Présidentielle : pour les libéraux, quelle réforme est prioritaire ?

Éducation, fiscalité, sécurité sociale, fonction publiques : les libéraux ont des idées et les candidats devraient les écouter.

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Présidentielle : pour les libéraux, quelle réforme est prioritaire ?

Publié le 6 avril 2022
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Peut-on encore faire dérailler le train qui nous conduit sur la route de la servitude ? À quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, même les plus optimistes des intellectuels libéraux doutent. Tout paraît joué d’avance, et le candidat qui remportera la mise prévoit d’appliquer un programme qui de toute façon sera aux antipodes de l’esprit du libéralisme.

Cette année, l’offre politique est globalement assez pauvre et aucun programme ne propose de réforme suffisamment courageuse et originale pour créer l’adhésion pleine et entière. Trop de dettes, trop de dépenses publiques, des libertés publiques en berne, une pression fiscale étouffante et un tissu entrepreneurial qui se délite : le modèle social français expire, et il est à craindre qu’une nouvelle fois, l’élection laisse passer l’occasion de la réforme nécessaire.

Pourtant, l’aveuglement des politiques est volontaire, tant les solutions et les idées existent. Le mouvement libéral bouillonne d’idées nouvelles, et certaines actions décisives pourraient renverser la vapeur et aider à relever un pays qui conserve beaucoup d’atouts. Mais où se situe l’urgence ?

 

Réforme de l’Éducation

Pour Jean-Philippe Delsol, avocat et président de l’IREF, la priorité doit être donnée à l’éducation, qui, malgré le courage et la vertu de certains enseignants courageux et passionnés, ploie sous le poids des syndicats, de la démagogie, d’idéologies égalitaristes et du statut de la fonction publique. Mais la solution ne viendra pas des ministères :

« Seule une libéralisation de l’école peut permettre à l’Éducation nationale de réagir et, peut-être, de se rénover face à une concurrence qui, à défaut, lui prendrait ses élèves et l’obligerait à réduire les effectifs du corps enseignant. »

Cela a des implications très concrètes :

« Il faut que les enseignants du public soient embauchés selon des contrats privés et licenciables si leurs cours sont mauvais, que les quotas limitant l’enseignement sous contrat (20 % des effectifs) soient supprimés, que cesse la suspicion à l’égard du privé, que l’État perde son monopole de dispense des diplômes (la collation des grades)… Il faut encore que les écoles ne soient plus financées directement par les budgets publics, mais par un système de bons scolaires remis par l’État aux parents ou éducateurs pour payer l’école de leur choix. Ça fonctionne bien à l’étranger aux Pays-Bas, en Angleterre, aux États-Unis, en Suède… ».

Jean-Philippe Delsol rappelle enfin que, non seulement les écoles indépendantes sont plus performantes, mais elles sont moins chères. Dans une économie globale qui repose largement sur le capital cognitif des individus, ces conseils devraient être pris aux sérieux par tous les candidats.

 

Réforme santé

Jacques Garello, économiste et président d’honneur de l’ALEPS, rejoint le constat de M. Delsol sur la priorité à donner à la réforme de l’éducation, tout en lui ajoutant celle de la sécurité sociale :

« Dans le domaine de la santé, de la retraite, comme dans celui de l’enseignement, il faut marquer la rupture avec l’assistanat et le dirigisme pour retrouver les vertus de la responsabilité, de la concurrence et de la subsidiarité. Cette réforme n’implique aucune dépense ni aucune réglementation nouvelle, il suffit de rendre aux Français l’argent dont ils ont été dépouillés et l’initiative dont ils ont été privés. »

 

Pression fiscale

Au cœur du malheur français, il y a sa fiscalité exceptionnelle.

Pour Nicolas Marques de l’Institut économique Molinari, une fiscalité de production hors normes qui taxe les processus de production indépendamment de leur rentabilité économique pousse des millions de Français à l’expatriation :

« Pour dégager 100 euros d’excédent net d’exploitation dans l’Hexagone, l’entreprise moyenne devait s’acquitter de 27 euros d’impôts de productions nets de subvention en 2019, contre 7 euros dans l’Union européenne. Conséquence, les emplois se détruisent plus vite et se créent moins vite. La réduction mise en œuvre par le gouvernement en 2021 est insuffisante. Il faudrait une baisse de 35 milliards d’euros pour aligner la fiscalité française sur les autres pays européens. C’est la clef pour la compétitivité et le pouvoir d’achat, le coût des impôts de production reposant au final sur les salariés et les chômeurs. »

Nicolas Marques assure également que loin de déstabiliser les finances publiques, l’allégement de la fiscalité de production déboucherait sur une augmentation du rendement des fiscalités traditionnelles et une baisse des dépenses publiques liées au chômage.

