Airbnb : ce que la nouvelle réglementation prévoit pour les locations saisonnières

La réglementation en vigueur concernant Airbnb est, comme toujours en France,  complexe et souvent méconnue des propriétaires.

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Airbnb : ce que la nouvelle réglementation prévoit pour les locations saisonnières

Publié le 14 avril 2018
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Par Thibaut Doidy de Kerguelen.

Accusée de tous les maux et surtout de permettre aux propriétaires de gagner de l’argent, la location saisonnière est dans le collimateur des pouvoirs publics après une décennie complète de liberté et d’explosion des plateformes de type Airbnb.

Comme toujours en France, la réglementation en vigueur est complexe et souvent méconnue des propriétaires. Suivant votre localisation géographique, la nature du logement et de la durée de la location, la loi impose des règles différentes.

Désormais, comme il sied dans un État socialiste, les risques encourus à ne pas respecter la réglementation sont bien réels, les contrevenants s’exposant à de lourdes amendes.

 

Un aperçu global des cas de location saisonnière Airbnb

Voici un tableau qui résume dans les grandes lignes les quatre cas principaux de location saisonnière Airbnb.

Ville de +200 000 habitants Ville de -200 000 habitants
Résidence principale Location libre dans la limite de 120 jours
Numéro d’identification nécessaire dans certaines villes
Location libre dans la limite de 120 jours
Pas de formalités
Résidence secondaire Déclaration obligatoire en mairie
Changement d’usage nécessaire dans certaines communes
Compensation de surfaces obligatoire à Paris
Numéro d’identification nécessaire dans certaines villes
Déclaration obligatoire en mairie
Changement d’usage nécessaire dans certaines communes

Location saisonnière d’une résidence principale

Mettons nous d’accord sur la notion de résidence principale

La loi ALUR de 2014 définit la résidence principale de manière différente de la loi fiscale :

« La résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du Code de la construction et de l’habitation »

La domiciliation fiscale n’a donc rien à voir. Si vous habitez 7 mois de l’année dans votre logement qui est votre résidence principale du point de vue fiscal, ce logement ne le sera pas au regard de la réglementation sur la location saisonnière…. (quand on vous disait que ce n’était pas simple…)

Louer sa résidence principale en location saisonnière

En tenant compte de la définition ci-dessus, un particulier peut louer sa résidence principale dans la limite de 120 jours par an (soit 4 mois par an ou 10 jours par mois en moyenne) à une clientèle de passage sans faire de demande d’autorisation et sans en changer l’affectation quelle que soit la commune où se trouve son logement.

La limite des 120 jours est donc cruciale. Pour pouvoir bien vous contrôler, le législateur a introduit récemment une disposition permettant aux communes de demander l’enregistrement des propriétaires souhaitant louer en saisonnier avec l’attribution d’un numéro d’enregistrement facilitant les contrôles.

C’est là qu’intervient le décret « Airbnb » sur la location saisonnière

La loi pour une République numérique, publiée en octobre 2016, et qui modifie certaines dispositions de la loi Alur et du Code du tourisme permet aux mairies de certaines communes (celles de plus de 200 000 habitants, pour l’essentiel), de mettre en place une procédure d’enregistrement ou de déclaration pour toute personne proposant un ou plusieurs logements à la location de courte durée situé(s) sur le territoire de cette commune.

Le numéro de déclaration ainsi obtenu par chaque hôte concerné devra figurer sur les annonces mise en ligne.

Le point important à noter concernant ce décret et qu’il est potentiellement activable par les communes de plus de 200 000 habitants mais aussi pour les communes des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que celles faisant partie d’une agglomération de plus de 50 000 habitants.

Le décret Airbnb peut donc par exemple être utilisé par les communes de Grenoble ou de Saint-Malo faisant partie d’agglomérations de plus de 50 000 habitants.

Par la suite, en avril 2017, est paru le décret d’application, appelé aussi décret AIRBNB, qui détaille les modalités d’enregistrement et de récupération du numéro (informations requises, possibilité d’utiliser l’avis de taxe d’habitation, numéro d’identification à 13 chiffres).

Pour savoir si votre commune est concernée, il n’y a qu’un moyen : appeler le service de l’urbanisme ou du tourisme. En effet, puisqu’il ne s’agit pas d’une obligation, les villes de moins de 200 000 habitants doivent prendre une délibération du conseil municipal.

 

Location saisonnière d’une résidence secondaire

Mais qu’est ce donc qu’une résidence secondaire ?

Si nous reprenons l’article 2 de la loi de 89 qui nous a permis de définir la résidence principale, un logement vous appartenant et que vous occupez moins de 8 mois par an peut légitimement être considéré comme une résidence secondaire au regard de la loi Alur.

Ça tombe bien car cette loi ne définit pas précisément la résidence secondaire.

