Par Johan Rivalland.
Cet ouvrage collectif arrive à point nommé au moment où le débat sur l’ampleur de la dette mondiale s’intensifie dans les médias, cette dette (à la fois publique et privée) atteignant désormais les 164 000 milliards de dollars selon le FMI, soit 225 % du PIB mondial. Certaines sources évoquent même 237 000 milliards de dollars, sans que je comprenne bien cet écart de chiffres.
L’objectif de l’ouvrage est à la fois de montrer comment nous en sommes arrivés là et de tenter de tirer les leçons des expériences (notamment à travers le cas emblématique du Japon, qui est l’objet du premier chapitre). Une situation bien connue de nos lecteurs puisque nombreux sont les articles et auteurs (au premier rang desquels on peut citer Simone Wapler, qui s’évertuent avec insistance et persévérance à tirer la sonnette d’alarme) mettant en garde depuis longtemps contre cette montée de l’endettement public et ses conséquences.
Le cas emblématique de la France
Dans sa préface, Michel Pébereau, dont on se souvient bien du célèbre rapport portant son nom, rappelle les données essentielles concernant l’endettement de notre pays et les conséquences qui en découlent, pouvant être destructives pour les générations succédant à celles qui sont à l’origine de ce même endettement (pour qui elles étaient indolores, et nous n’insisterons jamais assez là-dessus).
Il insiste ainsi sur le fait que les administrations publiques (entre autres) sont déficitaires, en France, depuis 1981 et sur le fait que la dette est passée de 20 % du PIB à cette époque-là à près de 100 % aujourd’hui (et il y a bien pire avec le Japon qui frise les 250 %, la Chine dont la dette progresse à une vitesse vertigineuse et avoisinerait déjà les 200 %, sans oublier les États-Unis et tant d’autres, selon des situations bien sûr différentes). Surtout, cette dette française, pour en revenir simplement à elle, est aujourd’hui de nature structurelle, c’est-à-dire qu’elle finance pour l’essentiel, selon un cercle vicieux, des dépenses de fonctionnement. Quant à la dette des collectivités territoriales et la dette sociale, particulièrement caractéristique de la France, elles sont en croissance inquiétante.
Or, rappelle Michel Pébereau, notre pays est le champion de l’OCDE en matière de prélèvements obligatoires. Ce qui rend d’autant plus préoccupante notre situation, alors même que notre compétitivité en souffre. Ce qui souligne aussi notre problème de dérive des dépenses publiques ainsi que de mauvaise gestion persistante et d’excès d’interventionnisme (avec nos 57 % de dépenses publiques rapportées au PIB).
S’il en appelle à une réduction de nos dépenses publiques et à leur réorientation, il met en garde contre l’idée de ceux qui imaginent que la solution consisterait tout simplement à effacer d’un trait de plume une partie de la dette, faisant fi des conséquences profondes que cela aurait en matière d’atouts pour un État de droit réputé respecter le droit de propriété des créanciers et la valeur des contrats signés. Et il rappelle que, se sentant protégés par la zone euro, nos gouvernants ont continué de laisser filer de manière inconséquente la dette au cours des dix ou quinze dernières années, au point de voir celle-ci doubler.
Turgot, une nouvelle fois révoqué ?
C’est le titre de l’introduction de Jean-Louis Chambon, référence appréciable (et assez naturelle pour le cercle Turgot, à l’origine du présent ouvrage) à cet homme d’exception que fut Turgot, dont les œuvres complètes en cinq volumes viennent d’être rééditées à l’excellente initiative de l’Institut Coppet.
Il y rappelle comment les différents États européens s’étaient engagés à respecter une certaine « rigueur » budgétaire (les fameux critères de Maastricht) lors de la fondation de la zone euro et comment ils ont renié superbement leur parole ensuite, mettant en danger l’ensemble de la société.
