Comment enseigner la langue ?

Une langue sert à conter, à raconter… et doit elle-même se raconter.

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Comment enseigner la langue ?

Publié le 27 février 2016
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La langue n’est pas une « matière » comme les autres, et ne devrait pas être traitée comme telle dans l’enseignement primaire et secondaire, puis universitaire. Une langue n’est pas constituée d’un ensemble figé de règles et principes immuables. Aucune matière me direz-vous — mais une langue encore moins, car une langue n’a ni début ni fin.

Acquérir la langue

Comment acquiert-on une langue ? Il est formidable d’observer que nous pouvons tous potentiellement parler toutes les langues du monde ! Handicap mis à part, n’importe quel individu est disposé à acquérir la langue du milieu dans lequel il va évoluer dès la naissance. Il n’y a pas de disposition physiologique initiale, selon nos origines ethniques, qui limiterait l’acquisition d’une langue ou d’une autre. La délimitation géographique de notre milieu d’évolution peut avoir une incidence acoustique à la marge (cf. les travaux du docteur Alfred Tomatis1), qui réduit à la fois les sons que l’ouïe peut distinguer, et donc que la voix pourrait volontairement tenter de (re)produire. Mais c’est la pratique de la langue elle-même qui fixe les phonèmes élémentaires pour lesquels nous adapterons alors au fil du temps notre diction et notre articulation — et qui nous empêchera de prononcer correctement les phonèmes qui lui échappe. Pour reprendre une formule de la sémioticienne Joëlle Cordesse, « nous sommes tous des polyglottes contrariés » !2

Face à cette égalité fondamentale dans notre aptitude initiale à acquérir n’importe quelle langue, comment expliquer cette inégalité apparemment insurmontable dans l’apprentissage et la maîtrise d’une seconde langue ? Joëlle Cordesse observe que les « sociétés qui ne bénéficient pas d’une école pour tous sont généralement multilingues, où les individus sont volontiers polyglottes »3. Le problème, éminemment paradoxal, est donc l’enseignement. C’est la logique même de l’enseignement dans nos sociétés modernes qui distingue les élèves jugés aptes à s’exprimer dans une nouvelle langue, et les autres élèves, jugés de fait inaptes, découragés et même dégoûtés par l’apprentissage et la pratique d’une langue autre que maternelle.

L’enseignement traditionnel

Car l’enseignement tel que nous le concevons traditionnellement consiste à évaluer ce qui est “correct” et à dénigrer voire à punir ce qui est “incorrect”. Parmi les trentenaires aujourd’hui, qui garde un bon souvenir des classes d’anglais quand il était petit ? Si c’est le cas pour vous, c’est que vous étiez jugé apte et encouragé — tant mieux. Les autres comme moi étaient sans cesse repris, brimés dans leur expression spontanée jusqu’à être sommés de se taire, récoltaient mauvaises notes et désapprobation du professeur, quand ce n’était pas railleries ou moqueries. Tant et si bien que l’on finit par ironiser sur ce qui est ressenti comme une incapacité fondamentale pour laquelle on ne peut de toute façon rien faire. On ne cherche même plus à faire l’effort de corriger son accent, on exagère volontairement certaines fautes grossières, et on finit par délaisser la “matière”. Résultat généralisé pour les Français : un niveau d’anglais jugé faible par rapport au reste du monde (enquête EF EPI 2015 : la France occupe la 37ème place sur 70 pays testés).

Les méthodes traditionnelles d’enseignement des langues étrangères sont trop formelles, rigides et peu soucieuses des besoins et motivations véritables des apprenants. Une langue s’apprend par-delà la langue. Pour faire envie, pour donner envie de l’apprendre, une langue doit se raconter, à travers une histoire qui entre en résonance avec nos envies, nos désirs et nos espoirs.

