Covid : non à la moralisation des soins

Une logique manichéenne consistant à trier bons et mauvais malades finirait à terme par se retourner contre chacun de nous si nous n’y prenons garde.

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Covid : non à la moralisation des soins

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 1 février 2022
- A +

Faut-il rembourser les traitements des malades de la Covid qui ont refusé de se faire vacciner ? Le directeur général de l’AP-HP Martin Hirsch s’interroge. Cette question a pourtant de quoi choquer même un provax convaincu. Parce qu’elle quitte le débat scientifique pour s’engouffrer dans celui de la moralisation des soins, jusque-là essentiellement nourri par les courants antichoix se demandant si les IVG devraient être à la charge du contribuable dès lors que des moyens contraceptifs auraient pu les éviter. Dans les deux cas de figure, la logique est identique. Faut-il instituer une gratuité au mérite, dont seuls bénéficieraient les patients prévoyants et irréprochables ?

On peut objecter que, dans le cadre d’une pandémie, un non-vacciné ne met pas que sa propre vie en danger mais également celle de ses congénères. En suivant ce raisonnement, faut-il prendre en charge les rougeoles, tuberculoses, rubéoles, coqueluches, puisqu’un vaccin obligatoire existe, faut-il prendre en charge les maladies sexuellement transmissibles puisqu’il suffit d’un préservatif pour s’en protéger ? Et faudra-t-il prendre en charge les futurs cancers du col de l’utérus alors qu’un vaccin contre le papillomavirus est aujourd’hui disponible ?

Faut-il prendre en charge la tumeur, la bronchite chronique, l’emphysème ou le pneumothorax des fumeurs qui se sont sciemment goudronné les poumons pendant vingt ou trente ans ?

Faut-il prendre en charge la cirrhose des alcooliques qui se sont imbibé le foie toute leur vie, les maladies cardio-vasculaires ou la goutte des goinfres, les hépatites, thromboses et insuffisances cardiaques des junkies, les produits de substitution des drogués, les accidents de la route des chauffards, les jambes cassées des skieurs hors piste, les caries des enfants qui ne se lavent pas les dents ?

Si l’on part du principe qu’un patient ne doit pas porter la responsabilité de sa maladie, on trouvera toujours une excellente raison de le priver de remboursement et de considérer ainsi qu’il y a des bons malades, vertueux, précautionneux, équilibrés, et des mauvais malades, négligents, excessifs et malsains. Ce manichéisme rappelle cruellement celui des années sida où les petits inquisiteurs se plaisaient à différencier les gentils contaminés victimes d’une transfusion sanguine et les méchants débauchés ou héroïnomanes qui ne leur inspiraient aucune compassion car, en définitive, ils l’avaient bien cherché.

Notre système de santé se fonde sur la solidarité et non sur des considérations subjectives. On peut le déplorer et s’agacer de devoir payer pour l’insouciance – voire l’obstination butée – des autres, car après tout, c’est à eux d’assumer les conséquences de leur libre arbitre. Sauf qu’à y regarder de plus près, nombre d’entre nous pourraient être visés par une moralisation systématique des soins.

Combien de malades seraient à terme reconnus coupables de leur pathologie et condamnés au non-remboursement ? Combien seraient contraints de renoncer à se soigner, faute de revenus suffisants ?

Et pourquoi, alors, continuer à prendre en charge les patients aux agissements indignes et nuisibles, les meurtriers, les délinquants, les prédateurs sexuels ? Où s’arrêter ? Certes, cet altruisme représente un coût substantiel pour la société.

Mais cesser de rembourser des non-vaccinés ou moduler les taux de remboursement en fonction de notre hygiène de vie ouvrirait une boîte de Pandore peut-être bien pire encore.

 

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  • Je suis entièrement d’accord avec votre point de vue.
    J’ai la chance d’être en excellente santé, je ne fais pas d’excès, je fais du sport, j’ai travaillé 42 ans, avec une seule journée d’arrêt de travail, et pourtant j’accepte volontiers de payer pour tous ceux qui n’ont pas cette chance.
    Les propos de ceux qui envisagent de faire payer les non vaccinés sont « dégueulasses » et nous conduisent tout droit vers une société encore plus inhumaine qu’elle ne l’est déjà.
    Qui peut dire qu’il ne sombrera jamais dans l’alcoolisme ou dans la boulimie ?
    Ceux qui pensent qu’il suffit de le décider pour arrêter de fumer n’ont jamais été fumeurs.
    C’est facile d’être fort quand tout vous sourit, ça l’est déjà nettement moins quand tout va mal.
    Nous sommes tous de pauvres pêcheurs, nous l’avons été ou nous le serons.
    Martin Hirsch, qui a dirigé la fondation abbé Pierre, devrait savoir que le pardon est un des piliers de la religion catholique.

    • Non, chaque chose a un prix, et ce prix (celui de la prime d’assurance maladie) n’a pas à être fixé par l’état mais doit être proportionné au coût réel. Que chacun paie la prime qui correspond à son cas. Ensuite, si vous le souhaitez, vous pouvez personnellement choisir d’aider ceux qui ont des difficultés à payer leur prime. Ce sera tout à votre honneur, mais au moins il n’y aura pas de passagers clandestins.

