Climat : l’incroyable saga de l’anomalie de température globale (3)

Troisième épisode de la saga des températures.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Temperature by Acid Pix (CC BY 2.0)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Climat : l’incroyable saga de l’anomalie de température globale (3)

Publié le 24 août 2019
- A +

Par Michel Negynas.

Le « hiatus » est l’apothéose des jeux d’interaction entre ceux qui tracent l’historique de l’indicateur et ceux qui modélisent le climat. En effet, il faut bien, au moins, que les modèles reproduisent le passé. Or même ça, ce n’est pas gagné. Heureusement, comme on est loin de tout savoir des paramètres climatiques, cela laisse paradoxalement de la latitude pour « ajuster » les modèles (« tuning en anglais ») par des facteurs arbitraires (« fudge factors » en anglais, terme généralement employé, pas vraiment flatteur). La cuisine interne aux protagonistes nous a été révélée par le « Climate gate » comme on le verra ci dessous : un des protagonistes, Michael Mann, parle de « dirty laundry » (lessivage pas très propre). Evidemment, il ne faut pas généraliser à la majorité des scientifiques travaillant sur le climat !

Le Climate gate

Fin 2009, on a pu voir sur le net une série de plusieurs milliers d’e-mails professionnels d’une vingtaine de scientifiques travaillant sur la question du climat. Ils ont été identifiés comme réels. On ne sait toujours pas, 10 ans plus tard, comment cette fuite a pu être possible. Toujours est-il que des milliers d’internautes se sont mis à les éplucher, et ce qu’on y a trouvé est édifiant.

Le Climate Research Unit de l’université de l’East Anglia, un organisme dépendant de l’Office Météo Britannique, abritant aussi l’équipe traçant les températures mondiales, le Hadley Center, avait été piraté. Les données et emails (61 Megabytes)  avaient été soigneusement collectés, et disposaient même d’un moteur de recherche associé ! L’affaire a été un peu oubliée depuis, mais certains internautes continuent d’exploiter cette mine.

Pour les lecteurs intéressés, le Climategate a fait l’objet de plusieurs livres : « Climategate: A Veteran Meteorologist Exposes the Global Warming Scam » ou  « Climategate: The CRUtape Letters »

Les auteurs de ces emails ont protesté, arguant de la nécessité de les replacer dans un contexte d’échanges libres au fil de l’eau entre confrères. En réalité, c’est l’inverse. Quand on connaît le contexte, ces échanges sont catastrophiques par ce qu’on y découvre. Une petite confrérie de « climatologues » essayait, dans les années 2000, de « contrôler » la communication scientifique sur le climat. Ils s’appelaient entre eux « The Team ». Quel rapport avec l’interaction modèles climatiques/températures ? Nous allons voir un exemple.

Le refroidissement des années 60 : le « blip »

De 1945 à 1975 environ, les courbes de température montrent un refroidissement. A l’époque, les media prédisaient un nouvel âge glaciaire, catastrophes à la clé. Cet épisode n’est contesté par personne, et c’est ce qui fait qu’il n’y a pas vraiment corrélation entre températures et CO2. Il fallait donc trouver une explication « rationnelle » : soit les températures étaient fausses, soit il y avait un truc, de préférence d’origine humane, pour ne pas introduire l’épineux dossier des variations naturelles du climat.

Kenneth Richard, un observateur attentif de ces affaires climatiques, a cherché à faire le point sur ces manœuvres :

Quelques échanges savoureux via les mails du Climategate extraits par Richard :

« De Tom Wigley à Phil Jones (email du 27 septembre 2009) :

Voici quelques spéculations pour corriger les températures des océans afin d’expliquer partiellement la parenthèse (blip en anglais) du réchauffement….aussi, si nous pouvions réduire le refroidissement de 0,15 degrés, cela serait significatif pour la moyenne globale…j’ai chois délibérément 0,15 degrés…. Cela serait bien de supprimer le refroidissement de 1940… »

Ou encore :

De Phil Jones à Mike, Gavin, Stefan (email de aout 2008)…

j’attends un petit ajustement autour de 1955, avec un maximum de 0,2 de février 1945 à 1950, réduit à presque zéro vers 1955…la température des océans est vraiment le plus faible point des températures globales, non seulement parce qu’elle domine en surface, mais aussi parce qu’il faut prendre en compte l’histoire des différents types de prélèvements, différents baquets (de prélèvement de l’eau) ou instruments….

Ou encore :

De Phil Jones à Ellen X (email de mars 2009)…

Ce qui va arriver aux températures des océans est qu’elles seront plus chaudes de 1945 à 1955, et ensuite elles refroidiront. C’est mieux pour l’argument de l’aérosol….

