Par Nicolas Lecaussin.
Un article de l’Iref-Europe
Fin du tirage au sort ? Mais pour faire quoi ? La réforme pour « canaliser l’accès à l’université » est pleine d’ambiguïtés et ne propose pas les mesures dont aurait besoin le système universitaire français. D’un côté, le bachelier devra avoir le « profil requis » pour entrer à l’université, mais, de l’autre, il gardera le « dernier mot » pour choisir sa filière.
Et il n’y a rien dans le projet du gouvernement concernant une vraie sélection à l’entrée. Car – faut-il encore le rappeler ? – l’accès à l’université est un droit mais pas un dû ! Il ne s’agit pas de l’école primaire mais des études supérieures. Ça se mérite ! D’autant plus que presque 50 % des étudiants ne passent pas la première année de fac !
L’université française à la 131e place
De même, il n’y a rien sur l’autonomie des universités et la concurrence comme c’est le cas dans d’autres pays. Dans le dernier classement QS World University Rankings (2017), la première université française n’est classée qu’à la… 131e place !
Précédée par deux Grandes Écoles : École Normale Supérieure (43e) et l’École Polytechnique (59e place). Dans le même classement, les Britanniques ont 16 universités parmi les 100 premières et les Américains plus d’une trentaine !
Au Royaume-Uni, les réformes de 2016 proposaient une université britannique encore plus dépendante du marché et moins de l’État. En 2012 déjà, les subventions publiques avaient été pratiquement supprimées et les frais de scolarité multipliés par trois (rappelons que les frais obligatoires ont été introduits dès 1999).
Liberté, flexibilité et concurrence
On envisage encore plus de liberté pour la création d’universités privées, même de très petite taille, et qui auraient la possibilité de proposer plusieurs enseignements. Ce pourrait être même des universités spécialisées dans un seul domaine.
Liberté, flexibilité et concurrence sont les caractéristiques de l’université britannique d’aujourd’hui. L’université française ne s’en sortira qu’avec de vraies réformes. Voici trois propositions qui sont d’ailleurs parfaitement interdépendantes :
1. Réformer le baccalauréat et en faire un vrai examen permettant une présélection pour l’université
2. Introduire la sélection à l’université grâce à des examens
3. Rendre l’université payante.
Il ne reste qu’à agir.
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Bonjour,
J’adhère complètement aux deux premières. Mais, en quoi la troisième prends du sens si les deux première deviennent effectives ? En quoi le filtre « Moyens financiers » prends de son utilité et garantit des élèves meilleurs ?
N’oublions pas que le système des écoles à cela qu’il s’auto-entretiens dans de l’incesto-économie (Terme volontaire). Les diplômés des grandes écoles s’embauchent pour valoriser leur formation et ainsi gagner plus. S’ensuit la hausse du coût de ladite école et un rapport qualité de formation/coût qui descend.
Nous devons sélectionner à l’entrée pour ne pas y voir des doux rêveurs incompétents mais plein d’espoirs. Mais l’enseignement doit rester gratuit selon moi.
There is no free lunch.
L’enseignement ne peut être gratuit, la question est donc qui paie et pour quelle contrepartie. Il est tout à fait possible de rendre l’université payante et simultanément d’instaurer des systèmes de prêts et bourses pour que ceux qui ont les capacités intellectuelles et la volonté ne soient pas éliminés en raison du milieu pauvre dont il leur arrive d’être issus. En revanche, un enseignement de qualité ne peut pas s’obtenir sans faire intervenir une vérité des prix, du côté de l’université avant de parler de celui des étudiants.
Imaginez que les cantines et restaurants soient gratuits, et voyez les conséquences sur la qualité des repas.
Quant aux pratiques de favoritisme des anciens des grandes écoles, elles n’ont d’importance que dans les domaines non-concurrentiels que sont l’administration et les entreprises publiques. Si dans une entreprise privée, l’équipe dirigeante souhaite rester entre anciens de la même formation, laissez le marché décider si c’est une bonne chose ou une erreur.
