Venezuela : « Comment je suis sorti de la crise grâce au Bitcoin »

Comment un jeune de 19 ans et sa mère tentent d’échapper à la crise au Venezuela grâce au bitcoin.

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Venezuela : « Comment je suis sorti de la crise grâce au Bitcoin »

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 27 août 2018
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Par Hannah Estefanía Pérez.

Voici la crise au Venezuela vue à travers l’histoire de Manuel Vásquez et de sa mère. Ensemble, ils se sont lancés dans le trading et dans des jobs d’indépendants afin d’économiser en bitcoins et autres cryptomonnaies. Pour garder leur maison.

Une histoire peu banale au Venezuela

Manuel Vásquez (pseudonyme) est un Vénézuélien de 19 ans, né dans l’État d’Anzoátegui (à l’est du pays). Il est passionné de cryptomonnaies. Avec sa mère, le jeune homme s’est lancé dans le trading et, en échange de bitcoins et d’autres monnaies numériques, il réalise divers travaux  afin de garder son logement et d’affronter la difficile crise économique que traverse le pays.

Dans un entretien avec DiarioBitcoin, Vásquez a raconté son histoire. Comment il s’est lancé dans l’écosystème cryptomonétaire et comment il subvient actuellement à ses besoins uniquement par ses revenus en devises numériques, ce qui lui permet de vivre relativement confortablement dans un pays tourmenté. Le jeune trader raconte ainsi que son incursion dans le monde des monnaies cryptographiques a commencé en 2014 :

« Je suis arrivé dans cet écosystème en 2014 comme toute personne ordinaire qui est arrivé à Bitcoin après m’être documenté sur les cryptomonnaies, mais sans y prêter beaucoup d’attention (…) À cette époque le Bitcoin valait environ 500 dollars US et Coinbase vous offrait un petit montant si vous vérifiiez votre compte. Ce fut mon premier revenu en bitcoins. »

Le capitalisme au secours du socialisme

Vásquez raconte qu’à cette époque, il a eu recours à des « robinets », ces sites Web qui rémunèrent leurs utilisateurs avec de petites fractions de bitcoins ou d’autres cryptomonnaies, ainsi qu’à des emplois freelance mais à la condition que les paiements soient en bitcoins. Au début, la jeunesse vénézuélienne a essentiellement utilisé la plateforme d’échange SurBitcoin — maintenant disparue — « ce qui m’a beaucoup aidé en son temps à changer les quelques dollars obtenus en monnaie locale (bolivars) ».

Cependant, cette même année, la crise économique au Venezuela commence à grandement s’aggraver ; pour Vásquez, les temps furent durs.

« La crise m’a rattrapé ; le manque de soutien et de motivation m’ont partiellement fait quitter l’écosystème. J’ai continué ma vie en essayant d’étudier comme une personne normale. Le prix du bitcoin s’est effondré et j’ai décidé de ne regarder que les nouvelles, sans pouvoir participer activement au marché. »

Parmi les difficultés rencontrées par la jeunesse vénézuélienne figurent l’hyperinflation et la rareté des produits de base. Les investissements sur lesquels il compte alors, avec son salaire en cryptomonnaies, sont si importants pour lui et sa famille que cela lui a permis de passer de « la souffrance à cause du manque de nourriture dû à la crise vénézuélienne » à « un certain apaisement ».

Des solutions contre la pénurie organisée

Le jeune homme se souvient de la difficulté qui a surgi lorsque, au cours des années 2015 et 2016, des pannes électriques ont commencé à apparaître au niveau national. Une situation qui impliquait des mesures de rationnement électrique quotidien, certaines de plusieurs heures consécutives, dans tous les États du pays. Pour le jeune homme, cela signifiait que son revenu était compromis : « La crise électrique s’est développée. Les pannes de courant sont quelque chose que je déteste car il n’y a plus d’énergie pour faire quoi que ce soit ».

