Chèque bois, chèque carburant : la folie des friandises étatiques

Le récent chèque au bois, après son cousin, le coup de pouce au carburant, illustre la dérive d’un système français de déductions fiscales et subventions injuste où un État paternaliste cherche à façonner un peuple frugal et vertueux.

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Chèque bois, chèque carburant : la folie des friandises étatiques

Publié le 14 février 2023
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L’exubérance d’un État distribuant subventions et exonérations fiscales comme autant de friandises a de quoi susciter de nouveaux abîmes de perplexité.

Un sujet de finances publiques pourtant crucial dans un pays qui réussit l’étrange exploit d’être à a fois le plus fiscalisé de la planète (co-champion du monde des prélèvements obligatoires avec la Belgique, 420 impôts en vigueur, un de plus tous les deux mois depuis 1981) et sans doute recordman de la plus longue série de déficits budgétaires de l’Histoire, 49 ans, série en cours.

 

Vérité aujourd’hui et erreur demain

Ainsi, pour compenser la hausse du tarif du gaz, l’État subventionne désormais le chauffage au bois alors qu’il y a quelques années il voulait interdire les feux de cheminée sans insert (un préfet d’Île-de-France avait gobé un rapport selon lequel ils émettaient plus de particules dangereuses que tous les camions des embouteillages de la région).

La subvention au bois et son cousin, le chèque carburant de 100 euros, ne survivront au demeurant sans doute pas longtemps au reflux du prix du gaz et du baril de pétrole, retombés sous le niveau constaté à la veille de l’invasion de l’Ukraine. Tant il est vrai que vérité subventionnée ou défiscalisée d’hier se révèle souvent erreur à combattre aujourd’hui, comme le rappelle la fermeture progressive des villes aux véhicules diesels considérés pourtant comme plus écologiques que ceux à essence il y a une quinzaine d’années.

Bref, l’incohérence et l’incertitude menacent dans ce maquis/marais transformant ménages et entreprises en chasseurs de primes & exonération, d’une opacité et complexité telle que personne ne s’y retrouve mais espère mieux tirer son épingle du jeu que le voisin. Sur quel pied danser quand un dixième du Code général des Impôts change chaque année et que surgissent, pour disparaître presque aussitôt, les coups de pouce aux cabossés de la conjoncture ?

Admettons toutefois qu’il soit légitime pour l’État de changer d’avis au gré des circonstances, cela s’appelle s’adapter. Mais, parallèlement, ce système, riche en folies listées par l’essayiste Jean-Marc Daniel1, se révèle injuste et dangereusement paternaliste.

 

Le règne de l’arbitraire

Injuste ? Il regorge de deux poids deux mesures arbitraires.

Jean-Baptise Say rappelait qu’une faveur particulière est généralement une injustice générale. Pourquoi, dans l’exemple ci-dessus, aider les ménages se chauffant au bois et pas à l’électricité ? Par ailleurs, nombre de professions, dont les journalistes, bénéficient de réductions fiscales dont la légitimité ne saute plus aux yeux aujourd’hui. Il en est de même de certaines exonérations de charges sociales, sous divers prétextes d’aménagement du territoire et de soutien à des métiers pénibles, ou en tensions, dont j’ai découvert l’existence en aidant quelque proche excentrique voulant se mettre à son compte. L’État se mêle aussi de subventionner les réparations d’appareils électroménagers. Pourquoi pas un chèque pour la rénovation de meubles ou le reprisage de pantalons ?

Les réductions d’impôts pour petits travaux de jardinage ou entretien du logement bénéficient à des ménages pouvant souvent se les payer et soutiennent l’activité d’artisans gagnant généralement bien leur vie. Quant à la raison légitime pour laquelle les rénovations de fenêtres en bois ou aluminium bénéficiaient jadis de déductions fiscales mais pas de celles en PVC, cela fera partie des mystères que je n’arriverai pas à élucider ici-bas ; le dépit amoureux d’un ministre du Budget envers un entrepreneur en fenêtres PVC ?

