Une France, sexy no more et nicht mehr sexy

Même si l’Allemagne n’est pas au mieux de sa forme, elle reste plus attractive que la France qui perd ses entrepreneurs et son capital.

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Une France, sexy no more et nicht mehr sexy

Publié le 5 décembre 2012
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Pendant que la France fête avec bonheur une croissance insolente et un chômage minuscule, la presse française, bien dans son rôle d’information, nous permet de faire un rapide tour d’horizon sur ce qui se passe autour de chez nous et nous permet de mesurer le plaisir qu’il y a à rester chez soi, bien au chaud : pas de doute, les décisions prises par Hollande et son équipe véritablement composée de ninja de l’économie et de la finance auront sauvé le pays d’une catastrophe qu’on croyait pourtant inévitable. Quelle réussite !

Pendant ce temps, en Allemagne par exemple, c’est vraiment le marasme, et le pays, au pied du mur, présentera l’année prochaine un budget à l’équilibre (au contraire du flamboyant budget déficitaire français). Et pour ajouter l’insulte à l’injure, l’Allemagne prétend pouvoir baisser dans la foulée le poids de sa dette à 81,5% du PIB en 2012, soit un recul de deux points par rapport à la précédente estimation du gouvernement.

Soit, on pourra toujours objecter que le gouvernement allemand joue l’optimisme débridé pour se ménager quelques bonnes cartes dans la perspective des prochaines élections. Certes, on pourra aussi noter que la situation allemande est en tout cas nettement moins rose que ce que laissent supposer les références énamourées d’une classe politique française dont le regard lorgne bien souvent outre-Rhin, sans vraiment savoir ce qui s’y trouve. D’ailleurs, la récente fuite d’un rapport sur la pauvreté y a déclenché un tollé tant la version finale semblait caviardée par rapport à l’initiale, démontrant surtout une volonté manifeste du gouvernement Merkel de cacher des écarts grandissants entre la population allemande la plus riche et la plus pauvre, et le palpable appauvrissement de l’Allemagne…

Il n’en reste pas moins que, vu du côté français de la lorgnette, les perspectives allemandes semblent résolument meilleures que les françaises, n’en déplaise à notre gouvernement et son gentil président par intermittence dont la motivation pour s’occuper des affaires du pays est d’évanescence croissante. Et si l’Allemagne est loin d’être la panacée, elle reste tout de même plus attractive que la France, y compris pour les Français et ce n’est pas juste moi, petit blogueur ronchon et désabusé qui le dit, mais bien la dernière étude de PricewaterhouseCoopers sur l’évolution du marché des fusions-acquisitions franco-allemandes sur les dernières années.

Selon cette étude, l’année 2012 promet un niveau de transactions record et en croissance de la France vers l’’Allemagne, montrant ainsi l’’intérêt des investisseurs français pour le marché allemand. D’après l’enquête menée, cette tendance s’expliquerait par l’attractivité du modèle allemand, notamment au niveau de ses petites et moyennes entreprises ; ces dernières sont jugées plus performantes, et implantées sur des marchés de niche par les investisseurs français. En outre, soutenues localement, elles sont traditionnellement proches des banques régionales et bénéficient par ailleurs de délais de règlement-client plus courts, ce qui leur permet d’’optimiser leur besoin en fonds de roulement.

Dans le même temps, les transactions transfrontalières de l’Allemagne vers la France baissent (en moyenne, de 2000 à 2011, on comptait 35 transactions, alors que qu’en 2011 et 2012, le chiffre tournera autour de 21). Cela s’expliquerait, d’après l’étude, par « une attractivité moins forte de la France en contexte de crise », ce qui est une façon polie de remarquer qu’ont finalement portés leurs fruits les coups de boutoirs répétés des gouvernements socialistes de droite puis de gauche sur les entrepreneurs avec le passage à la démultipliée à l’arrivée de Hollande Qui N’Aime Pas Les Riches.

Le résultat, en substance, s’illustre très bien de la façon suivante :

transactions franco allemandes

En outre, l’étude montre la dissymétrie de comportements des investisseurs français et allemands : les premiers investissent d’abord localement, en France là où les seconds n’hésitent pas à sortir de leurs frontières : si le marché des fusions-acquisitions dans l’’Hexagone reste essentiellement national, l’’Allemagne est davantage attractive pour les investisseurs étrangers. La contribution des investisseurs étrangers représente en effet 31% des opérations en Allemagne contre 16% en France de janvier à septembre 2012. Le nombre de transactions de la France vers l’’Allemagne était en moyenne de 31 transactions par an entre 2000 et 2011, et il a fortement augmenté cette année, passant de 27 opérations en 2011 à 38 sur la période de janvier à septembre 2012. La part de capital-investissement français en Allemagne n’’a cessé d’’augmenter, faisant ainsi passer en 2012 la France du 5ème au 3ème rang des pays réalisant le plus d’’opérations de capital investissement en Allemagne.