Merci à Kenneth Richard et quelques autres de s’être plongés dans ces échanges révélateurs…

Mais il convient d’éclairer les sujets dont il est question dans ces e-mails

L’affaire des « baquets » : la température de l’air en surface des océans est assimilée à la température superficielle de l’eau. On demandait donc aux navires de faire des prélèvements. Entre les navires à voile du 19ème siècle et les porte conteneurs, il y a évidemment des différences ; la hauteur par exemple, qui donne le temps entre le prélèvement et la mesure. Mais le contenant aussi : entre les baquets en bois d’origine, et les baquets en fer, ça peut faire un écart. Enfin, depuis la deuxième guerre mondiale, on prélève l’eau de refroidissement des moteurs, en entrée. Tout cela n’est pas anecdotique : souvenons nous qu’on parle de réchauffements de 0,1 degrés tous les dix ans…Les échanges de mails montrent que la difficulté d’évaluer les écarts entre les méthodes donne pas mal de latitude pour « ajuster »…

L’avenir de l’humanité se jouerait elle sur une histoire de baquets ?

La deuxième allusion des emails concerne les aérosols. Les aérosols sont censés avoir un effet refroidissant. « L’argument aérosol » consiste à supposer que le développement industriel des 30 glorieuses a produit tellement de pollution que ces aérosols (des poussières et des gaz se combinant en poussières fines) ont annihilé l’effet CO2. Les modélisateurs, pour faire coller leurs modèles au passé, ont donc « injecté » virtuellement des aérosols pour « refroidir » leur planète fictive. Mais on recherche en vain les mesures incontestables qui auraient dû permettre cet audacieux « tuning ».

Le hiatus

Tout allait bien dans le meilleur des mondes. On avait expliqué le « blip » de 1945. Les courbes de températures collaient entre elles (ce qui n’est pas étonnant, les données brutes étant en grande partie les mêmes.) Mieux, les courbes par satellites, disponibles à partir de 1979, étaient, elles aussi, à peu près cohérentes avec l’ensemble.

Mais à partir de 1998, ça ne chauffait plus. C’était gênant. Après le « blip », on entrait dans le « hiatus ». C’est difficile de traduire ce que les climatologues voulaient dire par là : une pause, une interruption, un arrêt ? En plein dans la préparation du 5ème rapport du GIEC, finalisé en 2013, cela en chagrinait plus d’un.

Un climatologue éminent, K Trenberth, disait : « Le fait est que nous ne pouvons rendre compte pour expliquer l’absence de réchauffement pour le moment, et c’est grotesque » 

Il y eut même une discussion serrée au sein du GIEC s’il fallait mentionner le hiatus ou le passer discrètement sous silence dans le 5ème rapport.

Chacun y alla de son explication. Certains auraient bien refait le coup des aérosols, avec le développement de la Chine, mais c’était osé. L’explication générale  était que la « chaleur » avait plongé momentanément dans les océans.

La gaffe

Il y avait quand même des climatologues qui trouvaient cela dommage. Un chercheur lié à NOAA, Thomas R Karl, un peu inconscient, sortit en 2015 une étude montrant que les dernières mesures de températures avaient été très sous estimées.

Une des raisons principales tiendraient à l’écart entre les mesures en baquet et en seau et les mesures avec les bouées en mer, qui serait bien plus grand qu’initialement estimé. Le hiatus, largement discuté dans le dernier rapport du GIEC, allait il disparaître ? On avouerait presque en même temps que la publication du rapport, qu’on découvre que les courbes de températures utilisées seraient fausses ? Malgré un malaise quasi général, cela a conduit NOAA à aligner plus ou moins les températures des bouées (hautement technologiques) sur celle des baquets (hautement domestiques).

Qu’allaient donc faire les deux organismes, GISS et HADCRU, qui publient en relation avec NOAA ? Eh bien ils ont fini par s’aligner.

Il restait un problème : les courbes par satellite. Il y avait de plus en plus d’écart entre elles et les autres comme on peut le voir ci-dessous.

 

Mais RSS a découvert opportunément un problème de calibration qui diminue l’écart. Fini le hiatus, comme on peut le voir sur les dernières mises à jour des courbes (en dehors du fait que depuis il y a eu un phénomène El Nino important, mais ça c’est de la météo).

Il y a tout de même un organisme indépendant, UAH, qui lui, n’a pas jugé bon de « calibrer » ses satellites, arguant qu’ils n’en n’avaient pas besoin.

Il y a maintenant un écart entre les deux courbes satellites, et la confusion devient totale :

La situation devient inextricable, mais ce n’est rien à coté de ce qui se passe, quand on veut reculer plus encore dans les séries de température, comme on va le voir dans le prochain bulletin. Ouf ! Quelle histoire !

Voir les commentaires (10)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (10)
  • Encore une preuve que ce qu’on nous bassine comme « science » est, en fait, du bricolage digne d’un mari qui essaie, pour la première fois, de planter un clou…de travers.
    Mesurer la moyenne de température du globe, sans oublier l’hémisphère sud, est mission sinon impossible, du moins très difficile, satellite compris car il y a des nuages sur environ la moitié du globe et qu’ils bougent!