Toutefois, le trader indique que, dans la mesure du possible, il a continué à travailler sur le Web. C’est d’ailleurs là qu’il a commencé à se consacrer au micro-commerce et à facturer en cryptomonnaies avec un revenu plus stable :

« J’ai commencé à me consacrer au micro-commerce et à l’obtention de revenus à condition que le paiement soit en bitcoins. J’avais un revenu régulier, mais l’argent allait simplement à de petites choses, rien de nécessaire pour survivre. Le bolivar a commencé à se dévaluer plus que jamais et j’ai alors dépassé les revenus de ma mère. Alors, à ce moment-là, j’ai réalisé que j’allais être un élément-clé pour la subsistance de ma famille pendant que nous étions au Venezuela ».

Vásquez explique que c’est à ce moment qu’il a décidé de se consacrer exclusivement au trading et aux cryptomonnaies, que « avec les hauts et les bas, elles m’ont toujours permis de gagner plus de revenus, au moins assez pour survivre dans une économie incroyablement inflationniste. »

Une entreprise familiale

Bien qu’au début Indira García (pseudonyme), la mère de Manuel, ait été sceptique, elle l’a maintenant rejoint dans les cryptomonnaies afin de conserver son foyer. Même le trader raconte qu’il a encouragé d’autres membres de sa famille à s’aventurer dans cetbécosystème.

« L’année dernière, le monde entier des cryptomonnaies a explosé, et j’ai réussi à tripler mes quelques revenus et à me lancer dans d’autres projets. Ma mère et plusieurs membres de ma famille ont commencé à s’informer sur ce qu’est le Bitcoin et les cryptomonnaies, et j’en ai profité pour lever leurs doutes à ce moment-là. »

Vásquez explique en outre que, récemment, plusieurs membres de sa famille qui s’aventurent dans les cryptomonnaies y voient aussi un moyen facile d’envoyer des fonds, « évitant tous les contrôles et les commissions excessives de services tels que Western Union, pour donner un exemple ».

Actuellement, la mère de Vásquez, une Vénézuélienne de 47 ans, a quitté son poste officiel de comptable et d’administratrice, pour se consacrer exclusivement au marché de la cryptomonnaie, aidant son fils dans l’entreprise. Pour payer les dépenses du ménage, Vásquez et sa mère pratiquent le trading entre les monnaies numériques et les bolivars.

Selon eux, cette activité leur permet de générer plus de revenus qu’un emploi traditionnel dans le pays :  ces cryptomonnaies peuvent être une forme d’épargne et d’investissement dans un pays où le salaire dans un emploi traditionnel est inférieur à 2 $US (au moment de la rédaction).

Responsabilisé dès le plus jeune âge

Pour le trader de 19 ans, la responsabilité d’assumer financièrement son foyer à un si jeune âge — il a commencé dans le trading alors qu’il était encore mineur — n’a pas été facile. Cependant, maintenant qu’il peut travailler avec sa mère pour gagner entre 100 $ et 300 $ pour soutenir son foyer, il lui est reconnaissant de son soutien : « En gros, c’était mon soutien principal alors disons que je rends tout ce qu’elle m’a déjà donné. »

Manuel Vásquez, jeune indépendant, fait partie des nombreux jeunes Vénézuéliens qui ont adopté différentes alternatives pour faire face à la crise économique du pays. Certains ont décidé de travailler en freelance, d’autres se consacrent au jeux vidéo ; dans tous les cas, ces jeunes cherchent à obtenir un revenu plus stable que celui d’un emploi traditionnel.

Il y a quelques mois, l’enthousiaste trader se trouvait devant le choix cornélien de poursuivre ou abandonner ses études universitaires. « J’étudiais l’informatique jusqu’à il y a quelques mois, j’aimais ma carrière et ce que je faisais, mais le simple fait d’étudier au Venezuela est un défi ». Par exemple, selon le jeune homme :

« Il y a eu des abandons parmi mes camarades, et même si j’ai essayé de les aider de toutes les façons possibles, il y en avait de plus en plus. En outre, les cryptomonnaies prennent un temps considérable, entre le trading et la recherche de revenu pour mes études et pour mon foyer, j’ai simplement choisi de quitter l’Université. »

Cependant, cette décision d’abandonner ses études lui a permis d’élargir ses horizons, d’apprendre de nouvelles choses et de s’offrir ainsi qu’à sa famille une meilleure qualité de vie. Vásquez est également autodidacte : il a étudié l’anglais seul, et c’est Internet qui lui a permis de se former à la technologie financière qui lui permet aujourd’hui de se financer.

