5 ordonnances pour sauver le système de santé

Tout le système organisationnel doit être simplifié avec moins de personnels administratifs et moins d’agences.

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credit Bernard Kron

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5 ordonnances pour sauver le système de santé

Publié le 30 janvier 2023
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Tout l’édifice de soins s’écroule. De nouvelles contraintes s’accumulent et vont accélérer la crise.

Pour que la maison ne s’effondre pas il faut commencer par rebâtir ses fondations, c’est-à-dire les études et la formation des soignants.

Tout le système organisationnel doit être simplifié avec moins de personnels administratifs et moins d’agences. Avec la lutte contre les fraudes, les budgets nécessaires seront libérés pour revaloriser les soins et motiver leurs acteurs.

La réforme des études de médecine

C’est la mère de toutes les batailles.

Malheureusement chaque réforme a amené le pire. La plus grave à mon sens est d’avoir détruit l’élitisme lors de la sélection des étudiants en supprimant les concours. Ces concours très sélectifs qu’étaient l’externat et l’internat des hôpitaux donnaient accès à une très bonne formation.

Le dispositif LMD et la culture woke ont contaminé le début des études de médecine. Il n’ y a plus de sélection par concours et les oraux ne sélectionnent plus les meilleurs. Le but était de diversifier les recrutements mais en réalité de sélectionner des futurs médecins « aux ordres » . Le numerus clausus reste inadapté car 20 à 30 % des étudiants envisagent de changer de voie à l’aulne des nouvelles contraintes.

La sélection par la diversité a multiplié le nombre d’étudiants qui souhaitent un vrai confort d’exercice. Les spécialités sans gardes et sans urgences sont choisies en priorité par les mieux placés à l’ECNi.

La médecine générale et les spécialités lourdes sont boudées et de plus en plus d’étudiants espèrent un travail à temps partiel ou le salariat. À ce rythme il n’y aura plus de médecine libérale accessible à court terme malgré le renfort de nombreux médecins étrangers.

La conséquence du salariat et du temps partiel de plus en plus recherchés est que le temps consacré aux soins est d’autant plus diminué, amputé par les tâches administratives. Il faudrait doubler le nombre d’admis lors du deuxième cycle. Ce serait possible avec les téléconférences, l’ouverture de facultés libres et davantage de stages formateurs en secteur libéral mais est-ce souhaitable ?

Une université croate va former des médecins à Orléans mais en langue anglaise. L’université de Zagreb a ouvert une antenne dans laquelle une cinquantaine d’étudiants seront formés.
Tollé chez les médecins et dans les universités d’Orléans et de Tours qui dénoncent une formation au rabais. À mon sens c’est pourtant une solution meilleure que celle qui consiste à importer des médecins étrangers qui manqueront dans leur pays.

Le deuxième cycle ne permet pas une bonne formation car il comprend trop de cours théoriques et pas assez de stages de qualité. Rien ne prépare les internes à leur fonction.

Le législateur a voulu imposer une quatrième année d’internat dans les déserts médicaux pour les futurs médecins généralistes. Réaction : 30 % des étudiants interrogés sur cette réforme envisagent de changer de voie.

Les internes peuvent refuser cette quatrième année de médecine générale et saisir le Conseil d’État. Ils peuvent aussi passer leur thèse et s’installer. La soutenance de la thèse se fait au plut tôt après validation de trois semestres de formation et au plus tard trois années après l’obtention du diplôme d’études spécialisées.

Après le vote par l’Assemblée d’une quatrième année d’internat pour les internes en médecine générale c’est maintenant l’Académie de médecine qui s’en mêle. Elle propose une « mesure phare » qui a fait bondir la jeune génération déjà traumatisée par toutes les contraintes : « un service citoyen médical d’un an pour tout médecin nouvellement diplômé ». Cette mesure devrait être maintenue « tant que la situation de l’exigera ».

Piloté directement dans les territoires par les agences régionales de santé en coordination avec les facultés de médecine, ce service se ferait « dans le cadre d’un salariat et en utilisant les infrastructures mises à disposition ».

Cette proposition est ubuesque car les internes sont rémunérés 2000 euros en moyenne avec des temps de travail toujours dépassés à cause des gardes. Ils ont déjà rendu ce service pendant 10 années à l’hôpital. Comme pour la quatrième année d’internat elle aura les mêmes effets négatifs en retardant l’installation et aggravera la pénurie de médecins. Il est faux de faire croire que 10 années sont nécessaires pour former de bons généralistes. Des jeunes seront toujours attirés par un métier sans chômage. Ils se contenteront d’un salaire pour des semaines de moins de 45 heures.

La solution serait de faire commencer l’internat de médecine générale en cinquième ou sixième année avec des stages de six mois en petite chirurgie et en médecine générale. L’ ECNi serait maintenu pour le choix définitif de la spécialité.

Avec une telle réforme, les internes pourraient être mis en responsabilité plus tôt pour participer aux urgences ou faire des remplacements.

L’internat de médecine générale serait avancé mettant ainsi près de 4000 médecins de plus sur le marché. En peu de temps les déserts médicaux seraient résorbés. La prise d’un poste d’assistant serait avancée d’un an ce qui permettra l’accès au secteur II et l’installation.

Il faudrait faire commencer l’internat de médecine générale en cinquième année et augmenter le nombre des spécialités en souffrance.

L’organisation générale de la santé

Les multiples agences de santé :

  • Groupements hospitaliers de territoire,
  • Agences régionales de santé,
  • Communautés profesionnelles territoriales de santé,
  • Permanences de soins,
  • Groupes hospitaliers universitaires.

 

Elles ont multiplié les postes administratifs et le nombre de médecins qui y participent.

