Par Éric Verhaeghe

L’Assemblée Nationale a poursuivi, mercredi, l’examen du projet de loi de finances pour 2016, en évoquant de façon minutieuse la fiscalité des entreprises. Elle a fini l’examen de la première partie du texte.
L’allègement de l’IS pour les PME rejeté
La majorité parlementaire a rejeté l’amendement de Charles de Courson baissant progressivement le taux de l’impôt sur les sociétés de 15 à 10 %, dans la limite du plafond de la première tranche des bénéfices. Dominique Lefebvre a notamment considéré que cet amendement pesait trop sur la fiscalité des ménages.
Le crédit impôt recherche dans le collimateur
Le député Alauzet (Doubs, écologiste) a proposé un amendement abaissant la fraction des dépenses éligibles au taux de 30 % du crédit d’impôt recherche (CIR) de 100 à 50 millions d’euros, arguant du faible nombre d’entreprises concernées par cette mesure coûteuse. S’en est suivi un débat sur l’utilisation concrète du CIR.
Karine Berger a notamment déclaré :
« J’espère bien que le CIR n’est pas le CICE des entreprises de technologie, et que vous n’allez pas m’apprendre qu’embaucher des gens en République tchèque donne droit au CICE en France – ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. »
La rapporteuse du Budget a indiqué que Bercy avait rechigné à lui communiquer des chiffres sur l’utilisation du CIR qui ne soient pas couverts par le secret fiscal.
Pour éviter une instabilité fiscale, la majorité a préféré rejeter l’amendement.
En revanche la commission a adopté un amendement de Charles de Courson rendant les instituts technologiques agricoles (ITA) et les instituts technologiques agro-industriels (ITAI) éligibles au crédit d’impôt recherche.
Abaissement du seuil de déductibilité des rémunérations différées
La Commission a ajouté un article sur les « parachutes dorés », à l’instigation de Pascal Terrasse.
« La déductibilité maximale est aujourd’hui fixée à six fois le plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 228.240 euros au 1er janvier 2015. Par le présent amendement, nous proposons de diviser cet avantage fiscal par deux. »
Cet amendement a été adopté pour les revenus distribués ou les dépenses engagées à partir du 1er janvier 2016.
Des amendements pour satisfaire les agriculteurs
La Commission a adopté plusieurs amendements favorables aux agriculteurs. L’un d’eux relève le seuil de chiffre d’affaires de l’agritourisme de 50 à 80 000 euros. Un autre élargit à 4 le nombre maximal d’associés d’un GAEC. Un troisième assouplit le mécanisme d’étalement des revenus exceptionnels en permettant une intégration par fractions inégales. Deux autres concernent les crédits d’impôt dans les GAEC.
Fiscalité maintenue sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE)
À la demande de la députée Eva Sas, la commission a maintenu la taxe sur les activités polluantes des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), qui rapporte 25 millions d’euros.
Fiscalité du diesel
Après un long débat, la commission a renoncé à augmenter le taux de TIPP applicable au diesel. En revanche, elle a validé un amendement de Jean-Yves Caullet (PS, Yonne) élargissant l’assiette de la taxe générale sur les activités polluantes dite « sanction » au gazole routier.
Extension de la taxe sur les transactions financières aux opérations intra-day
Les députés Cherki (PS, Paris), Goua (SRC, Maine-et-Loire), Mancel (LR, Oise) et Alauzet ont chacun déposé un amendement prévoyant l’extension de la taxe sur les transactions financières aux opérations intra-day. Ces amendements ont été adoptés avec une remarque de la rapporteuse Rabault :
« Rappelons, enfin, que le Gouvernement n’est pas favorable à la mesure. Évidemment, la commission des finances peut avoir son propre avis. »
Exclusion des véhicules mis gratuitement à la disposition des collectivités territoriales de l’assiette sur la taxe sur les véhicules de société
La commission a adopté des amendements identiques, déposés par les députés Colas (SRC, Essonne), Fauré (SRC, Ariège) et Courson excluant les collectivités locales de la taxe sur les véhicules de société.
