispensable : celle de l’État – pas celle des Français. Le défi est immense : empêcher la majorité des citoyens de sombrer dans la lassitude démocratique. Pour cela, il n’y a qu’une solution : leur proposer une offre politique attractive.

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  • Je reçois beaucoup de messages du monde entier et je suis surpris de voir comme la classe politique est méprisée et même haïe… partout !
    Et bien entendu, elle ne mérite pas cela ?
    Je crois que Facebook, essentiellement, empêche les gens de voir les choses et les événements avec recul et analyse ? C’est la porte ouverte pour toutes les démagogies, tous les populismes, toutes les fake news…
    Il faut d’urgence donner aux élèves des écoles un minimum de connaissances économiques et politiques.
    Et en ce qui me concerne, je pense qu’il faut punir (je ne sais comment ?) tous ceux qui publient des posts ou commentaires haineux ou appels au crime. Je suis même partisan d’interdire les « groupes » dans Facebook voir Facebook tout entier !
    Facebook ne doit plus devenir le point de ralliement et de rendez vous des fauteurs de troubles.
    De toutes façons, cette anarchie se finira de 2 manières possibles :
    soit le bordel généralisé, soit des mesures dictatoriales ?

    • Interdire, interdire, interdire..

    • Le mérite de la classe politique se mesure à ses résultats. Quels résultats probants pouvez-vous mettre en avant, en France, pour rejeter le mépris populaire ?
      La seule solution pour cette classe politique est de se retirer de tout un tas de secteurs où son intervention n’est ni justifiée, ni fructueuse. Il est devenu bien plus important, bien qu’elle ne veuille pas l’admettre, pour elle si elle veut survivre de pouvoir dire « je n’y suis pour rien » dans les 99% des cas où ça se passe mal que de pouvoir clamer « c’est grâce à moi, c’est grâce à moi » dans le 1% où ça se passe bien.

      • « Le mérite de la classe politique se mesure à ses résultats. »

        Voire …
        Il y en a qui gagnent par chance et d’autres qui perdent en dépit du courage et de la compétence.

        Le mérite c’est de prendre des risques raisonnables et de ne pas reculer devant les menaces.
        C’est un concept périmé.

        • Pour un individu, ok, je vous suis. Mais pour un ensemble comme la classe politique, les mauvais résultats ne peuvent pas être dus au hasard, ni les bons d’ailleurs. Prendre des risques raisonnables, ne pas reculer, oui, mais surtout avoir le discernement pour savoir quels risques tenter et quels risques éviter.

    • Je ne connais pas Facebook mais je sais -d’après ce qu’on m’en dit- que c’est un vecteur d’ expressions violentes et haineuses. Mais faut-il pour cela l’interdire ? La haine pourrait alors s’exprimer autrement, par des passages à l’acte, des défoulements, des débordements incontrôlés et incontrôlables… Bref, je me dis qu’il vaut peut-être mieux laisser dire, laisser la violence et la haine s’exprimer de cette manière (par facebook) plutôt que de la contenir par des interdictions qui n’empêcheront pas grand chose au final.

    • Mr. Milrem,
      Je comprends difficilement en quoi la remise en cause d’un droit fondamental qui est la liberté d’expression puisse apporter quelque chose de positif à la situation actuelle. Mais bon, peut être que de ne pas voir et entendre aide à avoir un sentiment que tout va bien.
      Ils ont dans les écoles un éducation économique et politique. Le partage, l’économie circulaire à but non lucratif et autres amusements.

    • « un minimum de connaissances économiques et politiques. »

      Qu’on commence par le commencement: savoir lire, écrire et compter; il y a fort à faire.

      • d’autant que les mêmes connaissances peuvent conduire à des résultats différents.
        oui au savoir de base mais aussi et surtout lié au sens pratique comme si apprenais dans la rue.

    • C’est vrai qu’avant Facebook il n’y avait jamais de révolutions, ni jacqueries et soulèvements. Depuis qu’Adam&Eve avaient quitté le Paradis pour notre pays de Bisounours, point de différents entre nous, tous chèvres. Hélas Facebook est arrivé avec sa face de sale bouc toujours prêt à ruer dans nos rues et culbuter les chèvres.