  • on s’aperçoit que rien n’est simple, c’est très complexe et les affirmations du GIEC et autres écolos d’opérette sont à prendre avec beaucoup de recul, elles relèvent presque du discours des gourous ou des sectes.

  • Excellent article qui prouve la falsification des données à laquelle se livrent des soi-disant scientifiques qui ne méritent pas ce titre!

    • Il y a deux type de scientifiques , les vrais faisant des recherches et les faux recherchant des fonds , c’est tout ce qu’ils sont capables de faire avec leurs faux diplomes .

      • C’est plus pervers que ça. Il y a en effet deux types de scientifiques. Ceux qui font de la recherche et essayent de comprendre la réalité. Et ceux qui font de la publication et veulent produire une « réalité » qui pourra passer sous les fourches caudines des « éditeurs » et des « reviewers » des revues qui ont été déclarées « à haut impact » et donc permettent d’avoir des bourses, des financements, etc…

    • Oui, toute cette affaire est partie d’une poignée de scientifiques à la déontologie douteuse, parmi une minorité (les 2000 du GIEC dont la plupart non experts en climatologie ni en physique), mais avec suffisamment de notoriété de leurs instituts de recherche pour emporter l’adhésion de leurs pairs (jusqu’à ce que certains, comme Courtillot, vérifient…).

  • la question est encore celle de l’incertitude, je ne suis pas choqué plus que ça par les emails, les procès d’intention sont stériles en science ..

    normalement , la science est d’autant plus assise qu’on a douté ..
    ici le credo c’est croyez les scientifiques..

  • Je n’ai pas bien compris les graphiques des anomalies.
    La version non modifiée montre qu’il y a une tendance plus haussière que celle trafiquée. Quelqu’un aurait-il une explication ? j’ai du raté quelque chose… Merci par avance.

  • Moi ce qui m’amuse beaucoup avec les climatosceptiques c’est qu’ils invoquent el nino pour relativiser l’emballement de ces dernières années, mais à aucun moment ils ne se demandent si l’épisode el nino de 98 ne biaiserait pas aussi leur perception du soi disant hiatus qui a suivi (à savoir la période 98-2013). Mettez-vous à la place de quelqu’un qui n’a aucun a priori sur la question du réchauffement climatique et qui regarde pour la première fois la courbe d’évolution de la température depuis 1980. Est-ce que vous croyez vraiment que son attention sera attirée par le léger ralentissement de la période 98-2013 ? Ce qui va le frapper c’est au contraire le rythme très régulier avec lequel les températures augmentent. Dire le contraire c’est être de mauvaise foi.

    • Une personne sans aucun à priori sur la question du réchauffement climatique ne regarde pas une courbe de températures depuis 1980 pour discuter du sujet… Cet ensemble d’articles le prouve très bien ; le phénomène est plus compliqué qu’il n’y paraît…
      De plus, si je suis votre raisonnement sur El Nino, pourquoi alors les « experts » du GEIC ont cherché des parades pour ne pas montrer son influence ? Pas très scientifique tout ça…
      Ensuite, même les experts ne sont pas d’accord entre eux sur ce qu’a provoqué El Nino, donc prendre parti d’un côté ou de l’autre est une absurdité ; présentons donc les chiffres tels qu’ils sont et ne les manipulons pas si on est un tant soit peu honnête…
      Enfin, cette manipulation de chiffres ne semble pas plus vous émouvoir que ça (contrairement aux « climatoréalistes » et non pas aux « climatosceptiques »).

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La nécessité de décarboner à terme notre économie, qui dépend encore à 58 % des énergies fossiles pour sa consommation d’énergie, est incontestable, pour participer à la lutte contre le réchauffement climatique, et pour des raisons géopolitiques et de souveraineté liées à notre dépendance aux importations de pétrole et de gaz, la consommation de charbon étant devenue marginale en France.

Cependant, la voie à emprunter doit être pragmatique et ne doit pas mettre en danger la politique de réindustrialisation de la France, qui suppose une... Poursuivre la lecture

L’INSEE vient de publier un bilan démographique pour l’année 2023 qui met en évidence un affaissement de la natalité française. Selon des sources concordantes, celle-ci n’est plus guère soutenue que par la fécondité des femmes immigrées. Ce qui laisse entrevoir à terme une diminution de l’effectif global de la population, et une nouvelle configuration de sa composition ethnique et culturelle.

Faut-il s’en inquiéter ? Pour la plupart de nos concitoyens, cette question n’a pas de conséquence directe et immédiate, encore moins pour les re... Poursuivre la lecture

0
Sauvegarder cet article

Dans son quatrième rapport publié le 23 octobre, le Conseil national de productivité revient sur la performance économique française de ces derniers mois, les effets de l'optimisation fiscale sur la productivité et les actions pour le climat qui lui paraissent nécessaires à l'atteinte des objectifs de transition énergétique.

Sur ce dernier point, le rapport est particulièrement approfondi et mérite une lecture attentive.

En premier lieu, le rapport indique :

« Les études [...] suggèrent que l’impact à long terme de la tra... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles