Les carburants sont-ils aussi chers que l’on pense ?

La précarité énergétique n’est en rien liée aux prix de l’énergie mais à l’arbitrage du budget des ménages en faveur d’autres postes comme l’alimentation, et surtout le logement dont les prix ont largement excédé l’inflation.

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Les carburants sont-ils aussi chers que l’on pense ?

Publié le 14 septembre 2023
- A +

Depuis début août, la hausse du prix des carburants revient régulièrement en boucle dans les médias et sur les réseaux sociaux, un carburant jugé toujours plus cher, avec notamment la barre symbolique des deux euros dépassée.

Pourtant, depuis janvier 2023, la hausse du SP95 n’est que de 4 %, et de seulement 1 % par rapport à avril.

En revanche, on observe d’importantes variations au sein des différents facteurs contribuant au prix du baril.

Décomposition du litre d’essence durant l’année 2023 

(source des donnes UFIP)

Rappelons que le prix du litre d’essence se décompose en quatre parties distinctes :

  1. Cours du baril
  2. Marge de raffinage (différence entre la valeur du produit raffiné et celle du baril de pétrole)
  3. Marge de distribution (incluant le transport vers le site de distribution)
  4. Taxes (TICPE fixe de 69 centimes pour le SP95, et 20 % de TVA sur la somme HT + TICPE)

 

Par ailleurs, le baril de pétrole étant coté en dollar, le prix en euro dépend aussi implicitement du change euro/dollar. Depuis le début de l’année, ce dernier n’a que peu varié, et son taux actuel (1,07) est plutôt favorable par rapport à 2022 (<1).

Depuis début 2023, le prix du baril s’est renchéri de 4 %.

Cette hausse est liée à des tensions sur les marchés pétroliers : forte demande du Sud-Est asiatique et baisse de l’offre imposée par les pays de l’OPEP pour maintenir des prix hauts. L’accroissement du prix du baril ne justifie toutefois que deux centimes supplémentaires sur le prix du litre d’essence.

En revanche, la marge de raffinage (+35 %) a explosé au cours de ces derniers mois, avec une augmentation de 35 % justifiant un incrément de 5 centimes sur le prix du litre de SP85. Ceci est dû à de très fortes tensions sur le marché des produits raffinés, dont une partie significative était importée de Russie avant le conflit russo-ukrainien. Les raffineries européennes ne pouvant à elles seules satisfaire la demande de produits raffinés (SP95 mais aussi diesel), l’Europe est obligée d’importer ces produits du Moyen-Orient, mais aussi de l’Inde.

En revanche, alors qu’au début de l’année, les marges de distribution étaient anormalement élevées (0,27 centime en avril), au cours de ces derniers mois, et pour des raisons commerciales, les distributeurs les ont réduites en moyenne de 5 centimes.

En conséquence si, depuis janvier, le prix HT a augmenté de 7 %, le prix du litre à la pompe TTC n’a finalement pris que 4 %, passant en moyenne de 1,88 euro à 1,96 euro. Compte tenu de l’engagement de TotalEnergies de maintenir sous les deux euros le prix de l’ensemble des carburants (SP95, SP98 et diésel), on ne devrait pas assister à de nouvelles augmentations au cours des quatre prochains mois.

Cette analyse montre que sur une année, les prix des carburants ont moins augmenté que l’inflation (+4,8 % en un an), et bien moins que les produits alimentaires (+11 % sur un an).

Cette observation est d’ailleurs confirmée par l’histoire.

Entre 1960 et 2020, alors que le SMIC a été multiplié par 40 et le prix du pain par 20, le prix moyen des carburants a été multiplié par 10, soit moins que l’inflation globale. Et pourtant, la perception de la population est tout autre.

Evolution des prix depuis 1960

(source des données France Inflation)

Contrairement aux autres matières premières (acier, cuivre, blé…) diluées sous forme manufacturée dans les biens et les services, l’essence est en prise directe sous sa forme (quasi) brute avec les consommateurs. Cette prise directe confère aux produits pétroliers un caractère d’instantanéité : contrairement aux prix des produits manufacturés, les prix à la pompe varient au jour le jour. De cette prise directe et de cette instantanéité résultent des réactions émotionnelles où le ressenti l’emporte sur la réalité.

Dans les faits, la précarité énergétique des plus modestes s’est donc largement réduite au cours des trente dernières années.

Pourtant, dans les faits de nombreux ménages rechignent à s’éclairer, à se chauffer ou à prendre des douches. La précarité énergétique n’est en rien liée aux prix de l’énergie, mais à l’arbitrage du budget des ménages en faveur d’autres postes comme l’alimentation, et surtout le logement dont les prix ont largement excédé l’inflation.