L’expérience de Turgot à la tête des finances de l’État et la richesse de ses écrits sont ainsi, même deux siècles après, une source précieuse d’enseignements (hélas bien oubliés entretemps) face à la situation actuelle, selon Jean-Louis Chambon.
Turgot était opposé tant à la banqueroute qu’aux hausses d’impôts ou aux emprunts, privilégiant la réduction des dépenses publiques et les réformes de structure (liberté du commerce, liberté du travail, remise en cause des privilèges) comme moyen le plus efficace et le plus durable de remise en ordre des finances de l’État. Réformes qui, si elles avaient pu être acceptées tout de suite et jusqu’au bout, auraient permis d’éviter la rupture bien plus brutale qui a suivi quinze ans après.
Mais, et c’est là le principal enseignement qu’en tire l’auteur, montrant la difficulté de la tâche :
Le temps perdu en inaction renforce le poids des conservatismes et des oppositions, et accroît celui des contraintes financières. Il arrive un moment où la marge de manœuvre de celui qui a l’ambition de réformer devient extrêmement faible et les soutiens qui lui seraient nécessaires trop fragiles.
Les leçons de l’expérience japonaise
L’expérience du Japon, retracée par Frédéric Burguière à travers un chapitre passionnant, nous révèle le caractère historique et quasi-culturel de l’effacement des dettes comme mode de régulation dans ce pays, face aux déséquilibres économiques (même s’il n’est pas seul dans ce cas et que la pratique des banqueroutes est quelque chose que nous avons aussi bien connu en Europe, et notamment en France à certaines époques).
Il s’agit, en effet, d’une pratique qui remonte là-bas au XIIIe siècle et dont l’auteur nous conte les différents épisodes, qui ont à chaque fois conduit à la spoliation de différents acteurs, créanciers domestiques, et parfois à une modification substantielle de la répartition des richesses au sein de la société. Un chapitre saisissant et fort instructif.
Mais c’est surtout en tant que pays actuellement le plus endetté du monde et ayant recouru le premier à une politique de facilité monétaire (Quantitative Easing) que ce pays est emblématique.
Le Japon est ainsi devenu un véritable laboratoire d’études pour aborder la question des dettes publiques, sachant que nombre de pays, en particulier en Occident, sont progressivement confrontés à des situations proches de la sienne. Il s’avère d’ailleurs depuis une vingtaine d’années un assez bon indicateur avancé des dérèglements financiers qui prennent forme dans le monde. Et il pourrait aussi constituer une référence de qualité pour mesurer les conséquences de l’ajustement du modèle de croissance chinois qui est en train de débuter.
Les trois grandes périodes qui ont mené à l’impressionnante dette actuelle depuis le premier choc pétrolier sont ainsi passées en revue et analysées. Actuellement, c’est plutôt l’impasse budgétaire qui prédomine, d’autant que la démographie très défavorable de ce pays vieillissant ôte toute marge de manœuvre en termes de croissance forte.
Mais c’est surtout la monétisation de la dette depuis 2012 et les Abenomics qui ont permis à l’économie japonaise de connaître jusque-là une certaine stabilité, malgré le surendettement colossal et la croissance atone. Le contexte économique favorable et la forte compétitivité de l’économie japonaise ont ainsi permis le maintien d’une situation d’équilibre de plein emploi.
Cependant, cela s’est fait au prix notamment d’une ré-allocation des portefeuilles (notamment pour les fonds de retraite), davantage orientés vers le risque, les obligations ne rapportant quasiment plus rien. En outre, si le surendettement ne semble pas inquiéter, à l’heure actuelle, les Japonais, qu’en sera-t-il en cas de retournement ou de la perte de stabilité du yen ? Frédéric Burguière conclut en rappelant que, ainsi qu’il l’a démontré à l’aide de sa présentation historique précédente :
Le règlement d’une situation de surendettement passe toujours par un ajustement de la répartition de la richesse. Cet ajustement peut être réalisé dans un cadre relativement consensuel, mais il peut aussi créer des conflits intergénérationnels, voire provoquer des transformations radicales de la société.
