Les deux tiers de toutes les demandes de brevets en Europe sont déposés en Allemagne. Ce fait n’est guère surprenant étant donné tous les aspects apparemment positifs du droit allemand des brevets et des procédures qui y sont associées. Les juges de brevets allemands sont ainsi tous des ingénieurs qui ont spécifiquement étudié le droit des brevets. Les dossiers sont réglés en six à huit mois (jusqu’à quinze mois à Düsseldorf). Les appels se font en un an à un an et demi, ce qui est comparativement très rapide.
Mais l’aspect le plus souhaitable du système de brevet allemand est la facilité avec laquelle les injonctions sont accordées. Lorsqu’une cour allemande donne raison à un justiciable dans une action en contrefaçon, une injonction est immédiatement accordée et elle suivra son cours même lorsque les deux parties vont en appel. Cela place l’Allemagne à part dans le monde des brevets. Ainsi, aux États-Unis, une injonction ne sera accordée que si un brevet est réputé exploité.
 Chaque médaille a son revers
Cependant, le régime de brevet allemand est assez dur pour monter une défense. Une action contestant la validité d’un brevet est amenée devant des tribunaux différents de ceux qui décident aux actions de contrefaçon. Il n’est pas rare qu’il faille vingt mois à ces tribunaux pour rendre leur décision. Une procédure d’appel peut rajouter environ deux ans au processus entier.
La jurisprudence allemande appelée « Orange Book » fournit une défense supplémentaire sur les brevets « essentiels » définis en termes de norme industrielle. Selon la jurisprudence « Orange Book », l’attaque contre l’injonction ne doit pas s’appuyer sur des principes d’équité. Celui qui cherche à obtenir le rejet d’une injonction doit prouver que la licence a été faite dans des conditions équitables et non discriminatoires et que des redevances raisonnables ont été versées au donneur de licence. Toutefois, le fait est que ni le droit civil allemand, ni les tribunaux allemands n’ont défini ce que seraient des redevances irraisonnables.
Par conséquent, une défense basée sur la jurisprudence allemande « Orange Book » est en grande partie inefficace. Une organisation donnant licence à une autre organisation pour vendre son produit peut affirmer que les redevances qui lui sont versées ne sont pas raisonnables ou même fixer unilatéralement un prix assez élevé qui lui semble raisonnable. Étant donné que les cours allemandes délivrent facilement des injonctions, la jurisprudence « Orange Book » crée ainsi un marché totalement artificiel aux donneurs de licence pour exiger des redevances élevées.
Un marché artificiel aboutissant à une course aux tribunaux
Ce marché artificiel causé par la jurisprudence « Orange Book » commence à provoquer une véritable course aux tribunaux. Une personne qui prend l’initiative d’intenter une action en justice peut être en effet tentée de choisir un tribunal non parce qu’il est le tribunal le plus approprié, mais parce que les règles des conflits de lois que ce tribunal utilisera mèneront à l’application de la loi lui convenant le mieux.
Certains nouveaux acteurs du monde de la propriété intellectuelle, tels les patent trolls et les patent privateers (ou (c)orsaires) sont des habitués de ces courses aux tribunaux. Cela n’a rien de surprenant, étant donné leur propension à utiliser les gouvernements et tribunaux comme moyen pour renforcer le cadre protectionniste où ils prospèrent, dégradant par la même occasion les perspectives de libre-compétition, d’innovation et de croissance des pays qui leur offrent malheureusement le cadre juridique le plus favorable.
Alors que le régime de brevet allemand peut sembler souhaitable pour les titulaires de brevets, la jurisprudence « Orange Book » représente un retour de bâton particulièrement rude et imprévisible. C’est ainsi que Microsoft a décidé de déplacer son centre de distribution européen d’Allemagne vers les Pays-Bas. Cette décision n’était pas le résultat d’une optimisation logistique. Microsoft a simplement cherché à éviter le droit allemand des brevets avant que ne soit rendu un jugement des tribunaux allemands en avril 2012.
Qui sont les victimes de la jurisprudence « Orange Book » ?
En ces temps économiques difficiles en Europe, le régime allemand des brevets a de graves conséquences sur le développement économique, technologique et social du pays. Pensez-donc : un système qui délivre des injonctions très facilement ; une jurisprudence « Orange Book » largement inefficace si elle est utilisée par le défendant ; des titulaires de brevets « essentiels » accusés d’infraction qui doivent prouver des éléments alors qu’ils ne sont pas clairement définis par le droit et attaquent leur donneur de licence pour antitrust plutôt que d’attaquer la substance de l’injonction elle-même, etc. Ce système vous parait-il vraiment idéal ?
Ce régime de brevet trop zélé étouffe l’innovation technologique, en particulier celle des petites et moyennes entreprises (PME) qui sont celles ayant le moins de temps et d’argent pour naviguer entre les risques réglementaires et financiers et ne peut qu’attirer les corsaires et patent trolls en Allemagne et donc en Europe, entraînant une surenchère judiciaire. Â
L’Allemagne a beau être le géant économique de l’Union européenne, ce régime de brevets n’en reste pas moins défavorable aux PME. En outre, il est inquiétant de voir de très grandes sociétés comme Microsoft préférer quitter le territoire en raison de son régime de brevet défavorable.
Si un régime de brevet étouffe le développement économique, social et technologique d’un pays et fait fuir les investissements étrangers, c’est qu’il est bien trop favorable aux détenteurs de brevets.
Piouhhh… je ne sais pas s’il s’agit d’une traduction mais le phrasé est peu clair.
Dès le début de l’article on parle d’un justiciable : s’agit-il du demandeur ou du défendeur et l’injonction concerne qui : le licencié ou le titulaire du brevet ?
En final on ne sait même plus à qui est favorable le régime des brevets allemands.
Une traduction probablement vu le 2em paragr  » Mais l’ aspect le plus souhaitable  » au lieu de contestable
France brevet dément faire du patent troll ( dans un article sur lesechos.fr
ah oui, bien vu pour « souhaitable »… et il y en a bcp d’autres.
Sur France Brevets… « Il [l’état] crée France Brevets, un fonds d’investissement détenu à parité par l’Etat et la Caisse des Dépôts et Consignations, et dont la mission est précisément de racheter les brevets des PME françaises pour mieux les « défendre », au besoin en allant jusqu’au contentieux. »
Si ça c’est pas du patent troll…
Non il ne rachète pas du moins dans le récent exemple Inside Sécure contre Samsung (ou au autre gros je ne me souviens plus ) si j » ai bien compris pour se rembourser des frais de justice Fr Br prélève un pourcentage sur les licences – ce qui n’ est pas sans conséquence sur le cours de l’ action si la sté est cotée