L’industrie : un sujet pour juger de la pertinence des candidats

Le déclin de l’industrie en France est un sujet important que les candidats à la présidentielle 2022 devront aborder.

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L’industrie : un sujet pour juger de la pertinence des candidats

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 24 décembre 2021
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La campagne présidentielle s’anime avec l’entrée en lice de la candidate des Républicains, Valérie Pécresse, une candidate animée d’une fougue combative exceptionnelle. Mais le candidat principal, le Président de la République, n’est toujours pas officiellement entré dans la mêlée : il ne se déclarera que seulement en février prochain.

Notre économie décline depuis plus d’une vingtaine d’années et tous les clignotants sont au rouge : une croissance insuffisante du PIB, un taux de chômage très élevé qui ne diminue pas malgré tous les efforts des divers gouvernements, des dépenses publiques au plus haut niveau de tous les pays de l’OCDE, des prélèvements obligatoires à un niveau record, une balance commerciale toujours fortement déficitaire et un endettement du pays qui augmente inexorablement, d’année en année.

Nos gouvernants se trouvent contraints de recourir chaque année à de l’endettement pour maintenir notre économie à flot, si bien que maintenant, la dette extérieure est considérable : elle avoisine 120 % du PIB, alors que les règles européennes imposent de ne pas aller au-delà de 60 %. Cette situation ne peut plus durer.

Pour apprécier correctement les propositions des uns et des autres en matière économique, il faut avoir pour grille de lecture le cercle vicieux dans lequel se trouvent enfermés nos gouvernants, un enchaînement fatal qui les contraint à augmenter chaque année les prélèvements obligatoires et à accroître l’endettement du pays.

La régression industrielle de la France

Le mal dont souffre l’économie provient de la régression constante du secteur industriel français depuis la fin des Trente glorieuses. La liaison très forte entre la production industrielle d’un pays et le niveau du PIB par tête de ses habitants n’a pas été considérée par les différents gouvernants. En effet, ils ont tous été formés à Sciences-Po comme à l’ENA, à partir de la thèse des trois secteurs de l’économie développée par Jean Fourastié dans Le grand espoir du XXe siècle, paru en 1952 ; le déclin de l’industrie française leur a donc semblé tout à fait naturel. Il était normal de s’acheminer vers une société post-industrielle constituée uniquement d’activités de services.

Et ce n’est donc qu’avec la crise du Covid-19 que nos gouvernants ont pris conscience du problème. Notre secteur industriel ne contribue plus aujourd’hui que pour 10 % seulement à la formation du PIB. Le pays est devenu le plus désindustrialisé de tous les pays européens, Grèce mise à part. À la fin des Trente glorieuses il s’agissait de 26 % du PIB, et des pays comme l’Allemagne en sont à 24 %. Pour compenser la perte de richesse résultant du déclin de l’industrie les pouvoirs publics ont été contraints  d’augmenter constamment les dépenses sociales. Elles ont pris ainsi une part croissante dans les dépenses publiques, et pour financer ces dépenses publiques croissantes l’État a dû régulièrement augmenter ses prélèvements obligatoires, c’est-à-dire la fiscalité.

Les rentrées fiscales se révélant chaque année insuffisantes, l’État a eu sans cesse recours à de l’endettement. Nous sommes donc confrontés à un enchainement fatal conduisant à un accroissement régulier de la dette du pays.

Une priorité pour les candidats

La priorité pour notre prochain président va être d’extraire le pays de ce cercle vicieux.

Pour cela il n’y a pas d’autre solution que de reconstituer urgemment notre secteur industriel. C’est en effet l’industrie, comme le montre le graphique ci-dessous, qui est le moteur de la croissance dans un pays.

On voit que la corrélation a un degré de confiance extrêmement élevé, et l’équation de la droite de régression indique que l’élasticité entre l’augmentation de la production industrielle et le PIB/tête des habitants est de 0,64 : une augmentation de 10 % de la production industrielle entraine un accroissement de 6,4 % de la richesse par personne.

Pour redresser la situation de l’économie française il s’agit de reconstituer le secteur industriel en le portant au niveau de 18 % environ du PIB, niveau en dessous duquel il n’aurait jamais dû descendre. Cela signifie la création de 1,8 million d’emplois nouveaux dans ce secteur que les économistes nomment « le secteur secondaire », ce qui porterait son effectif à 4,5 millions de personnes. À titre de comparaison, l’Allemagne en est à 5,7 millions dans les entreprises de plus de 50 personnes.

Il sera intéressant de voir comment chacun des candidats envisage de procéder : pour bien faire il faudrait que nous puissions reconstituer ce secteur industriel en une dizaine d’années, ce qui supposerait que soit créés environ 180 000 emplois industriels nouveaux par an. C’est un objectif extrêmement ambitieux et très difficile à inscrire à son programme. Les candidats nous diront s’ils comptent y parvenir par des mesures libérales ou bien par des interventions de la puissance publique.