Ce que nous enseigne l’analyse théorique
Jean-Jacques Pluchart s’intéresse ensuite aux paradigmes de l’endettement public, en nous dressant un rappel des grandes approches théoriques en matière d’endettement public. Doctrines libérale, keynésienne, ricardienne, approches néo-classiques et analyses structurelles nous permettent d’y voir plus clair dans l’analyse économique théorique, pour déboucher ensuite sur les applications concrètes en termes de politiques économiques et sur les prescriptions en matière de traitement de l’insolvabilité des États.
Intervention des IFI (FMI et Banque Mondiale), retour à la « règle d’or » (dont les différentes tentatives de mise en œuvre se sont avérées peu concluantes jusque-là, mises à mal notamment par la grande crise de 2008) et à l’orthodoxie budgétaire (dont seules les réformes Schröder en Allemagne ont permis de bons résultats en matière de gestion de la dette publique) sont passés en revue et analysés. Les confrontations entre l’orthodoxie budgétaire, nouvelle doxa européenne, expériences hétérodoxes et non conventionnelles sont également présentées, pour finir par les tentations plus récentes de mesures plus radicales, de nature très diverse et souvent très controversées, qui constituent autant de pistes évoquées par les uns et les autres pour tenter de remédier au mal profond qui nous est en train de nous ravager. Sans oublier la référence appréciable de l’auteur à la « présomption fatale » de Friedrich Hayek, appliquée ici à la dette publique.
La faible efficacité des règles budgétaires
Bernard Schwengler nous convie ensuite à observer ce qui s’est passé depuis l’instauration de règles budgétaires en Europe au début des années 1990.
Il montre que les règles-contraintes, se référant à un cadre juridique contraignant, à l’instar de la règle des 3 % maximum de déficit budgétaire (critères de Maastricht), se révèlent d’une efficacité limitée, contrairement aux règles d’engagement, de nature politique, adoptées surtout dans les pays à coalition (Suède, Allemagne, Pays-Bas, notamment), qui sont davantage tenues.
La période budgétaire des années 1995-2007 a ainsi permis une diminution des dettes publiques dans la plupart des pays de l’OCDE, et de manière particulièrement nette dans les pays ayant adopté des règles d’engagement (Irlande, Belgique, Danemark, Pays-Bas, entre autres). La France, quant à elle, s’est malheureusement singularisée en restant à l’écart de ce mouvement (allant même jusqu’à créer ce ridicule épisode national de la fameuse « cagnotte » en 1999 lorsque la forte croissance occasionna des rentrées fiscales plus fortes que prévu).
Si la grande crise de 2007 a entraîné une remise en cause ou tout au moins une mise entre parenthèse de ces règles jusqu’aux alentours de 2014, la plupart des pays ont assez sensiblement réduit leur déficit budgétaire ensuite, voire dégagé pour certains des excédents. Mais, encore une fois, la France est restée quelque peu à la traîne, malgré les discours (et chacun des gouvernements qui se succèdent, y compris l’actuel, trouve toujours le moyen de repousser l’équilibre structurel de quelques années).
D’une façon générale, depuis le début des années 1990, la particularité de la France par rapport à la plupart des autres pays de l’OCDE ne réside pas dans l’augmentation de la dette publique en période de crise économique mais dans le fait qu’elle n’utilise pas les périodes de croissance pour la réduire.
Le véritable problème est que les règles européennes (des 3 % et, depuis 2012 de l’équilibre à moyen terme) sont relativement inefficaces dans la mesure où les sanctions financières prévues ne sont pas prononcées, en raison de l’absence d’indépendance des organes chargés de prononcer les sanctions (ses membres se côtoyant les uns les autres et aspirant généralement, en outre, à reprendre une carrière nationale à l’issue de leur mandat). C’est pourquoi l’auteur propose un certain nombre d’idées très concrètes permettant d’aller dans le sens de l’instauration de règles d’engagement véritablement efficaces, appuyées sur des garde-fous plus puissants faisant appel à des autorités indépendantes.
