Les drapeaux dans les classes vont-ils rétablir la confiance à l’école ?

On s’enroule dans le drapeau comme pour voiler les nudités honteuses des nouvelles lois.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
French flag By: Bobo Boom - CC BY 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Les drapeaux dans les classes vont-ils rétablir la confiance à l’école ?

Publié le 16 février 2019
- A +

Par Stanislas Kowalski.

Les symboles sont-ils anodins ? En tout cas les députés aiment brandir les fétiches de la République, surtout quand ils la sentent en danger. La Déclaration des Droits de l’Homme était déjà affichée dans tous les établissements (en principe). Maintenant, dans toutes les salles de classe, ce seront les drapeaux français et européens, qui sortent toujours en couple désormais. En puis les paroles de La Marseillaise, cet hymne d’amour délicieux.

Entendons-nous bien. Il est louable d’aimer sa patrie et d’en donner des signes. Mais l’obligation de les afficher donne à la République des airs de femme acariâtre qui passe son temps à dire : « Tu m’aimes, dis-moi, tu m’aimes ? » Aucune loi ne peut nous forcer à l’aimer. Il lui suffirait de se rendre aimable et c’est avec fierté que nous porterons ses couleurs.

Des drapeaux pour cacher l’essentiel

Las ! On s’enroule dans le drapeau comme pour voiler les nudités honteuses des nouvelles lois, alors que la foule a choisi d’autres bouts de tissu pour représenter sa colère.

Ah ! « L’école de la confiance » ! Comme dans tous les couples qui battent de l’aile, plus on parle de confiance, plus on se méfie. Surtout quand c’est pour dire : « Fais-moi confiance, sans réserve. » On aurait pu espérer : « Je te fais confiance. » Ce ne sera pas le cas.

Jugez un peu.

Le premier article rappelle les devoirs des professeurs. Pour instaurer la confiance, ils doivent faire preuve d’exemplarité et respecter les familles et, bien sûr, l’institution. Car tout dépend, évidemment, de « la cohésion de la communauté éducative ». Ça ne rassure pas tellement les enseignants démoralisés par cette institution. Il est sans doute excessif de dire, comme certains syndicalistes, que cet article va restreindre leur liberté d’expression, mais il donne le ton. Vous êtes priés de ne pas faire de vagues.

S’ensuivent un certain nombre d’obligations et de contrôles nouveaux. Nous commencerons par l’école maternelle, dès trois ans, sans exception, même si la quasi-totalité des enfants qui sont prêts à entrer à l’école y entrent de toute façon.

De l’autre côté, une obligation de formation pour les jeunes de 16 à 18 ans, pour « ne laisser aucun jeune au bord de la route », selon les mots du ministre. Les 20 000 décrocheurs se verront proposer systématiquement une formation ou un apprentissage. Les 10 ou 13 années précédentes ont échoué, les centres d’orientation et les professeurs n’ont pas réussi à convaincre. Mais avec deux ans de plus, c’est sûr, ça va marcher. Marchez droit, jeunes gens, rentrez dans le rang. Seule une qualification dûment tamponnée par une institution légale peut assurer votre succès dans la vie.

Expérimentations pédagogiques

La philosophie du projet est confirmée par le renforcement des contrôles dans le cas de l’instruction en famille. Liberté ? Oui, mais.

Alors, certes, le projet de loi prévoit d’étendre les domaines dans lesquels les écoles et établissements d’enseignement scolaires peuvent faire des expérimentations pédagogiques. Ah ! Enfin ! Mais comme d’habitude, sous réserve de l’accord des autorités académiques, dont chacun connaît l’esprit aventureux.

Dans le registre des symboles, il y en a un qui ne sert à rien, mais qui est bien trouvé. Les ESPE sont renommés en Inspé (Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation). Si l’acronyme précédent évoquait des espoirs fallacieux, le nouveau semble plus en accord avec une politique de reprise en main et d’homogénéisation sur tout le territoire, car apparemment le principal problème des ESPE est leur qualité « inégale ».

Mais bon, de quoi nous plaignons-nous ? Quelques drapeaux, ça ne mange pas de pain. Il faudra juste prévoir de laver le linge sale de temps en temps. La lessiveuse, c’est peut-être le dernier lien des familles désunies.

