Par Jacques Garello.

En dépit des communiqués rassurants du gouvernement, la branche maladie est celle qui inquiète le plus la Cour des comptes qui a publié le 13 septembre dernier un rapport alarmant. Le ministre de l’Économie Michel Sapin n’en a tenu aucun compte puisque les dépenses publiques de santé augmenteront de 2,1 % en 2017. L’affaire a rebondi avec le programme de François Fillon, accusé de « casse sociale » et de « privatisation de l’assurance maladie ».
La Sécurité sociale finance trois quarts des dépenses
Le total des dépenses de santé aura représenté en France environ 260 milliards d’euros en 2014, soit environ 12% du PIB, chiffre qui classe notre pays dans le peloton de tête mondial (lui-même bien loin derrière les États-Unis). D’où vient l’argent ? Pour les trois quarts de la Sécurité Sociale, pour 9 % de la poche des assurés, et pour le reste d’assurances complémentaires, souscrites soit obligatoirement (mutuelles) soit volontairement (compagnies d’assurance).
À entendre certains, la Sécurité Sociale devrait avoir le monopole complet de l’assurance-maladie (Mélenchon). D’autres trouvent que le financement privé des mutuelles (7% du total des dépenses) occupe encore trop de place : il faudrait nationaliser les mutuelles (Montebourg) ou les mettre sous contrôle plus étroit de l’État (Hamon) ou créer une agence de régulation (Valls).
D’autre part, si le choix d’une mutuelle a été libre jusqu’au 1er janvier 2016, tout salarié doit désormais adhérer à la mutuelle de son entreprise, qui a elle-même obligation de proposer une mutuelle. Le salarié doit résilier les contrats individuels qu’il avait pu passer auparavant avec une mutuelle de son choix.
Le seul degré de liberté qui demeure est un contrat passé avec une société d’assurance ou un organisme de prévoyance, ce qui représentait environ 7 % des dépenses de santé en 2016. C’est dire que l’idéologie collectiviste et centralisatrice a prévalu et que la mutualité elle-même, qui n’est pourtant pas un système privé capitaliste, est appelée à disparaître.
La « casse sociale » annoncée
La campagne électorale a permis de relancer le débat puisque le monopole de la Sécurité sociale, renforcé par le contrôle des mutuelles, a été mis en cause à partir d’un principe général : réserver le financement public à une partie des dépenses de santé, celles qui concernent les interventions lourdes, les affections de longue durée et les handicaps définitifs, et laisser l’autre partie à la logique assurancielle, qu’il s’agisse de mutuelles ou de compagnies privées.
L’intervention publique serait subsidiaire. Suivant la lecture donnée des propositions avancées par François Fillon, la privatisation s’entendrait soit d’une régulation des mutuelles (ce qui reviendrait à adopter les propositions de Valls ou d’Hamon), soit d’une large ouverture aux assureurs privés soumis à la loi du marché.
Parallèlement, le caractère libéral des professions de santé serait restauré, sans doute avec la libéralisation partielle ou totale des honoraires et la suppression des numerus clausus. De toute façon, on est bien loin de la casse sociale dénoncée, puisqu’en aucun cas il ne serait question de limiter l’intervention publique aux seules situations extrêmes.
Privatisation et concurrence à l’œuvre
Il y a pourtant des pays, comme la Nouvelle-Zélande, où la santé est affaire purement privée et marchande. Dans ce pays, seuls 5 % du financement sont fournis par le budget de l’État, pour venir en aide à des personnes sans ressources ou sans assurance valide. Dans beaucoup de pays, comme l’Allemagne ou la Suisse, le choix est possible entre assurance privée et publique pour les personnes ayant un certain niveau de revenu (et qui peuvent donc assumer une dépense importante sur leurs propres deniers).
Enfin, les États-Unis avaient un système d’assurance-maladie libre (ce qui n’excluait pas les mutuelles ou les assurances souscrites par les entreprises ni une couverture publique pour les personnes âgées ou sans ressources). Mais la réforme Obama a obligé les Américains à prendre une assurance publique, tout de suite en faillite !
Bref, il n’y a rien de scandaleux à introduire dans le domaine de la santé les principes marchands, à condition qu’un filet social financé par la solidarité (c’est-à-dire l’impôt) soit prévu. On observe aussi que la solidarité spontanée, dans le cadre de la famille, des associations caritatives et des clubs service, se développe avec efficacité quand la solidarité publique obligatoire diminue.
Au minimum, la coexistence d’assurances publiques et privées a partout l’avantage d’améliorer la qualité de l’accueil et des soins, notamment hospitaliers, et de diminuer les coûts (en France ils sont doubles dans les hôpitaux publics).
Quant à la dimension humaine de la santé, elle s’exprime sans doute mieux dans les relations personnelles entre patients et professionnels de santé animés par la vocation qu’entre assujettis et administrations. Dans le domaine de l’assurance maladie comme ailleurs, la concurrence, la décentralisation et la liberté produisent leurs effets bénéfiques.
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On ne peut pas privatiser la sécurité sociale car c’est un organisme de droit privé, on ne peut même pas abolir son monopole puisqu’il est déjà aboli.
En fait il suffit juste que la justice applique le droit mais cela est hors de question en France.