Voici une lamentable histoire de manœuvre de communication qui implique 26 sénateurs socialistes, un laboratoire d’analyses sulfureux, l’Agence France Presse et les médias panurgiques.
Un an après…
Il était une fois 26 sénatrices et sénateurs socialistes qui ont fait le sacrifice d’une mèche de cheveux à des fins d’analyse en… juillet 2022. Pourquoi aura-t-il fallu attendre près d’un an pour l’apprendre et pour obtenir quelques éléments d’information – ou plutôt d’« information » ? Mystère !
Ces cheveux, qui ne finiront sans doute pas dans un reliquaire, furent confiés à la société – au « laboratoire privé et indépendant tocSeek » selon la dépêche de l’AFP – plus vraisemblablement toxSeek (un jeu de mot un peu approximatif, prononcez « tox(s)ic », mais le « ee » donne un « i » long en anglais).
Un laboratoire qui soulève de multiples questions
Cette société propose notamment un « Dépistage de 49 métaux, métaux lourds et terres rares + Près de 1800 polluants organiques » pour la modique somme de 340 euros. La liste des « polluants organiques » est évidemment longue comme le bras. Celle des métaux, etc. est subdivisée en « métaux essentiels », « éléments toxiques ou potentiellement toxiques » et « terres rares ».
On voit déjà l’approche commerciale adoptée : attirer le chaland hypochondriaque. Tout le boniment est fondé sur cette stratégie.
L’entreprise a produit un spécimen de « rapport d’analyses toxicologiques ». Au moins, les acheteurs potentiels curieux peuvent savoir s’ils en ont pour leur argent. On y lit, à juste titre :
« La recherche non ciblée (dépistage) dans le cheveu ne peut être quantifiable car les taux capillaires ne sont pas corrélés avec les taux sanguins… »
Moyennant quoi, on nous fournit des résultats classés en « Niveau[x] d’exposition À RISQUE » – pour lesquels il est nécessaire d’identifier les sources et de les supprimer de l’environnement – et « Niveau[x] d’exposition À SURVEILLER » – pour lesquels il est conseillé d’identifier les sources et les surveiller ou les supprimer.
Selon ce spécimen de rapport,
« ACCRÉDITATION ET CONTRÔLE QUALITÉ EXTERNE
Notre laboratoire est accrédité Cofrac n°8-4182 – norme ISO 15189 (pour son activité de laboratoire de biologie médicale). Notre laboratoire participe au programma QMEQAS (Assurance qualité externe de l’Institut National de santé Publique du Québec)
Mais l’accréditation Cofrac n°8-4182 est au nom de SELAS I-MITOX – LBM (IMITOX pour Institut Médical International de Toxicologie et de Pharmacologie) dont toxSeek serait un « partenaire ». L’accréditation est aussi pour des analyses qui ne sont pas celles de toxSeek – c’est indiqué à demi-mots.
Selon son site, « Le laboratoire [I-MITOX ou IMITOX] fait usage de la marque COFRAC sur ses comptes rendus de résultats ». Le spécimen de rapport de toxSeek ne le présente pas…
Derrière le « labo » (ou association loi 1901 plutôt..?) Toc-Seek se cache le laboratoire I-MITOX, qui est bien accrédité.. mais le logo COFRAC n’apparaît pas sur les compte rendus… parce que ce ne sont pas vraiment des analyses de biologie ?
(Poke @Cofrac_officiel) pic.twitter.com/ppSHIClodR— Bio_Saiyan (@SaiyanBio) June 27, 2023
Toujours selon ce spécimen de rapport,
VALIDATION SCIENTIFIQUE
Les process sont validés scientifiquement par une publication scientifique (revue à comité de lecture) Assesment of exposure to Organic and Inorganic Pollutants in Children’s Hair – International Journal of Public Health Research-2019 ; 7(1); 18-22 »
L’article n’est pas référencé sur Google Scholar mais peut se trouver sur Google. Il est ici. On peut accéder à une version PDF et vérifier l’affirmation que « Les process sont validés scientifiquement… ». Relevons que l’article est de la main des utilisateurs de la méthode d’analyse (Florent Brousse, Gilles Malonga, Guanghua Yang, Nouredine Sadeg), se prévalant dans l’article du laboratoire IMITOX. Que la revue soit à comité de lecture ne suffit pas à notre sens pour décerner un brevet de validité en fait auto-accordé.
Les commentaires sur les substances détectées sont aussi croquignolets.
Ainsi, l’utilisation princioale du glyphosate serait « Contre les mauvaises herbes (cultures agricoles). Chélateur. Antibiotique ». On a biberonné aux meilleures sources de la désinformation… D’ailleurs le glyphosate serait aussi un « Produit de détartrage des chaudières et canalisations »…
Tous « contaminés » par…
Pour les sénateurs qui ont fait un don de mèche de cheveux, on ne sait pas. Les résultats des analyses auraient été publiés le mardi 27 juin 2023, mais nous ne les avons pas trouvé.
Le grand public a en revanche été « contaminé » par une dépêche de l’Agence France Presse qui s’est répandue comme une trainée de poudre, les médias faisant preuve d’une grande inventivité pour leur titraille. Du reste, dans sa précipitation à diffuser une bonne nouvelle – bonne parce qu’elle est en fait mauvaise et anxiogène – l’AFP a même mal orthographié le nom du laboratoire…
Ainsi, pour les titres, Le Point : « Un cocktail toxique dépisté dans les cheveux des sénateurs » ; Le Monde : « Mercure, pesticides, plastifiants : un cocktail toxique dépisté dans les cheveux des sénateurs » ; Libération : « Mercure, pesticides, terres rares… dans les cheveux des sénateurs, les polluants foisonnent » avec un jeu de mots en sur-titre, « Parlement’hair ».
Le pompon est sans doute décroché par La Dépêche : « « On est contaminés » : mercure, pesticides, plastifiants… Ce mélange toxique inquiétant retrouvé dans les cheveux des sénateurs français ».
Tout y est pour faire peur, ou presque.
L’AFP nous apprend donc, notamment, que :
« Les analyses ont mis en évidence chez 93 % des sénateurs une présence de « terres rares » (lanthanides), supérieure à la population témoin du laboratoire. »
Non, c’est chez 24 des 26 sénateurs socialistes qui se sont prêtés à l’embrouille. Et de savoir que cette présence est supérieure à « la population témoin du laboratoire » ne nous avance guère.
Nous passerons sur le reste : avec les méthodes modernes d’analyse on trouve quasiment de tout dans tout.
Les réactions des sénateurs sont aussi très « instructives » :
Mme Angèle Préville, sénatrice du Lot et initiatrice de l’opération, fait la démonstration d’un remarquable esprit logique :
« C’est une alerte qu’on envoie […] Si c’est dans nos cheveux, ça veut dire qu’on est contaminé. »
L’AFP n’a trouvé aucune raison de ne pas citer un commentaire abscons de M. Patrick Kanner, sénateur du Nord :
« Notre mode de vie pèse sur notre qualité sanitaire, c’est clair […] Quand je suis à Paris, matin, midi et soir je mange à l’extérieur, et je ne maîtrise pas ce que je consomme. »
Yan Chantrel, représentant les Français établis hors de France « insiste par ailleurs pour que les questions de santé publique soient « intégrées pleinement » dans les politiques environnementales ». Comme si elles ne l’étaient pas, en tant que de besoin.
Et il ajoute :
« Cela interroge les modes de production et de consommation de notre société, qui créent finalement des nouvelles maladies ».
Quelle hauteur de vue ! Au fait, quelles nouvelles maladies ?
L’AFP ajoute :
« Après avoir modifié ses habitudes, il [M. Yan Chantrel] a accepté d’être retesté à l’automne prochain, avec deux de ses collègues qui ont déclaré des symptômes pouvant être associés à une intolérance aux champs magnétiques (fatigue importante, maux de tête…). »
Et voilà l’« électrosensibilité » qui monte dans le wagon… En fait, c’est un argument de vente de toxSeek.
Cette dépêche se devait de citer un représentant de toxSeek, faute de quoi elle aurait péché aux canons – formels – du journalisme :
« Pour Matthieu Davoli, cofondateur du groupe toxSeek, à l’exception des terres rares, les résultats « sont très cohérents à ce qu’on voit habituellement » dans la population. Cela témoigne d’une exposition « répétée et régulière » à des polluants présents dans l’alimentation et des produits cosmétiques ou d’hygiène. Il note qu’ »une contamination sur le long terme peut apporter des effets de perturbations endocriniennes et amener à des maladies chroniques, auto-immunes, neurodégénératives, cancers… » »
Un laïus initial bateau suivi d’une bonne dose d’anxiogenèse…
Matthieu Davoli est particulièrement compétent pour tenir ce genre de propos : il a, selon ses indications, une formation en… marketing stratégique.
Mais c’est aussi un très grand spécialiste de l’électro-hypersensibilité, y compris chez les animaux, ainsi que des cancers pédiatriques… Et il est aussi président de l’association ToxSeek Urgence.
… Et nos sénateurs socialistes, en quoi sont-ils compétents ?