Son travail en freelance, ainsi que l’utilisation de certains réseaux sociaux, lui ont également permis d’entrer en contact avec des acteurs internationaux du système cryptographique. C’est ainsi qu’il a signé des contrats de travail :

« Plusieurs des contacts qui m’ont donné du travail, je les connnais par Reddit ou Twitter, Discord et d’autres plateformes sociales ; une grande partie du travail que vous obtenez, c’est en parlant à ces individus ».

Présence sur Reddit

Récemment, le jeune enthousiaste a atteint une certaine popularité sur la plateforme Reddit, où il a posté plusieurs messages pour raconter une partie de son histoire, ce qui lui a valu un nombre important de visites et de commentaires. En outre, certaines publications mettent en lumière la situation actuelle au Venezuela, et d’autres dans lesquelles il dénonce certaines des mesures et pratiques arbitraires pratiquées par de hauts fonctionnaires de l’État concernant l’exploitation minière numérique et les cryptomonnaies.

Dans le même genre d’idée, il donne également son opinion dans certaines publications à  propos de l’écosystème cryptographique au Venezuela et des principales cryptomonnaies, entre autres. Parmi les principales devises qu’il utilise, il y a Bitcoin, Bitcoin Cash, Ethereum et parfois Litecoin et Monero.

« Comme pour le trading de base, j’utilise Binance, j’utilise aussi Bitmex. »

Parmi ses projets, Vásquez a quelques idées pour rendre les plateformes de crowdfunding plus transparentes lorsqu’il fait des dons, une plateforme d’aide qui accepte aussi les cryptomonnaies :

« Un système pour aider ceux qui en ont le plus besoin directement avec des histoires, et une petite somme d’argent qui pour beaucoup est insignifiante mais au Venezuela représente un soulagement dans la situation grave que vit le pays ».

Traduction par Contrepoints de Venezuelan 19-year-old boy and his mother live on cryptocurrencies.

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  • Dommage que la distinction ne soit pas faite entre l’utilisation bénéfique d’une crypto-monnaie qui permet d’échapper à la débandade de la monnaie officielle, et la manière de gagner sa vie par le trading, qui reste à la merci de l’habileté de la personne concernée et de sa chance. Bien sûr, avoir choisi la crypto-monnaie est une preuve de bonne inspiration et de clairvoyance, qui ne peut que favoriser les réussites en trading, mais quand-même…

    • Oui pour la bonne intention. Mais faire la comparaison entre le trading et la crypto-monnaie est hasardeux car les cryptos sont jeunes et le trading est vieux comme le monde. J’insiste sur le côté prédictif qui est faussé. le trading obéit a des sous-jacents « existants » tandis que les cryptos sont pour l’instant « folles » et c’est moi qui dit cela alors que je suis en plein dedans. Je riais jadis des articles de contrepoints tant la valeur de « compréhension » était une « valeur ». Du coup mon style de critique était forcé (beaucoup).

      C’est un peu comme pour l’invention des stocks-options. (ceux qui avaient compris avant les autres avaient gagné). AXA, Soros et consors.

      Aujourd’hui comprendre ne suffit pas/plus, mais c’est déjà ça.

  • ça me semble un ennemi du peuple et de la révolution bolivarienne ça… je présume que c’est interdit ou non autorisé ce qui revient au même ..

    • Bonjour, je ne suis pas un ennemi de la révolution, Je vous invite à venir au Venezuela pour voir les avantages du système que vous défendez ou suivez-moi sur Twitter @SrMiguelV

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