Les manuels scolaires nous ont habitué au contraire : la langue est utilisée pour raconter des histoires, souvent sans queue ni tête, et c’est rarement “l’histoire de la langue” (de ceux qui la parlent, du ou des pays où elle se parle…) qui est racontée. L’approche de la culture, quand elle existe, fait trop souvent référence à une culture “classique” et néglige les aspects plus contemporains, les modes et les tendances, les us et coutumes des jeunes, les aspects plus “underground” ou “branché” (et même ce terme “branché” est déjà trop ringard pour désigner ce qui intéresse et attire vraiment les jeunes…).

La seule obligation d’une bonne note à l’école ou d’une compétence professionnelle de plus à afficher sur un CV n’est pas suffisante. C’est d’abord tel héros ou telle star — parlant cette langue — que nous décidons parfois secrètement de suivre, c’est pour des individus, des cultures et des histoires que nous pouvons nous passionner, et rarement pour la langue en tant que telle (à moins d’être linguiste dans l’âme). Ce qui nous motive, plus ou moins consciemment, ce sont les aptitudes et possibilités offertes par la connaissance de la langue, que nous “mettons en récit” en imaginant et en (ré)écrivant notre scénario de vie. Subordonner ces rêves et ces espoirs à la seule obtention d’une “bonne note” revient à les annihiler.

L’étrangeté de la langue

L’apprentissage doit pouvoir se faire dans un grand bain d’essais où l’erreur n’est pas seulement tolérée mais encouragée, comme passage obligé de tâtonnements et d’expérimentations avant de pouvoir formuler des phrases “correctes” (ou du moins compréhensibles) dans une nouvelle langue. Dans cette perspective, les exercices — de découverte de “l’étrangeté” d’une langue étrangère — proposés par Joëlle Cordesse sont fabuleux4. L’approche neurolinguistique — qui élude notamment le bachotage stérile des règles grammaticales — développée et portée entre autres par Claude Germain et Michel Paradis5 mérite aussi d’être davantage expérimentée par les institutions scolaires et universitaires (ce qui impliquerait en partie de revoir les impératifs des programmes habituels, jusqu’aux modalités des examens).

L’enseignement des langues gagnerait à s’appuyer davantage sur la narration, le récit, le scénario de vie, et plus généralement la communication. Il est surprenant d’observer à quel point les spécialistes des langues (et les enseignants en général…) peuvent se révéler de bien piètres communicants.

Le contrôle strict des connaissances par régurgitation de listes de vocabulaire indigestes, de structures grammaticales figées, à restituer principalement à l’écrit, plombe l’apprentissage des langues étrangères et explique pour une large part la faiblesse des Français dans ce domaine. Les « cours de langue » tels que nous les avons longtemps conçus n’ont plus lieu d’être. La notion même de note pour évaluer la maîtrise d’une langue est une absurdité totale. Il faut ré-introduire le plaisir et les désirs de l’apprenant au cœur de son apprentissage, et lui offrir la possibilité de prolonger et d’élargir sa propre histoire, en la mêlant avec celle de la langue avec laquelle il veut essayer de la raconter.

  1. Lire notamment son ouvrage de présentation générale Nous sommes tous nés polyglottes, Dr Alfred Tomatis, Ed. Fixot, 1991.
  2. Joëlle Cordesse, Apprendre et enseigner l’intelligence des langues, Ed. Chronique sociale, 2009.
  3. Ibid.
  4. Ibid.
  5. Publications de Claude Germain sur le site de l’UQAM : https://uqam1.academ…u/ClaudeGermain (voir notamment Évaluation de l’approche neurolinguistique auprès d’apprenants chinois de français en première et en deuxième année d’université).
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  • Et si on commençait par apprendre à écouter, lire et écrire sa langue maternelle avec le sens critique

    Celle qui ferait, par exemple, immédiatement « réagir » quand on entendrait le soir d’une élection  » Les habitants de cette ville m’ont élu maire .. », alors que bien souvent seule une minorité des inscrits a de fait désigné le vainqueur.