Article mis à jour le 01/07/2023
soyons clairs à mon opinion, il ya un questionnement légitime sur l’effet sur la santé de la SOMME des micro contaminations chimiques..
il ya une approche simple sinon la seule possible qui est l’étude d’une substance à la fois..
mais pour étudier grosso modo la somme de tout…méthodologiquement… bonjour…
le problème est que les convaincus du « problème » veulent agir en aveugle sans même détecter de véritables signaux de santé publique. sans évaluer quantitativement le facteur causal
en gros dépense plein de pognon;.pour des résultats non observables…
et il y a même désormais un groupe « pire »… qui pose qu’acune pollution n’ est acceptable.
donc on doit parler méthode et CHARGE de la preuve à l’accusation..
ça c’est de la com..
et derrière il y de l’ideologie..
or il faut remplacer l’idéologie par le débat rationnel..
c’est quoi le problème? que faire pour ne pas faire plus de mal que de bien…
oui le monde moderne accroit certains risques.. mais ils diminuent d’autres Or nous vivons dans la somme des risques..
Les risques ne s’ajoutent pas, ils se combinent éventuellement, mais le risque de la somme n’a rien à voir avec la somme des risques. Il n’y a que dans une salle de cours qu’on peut aborder les questions de risques, et avec des élèves disposant d’une certaine culture scientifique, dans les médias c’est voué à l’échec.
poui je me suis sans doute ml exprimé..
ici on est surtout dans l’ignorance…on ne sait pas… on ne connait pas les risques..
on évalue de façon limitée certes dira t on réaliste…l’impact de l’exposition. à une substance à la fois….
imaginez donc la méthodologie pour estimer les effets combinés de 10 substances..
l’épidémiologie c’est déjà pas facile… avec un effet faible d’une substance..il faut de grosses populations..
mais on sait une chose.. on a pas vraiment de raison de s’alarmer car pas vraiment se signa de santé publique inquiétant..
or justement..c’est ce qui est nouveau , prendre des mesures sans savoir et tout en sachant qu’on ne sera même pas en mesure d’évaluer le résultat..
ici c’est de la com.. et de lidéologie.
J’ai quelques doutes sur la représentativité statistique d’un petit échantillon de 24 sénateurs gauchistes chauves comme modèle de la population française.
Oops, je voulais dire « non chauves ».
Il faut absolument supprimer les origines de cette contamination ! Et le point commun entre nos socialistes, c’est la cantine de luxe du Sénat. Supprimons la et, outre la meilleure santé de nos gauchistes, on améliorera nos finances publiques par les économies que cette suppression va induire.
Dangereuse supposition. La plus évidente particularité des sénateurs est d’être d’heureux bénéficiaires de la retraite par capitalisation…
Oui mais cette retraite ne contamine pas les cheveux…
Avec les méthodes d’analyses actuelle, on peut trouver des traces de tout dans n’importe quoi. Statistiquement, il y a forcement une molecule d’eau du pipi de Jésus Christ ou de Charlemagne, ou de qui vous voudrez dans un verre d’eau. Toujours et encore faire peur à la population sur n’importe quel sujet.
Effectivement, nous buvons la même eau que les dinosaures…
Voilà typiquement la nouvelle dénuée de tout sens scientifique. On ne cite pas exactement la source ; il n’y a aucune donnée précise sur les concentrations « mesurées », sur la méthode. Avec HPLC, on détecte tout partout.
Il n’y a pas de valeur sur les échantillons de la population générale.
Personnellement, lorsque je lis un compte-rendu de la grande presse censé « résumer » un article scientifique, je vais voir la source. Souvent, le résumé est inexact (les rédacteurs grande presse ont-ils parfois une formation scientifique?); dans ce cas, c’est « fausse nouvelle ».
L’espérance de vie a augmenté en France depuis 50 ans, il faut donc croire que le bilan reste nettement positif et gardons à l’esprit que « Tout est poison, rien n’est poison, c’est une question de dose »
J’ai lu ce jour, à ma surprise, un article similaire sur le site du Point. Comme quoi, la « grande presse » est aussi capable de faire preuve d’esprit critique.
Ça explique tout comme, l’abus des restos 3 étoiles est néfaste pour la santé mentale…
Je crois aussi que les opiacés n’ont aucunes normes à respecter.. Sans compter le dealer… Quand c’est vendu au poids, le saucisson à ses sels nitrites le dealer à les métaux lourds…..
Évidemment, cette étude est bidonnée comme toutes les autres, la. Science, la politique et le pognon ne font pas bon ménage… Et avec ce trio, y’a le cocu… Le lecteur.