Le cas des États-Unis
Jean-Claude Gruffat s’intéresse quant à lui à la dette américaine. Partant de l’histoire, qui a fait des États-Unis un emprunteur de qualité dès le départ, bien qu’ayant toujours été endetté, le problème de la dette est devenu préoccupant plus récemment, avec l’augmentation rapide de celle-ci depuis 15 ans. Une analyse du clivage politique complexe sur la question budgétaire permet de mieux voir l’opposition entre les Républicains, tenants de la supply side depuis l’ère Reagan, mais qui ont laissé filer les dépenses d’armement, et les Démocrates, davantage orientés vers les dépenses sociales (qui représenteraient près des deux tiers des dépenses courantes).
Le problème tient à la faible part des dépenses discrétionnaires et celle élevée et de plus en plus forte des dépenses automatiquement prorogées (qui correspondent en quelque sorte aux « droits acquis »). Celles sur lesquelles il conviendrait d’agir, selon l’auteur, si on entend mettre fin à la dangereuse spirale de l’endettement, entretenue à la fois par un système fiscal complexe et archaïque dont il nous décrit les grands principes et la tendance fâcheuse du Congrès à relever sans cesse, et de manière de plus en plus conséquente, le plafond de dette autorisée.
Or, selon Jean-Claude Gruffat, les républicains de l’ère Trump semblent avoir abandonné l’idée de rigueur budgétaire. D’où ses propositions sur ce qui pourrait constituer une véritable réforme fiscale aux États-Unis : simplification du Code des impôts (rendu indigeste par le poids du lobbying et le manque de neutralité idéologique), recentrage sur les missions essentielles de l’État, révision des programmes sociaux, entre autres. Mais les fortes divisions au sein du Parti Républicain et les orientations prises par l’administration Trump ne laissent pas entrevoir, selon lui, de velléités de traitement de la question de la dette dans l’immédiat.
Cependant, il considère que si cela est regrettable, la situation n’est toutefois pas préoccupante à court terme, au vu de la solidité de la situation américaine, les solutions de réduction du déficit étant quant à elles débattues et connues, donc susceptibles d’être mises en œuvre à moyen terme.
L’Europe et la Chine
Dans un chapitre assez technique, Isabelle Job-Bazille rappelle et explique les mécanismes complexes qui ont été mis en œuvre au niveau européen pour tenter de remédier au problème des dettes grecque et européenne en général. Institutions financières créées, mécanismes de solidarité, rôle de prêteur en dernier ressort de la BCE, effacement partiel ou mutualisation des dettes, émission d’eurobonds, etc. Elle développe aussi les différentes autres pistes actuellement explorées, faisant pour sa part le vœu d’une plus grande intégration européenne et de mutualisation des ressources.
Le cas, actuellement sans doute le plus préoccupant, de la Chine est étudié par Jean-Luc Buchalet et Christophe Prat. Ce pays qui a connu une période d’expansion exceptionnelle depuis 40 ans se distingue, en effet, par la progression fulgurante de sa dette au cours des toutes dernières années, avoisinant les 300 % du PIB (public + privé) actuellement. Et la Chine pourrait bien, selon la crainte actuellement la plus partagée, être le déclencheur de la prochaine crise financière mondiale.
De quoi décider Xi Jinping, depuis 2017, de s’y attaquer véritablement. Derrière la forte intervention étatique et les très forts montants d’investissement, se cachent en effet une faible productivité et les affres de la corruption, auxquels s’ajoute un endettement croissant au service d’investissements spéculatifs, en particulier dans l’immobilier et une véritable explosion des créances douteuses, dissimulées dans des structures de défaisance, assimilant la dette chinoise à une véritable pyramide de Ponzi.
