Brexit : le discours de Theresa May ne nous apprend rien

À ceux qui faisaient entendre que son gouvernement n’avait pas de plan pour la sortie de l’Union européenne, Theresa May a rétorqué que dans son esprit les choses étaient claires, qu’elle voulait une Global Britain plutôt qu’une Great Britain.

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Brexit : le discours de Theresa May ne nous apprend rien

Publié le 19 janvier 2017
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Par Thierry Godefridi.

Brexit : le discours de Theresa May ne nous apprend rien
By: Policy ExchangeCC BY 2.0

Madame May, Premier ministre du Royaume Uni, s’est adressée mardi aux diplomates étrangers à la Lancaster House, un manoir à l’architecture néoclassique situé dans le quartier de St. James, dans le West end de Londres. C’était censé être son discours le plus important depuis son entrée en fonction. L’on s’attendait à ce qu’elle explique ce que « Brexit means Brexit » (« le Brexit signifie le Brexit ») signifiait. Mais, si elle a finalement expliqué ce que le Brexit ne signifiait pas, ironisait Jon Henley, le correspondant aux Affaires européennes du Guardian, l’on ne sait toujours pas ce qu’il signifiera.

En effet, le discours de Madame May ne nous a pas appris grand-chose de neuf. Elle a beaucoup parlé mais peu dit. « Il y a un peu plus de six mois, le peuple britannique a voté pour le changement. Il a voté pour un avenir plus radieux pour notre pays. Il a décidé par son vote de quitter l’Union européenne et d’embrasser le monde. Et, il appartient à ce gouvernement d’accomplir cette tâche. »

Global Britain

À ceux qui faisaient entendre que son gouvernement n’avait pas de plan pour la sortie de l’Union européenne, Madame May a rétorqué que dans son esprit les choses étaient claires, qu’elle voulait une Global Britain  (une expression qu’elle a répétée dans son discours ; « Globale » ferait-il plus XXIe siècle que simplement « Grande » ?), « un pays sûr, prospère et tolérant, un aimant pour les talents internationaux et un foyer pour les pionniers et innovateurs qui façonneront le monde de demain ; un pays qui soit « le meilleur ami et voisin de nos partenaires européens », mais qui vise aussi « par-delà les frontières de l’Europe à restaurer ses relations avec d’anciens amis et à en créer de nouvelles avec d’autres ».

« This Government has a Plan for Britain. » Pour assurer la prospérité et la tolérance en Globale-Bretagne, le « Plan » prévoit-il post-Brexit de fermer ses frontières et d’y reconduire les talents et pionniers européens qui y résident ? Même les allochtones de la haute finance dans la City et de la Premier League de football ? Les anciens amis du Royaume Uni, les colonies de son ancien Empire, se réjouiront de la main tendue : ils n’attendaient qu’elle pour se « globaliser » (pensez à l’Inde !). Quant à ses nouveaux amis, Madame May pense-t-elle à la Chine qui lui financera et lui construira ses nouvelles centrales nucléaires ?

Détricotage de l’UE ?

« Nous ne souhaitons pas un détricotage de l’Union européenne, dit Madame May, il est de l’intérêt national de la Grande-Bretagne que l’Union européenne réussisse. » (Bon sang mais c’est bien sûr ! Voilà pourquoi l’ineffable actuel ministre des Affaires étrangères du Royaume Uni, Boris Johnson, « Brexiter » dans l’âme, a récemment confié au président de la Turquie qu’il aiderait cette dernière à entrer dans l’Union européenne…) Mais, a expliqué Theresa May (de Gaulle en avait fait autant il y a plus d’un demi-siècle), « nos traditions politiques sont différentes ; contrairement aux autres pays européens, nous n’avons pas de constitution écrite ; c’est le principe de la souveraineté du Parlement qui fait office de règlement constitutionnel ».

Ce ne serait donc que par fâcheuse étourderie que le Gouvernement britannique avait, en un premier temps, décidé de se passer de l’avis dudit Parlement souverain avant d’enclencher la procédure de l’article 50 permettant à la Grande-Bretagne de sortir de l’Union européenne. La Cour Suprême du Royaume Uni avait finalement été saisie sur la question de savoir si le Parlement britannique devait être consulté. L’arrêt est attendu. Madame May a toutefois retenu la leçon : elle a annoncé dans son discours qu’elle soumettra l’accord à intervenir entre la Globale-Bretagne et l’Union européenne aux deux chambres du Parlement. Ce qu’elle n’a, par contre, pas révélé, c’est ce qui se passerait si le Parlement britannique rejetait l’accord…

Un point est clair : la Globale-Bretagne de demain cessera de faire partie du « marché unique ». Elle cherchera, en lieu et place, « un accès aussi large que possible à ce marché au travers d’un accord de libre-échange nouveau, global, audacieux et ambitieux », c’est-à-dire aussi en dehors de tout accord douanier existant comme celui qui régit l’Espace économique européen (dont fait partie la Norvège) puisque cet accord prévoit la libre circulation des personnes. Jusqu’où ses partenaires européens ont l’intérêt politique et économique à laisser la Globale-Bretagne pratiquer la politique du « pick and choose » (le choix à la carte, « opt in, opt out ») déterminera in fine ce que « Brexit means Brexit » signifiera réellement.

