Il faut bien tracasser les auto-entrepreneurs, des fois qu’ils réussiraient malgré tout !

Grâce aux efforts permanents de la bureaucratie, les auto-entrepreneurs héritent d'une nouvelle contrainte qui pourrait bien signifier leur disparition.
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Entreprises : l'instabilité fiscale continue !

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Il faut bien tracasser les auto-entrepreneurs, des fois qu’ils réussiraient malgré tout !

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 9 juin 2017
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Dans le monde, la bureaucratie est souvent synonyme de tracasseries, d’ennuis, d’incompétence et de situations ubuesques qui poussent souvent les peuples à vouloir l’alléger et s’en débarrasser (avec un succès souvent mitigé, dirons-nous). En France cependant, son poids, son omniprésence et la tendresse invraisemblable et obstinée du peuple français à son égard lui ont pourtant permis d’accéder au rang de curiosité artistique, voire de vache sacrée que personne ne semble vouloir remettre en cause, par confort ou habitude.

C’est probablement pour cela que personne ne s’étonne plus guère lorsqu’une nouvelle loi, un nouveau décret paraissent et viennent alourdir encore un peu (ou beaucoup) la vie administrative des citoyens français. On savait en effet depuis un moment que les services de l’État ne reculent jamais devant la moindre complication ni la moindre multiplication de tubulures chromées à leurs usines à gaz procédurales grotesques, qu’il s’agisse d’envoyer paître une victime de terrorisme ou d’assommer des familles en deuil de contraintes ridicules. On ne sera donc pas étonné que, cette fois-ci, ce sont les auto-entrepreneurs qui servent de punching-ball à l’administration fiscale.

Comme de bien entendu, avant d’abattre sur ces entrepreneurs le bras vengeur et le glaive séculier, l’aigle fiscal a soigneusement préparé ses arguments et ne laisse pas s’installer le moindre doute sur la nature de l’opération qu’il entend mener : afin, nous dit-il, de lutter contre l’abominable fraude à la TVA qui ronge le pays et dépouille la veuve et l’orphelin des nécessaires émoluments de survie que seuls les impôts des autres leur permettent de toucher, l’auto-entrepreneur sera, à partir du premier janvier prochain, contraint d’utiliser un logiciel spécifique pour sa comptabilité, et puis c’est tout.

Notez que cette contrainte s’impose bien sûr à tous les commerçants et autres professionnels assujettis à la TVA, mais comme les auto-entrepreneurs n’y sont pas soumis (étant en régime de franchise de base), ces derniers pensaient – à tort donc – en être épargnés. Nous sommes en France et donc que nenni : l’administration vient de préciser que cette obligation les concerne aussi.

Autrement dit, pour les petits malins qui croyaient avoir choisi ce statut particulier d’auto-entrepreneur pour exercer une activité en se concentrant sur l’activité elle-même et non sur la paperasserie administrative et la comptabilité, eh bien c’est râpé : après la contrainte du double compte bancaire imposée en 2016, les auto-entrepreneurs vont donc devoir goûter au logiciel de comptabilité imposé.

Gageons au passage que ce logiciel, choisi parmi ceux dûment tamponnés par l’administration, correctement estampillé « éco-conscient » et « Bercy-friendly », n’a pas été l’objet de la moindre tractation discrète en coulisse, qu’il n’y a eu aucun lobbying de la part de l’un ou l’autre éditeur concerné, que les caractéristiques de ces logiciels sont éminemment enviables et que faire sa comptabilité dessus s’avèrera sans aucun doute une petite partie de plaisir, à mi-chemin entre un Pac-Man rigolo et une partie de démineur rafraîchissante.

Ah décidément, avec cette nouvelle contrainte rigolote, si indispensable et si bien pensée, la bureaucratie française marque encore de beaux points pour l’avenir de la France, son marché de l’emploi, sa compétitivité et son dynamisme économique. Parions même qu’une fois cette belle idée en place, de nouvelles vocations vont se déclarer.

Eh oui : n’oubliez pas, en effet, qu’augmenter les lois, c’est augmenter mécaniquement les crimes et les délits possibles et c’est aussi augmenter, assez artificiellement, les amendes et les peines que l’État pourra distribuer (on parle de plusieurs milliers d’euros dans ce dernier cas). Les tribunaux français, las de n’avoir rien à faire, pourront certainement trouver là matière à occuper leurs longues après-midi de farniente.

De même, augmenter les contraintes, c’est augmenter tout aussi mécaniquement les coûts de production pour toute entreprise, et donc en diminuer logiquement sa compétitivité. Il était temps : la France caracole si outrageusement en tête des nations développées que nos plus âpres concurrents, loin derrière elle, seront heureux de revoir enfin sa silhouette sur leur horizon, elle qui les avait laissés dans la poussière de la médiocrité capitaliste d’une bureaucratie trop légère.

De façon plus malencontreuse, augmenter les coûts et les lois, c’est aussi rendre la fraude de ceux qui la pratiquent bien plus rentable par rapport à ceux qui veulent rester honnêtes. D’une façon douteusement habile, ces nouvelles contraintes reviennent à inciter plus ou moins directement les citoyens à passer dans la zone grise du travail au noir, de la non déclaration ou, tout simplement, de la bonne combine, improvisée ou non.

En somme, dans un mouvement que la répétition rend comique, cette loi va avoir exactement l’effet inverse à celui escompté : elle va augmenter la fraude fiscale, mais elle va aussi diminuer les recettes fiscales soit par augmentation de cette fraude donc, ou soit par dépôt de bilan des entrepreneurs ne pouvant supporter ces nouvelles contraintes (et donc ces nouveaux coûts). Bien joué, mes lascars !

Au passage, cette loi montre encore une fois que la bonne foi n’est jamais l’option de base de l’administration française : l’entrepreneur est considéré, par défaut, comme un fraudeur qu’il faut si ce n’est écrabouiller sous les codes de plus en plus épais, au moins encadrer fermement, et que sans ça, il chercherait toujours, tout le temps, par tous les moyens, à extorquer le client, frauder l’État et filouter les administrations. C’est évident. Ne discutez pas. C’est ainsi. Point.

Elle montre aussi que ceux qui fraudent, sachant encore une fois comment contourner la contrainte, le feront et s’en sortiront mieux que les autres (est-il, du reste, nécessaire de rappeler la grande compétence de l’État en matière d’informatique ?)…

Enfin, cette nouvelle contrainte rappellera à bon escient que créer son propre emploi revient en France à se rendre esclave de l’État et de sa bureaucratie, petit à petit, cerfa après cerfa et qu’au bout se trouve plus souvent une corde, une poutre et un tabouret renversé qu’un compte en banque joufflu et une villa avec piscine.

Décidément, en France, à chaque absence de problème, l’État s’emploiera à trouver une solution à la fois lourde, inutile et qui permettra enfin au problème de prendre corps. Bravo.


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  • Depuis le 1er juin, de nombreux artisans ne pourront plus exercer leur métier s’ils n’ont pas obtenu un quitus étatique sous la forme d’un diplôme (BEP, CAP …). Voici revenu le joli temps des corporations : Protections des « insider » et difficultés pour les « outsiders ». https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2017/5/4/ECFI1700189D/jo/texte

    • Décret lui aussi signé par une belle brochette de losers sortants ! En plus il est d’une clarté… phénoménalement indigeste !

  • L’Administration ou comment faire faire ce pour quoi elle est payée par ceux qui la financent.
    C’est comme si je payais un plombier pour une fuite, qu’il me ferait tout faire à sa place, avec son matériel plus ou moins adéquat, et qu’il me traînerait au tribunal si je refusais de payer ce que j’aurais fait. A ce compte-là, le plombier ne sert à rien, l’Administration non plus.

  • c’est fou ce que cette nouvelle m’a tourmenté ! because , je suis ( toujours ) auto entrepreneur ; mais le double compte bancaire , je m’en passe ; le paiement via internet , je l’ai refusé ; je paie par chèque , et je peux vous garantir que les chèques sont rapidement encaissé ; alors leur histoire de logiciel , la déscense m’interdit de dire ou ils peuvent se le mettre ….d’autant que ne possédant rien , et mes revenus étant largement en dessous du seuil de pauvreté une fois réglé toutes mes charges , je ne vois pas trés bien ce qu’ils peuvent me prendre ;

    • @véra
      Bonsoir,
      Vos revenus sont largement en dessous du seuil de pauvreté !!? Je vous tire mon chapeau d’avoir autant d’abnégation ! Cette abnégation m’épate mais je ne la comprends pas : pourquoi vous compliquez-vous la vie à travailler pour que l’Etat vous déleste et vous apauvrisse ?

  • Bah,
    Le changement n’est pas pour maintenant :mrgreen:

  • faux ! archi faux ! halte a la désinformation. les microentrepreneurs pourront toujours tenir leur compte sur papier https://www.federation-auto-entrepreneur.fr/actualites/logiciel-facturation-auto-entrepreneur-tout-loi-antifraude

    • … et tous les autres devront prendre un logiciel imposé. Aucune désinformation.

    • « Le fisc s’est donc déchargé de la totalité de son travail sur le privé n’a plus rien a faire sinon harceler. »
      Dégraisser l’état opulent , remplacement d’un départ à la retraite sur 2, vous croyiez que ça n’allait pas avoir d’impact sur le service public ? lol
      Bien sur que l’état se désengage un maximum ! pour vous plaire monseigneur.

      Economies pour payer l’intérêt de la dette…, enfin bon on ne va pas refaire le monde qui vous plait et surtout ne pas chercher à comprendre la globalité de ce qui se passe, ça serait trop de remise en cause…kenavo.

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