Twitter : le départ de Dorsey pourrait aggraver la censure technologique

Le patron de longue date du site est peut-être plus attaché à la liberté d’expression que son successeur, Parag Agrawal.

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Screenshot 2021-11-30 at 15-08-30 Full Interview Jack Dorsey, C E O of Twitter and Square DealBook 2017 - YouTube

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Twitter : le départ de Dorsey pourrait aggraver la censure technologique

Publié le 1 décembre 2021
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Jack Dorsey a démissionné de son poste de PDG de Twitter, après avoir occupé divers rôles de direction au sein de l’entreprise depuis sa création en 2007.

Il explique dans un communiqué :

J’ai décidé de quitter Twitter car je pense que l’entreprise est prête à tourner la page de ses fondateurs.

Si Facebook a attiré beaucoup plus d’attention ces derniers mois, en raison d’inquiétudes généralisées – dont certaines étaient exagérées – selon lesquelles le site propagerait la haine et la désinformation et rendrait les adolescents dépressifs, Twitter est le site préféré des médias et de la classe politique.

Le nid d’oiseau bleu virtuel compte peut-être beaucoup moins d’utilisateurs que Facebook (300 millions contre 2 milliards), mais son importance pour les décideurs politiques signifie qu’il joue un rôle plus important que mérité dans le débat politique. Si un changement de direction entraîne des modifications importantes de la politique interne, cela pourrait avoir un effet démesuré sur les médias d’information.

Quiconque craint que les médias sociaux ne soient déjà devenus trop intolérants à l’égard des opinions dissidentes, trop enclins à faire taire les points de vue qui s’écartent de l’orthodoxie progressiste, devrait s’inquiéter du départ de Dorsey. De tous les pionniers de l’industrie technologique qui ont été traînés devant le Congrès pour répondre à des questions absurdes, il était de loin le plus hostile à l’idée que le gouvernement devrait servir de police de la parole sur Internet.

Alors que Mark Zuckerberg, le PDG de Facebook, s’est prononcé en faveur d’une modification de la section 230 qui pourrait donner davantage de pouvoir au Congrès sur les politiques de modération du contenu, Twitter est resté farouchement opposé à une réglementation accrue.

Lorsque j’ai interviewé Lauren Culbertson, responsable de la politique publique de Twitter aux États-Unis, pour mon livre Tech Panic, elle m’a prévenu que l’érosion de la section 230 pourrait « renforcer les opérateurs historiques » et « étouffer l’innovation et la concurrence« .

Lorsque des militants ont intenté un procès à Twitter, exigeant que le site supprime le compte de Donald Trump, alors président, Twitter a refusé, invoquant la section 230. Trump n’est peut-être plus sur Twitter – il s’est finalement comporté d’une manière qui violait manifestement les politiques du site – mais sans les protections de la section 230 et le soutien de Dorsey à la liberté d’expression, le site aurait pu agir beaucoup plus tôt et de manière beaucoup plus brutale. Il y a sans aucun doute beaucoup de politiciens démocrates et de figures médiatiques progressistes qui auraient souhaité qu’il le fasse.

Parag Agrawal comme nouveau PDG de Twitter

Le conseil d’administration de Twitter a approuvé à l’unanimité la nomination au poste de PDG de Parag Agrawal, actuel directeur technique de la société. Le principal projet d’Agrawal chez Twitter a été Bluesky, une initiative visant à créer « une norme ouverte et décentralisée pour les médias sociaux qui permettrait de mieux contrôler les informations abusives et trompeuses sur sa plateforme« .

Lors d’une interview il y a un an, Parag Agrawal avait déclaré qu’il pensait que Twitter devait « moins se préoccuper de la liberté d’expression. »

Notre rôle n’est pas d’être liés par le premier amendement, mais notre rôle est de servir une conversation publique saine et nos actions reflètent les choses qui, selon nous, mènent à une conversation publique plus saine […]Le genre de choses que nous faisons à ce sujet est de nous concentrer moins sur la liberté d’expression, mais de réfléchir à la façon dont les temps ont changé.