En filigrane des prix trompeurs de l’énergie, l’amélioration du pouvoir d’achat demande d’aller bien au-delà d’un poste énergétique représentant finalement moins de 10 % du budget des ménages. Une stratégie à l’opposé de celle du gouvernement dont le package pouvoir d’achat (plus de 50 milliards d’euros) a reposé à 80 % sur des aides énergétiques.

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  • certes mais on ne vit pas à cette échelle de temps non plus…

    -1
    • et le prix des carburants se répercutent dans les autres prix.. voire jusqu’au smic…

      -1
      • mais sinon..jeancovici avait fait un ratio de different prix à l’heure de travail.. pour signaler aussi..que le prix du carburant était « évidemment » plus cher..

        notez ..son prix était nul quand on en utilisait pas..

        les gens étaient loins dépendants de la bagnole.. pas compris dans le prix..

        et le titre ..plus que cher qu’on le pense…

        JUSTEMNEBT les gens connaissent le pirx d carburant!!! il s ne le pensent pas.

        • Plus élevé ce ratio par rapport à quelle date ?
          Par rapport à 2 ou 5 ans, c’est sûr.
          Par rapport aux années 70 ou 80, je ne crois pas.
          Mais en effet, les gens qui n’étaient pas nés en 1970 (et même ceux qui étaient nés) ça leur fait une belle jambe. De savoir qu’à l’époque, avec un smic, on se payait moins de litres d’essence.
          Donc vous avez bien compris que dans le temps long, c’est plutôt positif pour l’automobiliste. Dans le temps court, c’est dramatique, en particulier pour les petits budgets.
          Alors, est-il raisonnable, comme le fait Charlez de dire (en gros) :
          – de quoi vous plaignez-vous, ça va mieux qu’il y a 30 ans !
          La question elle est vite répondue.

          -1
          • voila…sortir 100 euro de plus sur un budget ric rac… PLUS…
            le fait que la mécanisation aidant tout prix augmente quand le prix de l’énergie augmente,

  • À la place de Total, je ne ferai aucune remise à la pompe. Quand Madame Borne justifie les manifestations anti Total lors du Conseil d’administration de ce dernier, que la CGT bloque les raffineries française pour un oui, pour un non, que LFI fustige les bénéfices de Total (qui sont faits Hors de France), que les écolos veulent que Total disparaisse, que son PDG touche un salaire trop élevé, je ne vois aucune raison pour que cette société fasse un quelconque geste pour une population qui élit des gens qui lui crachent dessus à tout moment.
    Total devrait dire « je ne baisse pas le litre pour inciter les automobilistes à prendre les magnifiques transports en communs écolos que les gauchistes ont tant développés au détriment de la voiture individuelle pour le bonheur de la planète et des gueux ».

    • Total pourrait tres bien vendre don reseau de distribution comme l l a fait recemment en allemagne au pays bas….a couchetard le distributeir canadien et il y a qq annees en italie au RU en suisse
      Mais le gouvernement doit freiner des 4 fers

  • Ca revient en boucle dans les médias et les réseaux sociaux, mais les coûts du logement et de l’alimentation semblent être bien plus prioritaires dans les préoccupations quotidiennes. Donc en fait, c’est de la propagande pour désigner Total comme bouc émissaire et oublier que si les coûts de raffinage ont explosé, c’est à cause des sanctions qui nous interdisent d’importer directement (mais pas indirectement en payant les intermédiaires, allez comprendre) essence et diesel russe, des règles françaises et européennes genre diagnostics à prix d’or et zan qui empêchent de se loger sans de folles dépenses superfétatoires, et des deux, guerre et règles, qui empêchent d’obtenir les produits agro-alimentaires avec les engrais et les produits phytosanitaires qui soutiendraient les rendements.

    10
  • Trompeur ? C’est le raisonnement de Charlez qui peut l’être.
    Il consacre son raisonnement à la faible augmentation du prix des carburants en 2023 alors que les prix de ceux-ci ont explosé en… 2022.
    Il évoque 40 milliards d’aides énergétiques à l’issue de sa démo sur les carburants mais en réalité les remises à la pompe en 2022 ont coûté environ 7 millards en 2022. Le chèque carburant, limité aux faibles revenus, devrait coûter 1 milliard en 2023.
    Il met en regard des aides ponctuelles sur une crise qu’on espère provisoire et une évolution longue du pouvoir d’achat.
    S’agissant des loyers, s’il est vrai que cette charge contrainte a fortement augmenté depuis 1960, elle a plutôt baissé depuis une petite décennie.
    Etc.
    Depuis le début de la crise, ce sont donc bien les dépenses énergétiques (transport, chauffage…) et alimentaires qui ont plombé le budget des ménages. Particulièrement ceux aux faibles revenus.

