Retraites : les Républicains disent n’importe quoi

Par opportunisme les Républicains prétendent que la capitalisation pénalise les pauvres.

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Screenshot 2022-10-04 at 13-40-06 (2) Bruno Retailleau Cette réforme de la retraite il faut la faire - YouTube

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Retraites : les Républicains disent n’importe quoi

Publié le 1 mars 2023
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Faute de se donner une doctrine claire et nette (par exemple libérale, pourquoi pas ? ) les chefs de file du parti LR mettent en avant leur position d’arbitres : sans eux la réforme des retraites de madame Borne ne peut être votée. Ils démontrent aussi qu’ils vont changer quelques dispositions de la réforme qui vont la rendre populaire : du coup passer de 62 à 64 ans sera accepté par l’opinion publique. Donc Macron ce n’est pas parfait (Valérie Pécresse voulait aller jusqu’à 65 ans) mais c’est déjà mieux grâce à LR.

Seulement voilà : on parle de plus en plus de capitalisation, certains libéraux disent même que tout le système actuel doit basculer de la répartition à la capitalisation. Des libéraux modérés suggèrent qu’un peu de capitalisation peut sauver la répartition, d’autres libéraux, extrêmes bien sûr, assurent qu’il faut en finir le plus tôt possible avec la répartition et que la transition pourrait se faire sur une ou deux générations.

Monsieur Retailleau, qui dit préparer la candidature de Laurent Wauquiez, vient d’affirmer sans hésiter que :

  1. La capitalisation va pénaliser les pauvres
  2. La répartition peut être sauvée si une politique nataliste est appliquée.

 

Je me dois d’éclairer son jugement.

 

C’est la répartition qui pénalise les pauvres

Comme il est permis à toute personne, même peu instruite, de savoir que le niveau des cotisations va augmenter tandis que celui des pensions va diminuer, et puisque madame Borne elle-même a expliqué qu’une population vieillissante signifie moins d’actifs pour cotiser et davantage de pensionnés à payer, ceux qui en ont les moyens peuvent prendre des dispositions pour finir leur existence à l’abri du besoin.

Ce sont les propriétaires d’un logement : ou bien ils n’auront pas de loyer à payer, ou bien ils bénéficieront des loyers qu’ils percevront. La propriété immobilière a du bon – du moins si on ne la détruit pas avec des impôts et des normes écologiques comme actuellement. Ces propriétaires sont aussi ceux qui ont pu épargner, qui ont aussi un patrimoine et des revenus suffisants pour prendre une assurance-vie, ou pour grossir un compte d’épargne retraite prévu par la législation : PER, PEC, PERE, etc. Ils peuvent aussi placer leur argent en bourse, sachant que sur la longue période ils seront certainement gagnantes. Mais d’autres ne peuvent pas se prémunir : ce sont les pauvres.

Si monsieur Retailleau veut dire que les pauvres sont exclus de la capitalisation, il a raison. En effet les pauvres sont à perpétuité condamnés à la répartition, ils devront se serrer la ceinture durablement.

Mais il y a un autre argument que monsieur Retailleau ne prend pas en compte : c’est que les salariés pauvres, comme les mieux payés, paient à l’URSSAF des cotisations qui pourraient être diminuées de moitié (voire davantage) si leur argent n’était pas gaspillé par le gestionnaire de leurs retraites appelé Sécurité sociale.

Il faut déjà considérer que la distinction entre cotisations salariales et patronales n’a aucun sens, puisque ces deux prélèvements sont effectués sur la valeur réelle du travail du salarié. On devrait verser au salarié son salaire complet, celui qui n’est payé ni par le patron ni par quiconque autre, mais par le client. Dans une économie de marché la valeur d’un produit ne vient que du prix que l’acheteur est disposé à payer, et ce prix va rémunérer ceux qui ont créé et offert ce produit : investisseurs, entrepreneurs et salariés. Les investisseurs (comme les obligataires ou les banquiers) ont engagé un capital financier rémunéré par un intérêt. Les entrepreneurs ont su réunir les facteurs de production pour mieux satisfaire les besoins des clients potentiels et réalisent un profit. Les salariés ont apporté leur travail, c’est-à-dire leur savoir, leur temps, leur effort. Un artisan, un entrepreneur individuel, un professionnel libéral, apportent les trois facteurs de production et sont rémunérés par leur clientèle.

Pourquoi le salarié est-il dépouillé de la valeur réelle et totale de son travail ?

