Un thread de The Final Frontier pour expliquer ce qu’est l’uranium appauvri.
A retrouver sur Twitter à cette adresse
Allez, mini thread de mise au point rapide sur la question de l’uranium appauvri.
On entend en effet tout et son contraire sur ce dernier.
Pour les anti-nucléaires, c’est un déchet.
Pour les pros, c’est une ressource valorisable.
Qu’en est-il vraiment ?
Alors matière valorisable ou déchet ? En fait les deux à la fois.
1- De l’uranium pas vraiment appauvri
Dans la nature, il existe deux principales sortes d’uranium (des isotopes), l’uranium 235 et l’uranium 238.
Nos centrales actuelles carburent à l’uranium 235.
Problème : l’uranium extrait des mines contient 99,3 % d’U238, et seulement 0,72 % d’U235, alors que nos centrales ont besoin d’une concentration beaucoup plus élevée pour pouvoir fonctionner.
Il va donc falloir séparer l’uranium 235 du 238, c’est ce que l’on appelle l’enrichissement.
En France, ça fonctionne de la manière suivante :
On transforme l’uranium en gaz (de l’hexafluorure d’uranium), puis on le fait passer par des centrifugeuses.
L’U235, plus léger reste vers le centre, alors que le U238, plus lourd, migre vers l’extérieur.
Comme le pouvoir de séparation d’une seule centrifugeuse est faible, on les aligne les uns derrières les autres pour obtenir un enrichissement suffisant (on parle alors de procédé en cascade).
En sortie de l’usine, on se retrouve donc avec de l’uranium riche en U235 (enrichi donc) qui va alimenter les centrales, et beaucoup d’uranium appauvri qui ne devrait, en théorie, plus contenir d’U235, mais uniquement du 238.
Bon, en réalité, ce n’est pas si simple, même si le coût d’une usine d’enrichissement n’est pas si élevé, l’uranium est incroyablement bon marché, ce qui ne pousse pas à l’économie.
Ainsi, l’uranium rejeté contient encore 0,2 à 0,3 % d’U235, que l’on peut facilement extraire avec notre technologie actuelle.
On peut en effet descendre à moins de 0,05 %.
Ainsi, les réserves d’uranium appauvri en France, qui représentent quelques 300 000 tonnes, contiennent encore suffisamment d’U235 pour alimenter le parc français pendant une décennie.
Un petit souci, la France ne dispose pas actuellement (souci d’économie et de vision à court terme oblige) des capacités en enrichissement.
Son usine, Georges Besse 2 ne dispose que d’une capacité de 7,5 millions d’UTS (unité de travail de séparation) par an.
Si l’on veut, en l’alimentant avec de l’uranium naturel, atteindre un taux d’appauvrissement d’au moins 0,05 %, il faut au moins doubler cette capacité.
Si on veut s’alimenter avec notre uranium appauvri, il faut la quadrupler.
Cependant, ça n’a rien d’impossible, ça représente seulement un investissement de quelques milliards, ainsi qu’une consommation d’énergie de l’ordre du TWh par an, sur les 400 que produit le parc.
En revanche, cela représenterait un gros progrès d’un point de vue environnemental, puisque cela permettrait de réduire de manière importante les besoins en extraction d’uranium, et donc de mines (-20 à 30 %).
Cependant, en sortie on se retrouvera avec de l’uranium réellement appauvri, et totalement inutilisable avec les réacteurs actuels, un déchet donc.
Mais qu’en est-il avec les réacteurs du futur ?
2- Les neutrons rapides et les surgénérateurs
On entend beaucoup parler des surgénérateurs pouvant consommer cet uranium appauvri. Qu’en est-il vraiment ?
Déjà, comment ça marche ?
En fait, ces réacteurs ont la capacité de transformer l’uranium 238 en plutonium 239 fissile (c’est-à-dire qui peut entretenir une réaction en chaine, et donc servir de carburant pour alimenter le réacteur) et ce avec un rendement suffisant pour ne plus dépendre d’alimentation en fissile externe, donc en U235 (contrairement aux centrales actuelles dont le rendement de conversion de l’U238 est très mauvais, et qui doivent être alimentées en U235).
Cela signifie qu’ils peuvent donc tourner uniquement avec de l’uranium appauvri, qui est alors utilisable.
Ils ont aussi la capacité de consommer certains déchets gênants.
Le problème, c’est que le processus est très efficace, et donc économe en ressources : avec un kilo d’U238, on peut produire 8000 MWh de courant. En comparaison, on ne produit que 60 MWh avec un kilog d’uranium sorti de la mine avec nos REP actuels.
Ainsi, si on remplaçait notre parc actuel par des surgénérateurs, on ne consommerait que 50 tonnes d’uranium appauvri par an. Sauf que le stock est de plus de 300 000 tonnes, et ne fait qu’augmenter.
Même avec une forte augmentation de la consommation d’énergie nucléaire, il est donc complètement illusoire d’espérer réduire ce stock via la surgénération.
Conclusion
Non, on ne se débarrassera pas du stock d’uranium appauvri comme ça, même avec un déploiement massif des surgénérateurs.
Maintenant, cet uranium peut encore être réenrichi et encore servir, le jeter maintenant serait donc un énorme gaspillage.
#nucléaire #nuclearenergy #environment #Energie
300000 tonnes à raison de 50 par an, cela fait 6000 ans devant nous. De quoi voir venir. Mais ailleurs, il est dit 2000, c’est pas mal, mais c’est quand-même plus bref. Alors, j’ai des doutes.