Et pourquoi donc ceux qui n’iront jamais à la fac devraient-il payer pour ceux qui veulent aller passer du bon temps sur ses bancs ?
Je vous remercie pour vos commentaires.
Si les universités ne sont pas gratuites et que l’état compense par des bourses, de facto, celles-ci deviendront une source de revenus pour les écoles qui augmenteront le tarif. Si des écoles privée s’en sortent, tant mieux pour elles, le privé doit rester libre et le marché agira. Mais l’état doit fournir aux citoyens la gratuité de la formation et la qualité qui va avec. En sélectionnant à l’entrée afin de retrouver, notamment, dans la consommation et la force de travail, le retour financier qui va avec.
Ceux qui n’iront pas à l’université, par conséquence, la classe sociale la parmi les moins rémunérées, en profiteront par une prospérité et la possibilité pour leurs enfants d’y aller à leur tour.
Pour exemple, l’assurance maladie ne profite pas qu’aux malades, mais aussi à ceux qui le deviendront. Le peuple en meilleure santé est ainsi plus productif.
Le marché ne peut, seul, décider de tout et doit être alimenté autrement que par la classe sociale pour et par lequel il est construit. Autrement, c’est de l’eugénisme.
Toujours selon moi bien sur 🙂
Une proposition intéressante: http://blog.francetvinfo.fr/classe-eco/2017/10/30/universites-et-si-les-etudiants-payaient-plus.html
Une quatrième proposition : recruter des professeurs compétents et cultivés par concours et non par cooptation. Peut-être aurons-nous enfin des « enseignants-chercheurs » sachant écrire français sans trop de fautes d’orthographe !
L’important est qu’il y ait un feedback qui motive l’université à avoir des enseignants-chercheurs performants. Le concours en lui-même ne me paraît pas une bonne méthode pour constituer une équipe efficace, on ne procède par concours ni dans le sport, ni dans l’industrie…
On voit le résultat de la cooptation : des mandarins ont nommé des petits chefs qui a leur tour ont promu leur cour ! D’où le niveau lamentable de beaucoup d’enseignants du supérieur ! Des profs de lycée sont souvent plus performants qu’eux !
La crise de l’université française est indiscutable. Mais, pour l’analyser et trouver des solutions, il faut effectuer des comparaisons avec de multiples pays et utiliser des outils appropriés.
Or l’article nous assène une soi-disant » vérité d’Évangile » sur la base de laquelle tout le monde doit raisonner, à savoir » Dans le dernier classement QS World University Rankings (2017), la première université française n’est classée qu’à la… 131e place ! […] Dans le même classement, les Britanniques ont 16 Universités parmi les 100 premières et les Américains plus d’une trentaine ! » Quand donc cessera-t-on de croire comme parole d’évangile tous ces classements élaborés par les anglo-étasuniens selon des critères anglo-étasuniens parmi lesquels la maîtrise de la langue étasunienne occupe un rang privilégié ? Faut-il s’étonner ensuite de la surreprésentation -comme par hasard – des universités anglo-étasuniennes … et de l’obsession dans maints autres pays de singer à tout prix Messieurs les Maîtres ? Morbleu, un peu d’esprit critique éviterait de se faire gaver de propagande aux conséquences si profitables… pour les universités anglo-étasuniennes ! Cette acceptation sans réflexion de critères provenant constamment d’une seule source dénote une catastrophique absence d’esprit critique ! Et on retrouve ce comportement dans tous les médias…
Encore une fois, il est évident qu’il faut réformer en profondeur l’enseignement supérieur français et l’article commence bien en énonçant que » l’accès à l’Université est un droit mais pas un dû ! « . Personnellement, je crois à 2 impératifs indissociables :
– une vraie et stricte sélection par le mérite et le travail et non par le tirage au sort, le copinage ou l’argent ;