Parce que l’argent qu’il verse est un pur gaspillage, parce que lorsque le salarié peut capitaliser une partie de ce qu’il perçoit il peut le faire fructifier. Par contraste, en système de répartition l’argent cotisé ne va pas sur un compte que le salarié retrouvera le jour de sa retraite, il est immédiatement utilisé pour payer un pensionné. Le calcul a été fait par toutes les personnes connaissant une arithmétique élémentaire : une cotisation placée, capitalisée, représente la moitié, voire moins de la moitié de la cotisation qu’il faut payer en répartition. En d’autres termes, on confisque au salarié pauvre la moitié de son salaire et on ne peut pas lui garantir qu’il aura une retraite suffisante dans l’hypothèse d’une population vieillissante.

Par contraste la capitalisation enrichit réellement le pauvre en lui laissant d’une part un pouvoir d’achat immédiat plus élevé, d’autre part la perspective d’une meilleure retraite. Où est l’appauvrissement du pauvre ?

 

Rajeunir la population

Il est vrai qu’on a entendu Bruno Retailleau et madame la sénatrice Valérie Boyer expliquer que le système par répartition peut être sauvé si la population rajeunit.

Le COR, qui n’a aucune qualification ni esprit scientifique, contrairement à ce que l’on croit, (au point que les syndicats eux-mêmes ne retiennent jamais ni ses données ni ses prévisions) soutient également que la croissance démographique peut sauver le système actuel. Plusieurs personnes concluent aussi qu’il n’y a aucune urgence à réformer.

La croissance démographique, utile ou inutile, peut être le fruit soit de l’immigration, soit d’une politique nataliste.

La voie de l’immigration a été choisie par l’Allemagne, qui a en effet assimilé presque trois millions de Turcs. Il s’agit bien d’une assimilation, c’est-à-dire que les immigrés sont amenés à apprendre la langue, à accepter le mode de vie et à s’installer dans des logements déterminés par l’État (et pas dans des logements dits « sociaux »), et à avoir un emploi rémunéré. De telles conditions ne sont pas acceptées en France, l’acquisition de la nationalité française, avec le « droit du sol » et le regroupement familial, est d’une grande facilité. En revanche il est possible que des immigrés non assimilés, voire sans papiers, aient des familles nombreuses : le communautarisme entraîne les drames que l’on sait.

Quant aux politiques natalistes, elles ont la faveur de nombreux milieux conservateurs, notamment catholiques. Il est en effet sympathique de voir de jeunes ménages entourés d’enfants en poussette qui assistent à la messe dominicale ou qui ont défilé pacifiquement dans les manifs pour tous contre les lois Taubira.

On cite le regain de natalité dans certains pays comme la Hongrie, où les allocations familiales, les parts fiscales, les crèches et les soins aux enfants sont plus accessibles. Mais il existe au moins deux arguments pour montrer les limites de la politique nataliste.

Le premier argument est typiquement libéral : il s’agit d’une politique. Cela signifie que la vie privée est régie par l’État, alors qu’elle est un choix personnel. C’est une ingérence injustifiée au point de vue des libertés individuelles.

Le deuxième argument est typiquement catholique : l’enfant est le fruit de l’amour et non d’un calcul économique. Allons-nous concevoir un enfant par patriotisme ? Faisons-nous un enfant en bon citoyen, pour sauver la Sécurité sociale ?

Vous trouverez peut-être ces deux arguments d’une autre période ou d’un autre monde mais nous voici revenus aux vertus morales de la capitalisation.

Comme je les ai déjà évoquées, voici les conclusions d’un exposé de Gary Becker sur la capitalisation :

« La capitalisation est un retour au travail : plus de gens seront actifs et le seront plus longtemps. C’est un retour à l’épargne. Alors que la répartition dilapide l’argent gagné et détruit le capital humain et la richesse nationale, la capitalisation place l’argent gagné, le fait fructifier.

C’est un retour à la responsabilité personnelle, la répartition contient tous les germes de la collectivisation et aboutit à faire disparaître toute idée de progrès personnel. »

Pour ne pas passer pour insensible à l’échec et à la misère, je rappelle aussi une remarque de Becker :

« S’il y a des individus laissés pour compte on peut prévoir un filet social à leur intention, mais ces cas doivent rester marginaux et il faut se garder, comme on le fait maintenant, de construire tout un système d’État providence sur des hypothèses extrêmes qui ne concerneraient normalement qu’une infime minorité de la population. »

À mon sens on peut aussi faire appel à la solidarité volontaire, qui est charité, autre forme de l’amour

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  • Avatar
    jacques lemiere
    1 mars 2023 at 6 h 52 min

    Moi je dirais que tout dépend de la capitalisation..pauvre ou riche!!!

    la capitalisation conduit à la possibilité de construire un capital productif de richesse.. mais on peut aussi mal investir.. et la mutualisation du risque ne protège pas de risques systémiques sinon ce serait trop simple!!!

    ne pas promettre!!

