En Afghanistan, le féminisme urge, en France, il palabre

Les droits des femmes, entre autres droits humains, est l’un des combats majeurs du XXIe siècle. En France, ils font la part belle aux promesses des candidats à la présidentielle 2022, tandis qu’en Afghanistan, les femmes n’ont plus accès à l’éducation.

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En Afghanistan, le féminisme urge, en France, il palabre

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 27 mars 2022
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L’isolement maladif peut conduire à toutes les déraisons en matière politique. À force de vouloir enchérir sur les propositions de leurs concurrents, — enfermés qu’ils sont par leurs œillères—, les candidats à la présidentielle s’arment de mesures de plus en plus isolées, comme le combat contre l’endométriose (Emmanuel Macron et Valérie Pécresse) ou des amendes pour les parents des filles de moins de quinze ans voilées (encore Valérie Pécresse).

En Afghanistan, cet isolement vire tout bonnement à la régression totalitaire, coupée de la marche du monde en faveur des femmes. Mais à l’heure où la France a voulu faire du droit des femmes l’un des fers de lance du quinquennat macronien, les prétendants à la présidence ayant repris le tempo, il est de bon ton de rappeler que les femmes ciblées ne s’arrêtent pas à nos frontières. Et par là même de se rappeler à quoi ressemble, vraiment, le féminisme.

 

En Afghanistan, le droit des femmes est en danger

Ce mercredi 23 mars, les jeunes Afghanes devaient enfin reprendre, par milliers, le chemin de l’école depuis le retournement du terrible 15 août 2021. Jour noir où les talibans ont fait main basse sur l’Afghanistan. Contrairement aux collèges, lycées et universités publics, seules les écoles et universités privées n’avaient jamais fermé leurs portes, tout comme les écoles primaires.

Il y a un mois, les talibans avaient promis leur réouverture à la fin mars, après le nouvel an afghan. Ce long temps d’attente s’explique par le fait que les talibans « voulaient s’assurer que les filles âgées de 12 à 19 ans seraient bien séparées des garçons, et que les établissements fonctionneraient selon les principes islamiques ».

Les jeunes filles se sont donc préparées, heureuses, pour enfin recommencer à s’instruire au collège ou au lycée. Mais après quelques heures de réouverture, les talibans ont brutalement annoncé à nouveau la fermeture des classes, face à des filles en larmes. « Nous n’avons pas le droit de faire de commentaires », a répondu le porte-parole du ministère de l’Éducation, Ahmad Aziz Rayan, après avoir déclaré plus tôt qu’ils rouvraient les écoles « dans le cadre de notre responsabilité de fournir une éducation et des structures éducatives à nos élèves ».

Dans les universités publiques, rouvertes en février, les filles sont là, mais rares. En plus des nombreuses professions interdites aux femmes et l’interdiction de voyager seules en dehors de leur ville, la difficulté d’accès à l’éducation est un vrai danger pour leur avenir.

 

En France, c’est presque un jeu

Pendant ce temps, les candidats français redoublent d’idées pour l’électorat féminin en vue des élections 2022. Ils voudraient avoir du panache et se prennent les pieds dans leur nez de clown, tombé à force de sautiller partout ou bien d’avoir un nez qui s’allonge trop. En somme, ils donnent à fond dans l’électoralisme — souvent miroir aux alouettes.

Éric Zemmour et Marine Le Pen paraissent toutefois les moins farfelus en se tenant, pour lui, à une libre répartition du congé parental et une augmentation de la pension de réversion des veuves, pour elle, à une allocation aux mères isolées et à l’égalité salariale. Tandis que Valérie Pécresse ajoute aux mesures de Zemmour la liste la plus longue de toutes, allant jusqu’à proposer un arrêt de travail pour règles douloureuses ou bien un tribunal spécialisé dans les violences conjugales. Jean-Luc Mélenchon, lui, fait purement dans le flicage, avec une commission de contrôle sur l’égalité salariale et une augmentation des sanctions pénales, toutes deux à l’encontre des entreprises.