Voir les commentaires (23)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (23)
  • Vu que cette ânerie de drapeau a été proposée par Ciotti, on peut en conclure qu’il s’agit bien d’une ânerie.
    Et à la place de la Marseillaise, à côté du tableau noir, n’importe quoi aurait fait mieux : du Lundi au soleil à l’Ecole est finie, en passant par, on peut toujours rêver, la DDHC de 1789, meme s’il est vrai qu’en ces temps de Gilets jaunes, un rappel salutaire à l’égalité de tous en droit et au pouvoir du peuple aurait fait tâche pour un gouvernement qui n’a jamais autant pris ses citoyens pour des gosses irresponsables.

    • Au moins, ce genre d’ânerie est indolore et l’occasion de refaire la peinture 😀 Ca ne suffira pas à rétablir le respect et l’autorité dans un e société où, de l’école jusqu’au sommet de l’Etat, le maximum est fait pour se dédouaner, #pasdevague, ou racoler #fêtedelamusiquetechnogaynegro

    • Vous jugez la pertinence d’une proposition à l’aune de qui la propose ?

  • deux drapeaux pour rétablir la confiance à l’école…….ils voient loin nos élus , quel imagination !…..j’en reste pantois…..

  • Ce n’est pas un signe religieux ?
    Moi je crois oui , la République est devenue une religion , elle est du domaine du sacré son grand prêtre s’appelle président mais c’est un prêcheur comme les autres ….et elle est obligatoire !

  • Jamais deux sans trois ! Il faut d’urgence ajouter le drapeau de l’ONU.

  • Vivre-ensemble, école de la confiance… le gouvernement par les mots. Comme s’il suffisait d’asséner les mots pour faire advenir la chose, alors que les actes sont en contradiction.
    Cette « école de la confiance » transpire au contraire la méfiance envers tout ce qui n’est pas dûment estampillé EN.
    Il faut savoir que les belles paroles de M. Blanquer retour aux fondamentaux, l’exigence etc…) ont été appliquées, mais uniquement en REP et REP+. Pour l’immense majorité des enfants, on continue à sacrifier l’enseignement disciplinaire. Ça tombe bien, on manque de profs.

  • L’incendiaire d’un de ces drapeaux risque de faire la une des journaux.

  • On peut aussi instaurer le salut bras levé vers le portrait du président installé dans chaque classe …

    Mais je ne suis pas sur que cela améliore les résultats scolaires.

    • L’histoire du serment américain au drapeau est assez intéressante. L’ayant personnellement expérimenté, je me suis toujours demandé si ces mots répétés chaque matin avaient laissé une trace dans mon esprit. A noter que le serment initial était prononcé le bras en position quasi-hitlérienne et que c’est justement pour s’en distinguer qu’elle est mise sur le coeur aujourd’hui. Le serment initial était : « Je jure allégeance à mon drapeau et à la République qu’il représente : une nation indivisible, avec la liberté et la justice pour tous. » Ma foi, ça n’était pas si mal, bien qu’avec un petit côté voeu pieux… Tout pasteur qu’il était, Bellamy n’avait pas mis la référence à Dieu qu’on y trouve aujourd’hui (c’est la faute à Eisenhower), et il aurait même voulu mettre liberté égalité fraternité à la place de liberté et justice, mais il a déjà eu peur de la polémique 🙂

      • Ma belle-mère, née en 1932, nous dit de temps en temps qu’à son époque, les élèves saluaient le drapeau en France. Mais je me méfie de ce qu’elle dit… ma mère, née en 1940, n’a pas connu ça (et elle, je lui faisais confiance) mais 8 ans d’écart c’est suffisant pour que les choses aient changé

      • Quand j’étais en 4e, dans les années 90, j’ai fait un voyage scolaire au Canada, en Ontario. J’avais été surpris par ce qu’ils appelaient là-bas les « opening exercices », si je me souviens bien toutes les classes se retrouvaient dans les couloirs pour chanter l’hymne national. Là-bas, c’est parfaitement normal. Il y a peut-être un problème de la France avec les symboles de la République en général. Mettre des drapeaux dans les salles de classe sans rien faire de plus n’apportera rien, mais ça ne fera peut-être pas de mal non plus…

  • Je crains la stigmatisation !pour assure le Padamalgam, le drapeaux LGBT est indispensable !

  • Quel intérêt ? Le respect ne se décrète pas, il se gagne, la confiance idem. On met un drapeau et en parallèle les programmes dénigrent l’histoire de la France !

  • Le drapeau européen et français en couple… pas toujours.
    Je suis passé devant le ministère des armées et l’européen n’y flotte pas.
    Il faut que j’y repasse dans quelques jours car il me semble avoir vu mec en combi vert de gris et un casque à pointe qui donnait des ordres pour hisser un drapeau noir, rouge et or, il me semble je ne voudrais pas tomber dans la fake new

  • Une belle occasion pour rappeler que le socialisme est indissociable du nationalisme.