    Une réaction qui a la longue devrait empêcher le dit-maire d’affirmer des contre-vérités du genre pour autant que donc il n’avait pas appris à l’école primaire à ne pas les formuler .

    Alors si on n’a pas appris à faire preuve spontanément de sens critique avec sa langue maternelle , rares sont ceux qui peuvent peser leur mots dans une langue non maternelle, ce,qui fait penser au célèbre « Tradutore traditore ».

    Combien d’auteurs sérieux sur des sujets capitaux, et en particulier métaphysiques, sont gravement trahis ?

  • Il y a avant tout une chose que l’on n’enseigne pas à l’école : c’est que à défaut de faire ce que l’on aime, il faut aimer ce que l’on fait. C’est de fait la seule façon d’apprendre efficacement.

    De plus, l’apprentissage d’une langue passe tôt ou tard par la connaissance de la culture du pays. Et le plus tôt est le mieux.

    Ainsi, sur un plan pratique, la meilleure façon pour les jeunes d’aborder l’anglais est probablement en apprenant le texte des chansons en anglais. (Principe qui fera rugir les défenseurs de notre culture et de notre Sacem). La pire façon étant bien sur de tenter d’apprendre une langue de façon académique par l’étude des règles de grammaire – alors qu’on utilise ces règles dans sa propre langue sans même les comprendre.

    Il faudra en outre qu’on m’explique comment on peut en France étudier l’anglais à l’école pendant des années et ne pas savoir ce que veut dire : gonna gotta ou wanna.

    Je me demande aussi si on ne gagnerait pas à enseigner l’anglais comme :

    Tou bii or nat tou bii, dat iz ce qouecheune

    pendant quelques années avant de commencer à essayer de l’écrire. (Et de raffiner la maîtrise de la prononciation).

    • @pragmat : « Ainsi, sur un plan pratique, la meilleure façon pour les jeunes d’aborder l’anglais est probablement en apprenant le texte des chansons en anglais. (Principe qui fera rugir les défenseurs de notre culture et de notre Sacem). »

      Bonne remarque, les droits d’auteur, parlons-en ! La législation des pays européens limite les enseignants et les élèves d’utiliser des œuvres protégées dans un contexte pédagogique. Bêtise ultime de la propriété intellectuelle ! Voici un article qui fait le point sur ce sujet : http://scinfolex.com/2016/02/22/la-france-a-t-elle-la-pire-exception-pedagogique-deurope/

      @pragmat : « La pire façon étant bien sur de tenter d’apprendre une langue de façon académique par l’étude des règles de grammaire – alors qu’on utilise ces règles dans sa propre langue sans même les comprendre. »

      Et c’est en effet précisément l’un des principes au cœur de « l’approche neurolinguistique » évoquée dans l’article.

  • La meilleure façon d’apprendre une langue (pas toujours facile à mettre en oeuvre, c’est vrai) :

    1. Apprendre un minimum de quelques règles de base comme conjugaison et construction d’une phrase

    2. Vivre dans le pays où se parle cette langue

    3. Se trouver et vivre avec un (e) amoureux (se) qui ne parle pas sa propre langue et éviter tout contact avec ceux qui la parlent.

    En 2 mois, on parle couramment, et en 6 mois on commence à oublier sa langue maternelle..

  • Attention à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain!
    Les propos de cet article font penser à ceux des pédagogistes qui opposent savoirs et compétences, avec le résultat que l’on constate.

  • Pas besoin de partir à l’étranger pour parler une autre langue, même si ça reste la voie royale, tout le monde n’en a pas les moyen financier, par contre on peu se mettre en immersion facilement de nos jour en restant chez soi.
    LIsez des BD, manga, éduquer son oreille à la sonorité d’un nouvelle langue grâce au série en V.O, aller sur des forum,lire des articles sur les sujets qui vous passionne en anglais etc…

    • Vous avez raison, c’est la bonne méthode. Rien n’empêche non plus de lire les auteurs classiques et d’apprendre un minimum de grammaire pour pouvoir comprendre et se faire comprendre.