      -1
      • « ce prix (celui de la prime d’assurance maladie) n’a pas à être fixé par l’état mais doit être proportionné au coût réel »
        Si c’est une prime d’ASSURANCE, le prix ( la prime) doit être proportionné AU RISQUE REEL;
        Sinon, ce n’est pas une prime, juste une cotisation « décidée au doigt mouillé »!

        • En effet. J’ai juste écrit « coût » parce que c’est la plus sûre manière de chiffrer le risque, et d’éviter tous les facteurs irrationnels qui s’invitent quand on parle de proportionner au risque.

      • Impossible : comme la liste de pathologies et de circonstances aggravantes énumérée dans l’article n’est, en plus, pas exhaustive, loin de là, comment chiffrer précisément dans un contrat d’assurance et par avance « le prix proportionné au coût réel » que vous prétendez être payé par chacun ? Comment l’ajuster aux changements de situation dans le temps de chaque assuré ? La solution (bancale) de l’assurance maladie met au pot un budget à « partager », avec un coût (ce n’est pas un prix) démesuré de -mauvaise- gestion, d’ailleurs, dans le cas de la sécurité sociale d’ailleurs obligatoire, contrairement aux traités européens. Par contre, effectivement, il est de l’opportunité pour chacun de choisir de se protéger mieux (en cotisant par exemple aux mutuelles)lorsqu’ils le peuvent, ET/OU d’aider ceux qui ne le peuvent pas (e.g. dons à des fondations : Cancer, Maladies orphelines, Lèpre, Crois-rouge, que sais-je encore).

        • Les assureurs savent très bien faire.Si vous assurez un navire, je vous garantis que la prime sera très bien proportionnée au risque réel, et tiendra compte de la quasi-totalité des facteurs susceptibles d’alourdir ou d’alléger ce risque, y-compris les risques éphémères. Ca pourrait très bien être la même chose pour des particuliers, peut-être pas au centime près, mais pour un certain nombre de facteurs. Il faudrait seulement que l’état soit hors du coup, et les assurances en concurrence libre.

          -1
          • Non, ils ne savant pas « très bien faire ». Ils bidouillent des modèles et ensuite essayent d’ajuster en fonction du résultat (s’ils perdent des clients et gagnent « trop » sur une police, c’était trop cher, surestimé probablement, s’ils gagnent plein de clients mais ont un P&L pas glop c’était sous estimé). Il faut un temps certain pour ajuster, et même là c’est uniquement statistique, reposant sur les moyennes.

            On essaye de faire coller au mieux pour que le trentenaire sportif non vacciné qui ne risque pas grand chose du COVID ne paye pas pour le gus de 75 ans, même triple vacciné, qui lui risque nettement plus, mais parmi les gens de 75 ans certains n’auront jamais le virus, ou s’ils l’ont pas de symptômes et parmi les trentenaires il y en a qui l’auront et iront en réa, même vaccinés… Simplement « en moyenne » ça sera plus « juste »… Parce que les moyennes sont faites par sous-catégories plus ou moins identifiées au lieu d’une moyenne unique nationale (gonflée par le financement des syndicats, mais ça c’est une autre histoire).

        • « comment chiffrer précisément dans un contrat d’assurance et par avance « le prix proportionné au coût réel  »
          Un assureur digne de ce nom ne chiffre pas par avance un prix, mais un risque. Et il utilise pour cela les études statistiques qui lui permettent d’évaluer assez précisément le coût moyen éventuel de chaque risque qu’on lui demande d’assurer.

      • Je connais quelqu’un qui disait comme vous, quand il avait 30 ans et qu’il était en pleine forme.
        Maintenant qu’il est obèse et qu’il a du diabète, il ne tient plus le même discours.
        Bien sûr que je suis pour la responsabilisation individuelle mais je pense que la santé ne dépend pas que de son propre comportement, comportement qui peut d’ailleurs être largement influencé par les accidents de la vie tels que divorce, deuil, chômage…
        Il faut également se méfier quand on parle de coûts financiers. Qui coûte le plus cher à la société ? Celui qui meurt d’un cancer du fumeur à 50 ans ou celui qui vit jusqu’à 90 ans moyennant de multiples soins et séjours hospitaliers ?
        Que pensez-vous de la gratuité des FIV pour les femmes qui choisissent d’avoir leur premier enfant à 45 ans ?
        Je suis un fervent libéral, mais je reste persuadé que la santé ne doit pas être considérée comme un secteur économique comme les autres.
        Que la question de la gratuité des soins soit posée par Martin Hirsch, qui ne connait rien d’autre que le secteur public, est encore plus étrange et est plus certainement une commande de Macron dont l’objectif est d’imputer ses échecs sur les non vaccinés.