Bien entendu, Agrawal a raison de dire que Twitter n’est pas lié par le premier amendement. En tant qu’entreprise privée, elle peut prendre les décisions de modération qu’elle souhaite. Mais sous la direction de Dorsey, Twitter a été un lieu de grande conversation sur des sujets d’importance politique, malgré quelques décisions de modération indéniablement discutables. M. Dorsey a résisté à la pression des législateurs démocrates et républicains qui voulaient que l’entreprise soit plus conforme à leurs opinions. Reste à savoir si Agrawal fera de même.

Traduction Justine Colinet pour Contrepoints

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  • Quand le niveau de liberté d’expression dans un pays dépend du choix de tel ou tel PDG par une entreprise privée, il y a du souci à se faire.

    • Il y a du souci à se faire quand on ne comprend pas le lien entre propriété et liberté.
      Twitter ne restreint pas la liberté d’expression, il restreint la liberté de s’exprimer librement sur sa plateforme. C’est dommage j’en conviens, mais ne vois pas d’atteinte à la liberté, il suffit de ne pas avoir de compte. C’est encore possible non ?
      Mais bon, hein, quand on ignore ce qu’est la liberté, on se plaint de ne pas pouvoir poser ses pieds sur la table basse d’autrui et prétendre que c’est un danger pour la liberté.
      Le danger pour la liberté est celui qui essaie de restreindre le droit de propriété d’autrui.
      Ici l’Etat.
      De rien.

      • On entend souvent défendre cette idée par les libertariens, c’est presque un dogme, « c’est une entreprise privée donc la liberté d’expression ne s’applique pas ».
        Je n’ai jamais compris pourquoi !
        Je suis moi-même entrepreneur alors je connais les entraves de l’état, les excès de la régulation, etc, mais je ne suis pas contre un peu de régulation justement.
        Les entreprises privées sont des petits fachos en puissance, leur rêve c’est l’oligarchie et le capitalisme de connivence, dépasser le voisin par tous les moyens (je répète je suis entrepreneur !), c’est la fable du scorpion et de la tortue, c’est dans leur nature (et c’est bon pour le développement économique de nos concitoyens, je le sais – ne vous inquiétez pas).
        Mais si on laisse les entreprises qui fournissent un service public (les fournisseurs de réseaux sociaux c’est bien un genre de « utilities » particulier) bafouer la liberté d’expression on affaibli la démocratie et on rentre dans un système oligarchique.

        Finalement quel est le but de ne pas réguler la liberté d’expression pour les entreprises qui fournissent des supports industriel de communication ? Faire semblant de croire que notre liberté personnelle est en jeu alors que c’est leur censure qui est une entrave à notre liberté ?

        Je vois très bien quelles sont les conséquences néfastes de la censure que pratiquent les différentes plateformes dont il est question, twitter compris, moindre diffusion des idées nouvelles, soumission à l’arbitraire étatique – je voudrais bien toujours peser 500 milliards l’année prochaine, que puis-je faire pour vous M. L’état ? Mise en place d’une oligarchie de gauchiste (les différents PDG de ces entreprises )- par contre je ne vois pas d’effet néfaste d’une régulation des plateformes de communication en ce qui concerne la liberté d’expression, je ne trouve pas !

        • Merci pour “utilities”, oui il ne viendrait pas à l’idée de Orange / Free / Bouygues-Telecom de couper la ligne de clients qui s’expriment mal par téléphone, ou qui se connectent à des sites mal-pensants par Internet.
          ==> Parce que l’Etat fait la régulation des « utilities »
          Facebook / Tweeter / Snapchat .. sont les nouveaux Orange / PTT

      • De belles circonvolutions pour essayer de nous expliquer que Twitter fait ce qu’il veut parce que raisons…?. Twitter en tant que plateforme est soumis aux lois de la bill 230. Elle se doit de veiller au respect de la liberté d’expression. Seuls les posts qui tombent sous le coup de la loi criminelle peuvent être supprimés.