Les projets inefficaces de la part des entreprises étatiques moribondes, vivant pour la plupart sous perfusion bancaire, accaparent en outre les ressources en crédits au détriment des entreprises individuelles et des PME, malgré un accroissement stupéfiant de la masse monétaire. En outre, elles se voient accorder un coût du capital anormalement bas, au détriment des entreprises privées, qui s’en trouvent asphyxiées.
Tous les ingrédients se trouvent donc réunis pour une crise majeure et la fin de la croissance exceptionnelle que semblait avoir connu le pays. Et les auteurs ne sont pas optimistes, ce capitalisme de connivence n’étant pas près de disparaître avec un Parti communiste qui a accru sa présence dans l’économie depuis cinq ans et un Xi Jimping qui semble reporter sine die la libération du marché.
La politique de Quantitative Easing à l’épreuve des faits
Après une présentation assez technique de Vivien Lévy-Garboua et Gérard Maarek sur les ressorts du Quantitative Easing, dont ils s’évertuent de montrer les réalités au-delà des affirmations erronées à leur sujet, Hubert Rodarie s’intéresse aux réflexions sur les raisons et circonstances de la crise de 2008. Il observe que celles-ci n’ont entraîné aucune remise en cause des dispositifs et fondements théoriques des politiques monétaires.
Seuls les comportements humains auraient été désignés comme coupables et des actions ont donc été engagées essentiellement en vue de les corriger, sans remise en cause des institutions monétaires, ni analyse des causes endogènes. Et, même si l’on observe malgré tout certains changements au niveau mondial à travers un déplacement des équilibres entre les pouvoirs économiques, professionnels et politiques, il en résulte que les problèmes demeurent, et même que le phénomène d’endettement s’est répandu à l’ensemble des pays du monde, y compris pays émergents, au premier rang desquels la Chine.
On pourrait ainsi soutenir que les politiques non conventionnelles ont permis l’extension mondiale du phénomène de l’endettement. Mais la contrainte financière de l’endettement actuel est toujours insoutenable pour les économies occidentales. Les banquiers centraux le disent. Le maintien des politiques non conventionnelles pendant plus de dix ans le prouve.
Succédant à une finance globalisée censée gérer et répartir le risque, les QE et ZIRP ont donné du temps aux gouvernements et aux entreprises ayant abusé du levier financier pour restructurer leurs dépenses ou leurs modèles, mais rien d’essentiel n’a été apparemment traité. Chez les politiques et les professionnels, tout concourt à installer la tranquillité. Le sentiment d’urgence a disparu, comme si la situation était redevenue normale. En revanche, pour les populations, le souvenir de la crise est là. Ses conséquences douloureuses n’ont pas été effacées…
Or, les politiques non conventionnelles, en faussant les repères traditionnels du marché, ont en fin de compte fragilisé le système financier sous l’effet de l’accumulation de dettes (publiques, cette fois) et de la hausse du prix des actifs de toute nature, financiers, immobiliers ou autres, encouragés par la politique de taux bas, voire négatifs.
En conséquence, alors que l’idée de certains d’effacer d’un trait de plume une partie des dettes apparaît bien aventureuse (Hubert Rodarie explique en détail pourquoi), seule une évolution en profondeur du système économique serait à même de remettre en cause fondamentalement les schémas actuels, ainsi que l’auteur l’explique en détail à travers des raisonnements assez complexes.
Enfin, Jean Boissinot s’intéresse à la demande de dette souveraine, c’est-à-dire aux investisseurs qui cherchent des placements de confiance, considérant les dettes publiques comme des « actifs sûrs ». Examinant les différentes périodes qui se sont succédé ces quarante dernières années, il s’interroge sur cette notion d’actifs sûrs. Sachant que des doutes sont apparus de la part des investisseurs en 2011 et la crise financière devenue systémique. Si la politique de QE de la BCE à partir de 2012 a permis de lever en bonne partie ces incertitudes, Jean Boissinot n’en met pas moins en garde, face à la prodigalité toujours présente en matière budgétaire de la part de nombreux pays, contre un retour en force des doutes de la part des prêteurs. Ce qui aurait des conséquences très graves « alors même que les cicatrices de la dernière crise sont à peine refermées ».