  • Excusez-moi, Monsieur Becmeur, mais encourager l’erreur me semble ridicule. Quand un enfant apprend sa langue maternelle, ses parents doivent corriger ses inexactitudes pour l’améliorer. Sinon il persistera dans ses approximations et finira par ne plus pouvoir s’exprimer de façon claire ni même comprendre les autres! Quand on sait dire en anglais, ‘I have got to » et « I want to », il est aisé ensuite de faire le lien avec gotta et wanna, mais l’inverse n’est pas forcément vrai! La grammaire aide à structurer sa pensée.

    • .je suis française j’ai étudié dans des universités américaines et anglaises, et j’approuve la pensée de l’auteur quand celui-ci dit qu’il faut encourager l’élève à commettre des erreurs. Il sous entend une méthode pédagogique qui consiste à corriger les fautes sans émettre de jugement. C’est ce que font les professeurs en langues étrangères dans d’autres pays. J’ai apprécié l’anglais parce que mes professeurs britanniques reprenaient mes fautes sans me ridiculiser.Je vous donne un exemple:
      Elève qui commet une faute grave de grammaire : I can to do it
      professeur britannique: You mean you can do it?
      Elève répète et se corrige: Yes, I can do it
      Alors qu’un professeur français se moquerait de l’élève et dirait « oh I can to do, n’importe quoi. ».
      et on n’apprend rien du tout.. juste l’humiliation!! il faut reprendre les erreurs sans porter de jugement.
      Merci A l’auteur de son article.. It is an engrossing and well written article.

      Marie, Chicago, Etats Unis.

      • Croyez-vous vraiment que le but des professeurs de langue étrangère français est d’humilier et de se moquer des élèves qui font des fautes? Ce n’est pas mon expérience! Quant à trouver l’article « engrossing », c’est-à-dire, captivant, c’est un peu exagéré, non? Qu’il soit bien écrit, c’est quand même un minimum!

        • En tout cas vos échanges le sont, captivants ! 😉 A commencer par cette confusion entre Marie et Marie… Comme la situation d’un professeur face à plusieurs élèves portant le même nom… 😉

          « Croyez-vous vraiment que le but des professeurs de langue étrangère français est d’humilier et de se moquer des élèves qui font des fautes ? »
          Ce n’est certainement pas leur but. Mais qu’en est-il dans la pratique ? Tous vos professeurs furent merveilleux ? Tant mieux pour vous. Il se trouve que ce n’est pas le cas de tout le monde, très loin de là malheureusement.

          Voici un article qui vous devrait vous intéresser toutes les deux : https://medium.com/hack-tes-kids/les-presqueurs-et-les-polariseurs-9ec51cacf985#.1dcb41kkr
          Le seul fait de répondre « faux » ou « presque » à un enfant produit des différences phénoménales. Même sans être malveillants, les profs ne maîtrisent pas toujours ces subtilités dans leur communication, et briment parfois involontairement certains esprits potentiellement brillants.

  • J’ai lu avec intérêt votre article.

    Il semblerait que vous n’ayez pas connaissance du fait qu’en France, depuis au moins 2005, l’enseignement des langues étrangères se fait selon les recommandations du CECR (Cadre Européen Commun de Référence pour l’apprentissage des langues étrangères), comme dans le reste de l’UE. http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/cadre1_fr.asp

    Contrairement à ce que vous avançez dans votre dernier paragraphe, l’apprentissage des langues ne se fait plus par mémorisation de « listes de vocabulaire indigeste », ni de « structures gramagticales figées ». Tout est fait en « contexte » et l’apprenant doit, de lui-même, déduire la règle de grammaire à partir d’un texte présenté souvent en « aveugle » (on l’entend avant de le lire, méthode permettant soi-disant et normalement de développer la compréhension orale).