    • @Milrem,
      Malheureusement pour vous, vous n’êtes pas né dans le bon pays.
      Si vous aviez vu le jour en Corée du nord vous auriez été le plus heureux des hommes !

      • Et encore, les perspectives d’ouverture en Corée du nord devraient l’inquiéter. C’est peut-être pour ça qu’il préfère celles de fermeture en France…

    • Je vous ai compris… héhé…
      Je ne suis sur face de bouc, cet animal diabolique…
      Personne ne m’y force 🙂 Je suis libre 🙂 Je laisse les autres libres 😉

  •  » le grand débat est le meilleur moyen de réconcilier les Français « …..avec les politiques aurait il dut ajouter ; parce que c’est bien contre les élites que les Français se révoltent , cette élite qui cherchent à diviser pour mieux régner et qui se cachent face à la révolte des citoyens ; allons , monsieur le maire , ayez au moins le courage de reconnaître que votre politique et votre comportement n’est pas étranger à cette colère et que la France se porterai beaucoup mieux sans vos parlottes et votre nullité ;

  • « les individus qui appartiennent à des associations sont moins susceptibles de voter pour des partis populistes. Alexis de Tocqueville avait raison (…) : la société civile est une défense essentielle de la démocratie libérale »
    Oui oui Tocqueville a raison ! Il se peut aussi que les gens les moins disposés à appartenir à une assos sont également les plus enclins à voter les partis populistes. Le nombre d’association est d’ailleurs relativement stable.

    • Le qualificatif de « populiste » ne devrait pas être la question. Seul devrait compter de savoir si les gens sont disposés à voter pour un parti qui propose des solutions. Or comme il n’y en a aucun, on se focalise sur savoir s’ils sont populistes ou non, mais c’est plutôt stérile.

  • Une intervention significative de la conception du débat par M. Macron

    (Même si on ne partage pas les options de ce maire)
    C’est un autocrate qui a été élu en 2017. Non pas vraiment élu, mais promu par une oligarchie internationaliste pour faire avancer le projet fédéral européen voulu par Washington et Berlin. Mais cette question-la n’a pas été posée…
    Et la manière dont s’est déroulée l’élection fait peser un soupçon d’illégitimité sur le gouvernement de la France.
    Le retour aux urnes sera indispensable.

    • « promu par une oligarchie internationaliste »
      Ce genre de vocabulaire ne peut qu’éloigner durablement toute solution à nos problèmes. Commençons par nous contenter de remarquer que Macron est, ce que nul ne conteste, un énarque, et que cela suffit à caractériser et expliquer ses erreurs et nos ennuis.

    • Mr La petite Bete,

      Cela est toujours un amusement de voir ce genre de commentaire en mentant en avant la grande théorie du complot Américain et Allemand.
      Je me garderais bien de vous un procès d’intention mais de mémoire cette question a été pose et discute entre l’Allemagne et la France et refuse par la France. De mémoire Mitterrand /Kohl.
      Cote Américain, parfois une bonne lecture de la constitution Américaine aiderait à voir/réaliser/découvrir que let Etats américains ont bien plus de pouvoir que les états européens.
      https://en.wikipedia.org/wiki/United_States_Constitution
      Le plus drôle est que le fonctionnent de la Fédération US induit des transferts massifs de richesses des états les plus riches vers les plus pauvres, ce que l`Allemagne et les pays du nord refuse totalement. Donc avec tout le respect, on pourrait voir une forme d` ironie dans votre commentaire.
      Sur l`aspect géopolitique, je pense que les que les US s`accommode très bien de la situation actuelle en Europe. Si , sur un malentendu, L` Europe adoptait une constitution de type US , cela serais un bien grand danger pour la suprématie US .

      • Vous avez raison certainement dans les grandes lignes, toutefois il y a quelques paramètres que vous omettez dans votre analyse.
        D’abord, il serait erroné d’assimiler Washington à Trump, il n’y a qu’à voir le mal de chien que le POTUS peut avoir à implémenter le programme sur lequel il a été élu. La manière de « la petite bête » d’exprimer son avis sur la situation est certainement maladroite, mais il n’est nullement besoin d’être grand clerc pour comprendre qu’il y a des intérêts, autres que ceux qui s’expriment au grand jour et de manière officielle, et qui ont une influence non négligeable sur des évènements d’importance et même sur des tendances de plus long terme.