Un avenir bien inquiétant
Pour conclure l’ouvrage, Frédéric Burguière nous fait part des inquiétudes que nous pouvons avoir face à un monde qui croule sous les dettes et au peu de pays capables de restaurer des excédents budgétaires, beaucoup se montrant satisfaits, comme en Europe, s’ils parviennent simplement à ramener leur déficit sous les 3 %.
Dans ce contexte, la prochaine récession risque d’être sévère. Pour être réaliste, Frédéric Burguière indique que, faute de réduire l’endettement, l’enjeu est désormais d’éviter à tout prix qu’il n’augmente trop rapidement. Il ne se veut, pour autant, pas trop pessimiste, ne croyant pas au scénario d’États en défaut de paiement en raison des mécanismes instaurés par les autorités financières.
Il admet néanmoins que les ajustements rendus nécessaires seront loin d’être indolores, le processus de monétisation des dettes, dont il sera long et difficile de s’extraire, impliquant une longue période d’équilibre fragile de très faible croissance, à la japonaise, dont on mesure encore mal la portée, ainsi qu’une baisse générale de la rémunération des actifs, y compris pour les fonds de pension et autres fonds de retraite ou contrats d’assurance-vie, qui vont connaître une lente érosion.
Autrement dit, plutôt qu’un choc violent qu’anticipent certains, Frédéric Burguière évoque plutôt un rééquilibrage de la répartition des richesses et une érosion des pouvoirs d’achat. Un scénario sombre et problématique, même si moins pessimiste qu’il pourrait être envisagé. Et un avenir à la japonaise ou le retour de Keynes et des politiques publiques de soutien à l’activité. À moins que de solides dirigeants mettent enfin en œuvre de vraies réformes. Ce serait alors, espère Frédéric Burguière, le retour de Turgot. Mais il est hélas permis d’en douter…
— Collectif, Les dettes publiques à la dérive – Anatomie d’un monde financièrement fragilisé, Eyrolles, mars 2018, 235 pages.
je suis étonné qu’avant tout réforme qu’il n’y ait
pas eu un audit des finances du pays ,de toutes ces niches fiscales,des sudventions,des dépenses publiques..c’est plus facile de dépenser. ..a la fin de sont mandat il y aura une augmentation du PIB…il ne manque plus que les ménages vivent comme L’ÉTAT. ..
INCOMPÉTENCE DE NOS sois-disantes ELITES…
Vous avez dit « Incompétence …. des Élites ».
En fait, il s’agit tout simplement d’une forme d’imposture de la part de la classe politique française qui pratique la politique de l’autruche.
Quant à la multitude des niches fiscales, elles ne sont pas prêtes à être supprimées; elles plaisent aux français qui, d’une façon générale, se complaisent dans ce qu’ils croient être leurs petits privilèges de droits acquis…. aux dépens d’autres français.
En somme, une France à coté de la plaque affublée de dirigeants ayant de grandes ambitions au niveau européen et, pourquoi pas autant qu’à faire, au niveau mondial.
Nos élites sont parfaitement compétentes, au contraire, pour obtenir et conserver leurs postes : ce sont ceux qui les désignent qui sont parfaitement incompétents, en appliquant pour les choisir des critères fondés sur l’esbroufe, l’élégance oratoire, les sophismes, le clientélisme, etc. Les élites ne font que s’adapter mieux que les autres à la demande.
@ MichelO
On ne peut pas parler du « succès carriériste » comme d’une « compétence professionnelle » sauf à inverser « objectif et moyens »!