    Ces méthodes dites déductives et découlant d’une pédagogie qualifiée d' »actionnelle » (on amène l’étudiant à réaliser une tâche qui va lui être utile dans la vie quotidienne: écrire un email, réserver une chambre, répondre au téléphone, faire des achats, voyager, voire même envoyer une plainte…) sont appliquées aussi et depuis encore plus longtemps dans l’aprentissage de la langue maternelle (en France, le français).

    La grammaire « traditionnelle, hors contetxe » (et l’orthographe grammaticale), le lexique, l’étymologie sont délaissés et font l’objet d’anathèmes. Ceci a eu pour résultat de créer des générations d’étudiants ayant leur baccalauréat en poche certes mais qui doivent ensuite suivre des cours de remédiation soit – AU PIRE- en orthographe, conjugaison et grammaire (c’est-à-dire la base même de la mécanique structurale de la langue) soit – AU MIEUX- en dissertation… Ce type de cours n’était pas offert dans les années 80 et 90, quand le niveau de pratique de la langue n’était pas encore tombé si bas, justement parce que l’apprentissage de la langue se faisait de manière traditionnelle…

    Un apprenant qui ne maîtrise pas sa langue maternelle, qui n’en connait pas la mécanique, aura du mal à en apprendre une autre. Il est peut-être temps, justement, de se réapproprier sa propre langue, de maintenir dans les programmes l’initiation obligatoire au latin et au grec, avec la possibilité de continuer ces « langues mortes » en option; de s’assurer que les textes littéraires ne disparaissent pas au profit des manuels d’instruction, rapports et autres textes « utiles », si l’on veut s’assurer d’un bon niveau linguistique.

    Le CECR -que je suis obligée, de par ma fonction, d’appliquer pour enseigner le français à des apprenants étrangers-, n’est autre que le fruit de théoriciens qui ne sont pas sur le terrain. Ils ne voient pas l' »Eurêka » apparaître sur le visage des étudiants quand, foin des recommandations dudit CECR et après maintes tentatives de faire découvrir une règle par déduction, on finit par donner le « sésame » (la règle « figée » que vous mentionnez) qui ouvre les portes de la langue… et là, comme par hasard et en conflit ouvert avec le CECR, l’apprenant, libéré de la dictature de la déduction, se met à faire des progrès fulgurants… Il y a quand même du bon dans la tradition, après tout!

    • « se met à faire des progrès fulgurants … »

      C’est le noeud du problème. Il ne faut pas décourager dans un premier temps, mais il faudra bien tôt ou tard acquérir l’ensemble des connaissances : orthographe, conjugaisons, grammaire, vocabulaire … Dans tout apprentissage, on est confronté régulièrement à des points de blocage. Et les différentes méthodes génèrent ces points de blocage d’autant plus surement qu’elles sont rigidement pensées et appliquées.

      Une approche qui me semble intéressante (mais c’est peut-être un cas personnel) est d’expliquer la nuance sémantique qu’induit dans une langue une faute de grammaire, de prononciation ou un mauvais usage du vocabulaire. C’est ce qui peut rendre risible ces fautes et nuit évidemment à la compréhension. D’un autre côté, cela peut créer des points de repère et démontrer que ces règles ont une bonne raison d’exister – et que la langue est quelque chose de cohérent. Du coup, toute faute est l’occasion d’apprendre une dizaine de choses dans la langue : étymologie, usages, collisions sémantiques, homophonie, synonymes, culture, grammaire …

      L »intérêt d’un professeur est de pouvoir expliquer et faire comprendre et non de faire du rabâchage en appliquant une méthode. Avis à l’Education Nationale et à ses théoriciens pédants.

    • J’ai lu avec intérêt votre réponse.