 

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  • J’ai bien ma petite idée sur les propositions qui vont être faites en matière industrielle, la fameuse croissance verte va nous sortir de là rapidement.
    On est à moins de 4 mois du premier tour et on ne parle que du Covid et de l’immigration.
    Aucun des candidats n’a eu un emploi productif au moins une fois dans sa vie, à part Poutou…
    L’industrie, c’est sale, ça pollue, ça entretient des ouvriers qui n’adhèrent pas aux idéologies « progressistes », pire qui fument des clopes au volant de leur vieux diesel.
    Tout le problème de la France vient de cette classe politique professionnelle, qui ne connait absolument rien à la réalité de notre pays.
    Il suffit de lire le rapport de notre commissaire au plan, qui vient de découvrir que nous sommes devenus un pays en voie de développement.
    Sa conclusion est d’ailleurs optimiste, car les pays en voie de développement ont au moins l’espoir de se développer un jour…

    • « classe politique qui ne connait rien de la réalité »
      On peut aussi ajouter un manque de culture générale et une absence de vision.
      C’est tout le problème de la révolte des masses et de l’effondrement d’une forme « d’aristocratie ».
      Comptons quand même sur Contrepoints pour nous faire un tableau complet des propositions des candidats dans ce domaine …. si il y en a.

    • Zemmour aussi a eu un emploi productif : journaliste !
      Alors, on est très loin de l’industrie et son domaine d’expertise est particulier (journaliste politique) mais il a une expérience du monde du travail. Dans le privé qui plus est.
      Serait-ce pour cela qu’il est plus sensible que les autres à la thématique de la réindustrialisation ?
      Disclaimer : je ne suis pas un militant pro Z. Je constate c’est tout (de même que je constate que Poutou a lui aussi une expérience du monde du travail).

    • La classe politique en France n est que le reflet des français. Plus facile de critiquer nos élus que d analyser les nombreux biais cognitifs qui traversent la société française et sont a la source de nombreux maux que nous refusons d admettre et donc de soigner. Il suffit de constater les réformes structurelles nécessaires qui n aboutissent pas ou sont si édulcorées qu il faut recommencer. L etat d esprit français est tellement dans la défiance qu il refuse toutes solutions a ses problèmes. Le pays tourne en rond…..

  • OUI. En plus, le mépris des « ingénieurs » pour la fonction commerciale + l’idéologie du tout contrôle, au lieu de sous traiter à l’extérieur, à des agents spécialisés la vente à l’exportation + La liquidation,organisée par des envieux, et des haineux, des TPE et PME en mal de succession.. On découvre aujourd’hui les vertus de consortiums familiaux à l’autrichienne, permettant à des cadres.. contremaitres etc, de succéder à une famille ne disposant pas d’enfant compétent, tout en conservant le capital engagé sur 7 / 10 ans.

  • Y a pas que l’industrie dans la vie, ça rapporte que dalle par rapport aux sociétés de services et puis, l’Allemagne monopolise la plus part des industries très rentables alors, on fabrique quoi? Des fers à repasser ou des robots ?
    Faudrait peut être déjà pour commencer reformer la fiscalité et la réglementation avant de songer à reindustrialiser.. Ils en disent quoi les candidats ? Silence surtout que la reindustrialisation implique… L’immigration..

    • L’industrie n’a plus autant besoin de mains qu’au XIX et XXème siècles, c’est plus les temps modernes, donc pourquoi cela tirerait de l’immigration ?

    • L industrie propose des salaires supérieurs aux sociétés de service, permet d exporter des produits ce qui alimente la balance de commerce extérieur et autorise le maillage du territoire. La stratégie de LVMH en France est tout a fait positive en s appuyant sur un savoir faire local. Ce qui n empêche pas qu une baisse de la fiscalité via les impôts de production est urgente et prise en compte par qq candidats à la présidentielle et déjà démarrée avec 10 milliards d euros…..

  • Nul besoin de s’occuper de l’industrie, ou de tout autre domaine d’ailleurs.
    L’important c’est de laisser les gens faire ce qu’ils veulent. S’ils veulent créer des entreprises industrielles, très bien, s’ils veulent créer des entreprises de service ou des entreprises agricoles c’est très bien aussi. Faut juste s’assurer que les règles du jeu sont fixées la fiscalité neutre et limitée et faire confiance « aux gens »…

  • Une bureaucratie de type soviétoïde s’est emparée de tous les leviers du pays et a consciencieusement appliqué le socialisme qui est a la prospérité d’un pays ce qu’Ebola est à la santé. Il ne faut surtout pas faire, il faut au contraire défaire et virer tous ces gens-là de nos porte-monnaie et de nos vies.
    L’auteur déclare que c’est la baisse de l’industrie la cause de nos problèmes, comme si c’était la fièvre qui était responsable de l’infection. Il semble même croire que les politiques ont cherché à lutter contre le chômage alors qu’ils en sont la seule cause !?
    Allo !?

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