Emmanuel Macron, pragmatique, s’attache au droit à la garde d’enfants et à la lutte contre l’endométriose. Avec cela, il sera bon être une mère, plus qu’une simple femme, puis une veuve les cinq prochaines années. Une vraie politique de procréation et d’incitation au mariage. Pour les célibataires et femmes libres, il vaudra donc mieux voter Mélenchon, pour peu que l’on aime l’autoritarisme et se venger des entreprises dans lesquelles on travaille. Quoi qu’il en soit, les mesures sont généralement là pour faire rêver, ou pour entretenir le combat entre les hommes et les femmes, souvent considérées comme victimes ou inférieures. Un combat fatiguant, quand on voudrait un peu plus que chacun soit respecté dans sa spécificité, voire dans sa liberté tout court. Le vrai rôle de la politique ?

 

De l’obscurantisme pour éclairer le théâtre politique

La situation afghane, obscurcie par le spectre de l’Émirat islamique et la loi coranique, ne saurait mieux rappeler l’urgence du combat pour les droits des femmes. Là où la liberté a perdu tout éclat, son cadavre nous rappelle à son importance.

L’on se dit que la priorité des rares femmes à pouvoir travailler ne serait pas de se précipiter sur l’obtention d’un congé en période de cycle féminin, proposé par Valérie Pécresse. Rappelons d’ailleurs qu’en se répétant environ une semaine par mois, ce congé pourrait être considéré comme un recul du droit des femmes à avoir une vie professionnelle normale, une régression dans l’égalité entre les hommes et les femmes, surtout si on lui ajoute le congé maternité.

Il pourrait même conduire à des abus. Honnêtement, plus aucun homme ne voudrait embaucher une femme de moins de 50 ans ! L’égalité salariale défendue par Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Valérie Pécresse, est un faux combat à l’heure où elle est assez respectée en France, comparé à d’autres pays. Mais l’idéologie a besoin de se nourrir, peu importe la réalité. Cela donne l’illusion de se battre pour quelque chose et de mériter le vote des Françaises. La difficulté des femmes est d’avoir accès, encore aujourd’hui, à des postes ou des contrats dignes de ce nom autant que les hommes, ce qui est bien différent. Rien dans ces mesures en faveur d’une plus grande liberté. Qui passe, entre autre, par l’égalité dans l’accès au travail.

Et l’obscurantisme des talibans nous éclaire en ce sens sur le véritable combat pour les femmes, sur ce que vivent dramatiquement certaines — notamment en France d’ailleurs, puisque les Frères musulmans et autres islamistes français ont des femmes ou des filles (en 2020, on dénombrait en France 40 000 salafistes et 50 000 Frères musulmans). Il nous rappelle à l’urgence du véritable féminisme et comment la France pourrait se distinguer dans ce combat, qu’il soit sur son territoire ou ailleurs.

La diplomatie est une branche de la politique, après tout. Et la liberté toujours à conquérir, à comprendre. Les femmes ne sont pas ces êtres fragiles que l’on nous présente, et dont la vie changerait grâce à la baisse de taxation sur les produits d’hygiène féminin (Valérie Pécresse, encore elle), ni des idiotes qui voteraient pour tel candidat pour être sûre d’être rémunérée comme un homme, car, seules, elles ne seraient pas capables de négocier.

Donnez-nous du crédit au lieu de nous humilier, ça nous aidera à défendre nos droits nous-mêmes face à nos recruteurs. La liberté ne peut se départir de la dignité humaine.

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  • En France, nous avons des problèmes plus grave à régler: légiférer sur la répartition équitable des tâches ménagères dans le foyer !! Alors, les Afghanes…d’abord c’est loin, ensuite qu’ont elles besoin d’instruction pour accomplir 100% des tâches ménagères !
    mais là dessus, on n’entend guère nos féministes de salon.

    • Chez nous on a des progressistes à géométrie variable, toujours prêts à couper les cheveux en quatre pour soutenir leurs lubies et tolérer l’innommable chez les autres au nom d’autres lubies.

      La vérité est que chacun est libre, mais l’émancipation des femmes est une nécessité économique et sociale. (Elle découle de « l’effort de guerre » du début du siècle). Cette vision est malheureusement totalement étrangère aux progressistes auto-proclamés qui nient en bloc les réalités économiques.

  • L’égalité en droit est effective depuis les années 80, tout ce qui est arrivé après est toxique, l’inégalité salariale est un mythe et Hommes et Femmes français ont maintenant un ennemi mortel avec cet état socialiste en faillite qui devient de plus en plus liberticide.

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