 

Façonner les vertus

Quant au paternalisme, il saute aux yeux dans nombre de subventions & défiscalisations, suivant un fantasme constructiviste d’élus et hauts fonctionnaires attachés à « corriger » l’humanité par diverses incitations ou pénalités. Une idée dénoncée par l’essayiste libéral du XIXe siècle Frédéric Bastiat, méconnu en France, selon laquelle l’humanité serait « une matière inerte recevant du pouvoir la vie, l’organisation, la moralité et la richesse, ou bien, ce qui est encore pire que, d’elle-même elle glisserait vers sa dégradation et n’est arrêtée sur cette pente que par la main mystérieuse du Législateur ».

À rebours de la Déclaration des Droits de l’Homme qui prévoit que l’impôt serve seulement à financer les charges communes, il s’agit d’orienter les comportements et façonner des vertus, de l’hygiène à l’empreinte carbone. Par exemple taxer le tabac pour dissuader de fumer (tout en prétendant que les lourdes charges pesant sur les salaires ne dissuadent pas l’embauche. Vous êtes sûrs que nous sommes encore un peuple cartésien ?). Des aides incitent à pratiquer le covoiturage ou à réparer son vélo, car c’est sain, le vélo. À quand le remboursement du dentifrice au nom de la lutte contre les caries ?

Existe pourtant une politique fiscale alternative n’ayant pas ces deux défauts majeurs2 et, disons, élégante, d’ailleurs pratiquée par 35 pays où elle a en outre souvent réduit la part de l’économie grise ; on supprime la grande majorité des mécanismes particuliers incitatifs ou pénalisants quitte à chagriner et on remplace la plupart des 420 impôts par une flat tax au taux unique de 14 à 17 % portant sur tous les revenus à partir d’un certain seuil, assorti en deça d’un impôt négatif (en clair, l’État verse un chèque aux nécessiteux) théorisé en 1968 par le penseur libéral Milton Friedman.

L’inconvénient principal étant qu’aucun ministre ne pourrait se vanter de distribuer des chèques de bois.

  1. Les Impôts. Histoire d’une folie française, Taillandier, 2017.
  2. La plupart des critiques sur la flat tax se concentre sur le fait qu’elle serait injuste car non progressive. Au-delà du fait que la quasi-totalité des impôts, de la TVA à la CSG en passant par l’impôt sur les bénéfices, ne sont pas progressifs non plus, il faut remarquer une chose : en fait, la grande majorité des hauts salaires ne paye pas vraiment plus de 17 % d’impôt sur leurs revenus grâce à divers mécanismes de déductions, ou d’exonération des portions les plus basses de leurs recettes. Et ceux qui devraient payer nettement plus… émigrent généralement.
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  • On peut dire qu’avec son film « Moi y’en a vouloir des sous » sorti en 1973, Jean Yanne fut un grand visionnaire et inspirateur des ̶s̶t̶r̶a̶t̶é̶g̶i̶e̶s̶ ̶é̶l̶e̶c̶t̶o̶r̶a̶l̶e̶s̶ politiques publiques actuelles.

    • La racket de l’état ayant atteint un niveau si élevé, il est parfois obligé de le compenser pour éviter une révolte. Révolte qui arrivera obligatoirement car il est incapable de se maîtriser.

  • bien entendu mais si vous vous voulez » l’égalité ».. en prétextant que les inégalités sont injustes..tout en laissant la liberté de choix aux gens..