      Premier paragraphe : pensez-vous mettre votre interlocuteur dans de bonnes dispositions pour échanger ? J’ai pris connaissance du CECR dans le cadre d’études de FLE. Mais votre façon de supposer le contraire semble chercher à tout prix une lacune, à mettre l’autre en défaut avant même d’argumenter. Comme la plupart des enseignants auxquels j’ai trop souvent du faire face. On retrouve le jeu d’un autre âge du docte enseignant et de l’élève ignorant, façon VGE / Mitterrand. Celui qui sait VS celui ne qui ne sait pas, coupable d’ignorance condamné de fait à un docile silence. Aucune bienveillance, on pose d’emblée l’idée que l’autre ne sait pas, qu’il a osé parlé sans savoir, qu’il se trompe et qu’il aurait donc du se taire. On interroge pour vérifier, pour piéger, pour prendre en défaut. Voilà précisément le genre de problème de communication que je veux avant tout pointer du doigt. En rhétorique, on recommande plutôt de démarrer un échange par une forme de captatio benevolentiae.

      Mais ne nous arrêtons pas à cela. Vous faites valoir l’existence du CECR, pour expliquer ensuite que nombre de profs prennent leurs libertés avec. Donc, à quoi bon ce document s’il n’est pas appliqué ? Légère contradiction qui apparaît d’autant plus en relisant votre dernier paragraphe, notamment :
      « Ils ne voient pas l’Eurêka apparaître sur le visage des étudiants quand, foin des recommandations dudit CECR et après maintes tentatives de faire découvrir une règle par déduction, on finit par donner le sésame »
      L’Eurêka survient précisément parce que les étudiants ont d’abord du faire face à un problème apparemment insoluble. Leur offrir d’emblée le sésame présente peu d’intérêt. C’est pourquoi j’ai cité, entre autres, les exercices de « découverte de l’étrangeté d’une langue » de Joëlle Cordesse. Aucune langue vivante n’est « logique », et ce qui compte est de ne pas freiner la pratique. Reprendre sans cesse un élève en lui disant qu’il a faux, voilà ce qui est faux – ou disons plutôt que cela marche bien avec certains profils, ceux-là même qui deviendront probablement profs par la suite, et met sur le carreau la plupart des autres. Mon souci est de prendre en compte ceux qui ont des difficultés, donc je m’attache peu à ce qui marche avec les bons élèves – à partir du moment où les bons le sont surtout par contraste avec les mauvais.

      Vous écrivez par ailleurs :
      « Contrairement à ce que vous avançez dans votre dernier paragraphe, l’apprentissage des langues ne se fait plus par mémorisation de listes de vocabulaire indigeste, ni de structures gramagticales figées. »
      Il suffit d’ouvrir n’importe quel manuel de langue et d’en observer la construction sommaire. Il suffit de suivre n’importe quel cours de quasiment n’importe quel niveau. Il y a bien des changements depuis plusieurs années. Mais les véritables innovations en matière d’apprentissage des langues étrangères sont généralement le fait d’éditions commerciales, ou de formations professionnelles, et non scolaires. Et même sur ces plans elles demeurent très rares.

      Ce que je retiens donc surtout de notre échange, c’est que les cadres ou directives, que ce soit au niveau européen, national ou même local, coïncident rarement avec les exigences des apprenants et de chaque relation au niveau interindividuel. Par ailleurs, ces relations peuvent être améliorées par une meilleure communication, à l’initiative de l’enseignant. Chacun doit pouvoir développer son style, affiner sa méthode, s’adapter à ses élèves, tout en s’enquérant du bien fondé scientifique des principes pédagogiques élaborés et appliqués. Il y a du bon dans la tradition, encore faut-il savoir quoi précisément, et ne pas se fermer à l’innovation et aux changements par principes (à ce propos, mon article précédent, par lequel je cherchais précisément à anticiper les critiques des suivants : http://www.contrepoints.org/2016/02/19/239375-est-il-possible-davoir-lesprit-ouvert )

