Dans un article paru en juin 2023, Muriel Jasor, rédactrice en chef du journal Les Échos Leadership & Management, écrivait que la sécurité psychologique est le plus puissant levier de motivation des équipes :
« Elle offre nombre de bénéfices insoupçonnés d’un bout à l’autre de la chaîne hiérarchique, et elle se pose en levier d’engagement sans équivalent ».
Dans les modèles traditionnels de leadership, l’un des ressorts essentiels de la sécurité psychologique est la capacité du leader à définir le chemin à suivre pour son équipe.
Ce ressort est donc essentiellement prédictif.
À partir de sa vision du futur, le leader définit des objectifs à atteindre. Il sait où il faut aller et dégage cet horizon pour que ses suiveurs puissent avancer sereinement. Ici, la sécurité résulte de la prise en charge de la dimension prédictive par le leader. Pour reprendre une expression très souvent entendue, le rôle du leader est de protéger ses équipes de l’incertitude. La sécurité vient donc ici d’une forme de garantie de protection par le leader.
Les deux piliers de ce modèle sont donc la connaissance et la protection. Le contrat implicite passé entre le leader et ses suiveurs est « Vous me suivez parce que je sais où aller, et que je m’engage à vous protéger. »
Mais dans un monde incertain où les surprises se succèdent et les croyances les plus solides sont fragilisées, la prédiction devient très hasardeuse.
Le leader ne sait plus dans quelle direction aller, ou du moins il ne le sait pas plus que ses équipes. Il en sait même parfois moins : plus on est haut dans la hiérarchie, plus on est éloigné du terrain. Or, dans une situation incertaine et évolutive, l’information importante est sur le terrain, et le leader se retrouve donc souvent à courir après celle-ci. La pyramide de la connaissance est inversée, ce qui mine le contrat de leadership.
Par ailleurs, le second pilier du leadership traditionnel, celui de la protection, est également remis en cause. D’une part parce que ces dernières années en ont montré les limites – les leaders n’ont pas protégé grand-monde dans la série de surprises et de sauve-qui-peut que nous avons vécu: leur fragilité a été mise en évidence de façon criante. D’autre part parce que ce modèle de protection, qui est au fond paternaliste, ne correspond plus à une époque où les gens sont mieux informés et aspirent à plus d’autonomie. La sécurité psychologique ne vient plus forcément nécessairement d’une protection.
Redéfinir la sécurité psychologique en incertitude
Dans un monde d’incertitude, il faut redéfinir la question de la sécurité psychologique sur de nouvelles bases.
Il s’agit d’aller au-delà d’une conception simpliste – je suis en sécurité parce que mon chef sait où il va et me protège. Il faut abandonner la posture paternaliste qui est un héritage de la révolution industrielle.
Il s’agit de traiter ses collaborateurs en adultes et de leur dire en substance :
« Je ne sais pas plus que vous où va le monde. »
C’est une phase cruciale dans toute transformation, celle qui consiste à accepter la réalité et à la reconnaître explicitement, quelque difficile que soit cette acceptation. Il faut faire son deuil du modèle jupitérien du chef qui est chef parce qu’il sait tout. Cette acceptation est un premier facteur de re-création de sécurité psychologique, parce qu’elle consiste à reconnaître ce que tout le monde sait déjà de toutes façons. Elle recrée la confiance sans laquelle il n’y a pas de leadership.
Admettre que nous ne savons pas où va le monde ne signifie cependant pas que nous devions être résignés à le subir.
C’est ce que nous enseignent les entrepreneurs. Sans nier les effets anxiogènes de l’incertitude, celle-ci présente en effet aussi des avantages. Un monde qui bouge et qui change est aussi un mode d’opportunités. Il s’agit donc de déporter le regard du futur – qui est imprévisible – vers le présent, qu’il faut s’attacher à comprendre. Une compréhension profonde du présent est de nos jours beaucoup plus importante qu’un verbiage sur le futur.
Il s’agit de mettre des mots sur cette compréhension de façon collective :
« Voici comment nous voyons le monde avec ses défis et ses opportunités », en explicitant les modèles mentaux pertinents.
Au cœur de la sécurité psychologique se trouve donc la notion de confiance.
Dans l’ancien modèle de la révolution industrielle, je me sens en sécurité parce que j’ai confiance en mon chef qui sait où il va et me protège. La confiance naît de la clarté du but.
Dans le nouveau modèle, je me sens en sécurité parce que nous avançons en confiance sur un terrain inconnu. La confiance naît de la clarté des moyens. Elle traduit la vision commune que nous avons du présent, y compris la reconnaissance des limites de notre connaissance.
Une vision commune du présent traduite par des modèles mentaux explicites est le socle de tout collectif solide, et représente la meilleure garantie de survie et de prospérité dans un monde incertain. Elle est la nouvelle clé de la sécurité psychologique.
Bienvenue dans un monde d’adultes !
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«faire son deuil du modèle jupitérien du chef qui est chef parce qu’il sait tout»
et surtout jupitérien parce qu’il a beaucoup de pouvoir..
hmmm…
la sécurité psychologique vient aussi pour moi de ma non dépendance excessive à mon lien avec la dite enterprise ..
de pouvoir allez ailleurs…
e til faut parler r de la sécurité psychologique du “patron” de perdre des bon employés..
ce n’ets pas une réflexion purement interne à l’entreprise..