        Une deuxième erreur est celle de comparer les Etats Unis d’Amérique aux Etats Unis d’Europe (pardon, à l’UE). Le cadre historique dans lequel les deux se sont constituées n’est en aucun point similaire. Les bases même des deux structures sont en fait carrément à l’opposé.
        Les USA se sont construits dans l’adversité au pouvoir colonial, dans le but de préserver les intérêts fondamentaux des partenaires, avec une définition claire des normes communes et des principes de subsidiarité qui n’ont pratiquement pas bougé depuis plus de deux siècles.
        L’UE, par contre, est partie sur des bases très modestes (la CECA), où on essayait de traiter un problème tout particulier sans se préoccuper d’une quelconque convergence ou d’une mise en commun des ressources vitales, comme la défense et la diplomatie. Ce qui n’a jamais changé, vu que l’OTAN n’a strictement aucun rapport avec l’UE. Par contre, le TCE a été jeté à la poubelle lorsqu’il a été proposé. Tandis que les normes communes n’ont eu de cesse de bouger, au point que plus personne ne doit avoir une vue d’ensemble.
        On ne peut pas s’étonner des différences de résultats si on regarde les différences existantes à la base.

        Quant au « danger » pour les USA, je crois qu’ils devraient être bien plus inquiets des évolutions du côté de la Chine, voire de la Russie, que de celles d’une société somme toute assez compatible avec la leur.

  • Non il n’y a qu’une seule solution le référendum initiative citoyenne pour laisser enfin aux gens la possibilité de choisir les grandes orientations de l’État et de la société

  • « Il est temps que les partis travaillent ensemble à relever la France plutôt que leurs ambitions. »

    Non, il « eût été » temps que les partis travaillent ensemble à relever la France plutôt que leurs ambitions !

    Dans les conditions actuelles une alliance des partis correspondrait à une alliance contre le peuple qui les rejettent.

    • En outre, je ne comprends pas : LREM n’était pas déjà sensé rassembler les partis pour relever la France ?

      Si LREM a gaspillé ses forces et NOS ressources pour satisfaires des lobbies écolo ou de sécurité routière, est-il raisonnable d’appeler à un rassemblement autour des rassembleurs corrompus ?

  • Lamentable de voir tous ces maires pleurnicher devant le Président ,eux qui ont été des grands dépensiers de l’argent public avec force ronds- points,salles des fêtes et autres structures toutes plus dispendieuses les unes que les autres pour flatter leur ego,l’emploi des copains ou de la famille, sans parler du clientélisme et de l’électoralisme les 2 mamelles de l’élection à la française!Mesdames Messieurs les pleurnichards comment font vos homologues allemands?il n’y a pas de taxe d’habitation en Allemagne et le foncier est beaucoup plus bas!Tous en stage en Allemagne les pleureuses!

    • Je suis sûr qu’ils sont d’accord, si vous leur payez trois ans d’apprentissage de la langue de Goethe, et un séjour d’une Oktoberfest à la suivante, incluses.

    • tout cela n’est que du sketch pour éviter à nos élus de se mettre au travail intelligemment !

  • Une seule réforme est indispensable : celle de l’État – pas celle des Français.

    Les Français ont subi une pluie de taxes, ce n’est pas fini, et une pluie de durcissements de normes techniques.
    Il est plus que temps d’y mettre fin.

    Il est temps que les partis travaillent ensemble à relever la France plutôt que leurs ambitions.

    Finies les belles envolées lyriques du président… Il est temps qu’il prenne racine. Et aux partis de revenir eux aussi à la réalité.

    Si ce n’est pas le cas, ils ne seront que des obstacles à dégager par tous les moyens.

  • « le complotisme et l’antisémitisme gangrènent une partie de la société depuis longtemps »

    Quel complotisme? Celui qui voit des agents de l’étranger partout dans les protestations? Celui qui fiche les twittos? Celui qui pense que le Président Trump travaille en douce pour Poutine?

    Ce complotisme porté par les médias dominants compte pour du beurre?

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