  • Un autre point qui me semble important : nos leaders politiques et médiatiques sont peu nombreux à parler ne serait-ce que l’anglais. Notre chef de l’état qui a pourtant fait de longues études, le parle mal, avec un horrible accent et n’a jamais fait d’effort pour corriger ça. Quand on entend Alexis Tsipras parler anglais, on a honte pour nos dirigeants. Un peu plus.
    Alors il faudrait peut-être commencer par donner l’exemple.
    Y compris en français, ou le même président arrive à mettre des pauses et des virgules a des moments, a des endroits où la langue ne le supporte pas.
    Bref, vaste sujet…

  • Sans vouloir contrarier Monsieur Valentin Becmeur qui ne maitrise pas la langue anglaise…sinon je suis certaine qu’il l’aurait précisé…au vu de cette plume affichant une certaine arrogance ..) certains enseignants n’ayant pas attendu de lire l’Sans vouloir contrarier Monsieur Valentin Becmeur qui ne maitrise pas la langue anglaise…sinon je suis certaine qu’il l’aurait précisé…au vu de cette plume affichant une certaine arrogance ..) certains enseignants n’ayant pas attendu de lire l’article de cette personne pour réaliser que la didactique des langues nécessitait « certaines » modifications pour ne pas parler de la pédagogie…points abordés dans cet article, travaillent déjà de manière différente de celle décriée, et ce en collaboration avec des orthophonistes, des neuropsy qui suivent les élèves en question. Pourtant..en ce qui me concerne je ne ressens pas la nécessité de m’en targuer en écrivant un article…ringard….(je dirais désuet) pour reprendre le terme de ce journaliste. À moins qu’il ressente le besoin de régler une vieille querelle datant du collège en lui et son professeur d’anglais, les détails étant d’ailleurs mentionnés en amont. Les lecteurs de Contrepoints ne sont pas là pour compatir aux frustrations scolaires de leurs journalistes.article de cette personne pour réaliser que la didactique des langues nécessitait « certaines » modifications pour ne pas parler de la pédagogie…points abordés dans cet article, travaillent déjà de manière différente de celle décriée, et ce en collaboration avec des orthophonistes, des neuropsy qui suivent les élèves en question. Pourtant..en ce qui me concerne je ne ressens pas la nécessité de m’en targuer en écrivant un article…ringard….(je dirais désuet) pour reprendre le terme de ce journaliste. À moins qu’il ressente le besoin de régler une vieille querelle datant du collège en lui et son professeur d’anglais, les détails étant d’ailleurs mentionnés en amont. Les lecteurs de Contrepoints ne sont pas là pour compatir aux frustrations scolaires de leurs journalistes.

    • Journaliste, c’est un bien grand mot ! ^^ Je suis entrepreneur, formateur professionnel spécialisé dans la communication et la prise de parole, et développant des supports pour l’apprentissage des langues. Je ne maîtrise aucune langue – pas même le français apparemment, vu les difficultés pour nous entendre. Mon expérience personnelle a certainement déterminé une part de mes préoccupations, jusqu’à en faire une activité professionnelle.

      …L’enseignement est décidément un domaine réservé. A chaque discussion sur le sujet, tous me font valoir qu’il ne faudrait pas être aussi critique, que les choses changent, évoluent, que des modifications sont en cours, que de gros progrès ont été faits depuis plusieurs années… Formidable ! Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes… Sauf pour les mauvais, les parias, les cancres, appelez-les comme vous voulez, ceux qui continuent d’avoir des difficultés malgré tous les dispositifs novateurs mis en place (en réalité encore exceptionnels et pas toujours soutenus par la hiérarchie), ces dispositifs qui n’imposent jamais qu’une seule vision de l’apprentissage, sans laisser une vraie liberté d’explorer, sans remettre en cause les conceptions sous-jacentes de la notion même d’enseignement de notre chère Education nationale.

      Mon engagement est de fait à la marge, je ne suis pas du côté des bons élèves, je suis du côté des cancres.