    Le débat s’est déplacé des injustices qui causent des inégalités à l’inégalité qui est une justice en soi.. les médias reprennent oxfam poutou..LFI…..

    poutou ne comprend pas pourquoi une personne peut être milliardaire et lui « smicard » DONC…
    alors que par exemple, devant lui sont organisées des loteries.. devant lui il ya des gamins qui deviennent millionnaires avec des vidéos à la noix sur internet.. il voit que la capacité technique de rendre service à beaucoup de monde du fait des telecom et de l’indusrialisation permet de s’enrichir..sans voler personne…
    la question est de savoir si c’ets du crétinisme pu de l’aveuglement volontaire éhonté.. funeste pour la liberté..

  •  » (un préfet d’Île-de-France avait gobé un rapport selon lequel ils émettaient plus de particules dangereuses que tous les camions des embouteillages de la région). » Air Parif confirme que le chauffage au bois est, à Paris en hiver, la première cause de pollution aux particules fines, et de loin. ( sans compter la foultitude de produits chimiques bien toxiques générés lors de la combustion du bois – il faut se rappeler que les particules / pellets sont composées de résineux – sapin, épicéa, mélèze, pin, etc., – les mêmes bois qu’on vous recommandait de ne pas utiliser dans vos feux ouverts pour cause de dépôts dans les cheminées )

    • ce qui est plus difficile avec la pollution atmosphérique à apprécier est le bénéfice risque » collectif ».. on peut même dire que c’est souvent inappréciable d’où la fête du slip pour un politicien..

    • On peut aussi rappeler que fumer une cigarette émet 3 fois plus de particules fines qu’un diesel tournant au ralenti pendant le même temps, et qu’alors que le tuyau d’échappement du diesel débouche dehors, comme la cheminée du chauffage, il n’est pas rare que les particules issues de la cigarette restent confinées un certain temps là où il y a du monde pour les respirer.

    • Vous en connaissez beaucoup des gens qui chauffent au bois dans Paris et proche banlieue?

    • Ce qui pollué Paris, c’est le charbon allemand dont les résidus de combustion arrivent directement sur Paris grâce aux vents dominants. Si les Allemands ont fait fermer Fessenheim parce que trop près de leur frontières, Macron n’a pas demander au top pollueur de l’Europe (après la Pologne) de fermer sa centrale au charbon. Cherchez l’erreur.

    • Se baser sur AirParif pour tirer une quelconque conclusion et s’en targuer pour faire des recommandations paraît totalement incongru ! Cet organisme n’a que peu de valeur scientifique et, bien entendu, se gave de multiples biais étatiques…
      Il n’en demeure pas moins qu’au regard de multiples VRAIES études scientifiques la combustion du bois semble démunie de toute vertu écologique par rapport à d’autres modes de production d’énergie.

  • Si l’on écarte les pseudos justifications des chèques qui pleuvent, on trouve une politique électoraliste qui achète la paix sociale avec les impôts de nos enfants, chargés d’apurer la dette considérable de ce gouvernement irresponsable…

  • « À quand le remboursement du dentifrice au nom de la lutte contre les caries ? »
    En voilà une belle idée pour notre ministre de la santé dont on ignore ce qu’il est devenu…

  • La France « co-champion du monde des prélèvements obligatoires avec la Belgique ». Peut-être, mais la Belgique a un avantage incomparable : aucune fiscalité sur les donations !

  • Bah, si ils font des cadeaux sans doute en ont ils les moyens et surtout un intérêt à ne pas diminuer la consommation, leurs copains ne seraient pas content.
    Ja mais compris pourquoi les fenêtres plastiques n’ont jamais été aidées…. C’est la mesure la plus importante quand on parle isolation….. Mais sans doute que le prix a payer pour l’état aurait été extravagant et puis, y a toujours le problème de la diminution de la consommation et donc, des taxes.
    Pour les ecolos, qu’ils sachent que la. Consommation d’énergie fossile n’arrête pas d’augmenter… Et que nos poumons ou le climat en a rien à faire, plus de médecins serait plus efficace pour la santé des hommes… Quand aux animaux, sortez de vos cités dortoirs, ils se portent très bien, même de trop.

  • Ce sont surtout des chèques en bois ……

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