Constitution, la serpillière du Clan Hollande

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Conseil constitutionnel, Paris - Crédit photo : Jeanne Menj via Flickr (CC BY-ND 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Constitution, la serpillière du Clan Hollande

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 11 février 2016
- A +

On peut le dire : c’est une belle victoire du terrorisme. Il aura certes fallu un massacre particulièrement violent, mais c’est fait, de façon rapide et définitive : l’État français a bel et bien plié, lamentablement, devant la peur, la corruption, la facilité et l’opportunisme.

Et c’est dans la nuit du 8 au 9 février que le législatif le plus lâche de la cinquième République aura choisi de servilement emboîter le pas à l’exécutif le plus veule (ou pas loin) que la France ait connu : l’Assemblée nationale a adopté ce lundi soir, à 103 voix pour, 26 contre et 7 abstentions, le premier article du projet de loi de révision constitutionnelle prévoyant l’inscription de l’état d’urgence dans la Constitution.

Difficile de savoir par quel bout commencer pour expliquer l’étonnement, que dis-je, la consternation qui envahit tout citoyen lucide lorsqu’on évoque le sujet.

Bien sûr, il y a le nombre de joyeux drilles conviés à ce massacre des libertés. Sur les 577 députés que les citoyens payent pour se déterminer, de façon claire, en leur nom, seuls 136 avaient jugé bon de participer au vote (moins d’un quart), et seulement 106 ont voté pour (moins d’un cinquième). Oui, vous avez bien lu : une révision majeure de la constitution a été votée par moins d’un cinquième des députés de la nation, députés qui, ensuite, viendront pleurnicher sur l’abstention toujours plus grande des citoyens (qui suivent donc leur exemple), et sur la baisse de plus en plus évidente de crédibilité de la parole publique (la leur).

député - branleur mot compte triple

Quelques voix se sont étonnées, ont même ouvertement fustigé ce nombre aussi faible de députés présents pour un tel vote capital. Tant mieux. Mais le souci est qu’en réalité, ce genre de mésaventure n’est pas une exception, c’est la règle. On se souvient d’autres votes, tout aussi importants, qui furent expédiés nuitamment par une petite troupe d’élus plus ou moins heureux d’avoir réussi leur forfaiture discrètement.

D’ailleurs, on pourra observer que même le débat sur la déchéance de nationalité, bidule médiatique qui a bien mobilisé tout ce que le pays compte d’élus névrosés en déficit d’attention, n’a pas réussi à remplir l’hémicycle : 332 députés avaient jugé bon de faire les marioles ce jour-là pour cet abominable bricolage constitutionnel. Si ça fait presque trois fois mieux que pour la constitutionnalisation de l’état d’urgence, il reste encore 42% de députés en goguette. L’épidémie de piscine-poney bat son plein dans les rangs des élus actuellement…

Or, on peut tortiller les choses comme on veut, il reste incroyable que, dans une démocratie qui voudrait vaguement être représentative, on puisse faire passer des lois alors que des centaines de députés sont absents ; il semble invraisemblable qu’un quorum ne soit pas imposé, et que ne soit pas mis en place une ligne de conduite, ou, soyons fou, une certaine éthique de la part de ces élus que nous payons pour ça.

En outre, on doit se poser la question : en quoi le fait de modifier la constitution va-t-il aider la lutte contre le terrorisme ? En quoi les petites agitations de l’hémicycle permettent-elles actuellement de sécuriser un peu le territoire ? Encore une fois, au prétexte de mieux préparer le pays en cas de grave danger, en agitant le chiffon pratique d’un terrorisme qui continue, en France, de faire toujours moins de morts que le cancer, les accidents domestiques ou le chômage dont le gouvernement prétend s’occuper, encore une fois, on fait passer tout et n’importe quoi dans les textes…

Enfin, il y a le sujet lui-même.

Feindre de vouloir mieux définir l’état d’urgence dans la constitution, c’est surtout donner l’occasion de passer, en loucedé, des petits amendements scélérats. Et ça n’a pas loupé.

Puisqu’il fallait constitutionnaliser l’état d’urgence (ah bon ? Le fallait-il vraiment ?), c’est sans difficulté qu’un amendement fut déposé par un certain Sébastien Denaja et voté dans la foulée, disposant que « pendant toute la durée de l’état d’urgence, le Parlement se réunit de plein droit et l’Assemblée nationale ne peut être dissoute ».