Emprunts toxiques des collectivités et des hôpitaux
Un long débat est intervenu sur les emprunts toxiques des collectivités et des hôpitaux. Plusieurs amendements sur le sujet ont été rejetés, mais un amendement complexe présenté par Marc Goua avec l’aval du fonds a été adopté. Il permet de refinancer en considérant le taux d’usure en vigueur lorsque le contrat d’origine a été signé, en général, aux alentours de 5 %.
Prolongation de l’exonération de plus-values immobilières pour les cessions en faveur du logement social
La rapporteuse générale a laissé la commission adopter un amendement non chiffré prorogeant d’un an l’exonération de plus-values immobilières pour les cessions en faveur du logement social.
Conservation des avantages fiscaux « Madelin » et « ISF-PME » en cas de réinvestissement
La commission a adopté l’amendement présenté par Bernadette Laclais (PS, Savoie) étendant à deux ans la période pendant laquelle l’avantage fiscal concerné peut être conservé aux conditions actuelles. La commission a en revanche rejeté un amendement de la même députée proposant une extension de la réduction d’ISF au titre des dons.
Prolongation de l’abattement de plus-values immobilières en zone tendue
Le député Pupponi a tenté d’étendre sur trois ans l’abattement existant. La rapporteuse Rabault a réduit cet amendement à une extension sur un an, arguant que la proposition de M. Pupponi coûterait 500 millions d’euros.
Compensation de l’exonération de la taxe foncière sur les logements sociaux
Les députés Goua et Pupponi ont obtenu que la compensation par l’État de l’exonération de la taxe foncière sur les logements sociaux ne soit pas minorée comme prévu cette année.
Élargissement du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) aux dépenses d’entretien des bâtiments publics
Cet amendement était présenté par Christine Pires Beaune (PS, Puy-de-Dôme). Il élargit l’utilisation du FCTVA aux dépenses de voirie. La rapporteuse Rabault a soutenu cet amendement à 300 millions au titre du soutien aux travaux publics.
Mesure favorable aux CCI
La commission a adopté un amendement limitant à 20 millions d’euros l’effort fourni par les Chambres de Commerce et d’Industrie. Il a été défendu par la députée Monique Rabin (PS, Loire-Atlantique).
Réduction des frais de recouvrement et de dégrèvement de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises
La commission a adopté un amendement microscopique sur la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises, dont les dégrèvements concernent 26 entreprises.
Suppression du plafonnement de la décote pour l’aliénation des terrains du ministère de la Défense en faveur du logement social
La commission a adopté cet amendement présenté par le député Pupponi, dans ces termes :
« Il a été décidé, dans la loi relative à la mobilisation du foncier public, une décote importante visant précisément à mobiliser ce foncier pour construire des logements. Or, la loi de programmation militaire prévoit la diminution de cette décote pour le foncier du ministère de la Défense. Dès lors, de nombreux terrains militaires, qui pourraient être mobilisés pour la construction de logements si la décote était plus élevée, ne pourront être vendus, ce qui diminuera d’autant le nombre de logements construits. Par conséquent, l’amendement vise à revenir au dispositif prévu par la « loi Duflot » relative à la mobilisation du foncier public. »
Jean-Louis Dumont (PS, Meuse) a toutefois déclaré :
« À titre personnel, j’estime que la défense de la France mérite autre chose que d’être soumise aux aléas d’une vente immobilière. Non loin d’ici, un immeuble a récemment été vendu à des conditions exceptionnelles qui ont dépassé toutes les estimations, mais les affaires ne seront peut-être pas toujours aussi intéressantes. Faudra-t-il décider d’acheter un Rafale ou de lancer une opération en Syrie ou ailleurs en fonction des ventes immobilières ? Une telle politique de défense me paraîtrait peu sérieuse. »
Extension de la possibilité d’aliéner un terrain de l’État en faveur du logement social avec une décote aux cas de réhabilitation
Le député Pupponi a également obtenu l’adoption de cet amendement qui proposait d’étendre aux simples travaux de réhabilitation la décote qui s’applique à l’acquisition de terrains nus et de terrains bâtis sur lesquels il est prévu de détruire pour reconstruire.
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