 

Si vous louez en location saisonnière 120 jours par an…

Nous pouvons légitimement considérer qu’un logement loué plus de 120 jours est votre résidence secondaire dans le cadre de la réglementation de location saisonnière (par opposition à la résidence principale ), même si cette notion n’est définie nulle part dans les textes et qu’elle peut en réalité correspondre à votre résidence principale fiscale que vous louez entre 6 et 8 mois par an (qui a dit que la devise de l’ENA était « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué » ?) .

Vos obligations

L’article L321-1-1 que nous avons déjà évoqué vous oblige à déclarer en mairie votre location saisonnière qui n’est pas votre résidence principale quelle que soit la commune dans laquelle vous êtes :

« Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non au sens du présent code, doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé. Cette déclaration préalable n’est pas obligatoire lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »

Pour faire votre déclaration de location saisonnière…

Choc de simplification ! Dans les communes ayant mis en place le numéro d’enregistrement prévu via le décret Airbnb, la déclaration n’est pas nécessaire, l’enregistrement suffit.

Pour les autres communes, un formulaire de déclaration du meublé de tourisme doit être rempli et adressé au maire. Ce formulaire peut-être récupéré et complété à la mairie, ou bien directement en ligne, via le portail Service-public.fr : Formulaire CERFA N° 14004*02

Attention !

Si le meublé n’est pas déclaré, le propriétaire est passible d’une amende de 450 euros.

Qu’en est-il du changement d’usage qui a fait couler tant d’encre…

Si votre logement est dans une commune :

  • de plus de 200 000 habitants (Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Strasbourg, Montpellier, Bordeaux, Lille, Rennes),
  • de la petite couronne parisienne (départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne),
  • ainsi que les communes de plus de 50 000 habitants comportant des zones dites “tendues” (fort déséquilibre entre l’offre et la demande de logements). La liste de ces villes est fixée par un décret du 10 mai 2013 (voir la liste)

 

Après la déclaration, vous devez de surcroît demander une autorisation de la mairie pour un changement d’usage de votre bien pour transformer ce local d’habitation en local dédié à la location saisonnière…. (Vous ne croyez tout de même pas que vous pouvez faire ce que vous voulez de votre propriété, non ? )

La mairie peut décider ou non de vous accorder ce changement d’usage. Cette autorisation est temporaire et délivrée par les mairies qui en fixent la durée (par exemple elle est de deux ans à Nice). Aussi lorsque l’autorisation temporaire arrive à expiration il faut en demander une nouvelle pour continuer son activité. Dans le cas contraire, le logement retrouve son usage d’habitation classique.

On parle de changement d’usage car en louant à une clientèle de passage vous retirez de facto un logement dédié à la location traditionnelle des habitants d’une ville. Il s’agit dès lors d’une activité professionnelle et non de logement à proprement parlé.

 

Attention !

Vérifiez que votre règlement de copropriété autorise le meublé touristique ! En effet, un règlement de copropriété peut ne pas tolérer la présence d’un tel meublé de tourisme dans l’immeuble.

Sachez néanmoins qu’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 8 juin 2011 indique que si la copropriété accepte l’exercice d’une profession libérale (cabinet médical…), elle ne peut pas interdire la location meublée de courte durée car les deux activités provoquent « des inconvénients similaires » et sont de même nature « professionnelle ».

 

Paris est un cas particulier

Paris est à l’origine de tout ce fatras juridico administratif. Le maire socialiste et surtout son adjoint communiste à l’urbanisme sont particulièrement attentifs à ce que vous ne puissiez pas tirer profit de votre investissement parisien.

Comment obtenir un numéro d’enregistrement à Paris ?

Le numéro d’enregistrement doit être demandé sur le site de la mairie à la page suivante quel que soit le statut de votre location touristique (inférieur à 120 jours sans changement d’usage ou supérieur à 120 jours avec changement d’usage).

Ce numéro est constitué de treize caractères répartis en trois groupes séparés ainsi composés :

  1. Le code officiel géographique de la commune de localisation à cinq chiffres
  2. Un identifiant unique à six chiffres, déterminé par la commune
  3. Une clé de contrôle à deux caractères alphanumériques, déterminée par la commune

 

Souvenez-vous bien que cet enregistrement va permettre à la mairie de vérifier que ces logements ne sont pas loués plus de 120 jours par an.

Les contrevenants ne s’enregistrant pas s’exposent à une amende de troisième classe (soit 450 euros). Les plateformes de location de type Airbnb se sont engagées à n’accepter que des annonces disposant d’un numéro d’inscription. Certaines ont déjà alerté leurs adhérents qu’elles avaient mis une alerte en cas de dépassement du seuil de 120 jours.

Le changement d’usage coûte cher à Paris

À Paris l’autorisation de changement d’usage est délivrée sous condition de compensation et soumise au respect de règles de compensation qui obligent un bailleur à créer des surfaces habitables en transformant des locaux commerciaux par exemple ou le patrimoine d’un organisme HLM.