Pendant l’état d’urgence, l’Assemblée ne peut être dissoute. Bah bien sûr.

Je me demande exactement ce qui peut motiver ce genre de modifications (ou quelle que modification que ce soit) lié à l’état d’urgence. De la même façon qu’on peut très bien imaginer moult situations où la dissolution de l’Assemblée pendant un état d’urgence aggraverait la situation, on peut en trouver tout autant où l’en empêcher rendrait la situation inextricable. Tripoter un texte aussi important à chaque événement aussi marquant soit-il, c’est la marque de fabrique de bricoleurs compulsifs qui croient faire mieux que leurs aînés en n’ayant jamais prouvé avoir seulement su faire aussi bien.

Parallèlement, on comprend aussi que l’état d’urgence annulera toute velléité de l’opposition de contrecarrer un 49.3 qui ne servira, de fait, à rien du tout. Pratique pour tout excité qui voudrait tenter des aventures législatives amusantes.

Heureusement que nous avons de sérieux professionnels à l’Exécutif ! Si nous avions une bande de clowns et de corrompus, j’aurais été inquiet.

Mais le plus intéressant dans tous ces rebondissements constitutionnels, c’est le timing diabolique qu’on nous impose : il ne s’est pas passé trois mois pour que des modifications majeures de la constitution soient mises en place, que des milliers de perquisitions soient menées, que des kilomètres de texte de lois soient votés visant à mettre en coupe réglée tout ce que le citoyen pouvait avoir comme nouvelle liberté – notamment dans le domaine numérique – et réduire encore un peu tout ce qu’il avait encore comme maigres libertés par ailleurs. Trois mois.

gifa trois mois

Et puisqu’on parle timing diabolique, comment ne pas rapprocher ce qui vient de se passer, les bricolages constitutionnels en cours, et la nomination de Fabius au Conseil Constitutionnel ? Oh, rien de vraiment étonnant puisque cela faisait des semaines qu’on murmurait ce débouché pour le factotum apparemment en charge du ministère des Affaires étrangères. Mais quand bien même, on admirera le petit côté cynique du président Hollande qui, d’un côté, fait modifier la constitution par une assemblée à sa botte (ou à peu près, quand elle est présente), et, de l’autre, nomme au Conseil, garant de cette constitution, un ministre qui n’a pas su prouver son innocuité, ni comme Premier ministre, ni comme second.

Et enfin, sans doute par l’ironie d’un sort chafouin ou blagueur, on apprend que la République Irréprochable du président pédalophile a été obligée de reporter le procès en fraude fiscale de Jérôme Cahuzac, ex-ministre du gouvernement Ayrault, pour une question … de constitutionnalité bien sûr.

À mesure qu’ont crû les menaces sur la République, depuis les attentats jusqu’aux pertes de monopoles via internet en passant par l’effondrement de la crédibilité de la parole publique, l’exécutif, suivi de près par un législatif devenu simple chambre d’enregistrement, a été obligé de répondre, avec le seul outil à sa portée intellectuelle, dans un crescendo funeste : d’abord des décrets, des lois, puis des lois organiques et enfin le tripotage plus ou moins massif de la constitution. Incompétent dans trop de choses et maintenant dangereux dans toutes, le pouvoir passe ses nerfs et fait dans l’esbroufe médiatique en allant inscrire son inaptitude jusque dans le texte fondateur de la République…

Décidément, sujette à toutes les torsions et apte à tous les nettoyages, la Constitution est devenue la serpillière du clan Hollande.

hollande ceux qui attendent plus rien
—-
Sur le web

Voir les commentaires (27)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (27)
  • Mots très durs. Mais ô combien justifiés ❗

  • Incroyable, personne n’a jamais parlé de l’amendement sur la non-dissolution de l’Assemblée.
    Sont-ils donc tous pourris? les élus et les médias?

    • Il se trouve que, oh miracle, Manuel Valls est farouchement opposé à cet amendement déposé par un député frondeur du P$…

    • Persévérez ! La réponse n’est plus très loin.

    • Et c’est pas plus mal. Que le Parlement défende son pré-carré de pouvoir est notre ultime chance de ne pas voir ce régime dégénérer en une dictature. Sous état d’urgence, il n’y a déjà plus de justice, alors si en plus le gouvernement peut se débarrasser du Parlement quand il veut… Pas étonnant que Franco Valls soit contre.
      Les députés sont certes des lavettes, mais ils sont pas fous!