Point n’est besoin de tourner autour du pot : même si la situation allemande n’est pas réellement extraordinaire, la situation française incite de plus en plus les Français à aller y voir : l’Allemagne attire les capitaux français et rejoint, en cela, l’Angleterre. D’ailleurs, les constatations récentes de Helene Fouquet de Bloomberg ne laissent guère de doute lorsqu’elle cite un patron français qui trouve que la France a définitivement perdu ses derniers atouts sexy. Les dénégations molles, ou l’absence un tantinet compassée de tout relais dans la presse française d’une réalité pourtant tangible et désagréable n’y changent rien : les entrepreneurs français s’en vont, de plus en plus nombreux, en Belgique et en Angleterre. Quant aux riches retraités, ils s’expatrient en Suisse en laissant le soin aux générations courantes et futures de régler leur compte aux quelques rares entrepreneurs et riches inconscients restés sur place et mettre une pierre (tombale) finale sur l’œuvre générale d’enfouissement du pays.

Eh oui : à force de bien signifier aux riches qu’ils étaient taxables à merci, ils sont partis se faire taxer ailleurs. À force de dire « Puisque tu n’es pas content, casse toi » à tous ceux qui avertissaient des dangers que la France courait avec ses politiques idiotes, ils ont fini par écouter ce qu’on leur proposait, et ils se sont, effectivement, cassés. À force de faire comprendre aux entrepreneurs que le patronat était une condition méprisable, ils ont arrêté d’entreprendre.

La suite, on la voit déjà se profiler et elle fera plaisir à tous les kapos du Camp Hexagonal d’Entraînement à la Décroissance Ultime : l’appauvrissement rapide et généralisé de toutes les classes de population en France, avec le paradigme bien connu que lorsque le riche maigrit, le pauvre meurt de faim. Parce que, voyez-vous, sachant que l’austérité n’a toujours pas été mise en place, si l’on ne peut pas dévaluer la monnaie, il va falloir baisser les salaires. Et baisser les salaires, selon les calculs menés par Huw Pill de Goldman Sachs, cela va faire très mal. Il a posé la question « Pour quelques uns des pays de la zone euro, quelles baisses de salaire sont nécessaires pour compenser les différentiels de coût du travail ? » ; la réponse se résume à ce graphique :

Réduction de salaires nécessaire pour une balance commerciale tenable

Ce qui veut dire que, concrètement et pour le cas de la France par exemple, les salaires devraient chuter de 15 à 25% selon les hypothèses pour rendre le pays à nouveau un tantinet attractif ou, dit autrement, pour donner une chance un peu réaliste à la zone euro de ne pas éclater en petits morceaux piquants. On comprend ici que ce genre de cascades est parfaitement invraisemblable sans déclencher un mouvement de foule majeur et de panique générale chez nos politiciens dont on rappelle que la gestion des crises, l’économie et la finance sont les points forts (cf Track Record et tout ça).

D’ailleurs, la conclusion de Goldman Sachs est réaliste puisqu’ils expliquent eux-mêmes que de telles coupes sont infaisables : il est difficile d’imaginer que la France acceptera une chute de près d’un tiers de son niveau de vie en comparaison de l’Allemagne. La seule autre mesure possible consisterait en une sévère inflation distribuée de façon assez asymétrique dans la zone euro, ce qui ne manquera pas de faire pouffer l’observateur extérieur (et bon courage pour contrôler tout le papier créé ces trois dernières années et qui n’attend que le meilleur moment pour redescendre en pluie drue).

Mais allons, ne nous laissons pas abattre puisqu’il semble maintenant clair que les politiciens qui ont la charge du pays sauront mener le pédalo bateau France vers le bon iceberg port. Et puis, certes, ce pays est foutu, mais d’une part, on a suffisamment prévenu tout le monde de ce qui allait se produire, et d’autre part, on rigole bien. Ce serait dommage de focaliser sur l’avalanche de problèmes qui arrivent.


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  • « les salaires devraient chuter de 15 à 25% », ou juste le coût du travail en conservant les salaires nets et en diminuant de 30 à 40% les charges sociales, ce qui devraient les mettre au niveau de l’Allemagne et encore bien au dessus de l’Angleterre.
    Les assistés feraeint la gueule mais pas les salariés

    • Entièrement d’accord si on rajoute les élus et les fonctionnaires, aux assistés.

    • Sauf que les charges sociales ça sert surtout à payer l’assurance maladie et les retraites, et encore partiellement vu le déficit. Ceux qui ont cotisé de force pour bénéficier de l’assurance maladie ne vont pas être très content de devoir prendre en charge eux-mêmes leurs soins, et je parle même pas des retraités privés de retraites ! C’est peut-être inévitable mais ça n’annonce rien de bon.

  • Yes, ça c est du bon !
    Merci h16

  • M’en fous, je me casse l’année prochaine ! Bon courage pour nettoyer ce merdier.

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