    -1
    • « depuis le début de la crise » : c’est à dire ??? Car les problèmes viennent essentiellement de la main mise de l’Etat (et l’UE) et ses fonctionnaires sur la vie des français et leur trahison au profit des USA.

    • c’est s écrit dans le titre ..lus cher qu' »on » le pense ..vous pensez mal… ou vous n’etes pas un on.

  • Merci pour votre explication très claire. Effectivement, le coût du raffinage, pourtant important, est très rarement mentionné dans les media.

  • et la proportion des taxes, dans tout ça ? Pas un mot, pourtant, elles représentent un énorme pourcentage dans le prix des carburants. Les graphiques sont illisibles, pas de légendes. Un article pour rien.

    • Les taxes sur les carburants n’ont pas augmenté. A part la TVA mécaniquement.
      Ce qui impacte la vie des gens depuis 18 mois, c’est l’augmentation forte et rapide des prix de l’énergie. Pas glop pour les fins de mois. Surtout si comme disait Coluche c’est les 30 derniers jours.
      Un salaire de cadre n’y verra que du feu. Si j’ose dire.
      Un smicard qui va au boulot en voiture, se chauffe au fuel ou au gaz va bien le sentir.
      Personne ici ne semble vouloir comprendre que le problème c’est le DELTA. Pas le fait que ce n’est que X % en base ou que l’évolution des prix depuis 1960 et patati et patata.
      A part ça, je suis d’accord. Un article pour rien.

      • Il faut aussi voir les taxes indirectes qui ne se voient pas et pour que ce soit les distributeurs les boucs émissaires.

        Chaque distributeur a pour obligation de participer aux travaux de rénovation énergétique à travers la prime CEE. S’ils n’atteignent pas leur quota ils ont des lourdes pénalités. Or ces obligations sont renforcées continuellement.

        Forcèment tout cela se traduit aussi dans le prix à la pompe et sur lequel s’exercera la tva.

        C’est la nouvelle manière pour l’Etat d’augmenter les taxes sans pour autant que cela se remarque et la faute reviendra aux entreprises.

  • Alors pourquoi je paye à Taïwan, 0,88 € le litre de diesel est à 1,02 € le litre de super 98 ?

  • « juste » une augmentation de 4% depuis le 1er janvier 2023 ? C’est comme l' »augmentation de l’inflation » qui diminue ^^
    il ne faut pas oublier qu’avant tout le bordel orchestré de la guerre en Ukraine, le SP95 était à 1,50€ (donc augmentation de plus de 20%)… Et je ne pense pas que les salaires des gens qui utilisent leur voiture aient augmenté proportionnellement…

  • on vous prend pour des billes…. mais vous aimez cela
    https://www.francebleu.fr/infos/environnement/gaz-de-couche-en-moselle-le-gouvernement-dit-non-2139082
    une « inspirée verte » s’agite et des années de recherches et d’investissements sont mis à la poubelle, mais on importe du GNL (paraît que le fuites de méthane…)qui vient de la fracturation ou de Russie,au prix fort, Total et Poutine doivent bien se marrer
    En Angleterre, 7 millions de personnes sont incapables de se chauffer l’hiver dernier,on a ouvert des « chauffoirs » dans certains land allemand, la France fait tout son possible pour rattraper son retard, d’ailleurs les restos du coeur sont submergés,avec un hiver un peu rude, le froid pourrait tuer plus que le covid, le rêve écolo e réalise

  • il ay les variations ds prix  » naturelles » , liés à la production consommation , usage, offre et demande, on doit faire avec..

    en gros plus de patates du mange autre chose …

    il y a les variations de prix idéologiques;.. causées par l’action politique voire des choix fiscaux pour ORIENTER les gens vers un autre consommation..

    le prix des carburant n’est donc pas en soi un sujet politique.. qui serait à mon opinion quelle fiscalité sur les carburants..et dans quel but is il y en a un..

    ce qui fait rire est que TOUT le mode semble dire qu’on doit se passer de pétrole….donc les gens devraient se réjouir…

    et plus amusant on a tailler un peu la fiscalité pour ça..et on met des batons dans les roues de la prospection…

    et on découvre que zut alors..

    le vilain total fait des profits en nous vendant des trucs qu’on ne veut pas acheter en somme..

    • oui je sais je devrais relire..

      j’ajoute qe comme à l’ordinaire le gouvernement va agir en réaction…

      premiere chose à faire arrêter la farce des politiques « climatiques »…

  • Les commentaires sont fermés.

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