Ukraine : l’UE condamne unanimement Poutine. Et après ?

L’Union européenne semble impuissante face à Moscou malgré sa volonté de sanction. Une situation favorable à Moscou et en défaveur de l’Ukraine.

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EU budget debate ahead of crucial summit - with Ursula von der Leyen (European Commission) By: European Parliament - CC BY 2.0

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Ukraine : l’UE condamne unanimement Poutine. Et après ?

Publié le 23 février 2022
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L’Union européenne vient d’approuver à l’unanimité un paquet de sanctions à l’encontre de la Russie. Elles s’inscrivent en représailles aux déclarations de Poutine reconnaissant l’indépendance du Donbass en Ukraine.

Une unanimité européenne qui est à la fois intéressante d’un point de vue des relations internes entre les membres de l’UE. Mais qui montre aussi son impuissance dans les affaires internationales.

 

Unanimité pour sanctionner la Russie. Pour combien de temps ?

L’ensemble des pays membres de l’UE ont validé des sanctions contre la Russie. Même la Hongrie, parfois perçue comme pro-russe a affirmé son soutien à l’Ukraine. Cette unité s’explique par les événements actuels, mais pour combien de temps ?

Sur la question russe et plus généralement sur les relations avec l’Europe de l’Est, les pays européens n’ont pas tous les mêmes positions.

Des pays comme l’Italie, l’Allemagne et la France ont fait preuve dans le passé d’une volonté d’un partenariat géopolitique avec la Russie. On se souvient de l’entente entre le président français Jacques Chirac, le chancelier allemand Gerhard Schröder et Vladimir Poutine contre l’intervention américaine en Irak. Le gazoduc Nord-Stream 2, symbole de la dépendance allemande à l’énergie russe est encore en fonction jusqu’à ces derniers jours malgré les tensions entre la Russie et ses voisins.

Inversement, les ex-pays de l’URSS tels que la Pologne n’ont jamais caché leur inquiétude vis-à-vis de la Russie, d’où leur atlantisme et leur souhait d’une Europe plus agressive envers elle.

Lors de l’annexion de la Crimée en 2014, les pays européens ont aussi pris des mesures et il se disait que le gouvernement allemand avait perdu confiance en Moscou.

Dans les faits, les vieilles habitudes des différents États ont vite repris le dessus. Et pour cause, l’Allemagne n’a pas pris ses dispositions pour être indépendante de la Russie et a maintenu son partenariat dans le cadre de l’Ostpolitik.

Quant à la France, ses intérêts ne sont pas en Europe centrale et orientale, mais en Afrique et au Moyen-Orient. À cet égard, avec l’influence croissante de la Russie en Afrique et au Mali, Paris va devoir se battre sur deux fronts diplomatiques.

 

Des sanctions inefficaces et en faveur de la Russie ?

Les sanctions prises par l’UE sont pour l’instant les suivantes :

– cibler les personnes impliquées dans cette décision illégale.

– cibler les banques qui financent des opérations militaires et autres de la Russie dans ces territoires.

– cibler la capacité de l’État et du gouvernement russes à accéder aux marchés et services financiers de l’UE, à limiter le financement des politiques agressives d’escalade.

– cibler le commerce des deux régions sécessionnistes à destination et en provenance de l’UE, afin que les responsables ressentent clairement les conséquences économiques de leurs actions illégales et hostiles.

 

Des mesures supplémentaires sont prêtes à être prises.

L’outil des sanctions économiques est toutefois dangereux car il peut se retourner contre nous. L’exemple des sanctions après l’annexion de la Crimée est parlant. Les sanctions adoptées à l’époque ont amené une réaction russe avec un embargo agricole sur les produits européens, ayant pour effet de pénaliser les exportations agricoles vers la Russie, privant ainsi nos agriculteurs d’un marché.

En outre, cette situation a obligé la Russie à développer son agriculture. Elle est alors passée de pays importateur à exportateur et elle est devenue une puissance agricole de premier rang.

En s’attaquant au libre-échange, les sanctions économiques européennes n’ont fait que renforcer la Russie tout en étant incapables de changer son comportement et pénalisant donc notre économie.

Il est à craindre que cette situation se répète, avec en plus une réserve énergétique européenne moins forte et une situation économique, sociale et politique moins stable qu’en 2014.

Pour ne rien arranger, l’Ukraine est un exportateur majeur de blé pour l’UE. Une situation de guerre globale dans ce pays aurait un impact certain dans l’économie européenne.