        • Pourquoi la santé doit elle être « différente » ? Les décisions de santé et l’assurance du même nom n’est pas différente de celles du logement, de la retraite, de la nourriture… Elles sont un peu complexes puisqu’elles prennent effectivement en compte de l’aléa, et qu’elles sont un problème temporelle avec « cycle de vie ».
          Mais il vaut mieux (comme dans tout, d’ailleurs) faire confiance à la décision de chacun (peut-être avec un filet de sécurité collectif, si vraiment, vraiment on veut mettre du public là dedans) puisque même les meilleurs spécialistes qui font de la recherche sur ces types d’assurance sont un peu « dans le vague » sur pas mal de problèmes (« puzzles » dans le jargon) et n’arrivent pas à trouver de modèles répondant correctement aux comportement des gens… Ce qui n’est pas étonnant, c’est toujours et encore le « problème du calcul économique en régime socialiste », l’information manque au planificateur central ou à l’assureur, et ce même s’il utiliser de la big data et de l’espionnage électronique constant…

    • Ce débat résulte du découplage entre prime d’assurance-maladie et évaluation du risque.
      On cotise en fonction de ses revenus et on est protégé indépendamment de la taiile de la famille assurée, de son état de santé et de ses comportements plus ou moins prudents.
      Face au débordement du système de soins, on se focalise sur l’adaptation des remboursements au risque délibérément couru alors qu’on pourrait adapter les cotisations au mode de vie. Une assurance maladie privée peut très bien prévoir des exclusions (sports à risques …) rachetables par des suppléments de cotisations. Une assurance maladie socialement redistributive et solidaire comme notre sécu-que-le-monde-entier-nous-envie ne peut qu’aboutir au gouffre financier et/ou au rationnement de soins, alors on cherche des boucs émissaires.

  • « On peut objecter que, dans le cadre d’une pandémie, un non-vacciné ne met pas que sa propre vie en danger mais également celle de ses congénères »
    Si tant est que le vacciné soit réellement protégé par son vaccin, ce dont on peut partiellement douter, (protection à 50%, 75%, 100%?), ou qu’il reste dangereux car malgré tout contagieux pour le non vacciné dont le choix est peut-être « éclairé » comme on dit, s’il estime ne pas courir de risque plus grave en étant non-vacciné que vacciné avec un produit expérimental dont les effets secondaires sont mal évalués car pas assez de recul!

  • Bonjour, je suis en désaccord avec la thèse de l’article.
    Tout d’abord le seul est unique but du vaccin a été de limiter au maximum le nombre d’hospitalisation et surtout de cas grave dans notre système de santé (malgré la communication hésitante de notre gouvernement).
    Mais surtout la proposition de martin Hirsch me parait plus libérale que le pass sanitaire ou vaccinale. Au lieu de déployer ce système avec toute les contraintes liés cela aurait permis l’exercice de la liberté de chacun (se faire vacciner ou non) et d’avoir une responsabilité derrière (vacciner couvert, pas vacciner pas couvert). attention on parle bien ici de remboursement pas du fait de ne pas se faire soigner ce qui conceptuellement différent (et pour le coup injuste). Ce système aurait je pense été encore plus efficace auprès de la population.

    D’autre part, je suis aussi d’avis que les comportements à risque soit sanctionné comme le tabagisme et l’alcoolisme. L’assurance maladie devrait être comme son nom l’indique une assurance. Si mon comportement me rapproche de la certitude de tomber malade, pourquoi les autres devrait il en subir les conséquences. Je n’empêche personne de fumer, mais je ne vois pas pourquoi je devrait être « solidaire » avec ces gens là.
    J’évoque des cas dans l’absolu et je suis sûr que certains lecteur trouveront des cas spécifiques ou c’est difficile à appliquer, mais pour conclure il n’y a pas de liberté sans responsabilité et dans la situation actuelle en France les personnes qui ne se vaccinent pas n’ont pas de responsabilité à assumer.

  • Une autre solution, inversement, on peut penser que quelle que soit la maladie, le malade en est toujours un peu responsable, et qu’il ne faut donc pas le rembourser. C’est à dire ne rembourser aucun soin. On en profitera alors pour ce débarrasser de ces fameuses cotisations qui n’auront plus lieu d’être.

  • Le contrat implicite qui fait accepter de payer pour la sécu c’est « quoi qu’il arrive, ‘on’ prend en charge vos dépenses de santé… sur la base d’un barème ». Après quoi on est obligé de prendre une mutuelle qui couvre le principal de la dépense.

    Si jamais on annonçait que bon, sous telle ou telle condition on ne rembourse plus, je (et pas mal d’autres) dirais « OK, donc je ne paye plus ». Le souci c’est qu’ici, niveau COVID, les gens qui payent c’est les jeunes (cotisent bien plus que les retraités et comme on a un système « répartition » et non « capitalisation » c’est ça qui fait tourner la machine) et les gens qui encombrent les réa c’est pas « les vilains non vaccinés » mais plus généralement « les vieux », « les retraités » (vaccinés ou pas)… Donc forcément ça va bien se passer…

    Mais un bulot comme Martin Hirsch n’a pas du trop y penser, vu que « c’est l’Etat qui paye » et qui décide…

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