Macron, candidat seul sur son nuage

Emmanuel Macron a déjà donné le ton de ce que sera le quotidien du prochain président de la République française : il sera seul, inexorablement seul.

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Macron, candidat seul sur son nuage

Publié le 7 avril 2022
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À force d’avoir bâti toute sa stratégie électorale en psalmodiant le mantra « moi ou le chaos », Emmanuel Macron risque bien de laisser la France le soir du 24 avril prochain devant un sombre avenir : en effet, il y a de fortes chances que ce soit, soit « le chaos sans Macron », soit « le chaos avec Macron ».

À quelques jours du résultat final, le président sortant semble désorienté. Le meeting du 2 avril a sonné faux, les sondages sont illisibles, entre chiffres et dynamique, la campagne numérique est un flop et le parti présidentiel un zombie. Pour ajouter au tableau, les chaines d’information et le microcosme journalistique ne décolèrent pas de son refus de débattre avec les autres candidats et boudent dans leur coin.

Un candidat seul sur son nuage

Surtout, la désinvolture d’Emmanuel Macron, qui s’est échiné à donner l’impression que l’élection n’était qu’une simple formalité, a été très mal perçue. L’arrogance maintes fois relevée du jeune prodige de la startup nation n’avait réellement pas besoin de cet ajout de suffisance qui laisse croire que toute cette histoire n’est qu’une immense manipulation et que le résultat est déjà joué d’avance.

Si on ajoute à cette impression le lieu commun que le politique est incompétent, impuissant et totalement déconnecté du réel, on s’achemine tranquillement vers un taux d’abstention record et une légitimité ridicule, voire contestable et qui sera sans aucun doute immédiatement contestée, quel que soit le nom qui s’affichera à 20 heures sur les écrans des téléviseurs.

Trois semaines ou presque avant le résultat final, nous pouvons dès aujourd’hui annoncer qui sera le vainqueur de l’élection présidentielle. Quels que soient son nom, ses opinions, son programme et les cris de joie de ses sympathisants à 20 h 01 : le vainqueur sera l’incertitude, la lassitude et la désillusion.

Aucun des candidats ne fait rêver. Non que ce soit entièrement de leur faute, mais bien plus celle de ce qu’est devenue la République française : une immense usine à gaz incompréhensible et pataude au-dessus de laquelle surnage un  aréopage d’amuseurs publics ayant comme seule et unique qualité celle d’être les copains de celui qui a gagné l’immense télécrochet qui a lieu tous les cinq ans.

Les énarques contre le reste du monde

Le candidat Macron ne déroge pas à la règle. Il est même en quelque sorte le symbole de cette transformation de la vie politique en télé-réalité. Il est le gagnant de la saison 7 de la grosse blague politique qui a commencé le 10 mai 1981 et qui saison après saison, a sombré dans le ridicule et le sordide, entre filles cachées, argent sale, scooter, diabolisation, scandales récurrents et autres petites phrases arrogantes et méprisantes.

Emmanuel Macron a théorisé cette sombre comédie. Pour son élection de 2017, il promettait de changer le monde. Pour 2022, il promet d’être le rempart pour que le monde ne change pas.

Bien joué. Les plus de 60 ans qui ont été chouchoutés pendant les deux dernières années et auquel il vient de promettre de ne pas toucher à leurs pensions (qu’il financera en rognant sur celles des plus jeunes) voteront pour lui. Les moins de 30 ans voteront pour les marchands de rêve socialistes aux promesses mirobolantes. Les autres voteront contre : ils choisiront entre voter contre Macron, voter contre ceux qui leur semblent pire que Macron, ou voter contre ce système et aller à la pêche.

Quel que soit le résultat, Emmanuel Macron a d’ores et déjà perdu. Il sera peut-être réélu. Mais il a perdu.

Quel que soit celui ou celle qui sera élu, il ou elle a déjà perdu. Il ou elle sera amené à régner sur un empire de fonctionnaires et à trôner au sommet d’un immense tas d’argent public, mais il sera impuissant, déconnecté du réel et donc jugé incompétent.

L’enfer turbo-ultra-libéral

Si vous demandez aux habitants des banlieues pour qui ils auraient voté ? Sans aucun doute pour Uber qui leur a enfin donné des opportunités de travail et d’évolution sociale.

Si vous demandez aux habitants des campagnes pour qui ils auraient voté ? Sans aucune hésitation pour l’enseigne de supermarché la plus proche, mais aussi pour Amazon et Netflix qui sont les seuls interlocuteurs fiables qui restent dans ces régions désertées des services publics.

Si vous demandez aux citadins à haut pouvoir d’achat pour qui ils auraient voté ? Pour la multinationale qui les emploie et qui leur assure leur train de vie et les protège sous tous les aspects.