 

Et l’Ukraine ?

La principale question à se poser est de savoir si les mesures prises par l’UE vont aider l’Ukraine. Il semble que non. Les sanctions n’ont pas d’effets notables pour inciter la Russie à reculer.

L’Ukraine est isolée militairement malgré l’aide en matière d’armement de certains pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni. Des missiles antichars Javelin ont ainsi été livrés sous l’administration Trump. Est-ce que cela sera suffisant ? Les pays de l’OTAN refusent d’envoyer des forces en Ukraine et concentrent le déploiement de leurs membres en Europe centrale.

Tous ces éléments suggèrent un sentiment d’impuissance de la part des Occidentaux. Le problème est que le reste du monde est en train de le comprendre et risque de s’engouffrer dans la brèche.

Voir les commentaires (17)

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  • L’UE est en train de se suicider, volontairement, comme quoi nos démocraties sont à l’agonie, mais certains en récolteront les fruits… Juda n’est pas qu’une image d’Épinal, nous sommes tous gouvernés par des Juda. Ça fait des années que les us sont en guerre contre l’humanité… Mais sommes nous des humains ou de la viande de boucherie entre les mains de…….. L’ Ukraine, mais avant la biolorussie et autres pays de l’est ou du moyen orient.. Les Anglo Saxon sont l’ennemi de l’humanité, ils regnent sur des pays sans avenir, l’Angleterre n’est qu’une île, les usa, ils ont tellement consommés qu’ils n’ont plus rien sans le voler aux autres, ce sont des prédateurs par nécessité… On accepte, ou pas. Si il y a des sanctions à donner… C’est le moment de se debarasser de ces cancrelas.

    • « les usa, ils ont tellement consommés qu’ils n’ont plus rien sans le voler aux autres, ce sont des prédateurs par nécessité…  »

      Ils ont également besoin que la Russie cesse de vendre leur gaz bon marché à l’Europe pour pouvoir leur vendre leur coûteux gaz de schiste à la place. Gaz de schiste qui a provoqué un véritable désastre écologique au passage…
      Je suis assez d’accord pour dire que la politique américaine est assimilable aux essaims de criquets migrateurs qui viennent dévaster des champs en Afrique…

  • La question est surtout de savoir pourquoi l’Europe devrait aider l’Ukraine. Certes, les Ukrainiens aimeraient bien devenir les assistés de l’Europe, mais il y en a marre des candidats à la redistribution.

    • L’otan….. On achète les pays a coup de millions de dollars pour leurs vendre des armes en milliards de dollars, du bizness.

  • « Lue condamne … et après.

    Le reste du monde est en train de le comprendre et risque de s’engouffrer dans la brèche. »

    – après on se les gèle…
    – le reste du monde = bye-bye Taïwan : les constructeurs automobiles n’on pas fini d’accuser la pénurie de semi-conducteurs pour l’effondrement de leurs ventes.

  • La Fontaine en rirait : le conseil des souris décide d’accrocher une clochette au cou du chat, mais qui pour le faire ?

  • Nous sommes en plein dans le « plus jamais ça » de l’entre deux guerres. Si Poutine envahit l’Ukraine, l’U.E ne fera rien car elle ne peut rien faire, les Européens verront qu’elle n’a aucun poids politique, voire qu’elle ne sert à rien, qu’elle ne peut qu’agiter ses petits bras, et le reste du monde verra l’Ukraine se faire avaler par l’ours néo soviétique.
    Poutine montre au monde sa puissance militaire. Le monde regarde et tremble pour l’Ukraine tout espérant une sorte de David VS Goliath. L’U.E n’a pas de puissance militaire … l’O.N.U a ses « Casques bleus ».
    Il y a quelques années, les pays baltes nous ont prévenus : ils ne craignaient pas les terroristes du Moyen-Orient, ils craignaient l’ours russe.

  • Ursula a dit : « Nous demanderons au Kremlin de rendre des comptes » !

    On se demande naïvement ce que cherche Poutine. Il me semble qu’il est simplement en train de confisquer les jouets technologiques militaires livrés par les américains à Kiev.

    Qu’est-ce qui pourrait l’en empêcher ?