– l’existence de passerelles et de » deuxièmes chances » tout au long de l’existence : par exemple, on peut ne pas avoir pu ou voulu faire des études poussées à 20 ou 25 ans et vouloir s’y remettre plus tard ou encore passer progressivement d’un état à un autre par des études et formations – bien entendu sérieuses et exigeantes – en continu. Or, dans ce fichu pays où la vie est souvent jouée à 23 ans selon qu’on sort de Sup’ d’Arrogance ou non, il n’y a aucune chance pour les autres si bien que nos soi-disant élites sont trop souvent » monocolores « . A contrario, parmi les structures qui donnent leurs chances à tous, il y l’Armée et l’Église qui permettent à des personnes parties d’en bas de parvenir à de hautes responsabilités grâces à de multiples » passerelles « , bien sûr à condition d’avoir de réelles aptitudes et de beaucoup travailler… Pas très à la mode mais je m’en moque un peu ayant assez vu défiler de freluquets persuadés d’être destinés à devenir les maîtres du monde parce qu’ils sortaient d’une grande école ornée le cas échéant d’un » emm’bi’ai » car il est toujours bon de rendre hommage à l’Empire… Si on étudiait vraiment sérieusement la composition des élites suisses et allemandes, le rôle de l’apprentissage et de la formation professionnelle et maints autres dispositifs moins » glamour » que » arrevarde » mais ô combien plus riches d’enseignement…
Etre bien classé dans la liste ne garantit pas qu’on soit bon, y être très mal classé est le signe qu’on est mauvais. Il y a du vrai dans vos propositions, mais je nuancerais la chose. La sélection + la deuxième chance reste fondée sur l’erreur que l’accomplissement individuel serait proportionnel à la longueur et au prestige du cursus. Or ce qui importe, c’est de découvrir le plus tôt possible ce à quoi on est bon et qui plaît, et cela fait trop longtemps que ne font autre chose que suivre le plus loin possible la voie bac-fac que ceux qui échouent. Faire autre chose, ce doit être considéré comme réussir ! Si l’armée et l’église réussissent aussi bien, c’est que ceux qui y rentrent ne le font pas pour avoir été laissés sur le bord du chemin, mais par vocation en pensant avoir trouvé leur voie. La charcuterie, la chaudronnerie, l’informatique, la mécanique et autres devraient sortir dès le lycée tous leurs adeptes du cursus standard. On ne parlerait pas de sélection, mais de vocations, ni de deuxième chance, mais de retour sur des choix erronés.
@ MichelO
Merci de votre commentaire.
Je suis globalement d’accord avec vous, y compris avec la nécessité de nuancer : le format réduit de ces remarques oblige à un certain simplisme…
1) Je maintiens que ces classements des universités, pays, etc. aux critères opaques et contestables sont souvent nuisibles.
2) Entièrement d’accord avec le rejet du principe d’une » voie royale unique » : il y a d’autres chemins menant à un accomplissement personnel, ce qui compte avant tout, voire à la réussite sociale que la voie bac-fac pour reprendre votre expression ; mais ces différentes voies ne doivent pas être définitivement séparées : par exemple, parlant de ce que j’ai vécu, si elle le veut et qu’elle en a les capacités, une assistante/secrétaire devrait pouvoir devenir juriste » pleine » en suivant une série de cursus exigeants mais adaptés à la situation des gens qui travaillent et, à l’arrivée, ceci apporterait une intéressante diversité dans le monde des juristes. Dans un autre domaine, un des atouts du milieu des vignerons est que peuvent s’y intégrer – sauf exception par un travail énorme – des gens d’autres origines qui apportent un autre regard et un enrichissement au monde viticole.
Au passage, ceci exige que le regard de tous soit dépourvu le plus possible de préjugés : un ingénieur qui devient vigneron ne » gâche » pas sa vie même si les études qu’il a suivies ne le destinaient pas à ce métier, les soi-disant élites doivent accepter la diversité… à condition que tous les parcours soient également le fruit d’un travail sérieux et correspondant au métier visé (je pense a contrario à certaines scandaleuses équivalences qui décrédibilisent le principe des passerelles et des deuxièmes chances).
Bien cordialement,