Les 1440 agences de l’État emploient près de 450 000 personnes et coûtent chaque année plus de 50 milliards d’euros. On ne sait pas combien coûtent celles dédiées à la santé ni combien de salariés elles occupent. Elles ont pris tous les pouvoirs.

Ces agences vont à l’encontre du but qui devrait être recherché : la sécurité.

Elles n’ont pas de stratégie, analysent et publient des rapports sans que des décisions soient prises. Où est l’État stratège qui pilote à vue sans tactique et sans vision avec cette gouvernance ?

Cette situation est parfaitement décrite dans Blouses Blanches. Plusieurs scandales ont démontré leurs échecs, les derniers étant celui des tests, des masques, du refus par la Haute autorité de santé de réintégrer les soignants non-vaccinés.

Les personnels suspendus ne reviendront pas. La plupart ont trouvé une autre orientation ou sont partis dans des pays voisins plus attractifs et moins regardants. Leur retour serait un bon signal mais ne réglera pas une pénurie devenue chronique. La délégation de tâches, les assistants médicaux, le numerus clausus, l’allongement de l’internat n’encouragent pas les soignants.

À cela viennent s’ajouter des mesures qui augmentent les contraintes : le conventionnement sélectif ; le service d’accès au soins avec l’obligation pour les gardes ; le projet de loi de Stéphane Rist introduisant la responsabilité collective à l’intérieur du secteur ; la limitation des droits aux remplacements. Qui voudra encore être médecin demain avec la ré-accréditation tous les 5 ans ?

Les métiers de soignants n’attirent plus, un tiers des écoles d’infirmières sont vides. En médecine, les contraintes, la durée des études, les salaires ou les honoraires trop faibles dissuadent les plus motivés. Les nouveaux médecins choisissent en masse le salariat, le temps partiel ou les spécialités sans gardes et sans urgences.

Le Ségur et la loi « Ma Santé 2022 » n’ont rien réglé. Les mesures du PLFSS ne régleront rien car le mal est trop profond . Tout l’édifice est à reconstruire. Il faut donc repenser tout le système de soins.

Les mesures pour sauver l’hôpital

Les CHU n’ont pas évolué depuis leur création en 1958.

Les actes chirurgicaux courants y sont en moyenne 40 % plus coûteux qu’en clinique. Le directoire, le conseil de surveillance, la commission médicale d’établissement et les pôles multiplient les postes administratifs, les dépenses non soignantes et le temps passé en réunions.

Trop de médecins participent à ces structures et manquent pour suivre les malades. Les tableaux Excel, les référentiels, les codifications des actes (plus de 500 médecins s’attèlent à réviser les quelques 13 000 actes codés par la CCAM), les réunions et les transmissions amputent encore plus le temps consacré aux soins.

Pas moins d’un tiers des postes d’agents adminisratifs pourrait être supprimé à l’hôpital, soit environ 100 000 postes. On rejoindrait ainsi l’Allemagne qui se contente de 22 % d’administratifs contre 34 % en France. La multiplication des tâches administratives représente un budget équivalent à 100 000 postes de soignants.

Il faut en priorité mettre fin à l’empilement des strates administratives qui paralysent les soins.

Les hôpitaux retrouveraient une organisation plus simple et davantage d’autonomie. Des accords complémentaires entre établissements seraient préférables à ces empilements administratifs qui bloquent les décisions et ruinent le système.

Les salaires des soignants doivent être revalorisés. La durée d’une carrière à l’AP-HP pour une infirmière est de 5 ans en moyenne, beaucoup démissionnent au-delà de cette période.

Les praticiens hospitaliers ne peuvent plus assurer la triple tâche soins-enseignement-recherches avec les obligations administratives. Beaucoup envisagent de démissionner. En région parisienne leurs salaires ne leur permet pas de se loger. Il faut leur donner un accès prioritaire aux logements sociaux.

Prescriptions

Ordonnance 1

Sélectionner les étudiants sur l’élitisme
Augmenter leur nombre

Ordonnance 2

Sortir du système Licence Master Doctorat
flécher les spécialités au début du deuxième cycle

Ordonnance 3

Supprimer les agences et les administrations en surnombre
Reconvertir un tiers de leurs salariés

Ordonnance 4

Libérer les soignants de l’administration

Ordonnance 5

Sortir le salaire des soignants de la grille des fonctionnaires

Ces ordonnances devront être complétées par d’autres décisions attribuant davantage de libertés aux acteurs de la santé.

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  • Tout ça se résoudra comme une fleur le jour où les politiciens seront traités comme des patients ordinaires lorsqu’ils auront un ennui de santé.

  • Je pense que la mort de la médecine française est due à sa dépendance totale à la Sécu qui n’est pas un patron acceptable, comme, en France, tout ce qui relève de la pieuvre étatique.
    Il faudrait que cet état dans l’état soit mis en concurrence, et que les praticiens soient un tout petit peu plus libres de fixer leurs honoraires.
    Une consultation à 25€ ce n’est pas digne!
    Un déconventionnement en masse serait plus efficace qu’une grève!
    (Je ne suis pas médecin).

  • Le médecine en France est morte. Tuée par le wockisme et le socialisme. Comme toute l’éducation. Si un diplôme est attribuée à la tête de client au lieu de ses compétences et son travail, alors le diplôme ne vaut plus rien et le travail fait par le diplômé encore moins.
    Dans 25 ans, on verra exploser les procès aux médecins. Mais pas de panique, ils seront défendus par des avocats qui ne savent pas lire. Merci les socialistes.

  • sans changement du statut des hôpitaux publics, sans libéralisation du secteur, sans la fin du monopole de la sécu, pas de miracle à attendre.

  • Les commentaires sont fermés.

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