Droits d’auteur « numérique » ou la grande hypocrisie

En voulant réglementer internet, on risque de dérégler un système dont nous profitons tous. Attention aux conséquences !

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Droits d’auteur « numérique » ou la grande hypocrisie

Publié le 20 septembre 2018
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Par Nicolas Lecaussin.
Un article de l’Iref-Europe

« Je suis fier que la France ait été à la pointe de ce combat », a déclaré Emmanuel Macron. Devinez : s’agit-il d’une baisse de la fiscalité ? Non, mais d’une nouvelle obligation qui, normalement, devrait être adoptée par tous les pays européens. Les eurodéputés ont adopté le 12 septembre dernier une version remaniée de la directive « adaptant le droit d’auteur à l’heure du numérique ». Les entreprises de presse obtiennent la création d’un « droit voisin » pour se « défendre » face à Google et Facebook.

Il est question d’une « meilleure rémunération » des auteurs, de plus de « contrôle » et d’une « meilleure répartition de la valeur » entre les différents acteurs d’Internet, notamment entre les créateurs de contenus et les plateformes qui diffusent leurs chansons, vidéos, articles. Ce vocabulaire, bien connu en France, n’est pas très rassurant. À première vue, cette directive semble partir des meilleures intentions : payer les créations des auteurs. Les conséquences pourraient néanmoins se révéler désastreuses.

Hypocrisie des éditeurs de presse

Tout d’abord, les plateformes internet (GAFA et autres) publient gratuitement des millions de « créations » (textes, musique, etc.) qui ne seraient publiées nulle part ailleurs. Elles circulent librement, toujours gratuitement : de nombreux auteurs se sont fait connaître et sont même devenus célèbres grâce à elles. Et cela dans tous les domaines.

Il y a une certaine hypocrisie chez les éditeurs de presse qui bénéficieront des « armes juridiques pour négocier avec les plateformes internet ». Quand on connaît les aides publiques dont bénéficient la presse et l’audiovisuel (en France surtout) et la façon dont ces medias rémunèrent la plupart des journalistes et pas du tout les collaborateurs occasionnels, on peut s’interroger sur les droits de celui qui possède les « armes »… On risque aussi d’assister à de longs et pénibles procès qui, finalement, pénaliseront les auteurs et coûteront cher aux éditeurs de presse.

Puis, et c’est probablement le plus inquiétant, à force d’être attaquées en justice, les plateformes internet (GAFA) risquent de mettre un grand coup de frein à la mise en ligne gratuite des textes et autres « créations ». Les perdants seront… les auteurs.

Les GAFA nous rendent service

Enfin, le problème n’est pas la publication gratuite en ligne dont nous bénéficions tous. Les GAFA nous rendent un grand service. Non, le plus dangereux pour un auteur est le plagiat. Ce ne sont pas les GAFA qui mettent la main sur la création mais les autres internautes. Et pour cela, il existe déjà des protections techniques en ligne qu’il faudrait encore améliorer.

Ne serait-il pas plus simple de prévoir un protocole permettant à quiconque de s’opposer à publication de ses œuvres, par un simple clic, sauf à négocier librement des droits d’auteur ?

En voulant réglementer, on risque de dérégler un système dont nous profitons tous. Surtout ceux qui, sans les plateformes internet, n’auraient jamais pu rendre publiques leurs créations.

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  • Un problème (réel ou imaginaire), une loi. Qui crée un nouveau problème, résolu par une nouvelle loi, qui elle-même, etc.
    Nos énarques sont indécrottables. Et la Nomenklatura européenne (ainsi que les euro-députés) sont nourris à la même tétine.

    • @ RX33
      Non, je ne crois pas.
      D’abord, très peu d’internautes dans le monde, savent ce qu’est l’ENA!
      D’autre part, si un rédacteur quelconque veut retirer un bénéfice de sa création sur internet, il risque bien de perdre beaucoup “d’audience” par rapport à tout ce qui circule gratuitement!
      Le risque, pas encore confirmé, c’est que dans l’U.E., cela ne vous soit pas accessible en vertu d’une législation européenne qui ne sera probablement pas étendue hors U.E. Donc cela se révélera par les effets pervers, donc des pertes d’audience!
      Restera au créateur à croire que le jeu en vaut la chandelle! Bonne chance!

  • Ce que les demandeurs de ce type de mesures oublient fort opportunément, c’est qu’ils ont dès aujourd’hui les moyens techniques d’empêcher les GAFA de “piller” leurs “oeuvres” et de profiter ainsi honteusement de leur travail : il leur suffit de désactiver l’indexation. Plus d’indexation, plus de reprise de leur cher travail sur les moteurs de recherche – ils deviennent les seuls à pouvoir en profiter.
    Le résultat risque cependant de ne pas être tout à fait à leur avantage… (si j’étais un tant soit peu cynique j’en viendrais à croire que c’est peut-être pour ça qu’ils l’oublient, d’ailleurs)

    • Euh… Des médias à tendance communiste veulent faire payer Google pour continuer de propager des idées sottes et nuisibles pour Google ? La firme de Mountain View ne peut elle pas les désindexer unilatéralement ? Il y aurait plus de place pour Contrepoints !

    • Les défendeurs de ce type de mesures sont surtout alléchés par l’argent de Google et consorts pensant obliger ces sites à leur reverser un argent qu’ils estiment le leur. Lol.
      Ils oublient la visibilité et la diffusion de leurs productions que leur apportent ces sites ce qu’ils ne seraient pas capables d’obtenir par leurs propres moyens.
      Cela ne changera pas grand chose à la vie de Google qui se contentera demander aux producteurs (de tout et n’importe quoi) l’autorisation de diffusion gratuite. Il y aura ceux qui accepteront et leur visibilité sera inchangée, et ceux qui demanderont des sous et qui disparaîtront des sites de recherche et de diffusion divers et variés. On les verra revenir rapidement piteux la queue entre les jambes signer les autorisations ad hoc.
      La seule différence est qu’avant, le flou encadrant les diffusions et reprises d’oeuvre et documents dans différents sites permettait toujours la sanction d’utilisations abusives. Maintenant, l’accord donné pour l’accès aux diverses œuvres, documents, productions des uns et des autres, limitera le recours en cas d’abus.
      On peut d’ailleurs s’attendre à ce que, devant l’échec, toujours les mêmes reviennent à la charge en demandant de nouvelles lois pour contrecarrer les effets adverses de la loi qu’ils encensent actuellement. Avec le “succès” prévisible comme dans toute chose où l’Etat vient mettre ses gros doigts…

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