  • Enfumage pour masquer leur échec.
    La priorité pour ces gens est d’occuper la scène médiatique. Y compris par des gesticulations aussi nocives qu’inutiles.

  • ne pas dissoudre l’assemblée nationale sera bien pratique lorsqu’il y aura un changement de président et forcement de majorité en cas d’élection de députés….enfin , si l’état d’urgence doit être validé par ces même députés et qu’il est peu probable que le terrorisme disparaisse comme par enchantement , le terrorisme étant devenu leur fond de commerce

  • Socialistes au pouvoir, dictature en approche ! L’histoire se répète sans fin. Heureusement qu’il avait annoncé qu’il serait exemplaire sinon je me demande ce que ce serait.

  • Mardi 9 février, Valls a indiqué que le gouvernement n’acceptera aucun amendement qui réécrirait le texte concernant la déchéance de nationalité. « tout amendement qui va dans ce sens, de suppression, ou de réécriture, remet en cause l’engagement du président de la République pris devant le peuple français dans le cadre du Congrès de Versailles. »

    En d’autres termes: l’exécutif décide et le législateur est prié de se taire et de voter ce qu’on lui dit de voter. Ce gouvernement piétine la constitution à plus d’un titre.

    Avec l’état d’urgence l’exécutif se débarrase du judiciaire. Avec ce proje de changement de la constitution il essaye d’intimider le législateur. La séparation des pouvoirs est sérieusement compromise.

    • Je ne voudrais pas être à la place d’un électeur LRPS « Charlie » en ce moment. Ni d’un électeur tout court d’ailleurs car se tirer deux fois des coups dans les panards en portant successivement Sarko et Hollande au pouvoir, faut avoir deux bras gauche.
      En résumé nous sommes en dictature vu qu’il n’existe plus aucune séparation des pouvoirs et que le 5ème est notoirement corrompu aussi ! A ceux qui me rétorquent « droit de vote = preuve de démocratie », je répondrai qu’ils parlent plutôt « droit d’élire » et que même en Corée du Nord, ça existe !

    • « En d’autres termes: l’exécutif décide et le législateur est prié de se taire et de voter ce qu’on lui dit de voter. Ce gouvernement piétine la constitution à plus d’un titre. »

      Ce n’est pas nouveau et cela n’a rien d’étonnant quand on sait que le Constitution de la Vème République a été rédigé en vue de favoriser cela.

      Tout d’abord, c’est le gouvernement qui détermine et mène la politique de la France (article 20) et pour ce faire, il possède une compétence réglementaire très élargie. En effet, l’article 34 prévoit un nombre limité de domaines dans lesquels est compétent le Parlement et qui relèvent donc du champs de la loi, alors que l’article 37 prévoit que le gouvernement est compétent dans tout ce qui ne tombe pas dans le champs de la loi!

      En outre, l’initiative des lois est partagée entre le Parlement et le gouvernement. Ainsi, en plus d’avoir un fort pouvoir réglementaire, l’exécutif peut proposer des lois au vote du Parlement! (article 39). Dans les faits, l’immense majorité des lois adoptées en France ont le gouvernement pour origine.

      Ajouter à cela le fait que le gouvernement a le pouvoir de déterminer l’ordre du jour de deux semaines de travail parlementaire sur quatre (article 48), que le Parlement peut autoriser le gouvernement à prendre des réglements dans les domaines normalement dévolus au pouvoir législatif (article 38, j’aime autant vous dire que cette possibilité est très utilisée) et que le mode de scrutin aux législatives a été élaboré de façon à donner une majorité obéissante au gouvernement ; et vous comprenez que le Parlement est amené de fait à se comporter comme un organe « avalisateur ».

      Il ne faut jamais perdre de vue que la Vème République a voulu mettre fin au parlementarisme des IIIème et IVème République et que le Général de Gaulle avait un mépris absolu des partis politiques.

