Management : la sharp attitude en 10 leçons !

Voici un bréviaire en 10 chapitres pour être “sharp”, une attitude qui sera porteuse en 2023 !

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Management : la sharp attitude en 10 leçons !

Publié le 9 janvier 2023
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Le business reste le business. Les temps sont difficiles. Il faut décider, renoncer, choisir. L’adjectif tendance chez les consultants en stratégie ou chez les as du M&A, pour qualifier un collègue ou une présentation, est sharp.

Être sharp, c’est être affuté, rapide, efficace, brillant, stratégique, c’est aller à l’essentiel, sans fioritures. Voici un bréviaire en 10 chapitres pour être sharp, voici ma management winter session !

Loin de moi l’idée de ne pas continuer pour autant à travailler ses soft skills. C’était l’objet de ma tribune, Management summer session, publiée par Contrepoints en juillet 2021, en quelque sorte la première partie du présent article. Elle énumérait des pratiques vécues visant à favoriser le bottom up, l’engagement et la confiance.

Plus récemment, dans Management : osez l’humour stand-up !  je donnais des cas pratiques permettant d’injecter une dose de fantaisie dans vos pratiques managériales.

Alors revenons à notre bréviaire pour maintenir et développer votre sharp attitude… une attitude qui sera porteuse en 2023 !

 

Des fondamentaux innés ou acquis !

J’ai souvent remarqué que les personnalités sharp faisaient preuve d’une clairvoyance qui s’appuyait soit sur de l’inné – le flair pour intuiter la création de valeur et comprendre la logique du business et la loi du marché – ou de l’acquis : par leurs études supérieures et/ou la poursuite de lectures bien digérées de grands auteurs qui leur servent de points fixes dans leurs analyses.

Dans les années 1960, au sein de l’Ancienne Mutuelle (l’ancêtre d’AXA), Claude Bébéar préparait ainsi les cadres de l’entreprise. Dans les séminaires, beaucoup de livres étaient étudiés, dont les fameux ouvrages de l’économiste et expert en management Octave Gélinier, qui a contribué à introduire en France les pratiques venues des USA, comme la direction participative par objectif.

Quelques conseils de lecture ?

Autant être cohérent et lire des auteurs favorables au marché libre et à la concurrence ! Je recommanderais la lecture d’auteurs de l’école autrichienne… Ludwig Von Mises au hasard ! Par exemple, à l’heure où l’on parle toujours autant de mettre « le client au centre des organisations », rien ne vaut la lecture de son oeuvre la plus connue Action Humaine publiée en 1940.

Un « roi du chocolat » n’a aucun pouvoir sur les consommateurs, ses clients. Il leur fournit du chocolat de la meilleure qualité possible et au prix le plus modéré possible. Il ne commande pas aux consommateurs, il les sert. Les consommateurs ne lui sont pas liés ; ils sont libres de ne plus fréquenter ses magasins. Il perd son « royaume » si les consommateurs préfèrent dépenser leurs sous ailleurs. Il ne « règne » pas davantage sur ses salariés. Il loue leurs services en leur payant exactement le montant que les consommateurs sont disposés à lui rendre en achetant le produit.

 

Analyser pour affronter la réalité !

Fin 1976, Alain Peyrefitte, un gars hyper sharp, publiait son best-seller Le Mal français. Près de cinquante ans plus tard, les symptômes sont encore là, les remèdes n’ont toujours pas été appliqués. Mais a-t-on fait l’exercice d’analyse partagée avec les Français ?

Il indiquait en effet que la France relèvait d’une « psychothérapie collective ».

Toute psychothérapie est d’abord une cure de vérité. Pour guérir un névrosé, la prise de conscience de l’origine véritable de la névrose est presque toujours nécessaire, et souvent suffisante. Ne cherchons pas le mal ailleurs qu’en nous. 

Dans toute organisation, prendre conscience avec objectivité de la situation réelle est indispensable.

 

Les bonnes matrices des familles !