Si vous demandez aux commerçants et aux artisans pour qui ils auraient voté ? Pour eux, ou à défaut pour leur maire, puisque ce qui se passe à plus de 50 km de chez eux ne les intéresse absolument pas.

Aucun des douze candidats ne touche, ne serait-ce que de très loin, à ces aspirations. Tous crachent d’ailleurs avec morgue et fierté sur cet enfer libéral, sur cet individualisme qui a envahi la société française et qui la menace d’éclatement, de partition, de sécession, de séparation. Tous se posent en sauveur de l’État providence et de l’uniforme républicain.

Aucun n’a compris que ce qu’ils considèrent comme la priorité absolue est à des milliards d’années des préoccupations quotidiennes des gens. Tout juste la population regarde-t-elle encore l’État quand les bruits de bottes se font entendre à nos portes, mais c’est surtout pour jeter un regard désabusé sur les réelles capacités de défense d’un blob qui engloutit chaque année quasiment les trois quarts1 de la richesse produite pour se financer.

Un chantier titanesque

Il y a tellement de choses à faire dans ce pays. Tellement de changements à apporter. Le politique est totalement incapable d’effectuer un tel travail, quel qu’il soit, quels que soient ses compétences, son courage ou sa volonté.

Il faut se rendre à l’évidence : un tel chantier ne peut pas reposer sur les épaules d’une seule personne.

Le changement se produira dans le chaos, dans l’émoi et dans le labeur. La France changera, non pas parce que le politique y apportera la solution car il n’est pas la solution au problème : il est le problème.

Le changement se produira inexorablement parce que quel que soit l’élu, il n’aura ni la légitimité, ni la majorité, ni l’appui pour faire autre chose que de limiter le chaos qui se profile à l’horizon. Le changement se produit toujours dans le chaos. Le changement apporte toujours sa part de chaos.

L’État finira bien par être obligé de retourner à sa place. Emmanuel Macron a déjà donné le ton de ce que sera le quotidien du prochain président de la République française : il sera seul, inexorablement seul. Seul et condamné à devenir le spectateur d’une pièce de théâtre qui se jouera sans lui.

 

  1. trois quarts : entre impôts, taxes, prélèvements, dette, remboursement de la dette, revenus des monopoles …
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  • Idem : plus l’élection approche, plus j’ai le moral dans les chaussettes.

  • Bien sûr que c’est de leur faute. Il n’existe plus sur cette planète d’hommes et de femmes d’état, que des petits télégraphistes d’intérêts ou d’autres

    • Retounez à l’église. Le retour du Messie est plus probable que l’apparition de « l’homme d’État » que vous appelez de vos voeux.

  • bonjour, en ce qui concerne les plus de 60 ans, ils n’ont pas été chouchoutés : voir cet excellent article https://fr.irefeurope.org/featured/article/emmanuel-macron-contre-le-pouvoir-dachat-des-retraites/
    Par contre, l’analyse est intéressante, en contre partie, ce qui est inquiétant, se passera après, il faut se souvenir quand même que l’obtention d’une majorité à l’assemblée ne sera pas évidente du tout…. alors que deviendra notre démocratie déjà mal en point ? s’il ne reste qu’une chambre pure d’enregistrement des élucubrations de Bruxelles, nous serons devenus des « européens » malgré nous… dégageant de fait la responsabilité de nos dirigeants. Et là le slogan « c’est la faute à l’Europe » sera vérifié. Notre souveraineté et notre liberté ne seront plus qu’un souvenir.

  • Votre constat est lucide mais ne croyez pas qu’il soit partagé par la majorité des Français.
    Beaucoup sont contents d’avoir été payés à ne rien faire pendant le Covid, beucoup ont bénéficié de leur prime rénove, du chèque inflation, du chèque culture, des aides à l’achat d’un véhicule dit propre…
    Les intermittents continuent d’intermitter tous les soirs chez Naguy, les vaccinateurs ont gagné des fortunes en picousant à la chaine…
    Pour beaucoup d’entre nous, le rapport à l’état est celui de ceux qui vivent sous l’emprise d’un parrain de la drogue, on sait que c’est mal mais on ne pas faire autrement.

  • Mobilisez-vous avec votre entourage pour les législatives, pour que l’actuel ou le prochain apprenti tyran ne puisse pas profiter d’un parlement potiche. On a vu trop clairement ce que l’absence de contre-pouvoir permet dans une fausse démocratie.

  • Prémices d’un coup d’état ?

    • Après le Prince Président devenu Empereur, l’Ado Président « caudillo »?
      En réalité plutôt une démission plus ou moins rapide s’il a une majorité parlementaire contre lui. Sa nature profonde l’empêchera de se mettre dans les pas de Mitterrand ou de Chirac d’autant plus qu’il n’a ni leur expérience ni leur reconnaissance internationale.

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