Exemple concret : si vous souhaitez louer un deux pièces de 40m² en saisonnier il va falloir transformer 40m² de bureaux en logement (voire même 80m² si le bien est dans un arrondissement central, plus de détails sur le règlement municipal parisien).

Les démarches étant particulièrement fastidieuses et le coût potentiel étant de plusieurs milliers d’euros par m² transformés, très peu de bailleurs réalisent cette démarche et sont de facto dans l’illégalité.

Dans la capitale, louer en meublé touristique une résidence secondaire entraîne donc des obligations très lourdes.

Paris est devenue la première destination mondiale d’Airbnb avec 86 725 logements de type Airbnb disponibles à Paris en septembre 2017, (leur nombre était de 56 544 en octobre 2016, soit une augmentation de 53 %), qui représenteraient une moyenne de 6,4 % du parc de logements de la capitale et dans certains quartiers jusqu’à 20 % du parc de logements disponibles.

Au lieu de laisser le marché se réguler (par exemple par l’innovation de la part des professionnels de l’hôtellerie), Ian Brossat, l’adjoint communiste chargé du logement du maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo, préfère hystériser la situation et prendre des mesure coercitives. « L’objectif est de mettre un terme à cette hémorragie  » a-t-il déclaré.

 

Ce que vous risquez à essayer de passer entre les mailles du filet

Les sanctions sont aujourd’hui bien réelles, de plus en plus nombreuses et de plus en plus sévères.

Tout d’abord, depuis la loi Alur de 2014, les contrôleurs de la Direction du logement et de l’habitat ont le pouvoir de vérifier si la location de votre bien est légale. Vous devrez ainsi présenter tout document prouvant que vous n’êtes pas hors-la-loi.

Les sanctions ne sont pas encore précisément définies, mais l’amende maximum forfaitaire est passée de 25 000 euros à 50 000 euros par logement :

  • 450 euros : non déclaration du bien en location courte durée simplement (idem partout en France).
  • 50 000 euros : infraction au Code de l’urbanisme, si le logement est mis en location sans autorisation qui peut être imposée au propriétaire
  • Une astreinte de 1000 euros par jour et par mètre carré peut être levée jusqu’à régularisation.

 

Le bénéfice du doute n’est plus accordé car les juges estiment maintenant que les particuliers connaissent la loi, comme expliqué par la Direction du logement et de l’habitat au Parisien.

Paris en est l’exemple le plus représentatif puisque la mairie y a engagé depuis plusieurs années une politique visant à lutter contre les locations touristiques illégales. Depuis 2016, 25 agents de la Mairie de Paris travaillent à plein temps sur le contrôle des locations saisonnières, et ont contrôlé 8500 logements, 600 dossiers parisiens sont en cours d’examen et 128 ont été transmis à la justice, selon Le Parisien.

Elle vient ainsi de communiquer triomphalement sur le niveau record des amendes déjà infligées aux propriétaires proposant des locations touristiques illégales : plus d’un million d’euros en 2017, soit trois fois plus qu’en 2016.

À vous d’évaluer le risque !

Sur le web

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  • La propriété est considérée dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 comme l’un des quatre « droits naturels et imprescriptibles de l’Homme ». Elle est également considérée comme « inviolable et sacrée », et « nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. »

    • Mais ça c’était avant que la Constitution de 1946 ne vienne s’y « en-même-tempiser ».

    • on tombe ici dans le cas où la nécessité publique l’exige évidemment bien sûr. Sinon tous les hôteliers vont devoir mettre la clé sous la porte, ça serait malvenu, non ?
      Et c’est parfaitement légal et démocratique, dans la mesure où la loi a été votée dans le respect des institutions prévues par la Constitution.

  • Le pire est que certains locataires Parisiens pratiquent la sous-location de leur appartement en toute illégalité et contre la volonté de leur propriétaire et ne semblent pas faire l’objet d’investigations de la part de la mairie de Paris.
    Dans le passé les privilèges étaient des droits que certains avaient et que d’autres n’avaient pas, nous assistons à l’explosion des nouveaux privilèges qui consistent à ne pas se voir appliquer la loi qui dans les mêmes circonstances condamne les autres.
    Au final, en matière de locations saisonnières cela revient à constater que les propriétaires ont moins de droits que les locataires.

  • Super article !
    Vos remarques sont très pertinentes et une tres bonne analyse

  • Le lobby des hôteliers parisiens a encore frappé, sous prétexte de concurrence « déloyale ». Sachant qu’ils sont pleins à 85% en saison normale et à 100% (en pratiquant en plus de fortes hausses de tarifs) durant les nombreux salons, ils ne réussiront pas à m’arracher une seule larme.

    • Eh oui ! Une fois de plus, le pouvoir politique fait le choix de privilégier les oligopoles et les corporations plutôt que la multitude des petits et des sans grades.

  • La propriété privée est soluble dans la mégapole…

  • Les commentaires sont fermés.

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