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  • C’est très vague tout cela , chacun peut voir midi à sa porte.

  • Lol bah justement son discours nous apprend rien ça reste de la communication et rien d’autre.

    • a mon humble avis personne n’a réellement écouté son discours il était en anglais pour les anglais et accessoirement pour les autres L’avantage c’est que nous n’aurons plus loin a aller pour faire des economies

  • Theresa May fait ce qu’elle peut pour préserver les intérêts du RU dans une situation dont elle a hérité. Inutile pour le Brexit ou le Trump-in de s’associer aux cris de putois d’un establishment politique et médiatique qui a poussé le bouchon un peu loin et est incapable d’en tirer la leçon.

  • M Corbyn (excellent pour une fois, Irony Lady, chuckle chuckle) et Mme Merkel ne semblent pas partager vos difficultés de compréhension.
    Le Royaume Uni va contrôler les entrées et les sorties a ses frontières, ce qui apparemment est incompatible selon l”EU avec l’accès libre au marché EU.
    Donc, bien que ridicule, nous nous approchons très rapidement d’un régime de douanes ou d’une contribution malgré tout au budget de l’EU. Ce qui sous entend une partie serrée en terme de négociations. Je ne sais pas comment vous, vous faites dans la vie, mais perso, j’évite de montrer mon jeu dés que la partie commence. Bref, ce qui a été fort peu aimablement signifié hier, c’est que si l’EU voulait d’un HK en face de Calais pendant qu’elle se perdait dans un délire de constructivisme a la mode ti livre rouge ou plus vraisemblablement Kafka, aucun problème, le RU s’adaptera fiscalement et diplomatiquement. C’est du chantage en bonne et due forme, quelque chose que Mme Merkel a très bien compris, et c’est le pire cauchemar de Corbyn, qu’il a également très bien compris, d’ou, a mon avis, sa meilleure performance de tous temps au parlement hier après midi.
    Vous parlez d’ironie, vous réchauffez d’ailleurs celle assez adipeuse du Guardian (no comment), mais manquez le meilleur.
    – Le RU est a la croisée des chemins. Soit elle reste sur une base social démocrate européenne classique, soit elle prend le large sur un modèle économique libéral, pour le coup, le terme “ultra libéral” serait presque justifié. L’ironie de ce référendum censé rendre la voix au peuple est que ce destin n’a jamais si complètement échappé a ce même peuple au moment ou l’histoire s’accélére. Le RU risque d’être encore une fois en total unisson avec les USA. L’intervention de M Trump est tout sauf une coincidence.
    – Si d’aventure le RU prenait la pente d’une libéralisation accrue pendant que le continent faisait le chemin inverse, ce serait délicieux que Mme May en soit l’artisan, ses tendances étatistes étant particulièrement marquées (cf son discours lors de la dernière convention Tories).

    Bref, pas pour la première fois, votre analyse n’en est pas une, vos états d’âme sont certes compréhensibles et sans doute motivés par votre humanisme hors du commun a contraster bien évidemment avec la mesquinerie et fourberie de mes compatriotes, mais bon, le sujet mérite largement mieux qu’un traitement hystérique de surface. Pour ca, je n’ai qu’a acheter le dernier Guardian.
    Le RU est a contre courant du continent depuis l’élection de Mme Thatcher. Alors oui, certes, c’était quelques centimètres au nord pendant que le continent faisait quelques centimètres au sud. Ca ne se voit pas. Quelques secousses. des frictions plus ou moins palpables. On s’habitue. Jusqu’au séisme et aux volcans, jusqu’au moment ou l’on se dit que MALGRE l’influx de centaines de milliers de travailleurs étrangers, notamment Français, le royaume compte 1.6M de chômeurs a ramener, par exemple, aux 6.6M de chômeurs dans la république socialiste de France, et qu’une “intégration politique toujours plus soutenue” dans ces conditions est une forfaiture.

    Quand est ce que vous allez foutre la paix a l’ambulance et vous occuper de l’accident?

  • “Il y a un peu plus de six mois, le peuple britannique a voté pour le changement. Il a voté pour un avenir plus radieux pour notre pays…”

    je pense que ceux qui ont voté contre le brexit ont aussi voté pour un avenir plus radieux…brexit ou pas il y a des constantes chez les politiques.

  • Heu..le sort des rosbifs…..on s’en fout comme eux se foutent totalement du sort des grenouilles….et c’est normal et cela devrait être obligatoire pour chaque gouvernement se préoccupant de leurs …..sujets.. cobayes. Rats de laboratoire….

  • Normal, qui va abattre ses cartes à l’orée d’une négociation cruciale? Il ne faut pas non plus prendre tous les politiques pour des tanches

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