  • Juste un commentaire sur cette phrase :
     » Pendant l’état d’urgence, l’Assemblée ne peut être dissoute. Bah bien sûr.  »
    Les parlementaires et le gouvernement pensent-ils que la révolution approche ? Vue la dégringolade de la bourse aujourd’hui, la grande crise se profile et à n’en pas douter les réactions populaires vont être terrifiantes. Ce ne seront pas des terroristes musulmans qui casseront les vitrines et scieront les platanes mais des citoyens affamés : mai 68 était une rigolade devant ce qui attend la France et d’autres pays européens … Les députés, les sénateurs et les ministres seront jetés dans la Seine !

  • Pourquoi mettre en cause seulement la gauche? Si la droite avait été au pouvoir elle aurait fait exactement la même chose

  • On a découvert également les pressions indignes qui se sont faites sur les uns et les autres pour ces votes ; Des menaces sur les députés, de perte de poste, de dossiers bloqués pour leur territoire, de priver de parole. Des menaces pour se soumettre. Certains députés se cachaient pour éviter leur collègue dont les pressions n’avaient rien de sympathiques ou polies. Notre démocratie déjà bancale plonge dans des travers graves.

    • Oui effectivement, de la même manière, les députés PS qui avaient voté contre la prolongation de l’état d’urgence avaient été invité à venir à l’Elysée pour se justifier de leur choix devant Hollande.

    • C’est pas plus mal.
      Il n’y a pas de raison que nous soyons les seuls à subit les effets du socialisme et ses vexations/humiliations/atteintes à la liberté.

      Un petit retour de bâton ne peut pas leur faire de mal.

  • Mais pourquoi diantre passer par une modification de la constitution?
    Franchement, une directive type 10-289 aurait suffi !
    Me comprend qui peut ou… veut!
    FUYEZ !

  • Au passage, il est amusant de constater que l’avalanche de textes censés lutter contre le terrorisme sont tous plus flous les uns que les autres, ne parlant partout que de « terrorisme » et « d’atteinte à l’interet générale ou aux institutions ». Evidemment l’abruti de base traduira expressément ces termes par « djihadisme », ne voyant là aucune différence entre « terrorisme » et « djihadisme ».

    Dans la mesure où l’ennemi actuel est parfaitement identifié, il était pourtant simple de voter des lois, temporaires, pour lutter contre cette menace en particulier, sans pour autant donner carte blanche aux politiciens en leur retirant tous les gardes fous qui les entravaient encore.

  • Si cela pouvait provoquer la chute. mais non, je ne sais pas par quel miracle la machine étatique emballée, peut continuer à dévorer des chatons mignons. Est-ce que cela cessera un jour ? J’ai bien fait de partir.

  • Pour changer un texte de la Constitution il n’est pas censé y avoir l’accord des 3/5 du Congrès ? 3/5 de l’ensemble, pas juste de ceux qui viennent voter.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

L’économisme de gauche le plus archaïque est bien parti pour revenir peu ou prou aux affaires et, avec lui, le magistère d’économistes théoriciens non-pratiquants, comme Élie Cohen, réputé faire consensus. L’objectivité et l’omniscience prêtées à ceux-ci par ce dernier reposent depuis longtemps sur un dosage subtil et pourtant largement déséquilibré entre libéralisme et interventionnisme d’État agrémenté d’antinucléarisme « raisonnable ». 

 

Dans cette caste séculairement omniprésente sur les plateaux télé, on trouve le dis... Poursuivre la lecture

Rares sont les notions qui, au fil des ans et des aventures politiques ont été autant attaquées que la notion d’État de droit. Au centre de tous les débats à l'occasion des actes de terrorisme ou des jugements clivants, l’État de droit est alors remis en cause par la classe politique et plus généralement par les citoyens.

Par Raphaël Roger.

Ces deux corps, qui pourtant s’opposent de plus en plus, avec d’un côté le corps peuple-civique fondé sur l’égalité politique et de l’autre le peuple-corps social fondé sur les manifestations... Poursuivre la lecture

Le fait pour un gouvernement de solliciter et d’obtenir la confiance de l'Assemblée contribue à la prévisibilité, la stabilité et la sincérité de l’action publique, et cela devrait être reconnu comme indispensable.

Le 30 janvier dernier, Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale, sans solliciter la confiance de l’Assemblée, avant qu’une motion de censure soit soumise, puis rejetée le 5 février. Le gouvernement Attal, comme le gouvernement Borne avant lui, a donc le droit d’exister, mais sans soutien de la chambre.

... Poursuivre la lecture
Voir plus d'articles