    • Ce que cherche Poutine ? La garantie que la Russie restera entourée de pays neutres ou satellites. Il aurait été facile pour l’Occident d’imposer à l’Ukraine de se déclarer neutre plutôt que de vouloir rejoindre l’OTAN, et nous n’aurions pas eu de guerre. L’Ukraine aurait même pu essayer de devenir une sorte de Suisse, indispensable aux deux camps pour leur commerce. Mais ça n’est pas électoralement vendeur de vouloir être neutre…

      • Oui.

        Chacun doit tenter de s’adapter. L’Ukraine a tout à perdre à servir de champ de bataille géopolitique entre USA et URSS. Alors qu’il pourrait être gagnant à négocier un statut neutre et commercial. L’idée que l’Ukraine « chasse principalement la subvention » en voulant se rapprocher de l’Europe n’est pas infondée.

        Mais peut-être que la Suisse est plus apte (géographiquement) à s’organiser comme une puissance de guérilla dissuasive.

        • Le statut « neutre et commercial » est totalement immoral aux yeux des voisins (comprendre de leurs dirigeants). Mais terriblement efficace de tous temps il me semble dans l’histoire de l’humanité.

  • La Russie a légalement tort dans cette affaire. Mais le Donbass se veut russe même si la Russie ne souhaite pas l’intégrer. L’Ukraine voudrait bien rejoindre l’Otan et l’UE ce que ni l’une ni l’autre ne souhaitent.
    Biden roule des mécaniques pour sa gloriole et par mépris pour la Russie, petite force régionale comme la considérait le grand géographe pétri d’histoire Obama.
    Oui, Poutine veut des territoires finlandisés sur sa frontière ouest.
    Oui, les pays baltes et la Pologne n’ont aucune envie à juste titre de retomber sous le joug des russes.
    Aux diplomates de jouer. Existe-t-il encore des Talleyrand et des Metternich?

  • Les États et autres politiciens, refusant d’écouter les peuples, les individus, et voulant (surtout coté occidental) détourner l’attention de leurs citoyens loin des deux années de fascisme sanitaire qui viennent de s’écouler et de la catastrophe économique que cela a causé et qui devient de plus en plus visible (10% d’inflation aux US!!) portent toute la responsabilité des morts qui ne manqueront pas de se produire en « Ukraine » (les régions indépendantistes sont elles réellement ukrainiennes ? Autant que le Kossovo était serbe, dirons nous…).

    Quand « on » décide d’intervenir chez un pays souverain pour défendre des minorités régionales de langue et culture différente (genre les bosniaques, les kossovars) c’est bien. Quand c’est « les autres » qui font la même chose, c’est mal. Quand Trudeau fait ce que fait le Parti Communiste Chinois, c’est bien, quand le Parti Communiste Chinois fait ce que fait Trudeau, c’est mal.

    Tout ça est terriblement pourri, et le moralisme manichéen (nous/eux, bien/mal, gentil/méchant) ayant remplacé chez beaucoup d’occidentaux le pragmatisme tolérant et le respect de l’individu plus que de la masse aidant, les jours sombres risque de continuer bien après la fin (qui ne sera sans doute jamais officielle) de la « menace pandémique »…

    • « la catastrophe économique que cela a causé »

      Et Biden et Ursula viennent de déclarer la guerre économique à la Russie. En supposant comme dans toute les guerres qu’il n’y aura de dégâts que chez l’ennemi.
      Bruno La Menace a déjà la solution : c’est l’état qui paiera !

    • « Quand Trudeau fait ce que fait le Parti Communiste Chinois, c’est bien, quand le Parti Communiste Chinois fait ce que fait Trudeau, c’est mal. »

      D’après une interview déjà assez ancienne, Trudeau est lui-même admirateur de la politique dictatoriale chinoise. Mais quand c’est lui qui le fait, aucun souci!

  • Vu de chez nous, ne rien faire semblait le plus sage pour calmer la propagande anti-russe, mais vu depuis la Russie, 20 ans de concessions n’ont abouti qu’à plus d’humiliations, plus d’agressions et plus de propagande.
    .
    Les sanctions étaient programmées par des USA en passe de perdre leur leadership mondial. Perdu pour perdu autant mettre un stop clair et sauver les russophones de l’est que Kiev humiliait et bombardait depuis 2014.
    .
    Pour un autre point de vue, voir donbass-insider dot com/fr tenu par Christelle Néant, une française qui vit dans les républiques séparatiste, elle est très bien informée et on en apprend beaucoup plus sur le détail des événements et des opérations en cours.

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