      • « mais ne vois pas d’atteinte à la liberté

        Vous ne « voyez » surtout pas qu’une entreprise privée menacée par les politiques de démantèlement ou de lourde sanctions n’est plus libre.
        Le but d’une entreprise est le profit avant tout et le profit pour ces réseaux se faisait en l’occurrence grâce à la liberté d’expression.
        S’ils s’en écartent c’est qu’ils ne sont plus libres et si la censure tombe sur un seul camp, c’est qu’ils sont devenus le porte-voix de ceux qui la menacent. Parag Agrawal est un ultra progressiste puppet des progressistes plus qu’un PDG d’entreprise « privée ».
        .
        100% Crony State donc et effectivement un lourd problème sur la liberté d’expression.

    • Le problème étant qu’ils sont aussi « privés » avec le congrès et les politiques
      fascistes « progressistes » sur le dos qu’une femme est libre de ne pas se faire violer avec un couteau sous la gorge.
      Quand les politiques ne s’en mêlaient pas, avant 2010 approximativement, ils faisaient simplement des profits en rendant service et se moquaient bien de ce qui passait dans leurs tuyaux ce qui coïncide avec une liberté d’expression totale.

  • on commence à voir des plateformes alternatives et le risque réel est à ce niveau soit

    que le gouvernement régule à ce niveau.. qu’il bloque la concurrence..

    il suffit de ne pas prêter attention à twitter!!

    mais facebook youtube ou twitter ne sont pas des dangers en soi , le danger est la connivence..
    ne vous taisez pas et ne vous laissez pas impressionner.

  • Avec le wokisme et la cancel culture plus une dérive des US vers une authentique démocrature, ce pays a des soucis à se faire.
    De même, la France, avec tous les médias nationaux aux mains de la gauche, voire de l’extrême gauche, nous sommes également dans la même mouise.
    Le communisme a disparu mais il est remplacé par une nouvelle dictature, celle d’une gauche qui dérive de plus en plus vers un islamo-gauchisme et qui soutient des minorités qui veulent détruire l’occident et ses valeurs.

  • Bonjour,

    J’avais lu un entretien de Jack Dorsey assez récent. Et il était revenu justement sur l’exclusion de Donald Trump de son réseau. Sous son vibrant appel au maintien de la liberté d’expression, j’y ai perçu un vrai regret et l’aveu de pressions très fortes à son encontre lors de cet épisode.
    D’ailleurs, lorsque j’écoutais la «lanceuse d’alerte» Frances Haugen mise en avant par les médias pour avilir Facebook, il n’y avait de sa part nul propos favorable à plus de liberté d’expression pour l’avenir de la plate-forme mais au contraire, plus de contrôle et de régulation. Ce qui m’a précisément étonné de la part d’un individu présenté comme lanceur d’alerte.

    Avec le départ de Dorsey, c’est la continuité d’une reprise en main des principaux réseaux sociaux américains qui s’opère sur un modèle plus chinois.

    Cordialement

  • Le titre est bien diplomatique. Considérant le pédigrée du bonhomme, la liberté d’expression ne pourrait pas un prendre un coup; elle en prendra un coup sûrement.

    J’ajouterais aussi que le statut d’entreprise privée de Twitter n’a ici aucune importance. Par la loi, Twitter est considéré comme un plateforme au même titre qu’une compagnie d’électricité ou de téléphone. Elle se doit de respecter les règlements de la bill 230.

    • En pratique il y a mille excuses possibles pour la censure d’autant plus que tout discours anti-gouvernemental ou pro-liberté peut très facilement être qualifié de « haineux » et la censure confirmée par des tribunaux à la neutralité douteuse.
      Tous les pions se sont patiemment mis en place pendant des décennies: inflation des bureaucraties, dérives des lois, des médias, de la justice, des politiques. Les libertés sont cernées de toutes part.
      Avec le Covid ils se sont aperçu qu’ils pouvaient mentir, enfermer et censurer sans aucun problème, la population en redemande.

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