 

Réduction du nombre de fonctionnaires

L’incapacité française à réformer provient aussi de sa prétention à l’exceptionnalité de son destin, qui rend ses élites souvent sourdes aux idées qui ne soient pas purement hexagonales. C’est pourquoi l’idée d’Alain Mathieu, le président d’honneur de Contribuables associés, est à la fois révolutionnaire et pragmatique : la France doit s’aligner sur l’Allemagne dans sa gestion des effectifs de la fonction publique.

L’État Français emploie pratiquement 7 millions de personnes (fonctionnaires et emplois publics non fonctionnaires), là où l’Allemagne n’en compte que 4,5 selon l’office fédéral statistique allemand. Cela signifie qu’à population égale, nous avons plus de trois fois plus de fonctionnaires ou de quasi fonctionnaires par habitant.

Dans le secteur privé, le gel des embauches permet la survie de l’entreprise, ce qui pourrait inspirer un État qui continue à embaucher 466 000 fonctionnairespar an selon un rapport de l’INSEE :

« Quelques années de gel des embauches publiques, couplées avec un alignement sur l’Allemagne des temps de travail annuels et des âges de départ en retraite des emplois publics français, rendraient les administrations françaises compétitives avec celles de l’Allemagne. »

 

La question institutionnelle

La question des règles du jeu institutionnelles interpelle Christophe Seltzer, de GenerationLibre. Dans la verticalité des institutions de la cinquième République, il y a peu de libertés et beaucoup d’autorité :

« L’élection présidentielle de 2022 sera inutile si elle ne débouche enfin sur une libéralisation des institutions en France. D’une part en dé-présidentialisant la Ve République pour réhabiliter l’Assemblée nationale comme lieu du débat idéologique et de la fabrique des politiques publiques. D’autre part, en décentralisant réellement une partie du pouvoir non régalien aux collectivités territoriales : des compétences, assorties de la capacité de lever directement l’impôt (condition essentielle) pour les exercer. Les objectifs : sortir du paternalisme présidentiel et rapprocher la décision politique – le plus localement possible – de l’administré. Sans subsidiarité ascendante, pas de startup nation. »

Le camp de la liberté a des idées qui bousculent le consensus mou. Maintenant, qui pour les reprendre et les défendre dans le débat politique ?

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  • « L’aveuglement des politiques » est en phase avec celui des électeurs.
    Donc, désolé de choquer, mais le problème est le suffrage universel.

    • Avatar
      Diagoras L Athee
      7 avril 2022 at 7 h 59 min

      A part un suffrage censitaire (tu payes des impôts tu votes, tu payes pas tu votes pas.) je ne vois pas trop ce qui pourrait améliorer la chose. par ailleurs il me semble que vous faites l’erreur de confondre l’origine du pouvoir et son extension.

      • On pourrait imaginer des questionnaires de vérification d’un minimum de bon sens et d’alphabétisation. Quand vous voulez investir votre propre argent, on exige que vous remplissiez le questionnaire MIFID, mais pour aller voter, on ne vous oblige pas à savoir que 2 et 2 font 5…

        • Encore une fois, le problème est moins le mode de désignation du gouvernement que l’étendue de ses pouvoirs.

  • Il y a du pain sur la planche, mais il faut noter que pour les impôts de production, en une semaine ça pourrait être réglé, contrairement aux autres sujets.

    • Oui et l’État y gagnerait très vite avec le feedback de la relance induite et son incidence favorable sur les dépenses sociales.

  • Toutes ces belles réformes absolument nécessaires coûtent un pognon de dingue que nous n’avons pas, et sauf à réindustrialiser ( en baissant les impôts de production entre autres et sans doute d’autres mesures encore plus difficiles à appliquer?), seul moyen de produire de la richesse, donner du pouvoir d’achat et des moyens de réformer sans s’endetter encore plus, tout le reste n’est que bla bla électoral et on ne voit chez aucun des candidats un seul programme cohérent qui permettrait de s’en sortir!
    CPEF

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