Un bon SWOT, les matrices BCG, Mc Kinsey, les « cinq forces de Porter »… Autant d’outils dans votre boîte pour analyser et partager une vision simple et opérationnelle.

À quand la dernière fois où vous avez fait l’exercice pour votre propre activité ? Et quand avez-vous lu ou relu pour la dernière fois un article, un livre présentant de telles approches ?

René Arnoux, champion de Formule 1, avait commencé sa carrière comme simple mécanicien. Dans le genre, René était sharp. Dans une interview, à la réponse « Quel est votre livre de chevet ? », il avait répondu « Le catalogue Facom » !

Et vous, praticien du management et de la stratégie, relisez-vous régulièrement vos manuels Facom de stratégie ? Le Strategor par exemple ? Relire un bouquin de management c’est comme relire un roman. On découvre des subtilités auxquelles on n’avait pas prêté attention la première fois.

Et d’ailleurs, est-ce la fin de l’histoire des matrices stratégiques pour paraphraser Fukuyama ? Des praticiens ou théoriciens du management ont-ils élaboré récemment de nouvelles approches ? Pas à ma connaissance, pourtant il y a de nouveaux angles de vue à concevoir !

 

Penser en stratège, agir en primitif !

La célèbre formule du poète René Char s’applique bien à des cas d’entreprise où le dirigeant prend une décision en sachant qu’il ne peut pas faire d’omelette sans casser les œufs.

J’avais assisté à une conférence de Paul Dubrule, le cofondateur du Groupe Accor, qui expliquait que pour lancer leur premier Novotel (à Lille en 1967), lui et son acolyte Gérard Pelisson avaient dû être borderline sur le plan de la réglementation (de mémoire sur un sujet d’aménagement ou d’urbanisme). En cela ils avaient été primitifs et pris leur risque.

Lorsqu’il s’agit notamment de prendre des décisions difficiles comme une réforme économique ou lors d’une nécessaire restructuration, se pose la question du gradualisme.

Marc de Scitivaux, fondateur des Cahiers Verts de l’économie, sharp quand il intervenait sur BFM Business, aimait citer la métaphore de la queue du chien du grand économiste français Frédéric Bastiat du XIXe siècle.

Je ne suis pas comme ce Champenois qui disait à son chien : « Pauvre bête, il faut que je te coupe la queue ; mais sois tranquille, pour t’épargner des souffrances, je ménagerai la transition et ne l’en couperai qu’un morceau tous les jours.

Dans la notion de sharp, il y a cette dimension de fulgurance, d’approche chirurgicale (d’ailleurs les chirurgiens sont souvent sharp !) qui fait la différence. Les start-ups, les petits groupes agissants, les minorités actives la détiennent.

 

Les Rumsfeld Rules !

Donald Rumsfeld est l’archétype du faucon.

Il a commencé sa carrière comme pilote et instucteur dans l’US Navy, effectué une carrière dans le public (au sein de l’équipe du président Gérald Ford puis beaucoup plus tard secrétaire d’État à la Défense sous Georges W Bush) mais aussi occupé des postes de haut dirigeant dans le privé. Rumsfeld a eu ses admirateurs et ses contempteurs. Le sujet n’est pas de les départager mais simplement de conseiller la lecture des Rumsfeld Rules : un certain nombre de phrases ou de citations regroupées par Rumsfeld lui-même.

Certaines sont pleines de bon sens et méritent d’être mémorisées.

« Si vous pensez avoir les choses sous contrôle, vous n’allez pas assez vite. » (citation qu’il attribue au pilote automobile Mario Andretti, champion du monde de Formule 1 en 1978)

« Quand vous faites du ski, si vous ne tombez pas c’est que vous n’essayez pas. »

« Surveillez la croissance de l’encadrement de niveau intermédiaire. Ne comblez pas automatiquement les postes vacants. Laissez certains postes vacants pendant 6 à 8 mois pour voir ce qui se passe. Vous constaterez que vous n’aurez pas besoin de pourvoir certains d’entre eux. »

« Trouvez des moyens de décentraliser. Déplacez le pouvoir de décision vers le bas et vers l’extérieur. Encouragez une approche plus entrepreneuriale. »

« Élaguer – élaguer les entreprises, les produits, les activités, les personnes. Faites-le chaque année. »

« Développez quelques thèmes clés et respectez-les. Cela fonctionne. La répétition est nécessaire. “Qualité”. “Clients”. “Innovation.” “Service.” peu importe ! »

 

Être sharp en matière d’innovation produit !