Vous ou moi demandons peut-être à nos élites des compétences techniques, mais la grande majorité des électeurs ne leur demande que des aptitudes carriéristes. Combien d’élus de la nation affirment voir dans le déficit et la dette des questions secondaires, voire des outils privilégiés ? Combien d’élus sont mauvais à l’oral mais excellents à l’écrit, cultivés en sciences exactes et en économie, soucieux de la réussite à long-terme des mesures prises pendant leur mandat ? Les deux catégories étaient sur la même ligne de départ, il n’est pas aberrant de remettre en cause la compétence professionnelle des électeurs qui ont choisi les premiers au détriment des seconds plutôt que celle de ceux qui ont réussi à prendre les meilleures places dans la compétition.
Bonnes questions dans cet article !
M. Macron, ne pouvons nous pas profiter de cette période d’amélioration pour viser un moins (je dis bien, MOINS) 3% sur la dette au lieu de continuer à gonfler le boulet de nos arrières-arrières-petits enfants ?
Quand va-t-on supprimer les couches administratives ajoutées depuis les années 60 ? Il faut faire un choix entre les départements et les régions, regrouper les communes vraiment et non ajouter des communautés, c’est une manière sympa de réduire le nombre de chromeurs mais je pense que les fonctionnaires des années 50/60 étaient largement plus efficaces que ceux actuels (ils en faut 3 pour faire ce qu’un faisait à l’époque, mais c’est peut-être à cause de l’informatique !).
@ Jean-M64
Non, ce n’est pas possible actuellement!
Il peut être vertueux de vouloir rapprocher les citoyens des prises de décisions qui les concernent dans certains domaines (décentralisation), à condition d’en dessaisir les services centraux devenus inutiles, sinon, ça devient vite impayable!
Dans un millefeuille ou une lasagne, on reconnait la pâte, beaucoup moins bien les garnitures et ingrédients entre les feuilles, qui se ressemblent pourtant beaucoup!
La seule comparaison de la France d’aujourd’hui avec celle d’il y a 50/60 ans, c’est mission impossible! Tout a changé et continue à changer!
Une dette mondiale entre 164 000 et 237 000 milliards de dollars doit logiquement être contractée auprès de prêteurs détenteurs de richesses astronomiques. Mais à la prochaine crise ce seront encore les petits épargnants les pigeons. Au niveau de l’UE tout est déjà prévu ! Pour les retraités cela à déjà commencé !
Comment certains investisseurs peuvent-ils encore croire à la légende des « dettes sûres » émises par les Etats, alors que ce sont les seules institutions en mesure de se déclarer en défaut, du jour au lendemain, sans prévenir, au bon vouloir du Prince ? Ne comprennent-ils pas que les Etats peuvent les euthanasier à chaque instant ?
Il n’y a pas de placement plus risqué ni plus spéculatif qu’un investissement dans une obligation publique. Au-delà de leur vacuité économique intrinsèque, le niveau de risque maximum est l’autre raison qui devrait conduire à l’interdiction définitive des dettes publiques.
apparament les dettes des pays s’arrachent facilement et ce serait la meilleure rentabilité. ..un georges Soros spécule sur là monnaie de certains pays .et les appauvris il en vit très bien et pour se donner une bonne moralité à créer un fond social important…moralité de bas étage !!!
Soros et les autres investisseurs, on s’en fout. Tout Etat qui fait le choix de s’endetter perd sa souveraineté par définition. Tout Etat endetté est un Etat failli.
Un Etat dont la monnaie peut faire l’objet d’une spéculation est également un Etat failli. Un Etat qui fait le choix du monopole monétaire cherche à voler sa population par l’inflation au lieu de laisser la concurrence monétaire apporter une bienfaisante régulation. Cet Etat est puni par là où il a péché. La spéculation contre son monopole monétaire est une punition amplement méritée qui sanctionne la présomption fatale des étatistes, assoiffés de prélèvements pour vivre sans travailler aux dépens des populations.
Compter sur la moralité d’autrui plutôt que sur ses propres efforts pour s’en sortir ! Ben voyons…