  • Le drapeau français n’est pas un drapeau de ralliement ; il est le drapeau d’un État dont l’autorité s’est imposée au peuple par la force. Cela en fait le symbole d’un pouvoir externe qui peut être perçue comme la puissance ennemie d’une population dont il occupe le territoire.

    Quiconque a été durement confronté à l’arbitraire de pouvoirs publics abusifs, sans pouvoir s’y soustraire, éprouve pour l’État qui l’a ainsi trahi une profonde aversion. Du coup, il se met à regarder le déploiement du drapeau national comme une vulgaire tentative de marquage de territoire par une puissance ennemie qui entend signifier ainsi qu’elle en dépossède la population ; il rêve de débarrasser le pays de cette occupation en se mettant sous une autre bannière mieux à même de représenter le ralliement aux valeurs qui lui sont chères.

    Dans ce cas, un simple Gilet Jaune peut faire l’affaire pour être le drapeau cher à son coeur comme symbole de ralliement à la cause de sa liberté (entre autres, sa liberté de circuler) et du respect reconquis de son identité.

    Dans ce contexte, les enfants subiront le drapeau bleu blanc rouge dans les écoles sans moufter; cependant certains sauront que ce drapeau n’est pas celui de leur père mais celui de l’État qui l’opprime et que leurs intérêts divergent car ils sont ennemis ; alors ils apprendront à faire la part des choses pour savoir quoi en penser avant de choisir leur camp.

  • Pour comprendre pourquoi les pouvoirs publics soumettent aujourd’hui la population à tant de provocations et d’injonctions injustifiées, dispersées, contradictoires ou aberrantes, nous pouvons regarder le pays comme un champ d’expérimentations, une sorte de laboratoire à ciel ouvert où sont testés des trucs pour voir.

    Voir le pays comme livré aux sciences humaines et politiques pour qu’elles progressent dans la connaissance du comportement de l’animal humain dépassionne le débat ; cela permet de passer d’un registre émotionnel à un registre plus rationnel. D’observé chacun devient observateur, et ce changement de point de vue permet de relancer la recherche de solutions inédites pour juguler la dictature en marche.

    Comme c’est parti, il n’est pas exclu que le drapeau national actuel finisse par nous faire horreur en nous rappelant « les heures les plus sombres de notre histoire » quand un envahisseur honni déployait chez nous son drapeau pour nous signifier notre défaite et exiger notre soumission.

    C’est toute l’ambivalence d’un drapeau national brandi par l’État français dans les écoles : peut-il susciter la fierté d’une adhésion gratifiante ou n’est-il que le symbole d’un projet de dictature qui force une adhésion mal acquise et marque le territoire pour exiger la soumission?

    • Dans les années 70 , une telle proposition eut été taxée de fasciste !
      Comme quoi , chassez le naturel il revient au galop . Nos étatistes de tout poil cherchent à travestir leurs échecs et médiocrité .

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Les auteurs : Nathalie Sayac est Professeure des universités en didactique des mathématiques, directrice de l’Inspe de Normandie Rouen-Le Havre, Université de Rouen Normandie. Eric Mounier est Maitre de Conférences en didactique des mathématiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC).

 

Mardi 5 décembre 2023, communiquant sur les résultats des élèves français à l’enquête internationale PISA, le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal a proposé de réviser les programmes de primaire pour y adopter progress... Poursuivre la lecture

L’Éducation nationale se trompe d’objectif en favorisant la mixité sociale et la réduction des inégalités plutôt que le niveau de connaissances. En effet, la dégradation du niveau général est nuisible à tout le monde et réduit l’égalité des chances en nivelant par le bas.

Depuis la publication en avril de mon article « L’éducation nationale se trompe d’objectif », sont arrivés les résultats de la dernière enquête PISA, qui confirme la catastrophe, et le plan Attal qui tente d’y pallier.

Ce plan vient tout juste d’être annoncé, on ... Poursuivre la lecture

Si j’étais ministre de l’Éducation nationale, de surcroît un jeune ministre pouvant aspirer à devenir, un jour, président de la République, je déclarerais vouloir supprimer le ministère de l’Éducation nationale dans sa forme actuelle, et vouloir lui substituer une autre organisation qui relève le niveau des élèves français dans les comparaisons internationales, mais surtout qui permette de réduire de manière drastique les inégalités sociales en matière d’éducation. La légitimité d’une telle décision est affichée au fronton de nos bâtiments publi... Poursuivre la lecture
Voir plus d'articles