Coût de la ressource plus élévé, consommateur plus exigeant, les lancements de nouveaux produits ou services vont être plus compliqués. Plus que jamais, il convient d’appliquer le filtre très sharp exposé par Eric Ries dans son best seller Lean Startup (2011).

« Quel est le problème, le painpoint que la startup (ou une entreprise) cherche à résoudre ? »

« Est-ce que les consommateurs reconnaissent qu’ils ont le problème que vous cherchez à résoudre ? »

« S’il y avait une solution est ce qu’ils l’achèteraient ? (Voir ci-dessous concept du cupcake !). »

« Et est-ce qu’il vous l’achèteraient à vous ? »

« Est-ce qu’on peut concevoir et fabriquer une solution pour ce probème ? »

Faute de cela, le risque est d’avoir un produit conçu par des ingénieurs qui se positionnent directement sur la question 5 alors qu’il n’y a pas de vrais usages pour les consommateurs !

S’agissant de la monétisation, sujet auquel sont confrontés beaucoup d’acteurs du e-commerce, on rappellera la métaphore du cupcake.

C’est l’histoire d’un collègue qui tous les vendredis ramène à ses coéquipiers une fournée de cupcakes maison qu’ils s’empressent tous de bouloter. « Une tuerie, tes cupcakes ! T’es trop fort, tu devrais te mettre à ton compte et ouvrir une boutique ! ». Quelques semaines plus tard, il revient au bureau avec ses cupcakes, en demandant une contribution de un euro par cupcake… Et là très peu d’acheteurs se précipitent… Moralité : de la gratuité à la monétisation, il y a une grande marche.

 

Savoir dire « non » !

En matière de lancement de produit, comme plus généralement de stratégie, l’essence est de décider de ce qu’on ne fera pas.

Il en fallait ainsi beaucoup pour convaincre Ben Tellings, CEO très sharp dans les années 2000 d’ING DIBA (l’entité allemande de banque en ligne d’ING, extrêmement performante). Il aimait raconter qu’il décourageait régulièrement ses chefs de produit venant lui proposer de nouvelles idées…

« On a déjà tellement à faire avec notre gamme. Restons focus. Désolé, tu n’es pas payé à faire de nouvelles choses. Je sais, c’est pas marrant ! ». ING DIBA, plus de 15 ans plus tard, fait toujours la course en tête !

Quant à Carlos Tavares, grand patron qui pourrait prétendre au Sharp Award, nul doute que dans la période actuelle, il doit souvent dire non ou du du moins filtrer fortement les projets. Ainsi doit-il plus que jamais adopter la posture qu’il présentait dans une interview sur son mode de management parue dans Les Échos en 2019.

À la question « le chef n’est-il pas censé avoir toujours raison ? », il répondait :

Je ne parviens pas toujours à me placer à ce niveau d’inconfort, mais il m’arrive deux ou trois fois dans l’année de dire à mon équipe « je suis en profond désaccord avec vous, mais on va faire ce que vous me proposez ». Après, cela crée une sacrée responsabilité… parce qu’il vaut mieux que ça marche, sinon je le leur rappellerai. Nombre de fois, la réponse n’est pas dans la bonne ou la mauvaise idée, mais dans la bonne ou la mauvaise exécution.

 

Plus facile de réduire le dénominateur !

Analyser, analyser, analyser… Comme a pu le montrer le même Eric Ries dans Lean Start Up, il faut se méfier terriblement des vanity metrics, ces chiffres glorifiant qui n’aident pas à comprendre la réelle performance de votre entité et qui cachent en fait la réalité du business.

Les chiffres de connexions mensuelles, de téléchargements ? OK, mais cela rapporte combien ? Les ventes, les ouvertures de comptes ? Certes mais quid des clôtures ? Le chiffre d’affaires moyen par client ? N’oubliez pas d’analyser aussi par cohorte (par période…) ! Et puis méfiez-vous des analyses trop rapides, fondées sur le biais des séries courtes ! Ne déduisez pas une tendance à partir de 2 ou 3 chiffres passés. Ce n’est pas parce que vous arrivez à faire 4 fois de suite un double six que vous aurez une surpondération de double six en jouant 1000 fois aux dés…

Bref privilégiez les actionable metrics ! Des indicateurs exploitables pour en tirer la substantifique moelle.

À titre d’illustration, la spécialiste des dépenses publiques Agnès Verdier-Molinié distingue le rang de la France (yes, on reste la sixième puissance mondiale en richesse totale : vanity metrics !) à la richesse par habitant. Nous sommes 23e après avoir été 11e dans les années 1980…

Citons aussi l’anecdote de Bernard Ramantsoa (l’ancien et emblématique directeur du Groupe HEC), qui racontait à ses élèves de MBA en stratégie d’entreprise au début des années 1990 :

Savez-vous comment Jean-Marie Descarpantries, PDG de Carnaud Metalbox, a transformé ses cadres en tueurs ? Réponse : en introduisant le ratio chiffre d’affaires sur effectif dans leurs objectifs… Et oui, il est souvent plus facile de réduire le dénominateur par exemple en ne remplaçant pas un départ que d’augmenter le numérateur.

 

Seuls les paranoïaques survivent !

C’est le célèbre titre d’un grand classique de la littérature managériale, publié en 1996 par l’ancien PDG du fabricants de puces, Andrew Grove qui exposait comment repérer et anticiper les grands bouleversements qui impactent votre business et invitait à se comporter comme un véritable paranoïaque de la concurrence et de l’environnement.

Dans ce livre, il livrait la question-clé à se poser dans une situation de crise :

Si on se faisait virer et que le conseil d’administration faisait venir un nouveau PDG, que crois-tu qu’il ferait ?

Posez-vous ce genre de question avec votre équipe, que vous soyez responsable de service, de département, d’une entreprise ou expert dans un domaine !

Grove n’a sans doute pas écrit cela par hasard. Il avait connu la persécution nazie puisqu’il était né en 1936 en Hongrie, dans une famille juive d’origine modeste, puis il avait fui le régime soviétique lors de l’insurrection de Budapest en 1957, pour émigrer aux USA.

Bref, son propre parcours plein de résilience, n’est pas très éloigné de la célèbre blague attribuée à Billy Wilder : « Les pessimistes ont fini à Hollywood et les optimistes à Auschwitz…».

 

Comme monsieur Keating !

Alors êtes-vous sharp inside ?

Monsieur Keating, le professeur de littérature du fabuleux film Le cercle des poètes disparus (1989), montait sur son bureau pour se « rappeler que nous devons constamment modifier le regard que nous portons sur le monde. Car le monde est différent vu d’ici […] Si vous avez une certitude, continua Keating tandis que certains regagnaient déjà leur place, alors obligez vous à considérer le problème sous un angle différent, même si cela paraît idiot ou absurde. »

Pour évaluer votre sharp attitude, montez sur votre bureau. Pour ne pas vous laisser par exemple endormir par des comités où l’on ne décide que de l’abri à vélos, pour reprendre la fameuse loi de futilité de Parkinson datant de 1957 (prémonitoire question vélos !), qui établissait que le temps passé à discuter d’un sujet est inversement proportionnel à son importance.

Bref pour essayer de repérer si vous n’êtes pas en train de vous laisser assoupir, telle la grenouille dans une casserole portée progressivement à l’ébullition, par les 5 R des organisations : la routine, les réunions, les réponses aux mails, les règles, le reporting !

 

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