Par Bernard Kron.
Le Conseil de l’Ordre a inventorié « les solutions qui marchent. » Elles ne seront pas suffisantes car  les déserts médicaux se développent à grande vitesse et les mesures fortes pour enrayer cette descente aux enfers tardent. Des contraintes seraient contre productives. Il faudra donc être plus inventif.
De nombreuses solutions palliatives sont mises en place pour essayer de faciliter l’accès aux soins devant la pénurie de médecins généralistes :
« Maisons ou pôles de santé, terrains de stage libéraux, groupements de coopération sanitaire attractifs, initiatives en tout genre : nos régions ont du talent », se félicite l’Ordre des médecins dans un rapport rendu public ce 21 février. Est-ce la réalité ?
Un  nouveau rapport du Conseil de l’Ordre intitulé « Améliorer l’offre de soins, initiatives réussies dans les territoires », recense dans les régions les initiatives les plus marquantes. On ne peut que les encourager.
Les  regroupements contre les déserts médicaux :
Les maisons médicales : elles sont de deux types :
- Les maisons de santé pluridisciplinaires (MSP)
- Les maisons universitaires de santé et de soins primaires (MUSSP :
L’une d’elle a été créée à Dijon  « en plein désert médical ».
Regroupant 25 professionnels, elle forme, avec la Mutualité et le CHU, un groupement d’intérêt économique (GIE), accueille nombre de stagiaires et coordonne trois projets de recherche. Un atout car les étudiants ont tendance à s’installer là où ils ont effectué leur stage.
Même expérience à Sucy-en-Brie, où une autre maison de santé universitaire a signé une convention avec l’ARS et le CHU. Tous les praticiens de la structure accueillent des stagiaires en médecine générale.
Les réseaux plus informels ont aussi la cote. En Côte d’Or, l’Ordre porte un projet de MSP qui aura vocation à signer une convention avec les mairies avoisinantes pour la mise à disposition d’un local équipé. Un praticien libéral viendra y faire des vacations une à deux fois par semaine afin de soigner des populations peu mobiles.
Les GHTÂ : ce sont les Groupements Hospitaliers de Territoires
Dans les Deux-Sèvres, un directeur d’hôpital a monté un groupement hospitalier de territoire (GHT) incluant le secteur libéral, partant du principe que sans cette collaboration, son GHT serait « unijambiste ». Établissements publics et privés, professionnels libéraux, MSP et pôles de santé du secteur ont collaboré au projet médical populationnel commun.
Les stages, préludes à l’installation du stagiaire
En région, les initiatives se multiplient. Dans le Centre-Val-de-Loire, le conseil de l’Ordre, l’ARS et la faculté de Tours travaillent main dans la main pour multiplier ces stages, tant en médecine générale, qu’en pédiatrie, ophtalmologie pédiatrie ou en rhumatologie libérale.
En Bourgogne, l’Union régionale et l’Ordre organisent des réunions à destination des étudiants de 2e et 3e cycle pour améliorer la connaissance de l’exercice libéral. En Bretagne, le CROM et le département du Finistère ont signé une convention pour favoriser les stages en médecine générale libérale dans les zones déficitaires ou éloignées des villes. Dans le Cantal, l’action conjuguée des acteurs institutionnels a permis de doubler le nombre de maîtres de stage en 2015.
Les Maîtres de stages universitairesÂ
 On peut devenir maître de Stage (MSU) pour 3 types de stages :
- Le stage en deuxième cycle : stage de trois mois destinés aux externes. Il leur permet d’appréhender les spécificités de la médecine générale. Il s’agit d’une occasion unique pour tous les étudiants de découvrir la médecine générale avant l’examen national classant où ils choisiront leur spécialité.
- Le stage dit de niveau 1 : accueil d’un interne de médecine générale (en troisième ou quatrième semestre sur les 6 semestres que comprend l’internat de MG) à son cabinet pour un stage obligatoire de 6 mois.
- Le stage dit de niveau 2 : stage ambulatoire en autonomie supervisée. Il s’agit de l’accueil d’internes qui ont déjà effectué le stage de niveau 1.
C’est un système trop rigide…
SOS médecin en tant que médecin traitant ?
Face à la pénurie médicale SOS Médecins a obtenu dans certains secteurs le statut de « structure collective traitante par dérogation ». Ce qui lui permet de prendre en charge en tant que médecin traitant des patients qui en sont dépourvus.
En Aquitaine, des généralistes libéraux, équipés de matériel d’urgentiste, sont autorisés à administrer les premiers secours dans les zones blanches.
La délégation de tâche :
Dans la Sarthe et en Rhône-Alpes, des expérimentations de délégation de compétences entre ophtalmologistes et orthoptistes ont permis de réduire de douze mois à 15 jours les rendez-vous pour renouvellement de verres correcteurs. Cela est également proposé pour les pharmaciens qui pourraient vacciner, et pour les infirmières qui après le Master deviendraient des « infirmières cliniciennes .»
La télémédecine contre les déserts médicaux :
Dans le Haut-Rhin, les détenus de la maison centrale d’Ensisheim sont examinés à distance, notamment en dermatologie, via une cabine de télémédecine. En Bretagne, de nombreux EHPAD sont équipés de ce type de cabine qui permet des consultations à distance.
Conclusion
Toutes ces mesures sont des soins palliatifs car même Paris devient un de ces déserts médicaux dans le secteur conventionnel. En province 1 200 maisons médicales ont été construites pour un coût de 1 à 8 millions d’euros chacune. Beaucoup sont vides faute de médecins, là ne sont pas de vraies solutions pérennes.
À la question « Si vous étiez ministre de la Santé, quelles seraient vos propositions pour lutter contre les déserts médicaux ? »
Les voici extraites du livre Chirurgie : chronique d’une mort programmée publié aux éditions L’Harmattan Paris.
- Raccourcir le cursus de médecine générale avec un véritable Externat formateur ;
- Donner une formation spécifique pour la médecine générale lors du 2ème cycle suivi d’un internat de 2 ans;
- Libéraliser la tarification des honoraires en dehors de la CMU et de l’ALD ;
- Fin du Tiers payant généralisé pour simplifier le temps administratif ;
- Créer des consultations avancées ;
- Permettre aux internes d’effectuer 6 mois d’assistanat auprès de médecins généralistes la dernière année ;
- Faciliter et rendre gratuit le stationnement dans les grandes villes ;
- Faire une vraie simplification administrative de l’exercice médical ;
- Supprimer la plupart des agences de santé, dont les ARS ;
- Développer de petites unités ambulatoires.
Retrouvez Bernard Kron au micro d’André Bercoff sur Sud radio le 7 mars prochain pour analyser le programme présidentiel de Marine Le Pen en matière de santé !
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