  • On apprend à parfaitement parler une des langues les plus difficiles au monde, car on nous montre une image de voiture et on associe cela à un mot « voiture »…. la langue anglaise, on l’apprend un peu comme cela, mais très vite on nous dit que « voiture » se dit « car »… et la les problèmes commencent.
    Nous devrions simplement apprendre l’anglais comme on apprend le Français dès la primaire, et pas autrement, et surtout en ne traduisant jamais oh combien jamais…. du Français a l’anglais.

    Ensuite, quand je vois mon fils de 3 ans, compter en anglais jusqu’a 7, connaitre nombre de lettres de l’alphabet en anglais, quand il voit une voiture de police, il sait dire « voiture de police » mais il dit aussi « police car »… c’est tout simplement, car au lieu de le faire regarder des dessins animés en Français, j’avoue ne le laisser regarder majoritairement des dessins anglais sur youtube. Mais a aucun moment je lui dit que « voiture de police » c’est « police car », il a associé seul que l’image d’une voiture de police ce sont les 2 mots.

    Voila pour mon expérience, mais il est vrai qu’après X années d’écoles à « apprendre l’anglais » quand je suis parti vivre à Londres…. les débuts ont été monstrueusement dur, car il faut :
    – comprendre un polonais, un londonien, un écossais,…. et çà c’est dur
    – le traduire mentalement en Français
    – pour répondre, on doit construire la phrase en Français
    – puis la traduire en anglais

    Après le temps passé, on commence à faire le jeu seul, sans besoin de tout le temps traduire (et donc mal traduire) mais çà prend beaucoup de temps, vraiment beaucoup.

  • Quoi qu’il en soit, Schola Nova Belgium accueille chaque année des élèves de primaire et de secondaire parlant le latin européen. Vous pouvez ou non manquer le train ou même croire que cela n’existe pas, mais nier une chose n’est-ce pas aussi s’en exclure?

    Valete omnes qui Latine loqui vultis. Venite ad nos et felices estote!

    Pr Stéphane Feye
    Schola Nova (non soumise au décret inscriptions) – Humanités Gréco-Latines et Artistiques
    http://www.scholanova.be
    http://www.concertschola.be
    http://www.liberte-scolaire.com/…/schola-nova
    http://online.wsj.com/news/articles/SB10001424052702303755504579207862529717146

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Jeudi 5 décembre 2023. L’ange Gabriel (Attal) descend sur la France, porteur d’une bonne et d’une mauvaise nouvelle.

Commençons par la mauvaise : les conclusions de la dernière étude PISA pointent les résultats catastrophiques des petits Français, en particulier en mathématiques. Une « baisse historique » des performances, peut-on lire çà et là. Rien de surprenant pourtant : l’enseignement public est en piteux état depuis des décennies. Il ne se relèvera pas spontanément de cette longue maladie.

Heureusement – et voilà la bonne ... Poursuivre la lecture

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Définir le contenu des programmes d’enseignement n’est pas simple. Il faut choisir et donc éliminer. Les priorités sont variables selon les milieux sociaux, les croyances idéologiques ou religieuses, les engagements politiques.

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Dans une démocratie, l’école doit-elle instruire ou éduquer ? En réalité, il faut nécessairement répondre : les deux, mon général. Tout est une question de nuances dans ce domaine.

 

Pas d’instruction sans éducation

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Le Conseil scientifique de l’Éducation nationale (CSEN) a récemment mis en lumière un problème majeur dans l'enseignement des mathématiques en France : un énorme déficit de compréhension des fractions chez les élèves.

Dans sa dernière note d’alerte, il relève que seule la moitié des élèves qui entrent en sixième savent répondre à la question « Combien y a-t-il de quarts d’heure dans trois quarts d’heure ? » : 22 % placent correctement la fraction 1/2 sur une ligne graduée de 0 à 5, confusion fréquente 1/2 avec 1,2, ou encore 2/1 avec 2... Poursuivre la lecture

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