    Alors certes on peut m’expiiquer que si je regarde l’histoire contemporaine.. mais l’histoire contemporaine est marquée e par l’industrialisation ET l’énergie abondante..
    Mais il n’est pas dit que les années qui viennent ne soient pas caractérisées par perdre le moins possible;. gérer la rareté des fossiles..

    -6
  • Oui on retrouve chez Retailleau le typique biais des politiques français : l Etat jacobin dirige , il se prend pour dieu : que la natalité soit ! On voit bien chez l’auteur les griffes lancées contre les groupes de croyants divers, mais au moins ces derniers qu’ils soient chrétiens ou musulmans ne se croient pas l’alpha et l’oméga , tendance en revanche fréquente chez les franc macs . Une fois l’ Eglise remise au milieu du village , que dire ? Eh bien que la dénatalité est avant tout un probleme de société développée (les coréens du sud ont le même problème) et aussi de société communiste , rien n’est plus désespérant que le communisme . Alors bien sûr je suis d’accord avec l’auteur : plus de libéralisme , rendons la liberté aux personnes de ce pays .

  • « La répartition peut être sauvée si une politique nataliste est appliquée. »
    Tout ce qui est politique ( nataliste ou autre) vient de l’état et en substance l’ingérence de l’état dans la natalité, tout le monde sait que ça ne marche dans aucun des pays développés, bien au contraire! Ce sont les pays pauvres qui n’ont pas d’incitation financière ou fiscale gouvernementale qui ont la natalité la plus galopante! Et si l’on doit attendre que la natalité attendue et suscitée par les aides de l’état commence à redresser les comptes de la retraite par répartition, tout le système se sera cassé la figure bien avant!

    • Ponzi peut être sauvé en augmentant indéfiniment le nombre de nouveaux entrants.

      • @Michel il y en a qui ont essayé et ils ont eu des problèmes . J en profite pour conseiller l’exellente série documentaire sur Netflix sur Madoff

  • La politique nataliste est parfaitement contre-productive. Un individu, dans sa vie, passe 20 ans comme inactif à la charge de la société, 40 ans comme actif à produire des richesses, et de nouveau 20 ans comme inactif à la charge de la répartition en France.
    Une politique nataliste apporte donc, sur la durée, autant d’hommes.an à la charge de la collectivité que d’hommes.an de production ! Elle est donc appauvrissante pour le pays pendant les 20 premières années, et neutre ensuite en supposant qu’elle ne soit pas poursuivie.

  • Que les LR disent n importe quoi ne devrait surprendre personne. apres tout c est le parti de Chirac et Sarkozy.
    Penser qu on va regler le probleme par la natalité est completement debile. Meme en admettant que les francais vont soudain se mettre a faire 5 enfants par femme, ca ne changera pas grand chose. En effet, au court terme il faudra financer ces 5 enfants (les parents s’appauvriront donc). l etat lui devra payer alloc, creches et ecoles. A moyen terme, vu l etat de l economie francaise, on aura 2 RSA, 1 employé sous payé et 2 qui devront payer pour tout. on peut meme penser qu avec l afflux de personnes, les salaires auront tendance a baisser (loi de l offre et la demande)

    PS: l immobilier n est pas forcement l exemple ideal de l interet de la capitalisation. il necessite de l entretien (sinon au bout de 20 ans vous avez une ruine) et sa valeur depend fortement de sa localisation (si vous avez ahcetez un appartement il y a 30 ans a Lyon ou St Etienne c est pas la meme valeur aujourd hui)

    • @cd oui , entre les libéraux qui sont pour le tout capitalisation et les collectivistes qui sont pour le tout répartition , on n’a pas sorti le derrière des ronces . Et si on s’inspirait de la Suisse , je dis ça je dis rien .

  • On devrait aussi apprendre à l’école à gérer un ménage, et sa vie sur la durée par la même occasion. 95% au moins des pauvres pourraient épargner, en particulier avec un salaire complet, mais ne le feraient pas faute de connaître d’autre méthode de gestion que de regarder si la banque ne va pas refuser la dépense. Mais combien de politiciens survivraient si leurs électeurs savaient compter ?

    • @Michel si déjà on apprenait à lire écrire et compter , là aussi , on sortirait un peu le derrière des ronces .

  • Les commentaires sont fermés.

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